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Détroit : fière poésie

Parfois à fleur de peau, mais aussi très solide et sûr dans ses écrits, l’ancien leader de Noir Désir n’a rien perdu de sa verve, de son sens du propos et de la métaphore. Aller chercher la petite bête au carrefour de ses mots est sincèrement inutile, tant les nouvelles compositions de DETROIT sont limpides, personnelles et fluides. Avec « L’Angle », le groupe nous balade dans des ambiances et des atmosphères diverses avec beaucoup de délicatesse et de force, sans jamais tomber dans ce lyrisme désuet très contemporain. Et grâce à une production lumineuse, c’est le genre de disque d’une qualité devenue très rare.

DETROIT

« L’Angle »

(Independant)

Evacuons d’abord toute polémique. Certes, on pourra toujours trouver un double-sens, voire certaines allusions dans les paroles de Bertrand Cantat, mais on peut aussi s’arrêter à l’aspect poétique de ses textes, car il reste bel et bien l’un des derniers en France à exceller dans le domaine. Et, très sincèrement, à l’écoute de « L’Angle », toutes tentatives de fouiner en quête d’éventuels règlements de compte de sa part seraient malvenus et déplacés. Surtout dans un pays où l’on célèbre un écrivain comme Céline qui a autant brillé par son rôle de fervent propagandiste du parti nazi que par sa fadasse prose, c’en serait presque vulgaire et à l’évidence ne rien connaître l’œuvre de DETROIT et de son chanteur.

Alors qu’en est-il donc de ce deuxième album (trois avec le live « La Cigale »), « L’Angle » ? Quand la majorité des médias s’est surtout posée la question de savoir s’il fallait l’écouter, ou pas, personne ou presque ne semble s’être penché sur son contenu. A croire que cela ne se fait pas. C’est à penser que les amoureux de la musique et des textes de Bertrand Cantat se doivent de l’écouter en catimini… Et sans mot dire, en deux mots. Bref, dix ans après « Horizons » et sept depuis « Amor Fati » sorti en solo, l’auteur, guitariste et harmoniciste poursuit l’aventure DETROIT en trio, où il est brillamment accompagné de Pascal Humbert (basse, batterie, guitare) et Jérémie Garat (violoncelle, guitare).

Très acoustique et mystérieux à bien des égards, « L’Angle » dévoile une nouvelle facette musicale, toujours aussi intense et profonde. Des terres andalouses (« Je Ne Savais Pas », « Recueillement »), en passant par le très secret Pays Basque, DETROIT met légèrement le Rock de côté (excepté sur « Oh Non Non Non » et « Au Royaume Des Aveugles ») et se consacre à des élans fiévreux, atmosphériques et captivants portés par une voix vive et percutante, qui domine dans le moindre détail ces nouvelles chansons (« La Beauté », « Les Roseaux Soucieux », « Les Âmes Sauvages », « Fleur Du Chaos » et le morceau-titre). La maturité artistique de ce nouvel opus est un écrin pour ces paroles étincelantes.

Photo : Détroit

4 réponses sur « Détroit : fière poésie »

Cher François
Tu sais tout le bien que je pense de toi et de ton formidable boulot sur ce site que tu portes à bout de bras… cependant, concernant la chronique de ce Détroit, je ne partage pas ta « démarche » dans le sens où il y a tellement d’autres groupes, bien moins connus et tout aussi talentueux que la formation de Bertrand Cantat qui auraient sans doute mérité ton analyse et ta bienveillance…ce qui, à mon sens, ne peut s’appliquer à cet individu car, je fais partie de ceux qui pensent qu’on ne peut dissocier l’artiste de l’homme et ce dernier, d’après moi, n’a aucunement besoin de la presse et des médias pour exister, ses fans irréductibles ayant évacué depuis longtemps sa monstruosité…une œuvre artistique, si belle soit-elle, peut-elle effacer un crime ? Je ne le crois pas…ceci dit, ça ne change rien à l’affection que je te porte…. joyeux Noël quand même !!🤗

Salut Patrick,
Je savais très bien qu’en chroniquant l’album de Détroit, je m’exposais à pas mal de remarques en tout genre. Et pourtant, tu es le seul, ce qui n’est ni un bon signe, ni un mauvais d’ailleurs. J’ai hésité (pas très longtemps) à en parler, car je l’ai écouté… Et là, il faut reconnaître que c’est une petite merveille pour qui aime les beaux textes et la musique qui va avec… 😉
Cela dit, quand tu me dis qu’il y a beaucoup de groupes aussi talentueux que Détroit en France, je m’élève en faux ! J’ai tellement peiné à en trouvé 24 pour mon Top de l’année… si tu savais ! Non, il n’y a pas grand-monde à ce niveau dans notre beau pays. Et histoire de ne pas créer de polémique, je ne mentionnerai pas quels sont les artistes qui lui arrivent à la cheville, mais ils sont très, très peu nombreux.
Après, pour ce qui est de dissocier l’artiste de l’homme, je suis plus nuancé, ce qui n’est pourtant pas dans mon caractère, ni dans mes habitudes. En ce qui concerne Cantat, la mort de Marie Trintignant date de 2001. Je ne savais pas qu’il avait été condamné à une perpétuité incompréhensible, puisqu’il a payé sa dette comme on dit. Il aurait donc mieux fallu le tuer tout de suite, c’est ça ? Plus de 20 ans après ce drame, on ne peut pas passer à autre chose ?
J’ai justement fait le lien avec Céline, par provocation un peu, mais pas tant que ça. Je ne sais pas si tu connais la vie de cette pute qu’on salue encore comme un grand écrivain (ce qui est faux !). Ça, c’est lamentable d’autant qu’on enseigne cette raclure de nazi à l’école ! Tu sais ce qu’a été la vie de ce type ? Là, je ne parle pas d’un accident comme pour Cantat, mais d’actes délibérés, prolongés, actés et assumés. Pour Cantat, avec tout le respect que je peux avoir pour Marie Trintignant, on parle de circonstance. Et c’est bien là le problème. Il en est tout autrement pour Céline, Matzneff et quelques autres qui ont réfléchi, organisé, concrétisé et surtout assumé leurs actes. Je te laisse réfléchir là-dessus, car si aucune peine n’est réparatrice, tuons les gens directement !
Maintenant, si tu aimes la poésie, car c’est le cas ici, écoute l’album et si tu aimes la musique intelligente, délicate et tout simplement belle : écoute-le deux fois ! 😉 On pourrait en parler des heures et dire aussi certaines choses quant au déni et à la haine qui nourrit le clan Trintignant… A croire qu’ils en ont oublié d’aimer leur fille. Mais le ton ne serait pas le même ! 😉
Je te souhaite aussi de bonnes fêtes et merci de m’avoir permis indirectement de dire ce que je pense (un peu !) de tout ça… 🙂
Prends soin de toi ! 🙂

Cher François,
loin de moi l’idée d’épiloguer à l’infini sur le cas Cantat, on pourrait argumenter de la même manière sur l’écrivain Céline que tu exècres tant : son chef-d’œuvre littéraire « Voyage au bout de la nuit » (1932) est bien antérieur à sa conversion au national socialisme et son antisémitisme, du coup,on pourrait tout aussi bien » distancier  » son œuvre du comportement excecrable de son auteur, si je suis ton raisonnement…
( Ce qu’il a écrit avant de devenir un salaud ne pourrait être remis en cause par son attitude à posteriori !)
Pour moi,il n’y a pas de différence, dans les deux cas, l’homme et l’auteur ne font qu’un et ce n’est pas la sanction « ridicule » dont a écopé le leader de Détroit qui me fera changer d’avis , il a eu beaucoup de chance, aujourd’hui il aurait pris 20 ans…
À très vite…

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