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Moundrag : dragon’s flight [Interview]

MOUNDRAG, c’est l’histoire de deux frangins, Camille et Colin Gœllaën-Duvivier, biberonnés au Rock Progressif et psychédélique depuis leur plus tendre enfance. Originaire de Paimpol en Bretagne, le duo détonne et étonne grâce à un line-up surprenant, puisqu’ici point de guitare, ni de basse : juste (beaucoup !) des claviers et une frénétique batterie. A eux d’eux, ils viennent de sortir leur premier album, « Hic Sunt Moundrages », savante concoction de Hard Prog/Heavy Psych dans un  univers de science-fiction 70’s ancré dans une réalité très actuelle. Camille (claviers) nous en dit un peu plus sur ce groupe hors du commun et du temps…

Photo : Théo Gosselin

– MOUNDRAG a commencé à faire parler de lui il y a trois ans avec un premier EP éponyme. Depuis, les choses se sont accélérées. C’était déjà ce que vous imaginez en 2018 en créant le groupe ?

Eh bien non, pas vraiment ! En créant MOUNDRAG, nous avions comme objectif premier de faire les premières parties des groupes en tournée en Bretagne, afin de démontrer aux groupes et au public qu’il n’y a pas besoin de guitare pour faire du Rock’n’Roll ! Mais les choses se sont bousculées après qu’on est joué au Trans Musicales de Rennes en 2019. Depuis, on joue partout en France et en Europe… et on ne joue plus en premier !

– Comme de plus en plus de groupes, vous évoluez en duo, qui est d’ailleurs aussi une fratrie. Justement, est-ce que cela vous a aidé dans le sens où vous avez sûrement été bercés par la même musique ? Finalement, les repères étaient déjà là

Exactement, on a commencé à jouer ensemble très tôt (Playmobil, Lego…) et vers mes 13 ans, notre oncle irlandais nous a offert le CD de Deep Purple « Made in Japan », et ça a été un choc ! On est passé des Playmobil du grenier au studio de répétition dans la cave. De plus, nos parents sont musiciens, on a depuis tout petit été bercé par la musique et le rythme des tournées et des enregistrements, car on les accompagnait beaucoup.

Photo : Jean-Adrien Morandeau

– MOUNDRAG évolue dans un registre très marqué par les 70’s avec, forcément, de l’orgue en cascade et des morceaux progressifs. Cette évasion sonore et musicale que vous proposez, vous ne la retrouviez pas dans la musique d’aujourd’hui ? Ou plus simplement, c’est son intemporalité qui la rend toujours très actuelle, qui vous a séduit ?

Il est vrai que le Rock 70’s n’est pas du tout diffusé par les médias mainstream… Mais pour nous, ce style de musique et les messages des chansons sont toujours d’actualité ! Les problèmes sociaux, religieux ou encore environnementaux sont toujours présents. Le Rock Progressif et psychédélique est notre moyen de dénoncer et de parler des sujets qui nous angoissent… Et franchement, le Rock des années 70, c’est pas le kiff absolu ?

– « Hic Sunt Moundrages », votre premier album, vient tout juste de sortir et il est d’une incroyable fraîcheur et surtout il bénéficie d’une production très live et spontanée. Dans quelles conditions l’avez-vous enregistré, car il est le reflet parfait de vos concerts ?

Merci beaucoup ! Il a été enregistré en février 2021 dans les studios ZF Prod à côté de Rennes. Nous étions en osmose, perdus dans la campagne et sous la neige pendant dix jours ! Nous avons enregistré les parties rythmiques (basse, batterie, orgue) en live. Nous avons ensuite fait les overdubs des voix et des autres instruments (piano, percussions, mellotron, Moog…). Nous avons fait le choix de ‘surproduire’ ce premier album, car nous aimons différencier le live du studio. Maintenant le challenge, c’est de réarranger les morceaux studio pour le live.

– En vous écoutant, on pense à beaucoup de groupes, mais il dégage de MOUNDRAG beaucoup d’originalité et un souffle que l’on ne retrouve pas souvent dans la musique des 70’s. Votre intention est-elle de ‘dépoussiérer’ un peu un registre, qui peut paraître lointain pour certains ?

Nous aimerions que plus de personnes, et notamment des jeunes, écoutent ce style de musique, c’est pour cela qu’on essaye de rendre le Rock 70’s plus ‘actuel’ avec les codes de la musique d’aujourd’hui. Cela se traduit par une structure musicale, des refrains, des sonorités (parfois) plus actuelles, tout en gardant une énergie et une esthétique 70’s. Nous adorons jouer aux archéologues de la musique. D’ailleurs, « Hic Sunt Moundrages » est rempli de références et d’hommages aux groupes qu’on adore, tout en gardant notre patte de jeunes de 2022.

Photo : Jean-Adrien Morandeau

– Une autre de vos particularités est que vous chantez tous les deux. Comment cela se passe-t-il ? Chacun chante ce qu’il écrit, ou est-ce que vous adaptez vos voix et vos textes aux morceaux ?

Nous avons commencé à chanter sérieusement avec la création de MOUNDRAG, et donc chanter ensemble était la meilleure chose à faire. En unissant nos deux voix, on a réussi à trouver des harmonies comme celles des groupes Folk et Prog des seventies que nous aimons tant. En général, il n’y a pas de règles sur qui chante le lead et qui écrit les textes. On partage nos voix aussi en fonction de ce qui nous rend à l’aise à chanter et surtout pour ne pas laisser l’autre dans la difficulté.

– MOUNDRAG est empreint d’une forte communion entre votre musique et un aspect visuel très présent. Et au-delà des histoires de dragons (que j’adore !), vous abordez aussi des problèmes actuels très forts où se croisent religion et diverses cultures. Iriez-vous jusqu’à dire que vous avez un message à livrer à travers votre musique ?

L’univers musical étant bien particulier, il faut que l’univers visuel le soit aussi. Donc, c’est à travers des paysages de science-fiction que nous trouvons l’inspiration des thèmes de nos chansons. Les thèmes de sciences fictions sont en général plutôt pessimistes vis-à-vis de l’évolution des sociétés, et c’est en imaginant le futur sur notre terre à partir de ce que nous vivons actuellement que nous ne voyons que des problèmes pour les années à venir. Nous sommes très inquiets du chemin que nos politiciens, nos cultures et les religions nous font prendre… Et la musique progressive est parfaite pour mettre en abîme ces sujets pas faciles à exploiter dans le Rock’n’Roll.

– Parlons de l’album, qui est finalement assez court, puisqu’il contient cinq titres. Parmi eux, il y a « La Poule » et ses 20 minutes. Le morceau est incroyable en rebondissements et passe par de nombreuses émotions. Même s’il laisse apparaître un esprit très jam, il est très écrit avec des chapitres bien distincts. Comment ce morceau emblématique de votre répertoire a-t-il vu le jour, et est-ce que l’envie de composer un titre aussi long était présente dès le début, comme une sorte de challenge ?

Avant même de commencer MOUNDRAG, nous avions déjà la première partie de « La Poule » et il était déjà question d’en faire un morceau de 20 minutes, c’était notre rêve ! C’est comme ça que nous l’avons créé, parties par parties, comme pour bâtir un édifice pierre par pierre. Et cela prend du temps, en tout cas, ça nous a mis du temps à composer. Souvent les choses venaient très facilement et parfois c’était totalement l’inverse… Il nous est arrivé de buter sur un passage, ne plus savoir quoi faire après, ou comment faire la transition d’une partie à une autre. Il y a eu même des moments de questionnement sur le concept-même de composer ce titre, d’aller au bout. Finalement, on s’est retrouvé en studio avec tout en tête et tous les arrangements prévus. On l’a enregistré sans se poser toutes ces questions et c’est comme ça qu’est né « La Poule ».

– J’aimerais enfin qu’on dise aussi un mot sur Komodrag & the Mounodor, qui est la fusion entre MOUNDRAG et le groupe finistérien Komodor. Sur scène, il y a une réelle osmose entre vous à tel point qu’on a l’impression que vous vous connaissez depuis toujours. Est-ce qu’on pourrait imaginer la sortie d’un album ? D’ailleurs, est-ce que vous en avez déjà parlé entre vous ?

Les premières dix minutes de notre rencontre avec les Komodor en 2019 nous ont paru comme si c’était dix ans. Les relations humaines sont la base de toutes créations musicales et quand il y a l’étincelle entre différentes personnes, il faut foncer car on ne sait pas quel brasier va naître de cette étincelle. Les Komodor et nous, c’est puissant et sur scène c’est l’extase ! Et en studio, il ne vaut mieux pas imaginer… Bien sûr, il va y avoir un album qui sortira ! On attend juste tous ensemble que « Hic Sunt Moundrages »fasse un peu de route, mais on sent qu’on n’aura même pas le temps de souffler un peu entre les deux albums !

L’album de MOUNDRAG, « Hic Sunt Moundrages », est disponible chez Dionysiac Records/Modulor.