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Maudits : l’énergie de la liberté [Interview]

C’est toujours un plaisir de pouvoir suivre la progression d’un groupe en qui l’on croit depuis ses débuts et de voir où il en est quelques années plus tard. Depuis son premier effort éponyme sorti juste avant la pandémie, MAUDITS suit son chemin et affine un style original déjà perçu à l’époque. Le trio ne cesse de bousculer son post-Metal instrumental, le parant de cordes notamment, et évoluant dorénavant dans des sphères encore plus progressives et cinématographiques. L’occasion de faire le point avec son guitariste et compositeur, Olivier Dubuc, et d’évoquer avec lui le très bon « Précipice », sorti il y a quelques semaines maintenant chez Source Atone Records.

– J’ai le plaisir de vous suivre depuis vos débuts en 2020 et je trouve votre ascension assez exemplaire. Vous en êtes à votre deuxième album, vous avez sorti un EP, un split avec SaaR et le live à l’Opéra de Reims. Vous n’êtes si MAUDITS ça au final !

Non, non ! On avance ! (Rires) On travaille sur notre truc, on prend du plaisir. Je pense que, quelque soit le domaine, quand tu fais les choses de manière relâchée, ça se passe bien et le résultat est plutôt bon. En tout cas, chez MAUDITS, c’est ce que l’on fait et tout va bien.

– D’ailleurs, ce qui est remarquable, c’est qu’en quatre ans, vous avez pu expérimenter tous les formats existants, à savoir l’album, l’EP, le Live et le split. Est-ce que l’approche dans la composition est toujours la même, ou les exercices sont vraiment différents ?

Ca peut être différent, oui. Au niveau de l’évolution du projet et des sorties, il y a eu des choses assez similaires, mais où l’on a mis autant d’énergie à chaque fois. Et il y a eu des sorties de circonstances. Si tu prends le premier EP, « Angle Mort », nous n’avions pas prévu forcément de le sortir dans ce format-là. Ce sont des recompositions de morceaux déjà existants. Mais comme on avait sorti le premier album entre deux confinements, on s’est dit qu’on allait attendre, car personne ne savait ce qui allait se passer et on voulait vraiment le défendre en live. L’approche peut donc être différente suivant les circonstances. Mais elle n’est pas forcément moins libre. On peut garder une ligne directrice déterminée en fonction de ça.

– Vous venez de sortir votre deuxième album, « Précipices » il y a peu, et la première chose qui m’a frappé, c’est que je vous trouve moins ‘timides’, beaucoup plus sûrs de vous dans l’élaboration de votre style. J’ai le sentiment que vous faites enfin ce que vous avez en tête depuis le départ. C’est le cas ?

Oui, on peut le percevoir comme ça. Ca n’a pas forcément été ressenti de notre côté. On a fait ce que l’on avait à faire sur le moment. Nous n’avons pas eu de pression et au contraire, l’expérience acquise depuis les débuts nous a permis de trouver notre ton et notre son. En tout cas, de mon point de vue, c’est la meilleure réalisation que j’ai sortie et j’en suis content à 100%. Je pense que c’est très abouti et c’est le résultat de ces dernières années de travail. On a fait ce que l’on avait envie t’entendre, sans se préoccuper de donner dans tel ou tel style et sans aucune pression extérieure.

– Je ne sais pas si le titre va dans ce sens, mais il y a un vrai gouffre entre vos deux albums, si on ne tient pas compte des EPs. Sans aller jusqu’à dire que vous êtes méconnaissables, il y a une touche qui se précise et qui tient d’ailleurs aussi peut-être à la présence depuis quelques temps de Raphaël Verguin au violoncelle. L’apport des cordes distingue vraiment MAUDITS de la scène post-Metal française. De quelle manière est-ce qu’il intervient dans la composition ? Sur vos propositions, ou plutôt ses idées personnelles ?

C’est vrai qu’au niveau du style, le fait de mettre du violoncelle, d’en mettre beaucoup, et aussi de le laisser s’exprimer sur les morceaux, nous distingue du reste de la scène post-Metal. Elle n’en met pas la plupart du temps, ou alors juste sous forme d’arrangement et pas forcément avec de vrais instruments. C’est souvent noyé dans la musique du groupe. C’est vrai que Raphaël a vraiment mis sa patte. Et comme nous faisons tout à fond, et en vrai, ce nouvel album prend cette ampleur. On a aussi cherché à se marquer clairement dans un esprit de musique de film. On n’hésite pas et on ne s’enferme pas, non plus. On suit nos envies, sans aucune retenue. On essaie toujours de faire du mieux possible. Entre les deux albums, on a poussé les curseurs plus haut et cela s’entend probablement. On maîtrise vraiment notre sujet et on sait où on veut aller. Les choses se font de manière fluide et naturellement. Avec le recul, je pense que MAUDITS est également aujourd’hui plus marqué par le Rock Progressif dans les structures et la liberté de faire. Il y a un esprit 70’s, plus riche et plus travaillé.

– MAUDITS reste toujours ancré dans le post-Metal, mais les variations sont beaucoup plus nombreuses sur ce nouvel album. On y décèle des éléments post-Rock surtout, mais aussi Doom et progressifs. « Précipices » est clairement plus ‘cinématographique’ dans l’approche. C’est vers cela que vous voulez tendre depuis le split notamment ?

On voulait ça, même si ça s’est fait naturellement. Si tu prends le split, notre morceau (« Breken », qui est décliné en trois parties – NDR) est très écrit et très cinématographique. Il s’est construit aussi sur des arrangements de cordes avec du violon et du violoncelle. Lorsqu’on fait les maquettes, Raphaël intervient vraiment en dernier et souvent au moment des prises. Et c’est la même chose pour Emmanuel (Rousseau, multi-instrumentiste – NDR), qui est aussi co-producteur de l’album et qui écrit avec moi depuis le début. Il apporte beaucoup au niveau des arrangements. Et finalement, tout ça s’est un peu construit sans que l’on puisse le prévoir. Le projet est très libre, mais le postulat de départ est de faire le mieux possible et tant que nous ne sommes pas contents, on ne le sort pas. Il faut que l’on soit totalement satisfait, mais sans y passer trop de temps, non plus. Ca n’aurait plus de sens. Et là-dessus, nous sommes tous d’accord et on ne lâchera rien !

– J’aimerais aussi qu’on dise un mot de ce « Live at Opéra Reims », qui contient trois morceaux sur 30 minutes. Comment l’enregistrement s’est-il passé, car ce n’est pas un lieu habituel. Y avait-il du public, car ce n’est pas perceptible ? Et est-ce qu’il s’agit plus d’une performance que d’un Live finalement ?

C’est un peu les deux, car il n’y avait pas de public. En fait, lorsque cela a été tourné, c’était dans cette période avec beaucoup de confinements et où les concerts n’étaient pas autorisés. L’idée de départ était de trouver un beau lieu pour faire une belle vidéo de promo. On ne savait même pas que ce serait à l’Opéra de Reims, d’ailleurs. En fait, de par son activité professionnelle, Erwan (Lombard, basse – NDR) avait comme client le directeur de l’Opéra et au fil des discussions, il lui a proposé tout simplement de le faire là-bas. On lui a donné nos dates et il nous a gentiment prêté les lieux pendant deux jours avec tout le staff de l’opéra et gratuitement. On avait juste à apporter notre matos. On a donc pu faire plusieurs prises, mais on a gardé l’enregistrement fidèle et intact en y retouchant juste très légèrement quelques petits détails, qui arrivent naturellement dans tous les concerts. L’ensemble a juste été remixé et surtout remasterisé. Le gros du travail a été sur le montage des images.

– Est-ce qu’il y avait une portée particulière pour vous de vous produire dans un endroit aussi symbolique ?

Carrément, le lieu est super et l’acoustique est incroyable. Même s’il n’y avait pas de public, l’endroit est fou ! Et puis, on a été accompagné et soutenu par une équipe géniale, notamment au niveau des lumières. Mais c’est finalement après coup, en voyant les images, qu’on a vraiment pris conscience du lieu et du rendu. A ma connaissance, nous sommes le seul groupe de Metal, ou assimilé, à avoir fait ça à l’Opéra de Reims.

– Revenons sur l’album et notamment au morceau caché en toute fin que je laisse aux lecteurs le plaisir de découvrir. La petite surprise vient du fait que l’on y entend une voix féminine, ce qui peut surprendre de la part d’un groupe instrumental. Tu peux nous en dire plus sur cette présence énigmatique ?

Sans entrer dans les détails, Chris (Christophe Hiegel, batterie – NDR) a perdu quelqu’un de proche durant le processus de composition. L’idée était de rendre hommage à cette personne en faisant un morceau caché. C’est d’ailleurs une décision qui s’est prise au dernier moment. Au départ, c’était juste une piste instrumentale. Puis, j’ai eu l’idée de lui demander s’il pouvait récupérer des vidéos ou des messages parlés pour les mettre en fond. Et la décision était aussi de cacher le morceau et de ne pas en parler. On voulait un vrai hommage. Ainsi, on a fait un montage à partir de voix récupérées sur des messages vocaux, via une amie de cette personne. J’ai ensuite écrit une trame atmosphérique avec des accords que j’avais en tête avec Emmanuel. Je connaissais un peu la personne en question et à la fin, on était vraiment rincé. C’était vraiment épuisant, surtout lorsqu’on connait les circonstances et le contenu de son propos. Je suis très content du résultat, car ce n’est pas de la pleurnicherie. C’est beaucoup plus un hommage serein que triste.

– Enfin, j’aimerais qu’on évoque aussi la scène, puisque vous venez d’achever une mini-tournée avec le groupe Parlor. J’imagine que vous avez définitivement trouvé vos marques et peut-être aussi votre public. Qu’en retenez-vous au final ?

Oui, on a fait cette petite semaine de tournée qu’on a monté entièrement nous-mêmes. Ca a été un gros boulot d’environ deux/trois mois qu’on a fait avec Yann de Parlor pour trouver des dates, des salles, négocier les cachets et la logistique. Globalement, ça s’est bien passé. C’est une belle expérience, assez éreintante quand même, car on n’a pas de roadies et on a tout fait nous-mêmes. C’était vraiment sympa d’enchainer les dates comme ça, dans des lieux et des configurations différentes aussi, car ce n’est pas quelque chose qu’on a l’habitude de faire. Et puis, on s’est très bien entendu avec Parlor, qui est composé d’anciens membres de SaaR qui s’était séparé après le split justement. Nos registres sont très différents, eux sont dans un Hard-Core avec un côté Punk très second degré. C’était vraiment une super expérience !

Le dernier album de MAUDITS, « Précipice », est disponible chez Source Atone Records.

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Hard-Core Post-Metal

Parlor : like or die !

Incisif et frontal, le HardCore de PARLOR semble avoir franchi un palier grâce à des nouveaux titres acérés et imposants, magnifiquement servis par une production aux petits oignons où rien n’est laissé au hasard. « Comments » montre un quatuor parisien très combatif et l’ensemble mérite bien un gros Like… ou un rapide commentaire !

PARLOR

« Comments »

(Source Atone Records)

Que la récente panne géante et mondiale de Facebook et de ses réseaux annexes a dû bien faire rigoler les membres de PARLOR ! Car sur « Comments », le quatuor passe au vitriol les addictions aux commentaires et autres Likes que beaucoup déversent au quotidien. Satirique et plein d’humour, ce nouvel EP pose un regard brutal, HardCore et décalé sur ce phénomène ambiant.

Après une démo (2017) et un album (« Softly » en 2019), c’est donc avec un EP six-titres de 20 minutes intenses que PARLOR refait surface. Si le combo revendique un Chaotic HardCore, ce sont surtout des morceaux bien ficelés, massifs et très structurés qui composent « Comments » (« Dive In Motion », « Fighting The Blue »). Le songwriting s’avère ici redoutable.

En se frottant au Punk HardCore et au post-Metal, PARLOR élargit encore un peu plus son spectre et s’ouvre bien des horizons (« Pervitine »). Grâce à un chant hargneux et volontaire, les morceaux du quatuor prennent un volume conséquent et la massive rythmique, ainsi que les riffs tranchants développent parfaitement l’ensemble (« Instacat », « Comments », « Q & A »). Moins chaotique, certes, mais plus mordant !