Catégories
Rock Progressif Stoner Rock

Grandma’s Ashes : des Parques émancipées

Après cinq ans sur la route à peaufiner son style à travers un voyage aussi introspectif qu’instructif pour les trois musiciennes et la réalisation d’un EP très prometteur en 2021, GRANDMA’S ASHES dévoile aujourd’hui un premier effort plein de certitudes, de surprises et avec une identité personnelle dont les contours sont désormais établis. « This Too Shall Pass » étonne et séduit… tout simplement.

GRANDMA’S ASHES

« This Too Shall Pass »

(Nice Prod/Baco Music)

Il y a deux ans à l’occasion de la sortie de leur premier EP, « The Fates », j’avais eu le plaisir d’interviewer Eva, Myriam et Edith, respectivement chanteuse et bassiste, guitariste et batteuse de GRANDMA’S ASHES. Ce premier cinq-titres, où elles donnent toutes les trois de la voix, mariait avec beaucoup d’élégance un Stoner Rock solide et des influences directement issues du Rock Progressif.

Avec « This Too Shall Pass », le trio féminin s’affirme de plus en plus et livre un premier album très abouti, très inspiré et surtout qui sort très habillement des sentiers battus. Si on pouvait considérer « The Fates » comme une mise en bouche, on entre cette fois de plein pied dans l’univers si singulier de GRANDMA’S ASHES. Le groupe a évolué naturellement, tant dans le visuel présenté que dans l’approche musicale.

Le combo conjugue des mélodies lumineuses sur des textes pourtant sombres et des refrains efficaces. Avec un travail remarquable sur les voix notamment et la présence de trois interludes qui sont autant de belles respirations, GRANDMA’S ASHES rend son premier opus très envoûtant. Musclé (« Cold Touch », « Caffeine »), sensible (« Aside », « Cassandra ») et plus aérien (« Lost At Sea », « Borderlands »), les trois artistes imposent leur style avec brio.

Photo : Alexandre Le Mouroux

Retrouvez l’interview du groupe accordée à Rock’n Force

Catégories
France Stoner/Desert

Grandma’s Ashes : une autre dimension du Stoner [Interview]

Fortes d’un premier EP impressionnant à bien des égards, « The Fates », Eva, Myriam et Edith bousculent les codes très établis du Stoner en y insufflant des touches progressives, un travail exceptionnel sur les voix et une musicalité basée sur des mélodies imparables. GRANDMA’S ASHES revisite le genre avec audace dans un univers très personnel. Rencontre avec le très inspiré trio français.

Photo : Angela Dufin

– Vous avez tourné pendant trois ans (la belle époque !) avant d’enregistrer votre premier EP, « The Fates ». C’est devenu une démarche très rare aujourd’hui que de vouloir d’abord faire ses preuves sur scène. Vous aviez besoin de cette légitimité avant le disque ?

Non, jouer en live a toujours fait partie intégrante de notre processus de création, faire des concerts pendant trois ans avant d’enregistrer l’EP était une façon de construire notre univers, d’apprendre à se connaître musicalement, humainement, d’essayer des choses et de voir ce qui fonctionne ou pas. Il nous a fallu ce temps pour être satisfaites et mûrir avant de se dire qu’on était fin prêtes à figer une part de notre musique et à la donner à notre public.

– Vous devez justement avoir un répertoire suffisamment étoffé pour sortir un album complet. C’est la situation actuelle qui vous a fait opter pour ce format, ou vous semblait-il le plus adapté à une première sortie discographique ?

L’album est en préparation mais notre première sortie est un EP 5 titres, ce qui est plutôt habituel pour un groupe en développement comme le nôtre. Nous voulions proposer une première introduction à notre univers tant visuelle que sonore.

– Certes, la question est récurrente mais fonder un trio entièrement féminin était-il votre idée de départ, ou est-ce que les choses et les rencontres se sont faites naturellement ?

Les rencontres se sont faites naturellement, nous nous sommes rencontrées par des annonces sur internet avec l’envie commune de faire de la musique et des concerts. Aujourd’hui, nous sommes nombreuses sur la scène Rock, nous pensons qu’il est temps d’accepter que les femmes puissent collaborer par passion avant tout et par affinité, et non pas à des fins autres que musicales, c’est une chose qu’on ne questionne pas dans les groupes 100% masculin. (Nous sommes d’accord et c’est d’ailleurs une démarche que je soutiens depuis très longtemps –NDLR).

– GRANDMA’S ASHES propose un Stoner très élégant, alternant des côtés massifs et des passages plus doux et très progressifs. Votre spectre musical est vaste, c’est une façon de ne pas se cloisonner dans un registre prédéfini et de sortir un peu des codes du style ?

Exactement, nous pensons qu’une bonne manière de se réapproprier le Stoner est d’y ajouter des aspects qu’on ne retrouve pas habituellement dans ce style de musique. C’est à partir de ce constat que nous avons commencé à ajouter des rythmiques un peu plus complexes, un côté très mélodique et des ambiances. Nous avons inséré petit à petit des éléments qui nous plaisent dans des genres musicaux très variés (de la musique classique à la Pop, tout y passe!) pour finalement arriver à cet équilibre entre gros riff efficaces, Prog et mélodie. Puis, les groupes de Rock sont peut-être un peu trop cloisonnés dans des sous- genres aujourd’hui. On croise rarement du post-Punk et du Prog dans une même programmation par exemple, alors que cela ferait peut-être du bien à la scène de s’hybrider.

Photo : Angela Dufin

– Il y a également un gros travail sur les voix, où on vous retrouve d’ailleurs parfois toutes les trois. C’est assez inhabituel dans le Stoner pour être souligné. On a le sentiment qu’elles sont aussi essentielles que les riffs de guitares. C’est le cas ?

Les voix ont pris une importance particulière lors de notre passage en studio. Nous avions déjà conscience du côté très mélodique d’Eva, et ajouter des chœurs faisait partie de nos projets. En enregistrant, nous avons pu essayer de les empiler en chantant chacune des voix toutes les trois, plusieurs fois. Cela a donné un résultat similaire à une nappe (sur « A.A » et « Daddy Issues » notamment), c’était surprenant et beau. Nous nous sommes rendu compte que cela pouvait devenir un élément à part entière aussi bien pour souligner des harmonies que pour ajouter des textures psychédéliques, on va essayer d’explorer ça au maximum.

– Vous évoquez souvent un style narratif en parlant de votre musique. Comment cela se traduit-il concrètement, en dehors des textes bien sûr ?

Nous aimons illustrer nos textes musicalement. Nous cherchons à mettre en musique nos sentiments et nos idées, ainsi l’instrumentation est toujours en dialogue avec des images dont nous discutons ensemble. L’atmosphère, les harmonies sont donc une façon de servir la narration, mais c’est aussi nos réflexions sur les structures qui nous permettent de raconter des choses. Il est important pour nous de penser des structures de chanson mouvantes, avec de longs passages instrumentaux, des surprises comme un élément perturbateur dans une histoire… Nous nous sommes beaucoup inspirées du Rock Progressif pour cet aspect, en écoutant des morceaux de Yes, par exemple, nous avons vraiment l’impression qu’un fil narratif est déroulé, on ne retrouve pas toujours le traditionnel couplet/refrain/pont, etc. La temporalité des parties est beaucoup plus élargie et elles sont aussi très riches et développées, c’est ce que nous cherchons à agrandir.

– Ce premier EP est très mature dans les compositions comme dans sa production. Un mot enfin sur la pochette elle aussi très évocatrice et à la symbolique très forte. D’où vous est venue l’idée ? Elle est presque cérémoniale…

Lors d’un concert dans un petit bar à Montreuil, un gars est venu nous voir en fin de soirée pour nous expliquer qu’il commençait à écrire une chronique sur nous, en nous comparant aux trois Parques. Il trouvait que la voix d’Eva était similaire au fil de la vie qui se déroule, que Myriam le tissait avec ces arpèges de guitare et qu’Edith le coupait avec ses rythmiques affûtées. La métaphore nous a tout de suite séduit, et elle correspond aussi à la manière dont nous écrivons nos chansons. Dans l’EP, chacune d’entre elles parle d’un personnage dont nous tissons la destinée, qui est d’ailleurs souvent tragique. Le fait de nous représenter toutes les trois en Parques sur la pochette est aussi une manière de prévenir l’auditeur qu’il est sur le point de rentrer dans un univers où il n’a plus le contrôle, nous l’amenons dans une autre dimension au gré des changements d’ambiance.

https://grandmas-ashes.bandcamp.com/album/the-fates

Catégories
Stoner/Desert

Grandma’s Ashes : Une élégante férocité

A la fois plein d’humour et d’une noirceur très présente, ce premier EP de GRANDMA’S ASHES dévoile un trio féminin dont l’élégance et la sensualité des compositions font mouche sur un Stoner Rock consistant, aérien et aux mélodies terriblement accrocheuses. Très moderne dans sa structure, la musique des Françaises est séduisante à plus d’un titre.    

GRANDMA’S ASHES

« The Fates »

(Independant)

La première chose qui vient sauter aux oreilles à l’écoute de ce très bon premier EP de GRANDMA’S ASHES, c’est que les trois musiciennes ont certainement du passer beaucoup, beaucoup de temps sur scène tant « The Fates » sonne live et laisse transparaitre une honnêteté pleine d’énergie et une sincérité évidente. De prime abord assez épurées, les compos révèlent un songwriting affûté et abouti.

La sensualité du trio féminin se manifeste dès « A.A. », grâce à la voix aérienne et toute en nuance d’Eva portée par ses riffs entêtants. Que ce soit la basse très groovy et ronde de Myriam ou la frappe solide et précise d’Edith, chacune mène GRANDMA’S ASHES vers un Stoner Rock élégant (« Radish Cure », « Daddy Issues »). Et les mélodies redoutables du trio survolent des rythmiques lourdes et massives.

Mêlant très habillement une certaine douceur avec une sauvagerie toute contenue (« Song For Fiona », le groupe montre une technicité et une maîtrise à toute épreuve. Le travail effectué sur les voix, où elles sont parfois trois, est remarquablement mis en valeur par une production aussi brute que claire. GRANDMA’S ASHES signe avec « The Fates » un premier effort très réussi et complet… et même peut-être un peu court !