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Ronnie Baker Brooks : un inestimable héritage

Tout petit déjà, Muddy Waters et Willie Dixon faisaient partie de son entourage, ou plutôt de celui de son père, autre légende disparue en 2017. Alors, bien évidemment, RONNIE BAKER BROOKS a le Blues le sang, il n’en serait être autrement. Guitariste virtuose et très polyvalent, il est également un chanteur hors-pair et nous porte de sa voix chaleureuse et légèrement voilée. Pour son cinquième album, l’Américain mélange émotion et percussion avec ce tranchant propre à Chicago avec un naturel absolu, qui fait perdurer le mythe avec classe. 

RONNIE BAKER BROOKS

« Blues In My DNA »

(Alligator Records)

Affirmer qu’on a le Blues dans son ADN lorsqu’on s’appelle RONNIE BAKER BROOKS est un doux euphémisme. Fils du grand Lonnie Brooks, il a fait ses armes à ses côtés en devenant rapidement son deuxième guitariste après une enfance passée au son des notes bleues. En 1988, il fait même sa première apparition sur l’album « Live From Chicago : Bayou Lightning Strikes » et dix ans plus tard, il fonde son propre label, Watchdog Records, sur lequel il sort trois albums (« Gold Digger », « Take Me Witcha » et « The Torch »).

Après un passage chez Provogue pour « Times Have Changed », il intègre aujourd’hui les légendaires Alligator Records pour un disque qui est finalement un incroyable témoignage de son parcours. Et pour l’accompagner, Will Macfarlane (guitare), Dave Smith (basse), Steve Potts (batterie), Rick Steff (claviers) et Clayton Ivey (orgue Hammond) font rayonner ce superbe « Blues In My DNA », composé entièrement par RONNIE BAKER BROOKS, à l’exception de « All true Man », co-écrit avec ‘Big Head’ Todd Mohr. Du beau monde !

La mise en bouche très funky de « I’m Feeling » annonce une suite très éclectique dans un Contemporary Blues, tout en maîtrise et où chacun y va de son feeling personnel pour donner vie à ce nouvel opus. Sensible sur « My Love Will Make You Do Right » et « Accept My Live », RONNIE BAKER BROOKS fait état de ses nombreuses qualités de guitariste, bien sûr, mais aussi de chanteur. Souvent enrobés de cuivres, certains titres sont d’une profondeur électrisante (« Stuck on Stupid », « My Boo », « Blues In My DNA »). Magnifique !

(Photo : Jim Summaria)

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John Primer & Bob Corritore : a story of truth

Parler de sincérité et d’authenticité lorsque l’on a affaire à deux monuments comme JOHN PRIMER & BOB CORRITORE est presque malvenu, sinon déplacé. Le réputé et expérimenté tandem guitare/harmonica est l’un des meilleurs représentants de ce Chicago Blues, à la fois inimitable et tellement identifiable. A travers une belle douzaine de joyaux nés dans la ville de l’Illinois, « Crawlin’ Kingsnake » nous emporte dans un tourbillon festif, émouvant, dansant et littéralement lumineux.

JOHN PRIMER & BOB CORRITORE

« Crawlin’ Kingsnake »

(VizzTone Label Group)

Sur près d’une heure, JOHN PRIMER & BOB CORRITORE font une nouvelle fois briller le Blues de Chicago, entouré d’un groupe à faire pâlir toute concurrence, même si c’est plutôt le respect et le partage qui habitent tout ce beau monde. Pour ce quatrième album commun, nos deux bluesmen entretiennent et font sonner ce courant si cher au grand Muddy Waters. Et lorsque l’on connaît leur pédigrée et leur parcours, ça ressemble plutôt à une promenade de santé, guidée par un désir de transmission et un plaisir présent sur chaque note.

Pour mener à bien ce somptueux « Crawlin’ Kingsnake », JOHN PRIMER & BOB CORRITORE, tous deux originaires du South Side de Chicago, sont accompagnés par un groupe d’élite avec Jimi Primetime Smith à la guitare, Anthoni Geraci au piano, Bob Stroger à la basse et Wes Starr à la batterie. Je vous invite à aller jeter un œil sur leur splendide CV à tous pour faire une idée plus concrète du très haut niveau du combo à l’œuvre ici. Et c’est entre 2021 et 2023 que les sessions ont été enregistrées dans les studios Tempest en Arizona.  

Au long de « Crawlin’ Kingsnake », on se retrouve entouré de James Cotton, John Lee Hooker, Willie Dixon, BB King, Jimmy Rodgers, Magic Slim et bien entendu Muddy Waters, repris à trois reprises. Chaleureux et groovy, JOHN PRIMER & BOB CORRITORE y mettent tout leur savoir-faire, une dextérité et une technique implacable et surtout un feeling époustouflant. Slide enflammée, piano survolté, harmonica transi de bonheur et une voix envoûtante : il ne manque rien à ce nouvel opus, qui sonne si live et tellement authentique.

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Bjørn Berge : steel got the Blues

Entre compos et covers, c’est avec un « Introducing SteelFinger Slim » un peu spécial et inattendu dans son contenu que BJØRN BERGE fait courir ses doigts d’acier sur son instrument. Si la voix inimitable et la liberté absolue dont il a fait sa réputation sont bel et bien intactes, on aurait peut-être apprécié un peu plus de titres originaux, même si sa manière de défourailler les morceaux des autres conserve toujours quelque chose d’assez mystique et de jouissif.      

BJØRN BERGE

« Introducing SteelFinger Slim »

(Blue Mood)

Fidèle à lui-même c’est seul que le Norvégien revient avec un nouvel album, son treizième, et le solitaire bluesman fait de nouveau des étincelles parant son jeu de ses plus beaux atouts. L’acier de son dobro vibre sous son toucher si singulier, passant du picking à la slide avec la dextérité qu’on lui connait et venant se joindre à cette voix profonde et unique avec laquelle BJØRN BERGE nous berce et nous envoûte depuis tant d’années. Et c’est toujours le cas avec « Introducing SteelFinger Man ».

Voix, guitare et stompbox, il n’en faut pas plus au ténébreux Scandinave pour livrer un Blues mâtiné de Rock dans une formule acoustique et métallique si particulière par sa froideur sonore. Pour autant, il se dégage beaucoup de chaleur de ce nouvel opus grâce à des morceaux simples en apparence, mais toujours très bien sentis et d’une personnalité qui fait de BJØRN BERGE l’un des rares artistes de Blues à savoir, et pouvoir, capter l’attention et captiver à chacun de ses disques.

Son timbre guttural nous embraque cette fois sur dix titres qu’il a tenu à enregistrer en une seule journée, une façon d’aller l’essentiel avec autant de spontanéité que de justesse possible. Et BJØRN BERGE sait y faire. Cependant, et même si c’est toujours aussi bien réalisé et arrangé, le fait de reprendre « Get It On » de T. Rex, « Like A King » de Ben Harper, « Spoonful » de Willie Dixon et « Black Night » de Deep Purple dans des versions certes revisitées parait un peu beaucoup sur une production studio.

Photo : Tor Nilssen