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Bella Moulden : revival by youth [Interview]

Alors qu’elle a sorti son premier EP, « Voyager », en mars dernier, BELLA MOULDEN a déjà la tête solidement posée sur les épaules. L’Américaine, multi-instrumentiste, chanteuse, productrice et songwriter, s’est forgée un univers sonore 70’s très personnel basé sur une Soul, qui va puiser autant dans le Rock que le Blues ou la Pop. En gardant un côté brut, elle développe une intensité authentique dans des chansons, qui sont autant de morceaux de vie que d’expériences musicales. Touche-à-tout, audacieuse et créative, la musicienne, qui s’apprête à venir en France à la rentrée de septembre, affiche déjà une belle assurance, malgré son jeune âge. Entretien avec une artiste qui s’affirme avec talent.

– La première chose qui surprend lorsque l’on regarde ton parcours, c’est que tu as commencé la musique très jeune et en autodidacte. Aujourd’hui, tu joues de la guitare, de la basse, du piano, du ukulélé et des percussions et tu produis toi-même tes morceaux. Quel a été le déclic et as-tu trouvé rapidement le style qui te convenait le mieux ?

Le tournant pour moi a eu lieu pendant le Covid. Je suivais des cours en ligne, ce qui est toujours le cas, et pendant cette période, j’ai commencé à expérimenter mon son et mon style. J’avais l’habitude d’empiler ma guitare et ma basse, ce qui était incroyablement lourd pour mes épaules et mon dos. J’ai aussi commencé à faire des boucles et c’est comme ça que j’ai composé « SelfCare ». C’est avec cette chanson que j’ai compris que ce n’était pas juste un hobby ou juste quelque chose avec du potentiel, mais que je voulais en faire ma carrière. J’en avais toujours rêvé, mais jusqu’à ce moment-là pendant le confinement, ça ne semblait pas tangible. Depuis, je suis déterminée. C’est drôle, « SelfCare » est en fait la chanson que je préfère le moins, mais c’est devenu mon plus grand succès jusqu’à présent. Ensuite, j’ai commencé à écrire davantage de chansons Rock, la direction que je voulais vraiment prendre. J’avais tellement de chansons quand j’étais plus jeune, mais la peur me retenait. Maintenant, je les libère lentement mais sûrement, au fur et à mesure qu’elles trouvent leur place dans le monde que je crée.

– Justement, ta musique est emprunte des années 70, une époque que tu n’as pourtant pas connu, et que l’on retrouve aussi dans ton univers visuel et vestimentaire. Qu’est-ce que cela évoque chez toi ? Une forte créativité artistique ? Des artistes incroyables, ou plus simplement l’éduction musicale que tu as pu recevoir de tes parents ?

Oui, une grande partie de ma musique et de mon style est fortement inspirée des années 60, 70 et même 80. Je n’ai pas connu ces époques moi-même, évidemment. Mais à mon avis, les années 70 ont été la meilleure période que j’ai étudiée, tant pour la musique que pour la mode. Il y a quelque chose de spécial dans cette époque : la brutalité, la liberté, …. J’ai vraiment beaucoup idéalisé cette décennie. Des artistes comme David Bowie, Jimi Hendrix, Stevie Nicks et Prince ont vraiment façonné ma vision de l’art. A l’époque, la musique n’était pas seulement un produit ou un moyen d’atteindre une certaine finalité. On reconnaissait quelqu’un à sa musique et à son style. L’expression personnelle comptait. Le talent comptait. Avoir une voix unique comptait.

Mes parents ont grandi à la fin des années 80 et dans les années 90. Ma mère était passionnée de Pop des années 80, et c’est elle qui m’a fait découvrir Prince. Mon père était davantage branché Hip-Hop des années 90. A partir de là, je me suis plongée dans la musique qu’aucun d’eux n’écoutait ! (Rires) Mais le côté artistique en général de cette époque m’a semblé si riche et substantiel. Il me touche bien plus que la plupart des musiques grand public d’aujourd’hui. J’essaie d’incarner cet esprit dans mes chansons tout en restant dans l’air du temps. Mais parfois, je crains que la poursuite des tendances modernes n’en dilue l’expression. C’est un travail permanent : évoluer sans perdre ce qui fait ma musique.

– On l’a dit, tu as aussi productrice de ta propre musique. C’est quelque chose qui s’est imposé à toi plus par obligation, ou le travail du son est aussi un domaine qui te passionne autant que la composition ?

Certainement pas par obligation, mais par pure fascination. Même si j’ai commencé comme chanteuse, je jouais toujours d’un instrument, alors la production m’a semblé être l’étape suivante naturelle. Franchement, j’adore produire des beats plus que tout. Parfois, je me dis que les sons à eux seuls peuvent raconter une histoire avec encore plus de force que des paroles. C’est comme pour la musique classique, on la ressent, tout simplement. On ressent le sens de chaque mouvement, même sans même prononcer un seul mot. C’est ce genre de beauté que je recherche quand je produis.

– Tu es ce qu’on appelle aujourd’hui une artiste DIY, c’est-à-dire que tu gères ton projet de A à Z, y compris l’édition de tes CD en série très limitée et personnalisée (50 exemplaires). Là encore, l’objectif est d’avoir le contrôle total sur ta musique et aussi sur les à-côtés, même s’ils peuvent vite devenir envahissants ? 

Eh bien, je bénéficie de l’aide de VCM Management, que j’ai cofondé, mais tous mes projets ont été créés et sont gérés par moi-même avec l’aide et le soutien d’autres personnes plus récemment. C’est vraiment agréable de commencer à constituer une équipe. Je ne veux pas avoir le contrôle total de ma carrière. La seule chose qui m’importe vraiment, c’est l’art en lui-même, c’est-à-dire ma créativité, ma vision et la propriété de cette créativité. Ni plus, ni moins. La logistique, les ventes et le côté commercial ne sont pas quelque chose que j’apprécie du tout. Mais c’est un peu le fardeau nécessaire pour être une artiste indépendante. Ce n’était pas prévu et c’est arrivé comme ça après avoir eu affaire à de nombreux labels et agences américaines qui ont essayé de me posséder, de me remodeler et de me mouler selon leur idée du ‘mainstream’. Cela me semblait inutile. Pour moi, ce n’était jamais une question de célébrité instantanée ou d’argent, c’était toujours une question de métier. Dans un monde idéal, j’aurais une équipe complète qui gérerait tout ce bruit de fond, afin que je puisse me concentrer uniquement sur la musique.

– D’ailleurs, pour rester sur ce premier EP, « Voyager », il continent un morceau inédit de huit minutes, qui n’est disponible que sur l’édition CD. Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus, car « F.R.I.E.N.D.Z.O.N.E. » est une chanson aussi longue qu’intimiste, et elle a quelque chose d’assez intriguant ?

Oui, « Friends », initialement intitulée « F.R.I.E.N.D.Z.O.N.E. », est disponible uniquement sur l’édition CD de « Voyager ». C’est un extrait brut d’une chanson que j’ai composée il y a des années, après avoir traversé le chagrin et la spirale émotionnelle d’une relation amoureuse. J4avais eu l’impression que tout se passait bien… Quand soudain, j’ai entendu : « Soyons juste amis ». Je me souviens avoir été complètement anéantie, me demandant ce qui n’allait pas. Je n’avais plus de réponses. Mais maintenant que je suis un peu plus âgée et que j’en ai largement dépassé tout ça, je réalise que c’était parce que je ne lui avais pas donné ce qu’il voulait. Je n’arrêtais pas de dire non. Non pas parce que je m’en fichais, mais parce que je voulais d’abord lui faire confiance, le connaître vraiment. Je voulais qu’on commence comme… des amis. Il en a eu marre, a couché avec quelqu’un d’autre, il a appelé ça une ‘relation’, et il est revenu me dire qu’on devrait juste être amis. (Rires) Et bien sûr, genre un mois plus tard, il m’a fait chier, me disant que je lui manquais, qu’il regrettait tout ça… Les conneries habituelles. Je l’ai bloqué. Je lui ai donné une chance qu’il ne méritait pas et je me suis sentie brisée. Je me suis demandé si j’étais digne de tout ça… juste à cause d’un mec. Sérieux ? Mais bon, de ce bordel est née une chanson de près de neuf minutes, qui a fini sur un EP, aujourd’hui épuisé. Du coup, il n’est plus qu’une note de bas de page dans ma discographie.

– Pour ceux qui, comme moi, ne sont pas sur TikTok, ta chanson « SelfCare » et même « Season Of The Witch » sont carrément devenues virales sur la plateforme. Tout d’abord, est-ce que tu t’y attendais et est-ce que ce genre de procédé va, selon toi, devenir la norme pour les artistes émergeants, plutôt que le circuit traditionnel ? A moins que tu ne le vois juste comme une sorte de tremplin ?

Je ne m’attendais vraiment pas à ce que ça devienne viral. Ça m’a semblé complètement incroyable, surtout en tant qu’artiste indépendante sans contrat. D’habitude, ce genre de viralité est réservé aux artistes soutenus par des majors. J’espère que davantage d’artistes émergents auront ce genre de moments, mais honnêtement, depuis que « SelfCare » et « Season Of The Witch » ont commencé à gagner en popularité, on dirait que TikTok privilégie davantage les artistes signés. Bizarrement, « SelfCare » n’affiche plus les statistiques de mes vidéos dans mon onglet ‘musique’, ce qui est dommage. On discute beaucoup avec eux là-dessus depuis des mois et toujours pas de solution. Je ne veux pas croire que c’est parce que les labels poussent les artistes indépendants comme moi hors des projecteurs pour promouvoir les leurs, mais… c’est difficile de ne pas y penser.

Enfin, devenir ‘viral’ n’était pas ce qui comptait le plus pour moi. Ce qui comptait avant tout, c’était de voir le chemin parcouru : tout ce qu’on peut faire toute seule, sans suivre les tendances et sans label. Ça faisait du bien. Je ne suis pas dans un esprit de compétition, pas du genre ‘Oh, cet artiste signé a eu tant de vues de ses vidéos et moi tel chiffre…’. Je ne suis pas du genre à comparer. Ce qui m’a vraiment touché, c’est de voir autant de gens s’identifier à ma chanson. Les gens l’utilisent pour créer des vêtements, peindre, parler de ce qui leur tient à cœur, ou simplement pour vibrer avec, et c’est ça qui compte. Cet effet d’entraînement créatif compte bien plus pour moi que les chiffres.

– Cependant, j’imagine que la scène reste le principal objectif pour toi. Alors, justement, lorsqu’on est une one-woman-band comme toi, comment t’organise-t-on en scène ? Est-ce que tu fais appel à d’autres musiciens pour t’accompagner ? 

(Rires) Je repense à l’époque où j’étais une vraie femme-orchestre sur scène, et waouh !, c’était énorme. Une guitare double-manche de 13 kg attachée sur mes épaules, un clavier sur le côté que j’avais du mal à atteindre et une loop station à mes pieds, qui refusait parfois de coopérer, un micro et la pression de chanter en plus. Terminé ! Parfois, la loop station plantait, ou le technicien-son avait des difficultés avec mon installation et c’était à moi de résoudre le problème en temps réel. J’adorais ce défi, mais c’était vraiment stressant.

Je suis vraiment reconnaissante de pouvoir maintenant m’entourer d’autres musiciens, à savoir généralement un bassiste, un guitariste et un batteur. Ça me soulage énormément et me permet de me concentrer davantage sur le chant, la guitare, parfois le clavier et plus simplement sur la scène. Je peux bouger, sauter, interagir avec le public… ce qui était impossible avec cet énorme double-manche. Ces derniers temps, je réserve les formations solo aux moments créatifs en ligne ou lorsque l’ambiance l’exige. J’intégrerai certainement quelques éléments de ce genre à mes prochaines tournées, mais rien de comparable à l’équipement complet que j’avais l’habitude de trimballer. J’ai gagné ma liberté et ma colonne vertébrale me remercie ! (Sourires)

– Pour rester sur les instruments, on te connait donc pour arborer, et jouer, d’une guitare double-manche signée Eastwood Guitars, et qui pèse tout de même 13kg ! Comment l’as-tu apprivoisé et qu’est-ce que cela demande en termes d’anticipation artistique pour gérer les riffs de la guitare, tout en maintenant le rythme de la basse ?

Je ne dirais pas que je la maîtrise parfaitement. Je ne pense d’ailleurs pas maîtriser aucun des instruments que je joue. J’aime à croire que j’apprends toujours quelque chose de nouveau à chaque fois que j’en prends un. Mais cette double-manche ! Honnêtement, ce n’est pas aussi difficile qu’on pourrait le croire, si l’on joue déjà de la guitare et de la basse. Le principal défi est de passer de l’un à l’autre en temps réel, surtout si l’on fait des boucles et que l’on essaie de placer une partie sur un temps ou une mesure spécifique. Ce genre de timing demande beaucoup de concentration. Et puis, le poids en général aussi. Cet engin est incroyablement lourd, si on reste debout trop longtemps. Je ne le répéterai jamais assez ! (Rires)

– Parlons un peu de ton univers musical. Il a une base Blues, Rock et Soul, des tonalités très 70’s et psychédéliques et les références à Prince notamment, mais aussi à Jimmy Page, sont perceptibles. Tout cela se fond dans un son très personnel. Est-ce que, justement, tu as facilement et rapidement trouvé ton empreinte sonore, ta façon de te démarquer des autres artistes ?

Ouais, ça m’a semblé naturel. Je n’ai pas réfléchi à tout, ni fait de grande réunion avec ma famille pour dire : ‘bon, il est temps de créer mon son !’ C’est juste… comme ça. Comme mon nom de scène, c’est juste mon surnom et mon nom de famille. Ce que je suis en tant qu’artiste est exactement qui je suis en tant que personne. Mais ça n’a pas toujours été comme ça. Plus jeune, j’avais peur d’être moi-même, peur de m’habiller comme je le voulais vraiment, peur d’être honnête avec moi-même. J’essayais sans cesse de me faire plus petite pour rentrer dans ce qui me semblait plus ‘acceptable’. Ensuite, je me suis enfin autorisée à être ce que je suis vraiment. Maintenant, je m’habille sur scène comme en dehors, sauf si je suis particulièrement paresseuse. J’accompagne ma mère au supermarché en pantalon patte d’éléphant, chemisier à volants et autres. Ce n’est pas un costume. C’est moi. Ne plus être moi-même depuis si longtemps, c’était presque comme vivre dans la peau d’une personne complètement différente. Mais maintenant, je me réveille en BELLA MOULDEN, et je me couche en BELLA MOULDEN. C’est tout. Pas de changement, pas de masque. Juste moi.

– On a parlé de ta musique, mais pas de ton chant. Là encore, est-ce que c’est venu de manière assez naturelle, ou as-tu été inspirée par certains modèles et je pense aux chanteuses Soul, évidemment ?

Oui, chanter m’est venu assez naturellement. J’ai suivi six mois de cours de piano classique et de chant à l’âge de neuf ans, mais on a tellement déménagé que j’en ai eu marre de changer constamment de professeur. J’ai donc commencé à apprendre en autodidacte. Ça me rappelle un peu comment on commence à écrire à l’école. On vous apprend à former les lettres et, avec le temps, votre écriture devient une entité unique et personnelle. C’était pareil avec ma voix. J’ai commencé par les bases, puis je l’ai laissée évoluer au fil de mes explorations. J’ai été profondément inspirée par des artistes comme Adèle, Amy Winehouse, Etta James, Janis Joplin et Big Mama Thornton. La Soul, le Blues et le courage : cette brutalité m’a vraiment attirée. Adèle restera toujours ma préférée. Sa maîtrise, son émotion… Elle a changé la donne, selon moi.

– Un mot enfin sur ta venue en Europe à la rentrée avec une halte à Paris le 9 septembre à ‘La Péniche Antipode’. J’imagine que c’est une belle aventure pour toi ? Comment est-ce que tu l’appréhendes ? Tu es également suivi par des fans européens et notamment français ?

Oui ! J’ai des fans en France, dans toute l’Union européenne et au Royaume-Uni et j’ai vraiment hâte de les rencontrer enfin. Ce voyage me semble être une étape importante dans ma carrière et je suis plus que ravie. Je me suis entraînée, j’ai travaillé mon endurance et, surtout, j’ai répété mes sets avec toutes les chaussures sophistiquées que je compte porter. (Rires) Plus sérieusement, j’ai tellement hâte de partir en tournée en Europe et au Royaume-Uni. Je ressens toujours beaucoup d’amour de la part de ces deux pays et c’est un tel plaisir de travailler avec des gens à l’étranger et de rencontrer mes fans en personne. Tous mes remerciements vont à eux. Ils ont été là pour moi d’une manière que je ne prendrai jamais pour acquise. Et puis… Je n’ai jamais joué sur un bateau auparavant, alors je vais certainement rayer ça de ma liste des choses à faire. (Rires) Enfin, merci beaucoup d’avoir pris le temps de t’intéresser sincèrement à ce que je fais. C’est très important et j’espère tous vous voir en septembre ! (Sourires)

La musique de BELLA MOULDEN est disponible sur toutes les plateformes et sur le site de l’artiste : www.bellamoulden.com

Elle sera donc le 9 septembre prochain en concert à Paris et la billetterie est déjà ouverte : www.helloasso.com/associations/tadam-records/evenements/concert-bella-moulden-et-the-wealthy-hobos

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Contemporary Blues Delta Blues

The Kerry Kearney Band : psychedelta touch

Multi-récompensé et incroyable ‘slideman’ devant l’éternel, KERRY KEARNEY revient avec son BAND pour un disque entraînant et chaleureux où il s’est entouré d’un groupe redoutable. En véritable bluesman, il partage ici encore sa musique, celle d’autres aussi, dans une harmonie musicale renversante. Le chant, l’harmonica, les claviers et ses guitares prennent un relief incroyable à travers un Blues contemporain, souvent Rock et toujours sensible à vous donner la chair de poule. « The Kerry Kearney Band » est un moment de bonheur partagé.

THE KERRY KEARNEY BAND

« The Kerry Kearney Band »

(Paradise Records)

Incontournable maître de la slide basé à Long Island, KERRY KEARNEY est tombé très tôt dans la marmite du Blues et n’a pas tardé ensuite à partager la scène avec les plus grands, dans des styles d’ailleurs souvent différents, allant du groupe de Marty Balin, l’ancien chanteur du Jefferson Airplane au Allman Brothers Band, ou Dickey Betts et les Blues Brothers. Autant dire qu’il est à l’aise dans tous les registres et que rien ne lui résiste. Et sur ce nouvel opus, l’éventail est une fois encore large et toujours d’une classe resplendissante.

Entouré d’un groupe de haut vol, constitué de Jack Licitra (claviers), Gerry Sorrentino (basse), Mario Staiano (batterie) et Nydia Mata (congas, percussions), le KERRY KEARNEY BAND a franchement belle allure, d’autant que l’Américain accueille des invités de choix : Mark Mancini (claviers), Bill Lifford (harmonica), Camryn Quinlan (chant) et Jeff Namoli (percussions). De son côté, il dirige l’ensemble à la guitare électrique, acoustique et slide, à la mandoline et au chant de sa voix rugueuse. De quoi fondre sur place…

Pour cet album éponyme, il se présente avec sept compositions originales et trois reprises de Bobby Rush, Warren Zevon et même Bob Dylan avec « Meet Me In The Morning ». Et si « The Kerry Kearney Band » se montre d’un éclectisme volcanique, la ligne directrice est claire : prendre et donner du plaisir ! On se délecte de « Harder To Breathe » et « Santa’s Got A Brand –New Bag » chantés par Camryn Quinlan, décidemment somptueuse. Et que dire du virevoltant jeu de KERRY KEARNEY, qui enflamme cette belle réalisation ? Irrésistible !

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Classic Rock France Hard 70's Rock 70's Southern Blues Rock

Emerald Moon : céleste [Interview]

Arrivé il y a quelques jours dans les bacs, le premier album d’EMERALD MOON est LA sensation Classic Rock française de l’année. Il faut aussi avouer que le quintet compte dans ses rangs des musiciens chevronnés et bouillonnant d’idées. Guidés par leur chanteuse, les deux guitaristes multiplient les combinaisons sur une rythmique groovy à souhait et ce très bon « The Sky’s The Limit » vous renvoie avec bonheur dans les 70’s sur une production très actuelle et organique. Le fondateur et guitariste, Fabrice Dutour, revient sur la création du groupe, sa façon de travailler et surtout sur cette musique qui lui tient tellement à cœur.

– Au regard de vos parcours respectifs, j’imagine que vos chemins ont dû se croiser assez souvent au gré de vos projets. Quel a été le déclic pour monter EMERALD MOON et surtout pour en définir le style ?

Pour ma part, je joue déjà avec Laurent (Falso, batterie – NDR) et Vanessa (Di Mauro, chant – NDR) dans deux projets différents. J’ai eu le bonheur de partager l’aventure ‘United Guitars’ avec François (C. Delacoudre, basse – NDR), dans laquelle figurait également Michaal (Benjelloun, guitare – NDR). Tous les deux ont d’ailleurs eu plusieurs fois l’occasion de partager la scène, lorsque les chemins de Gaëlle Buswel, avec qui joue Michaal et de Laura Cox, avec qui jouait François, étaient amenés à se croiser. Vanessa et Laurent ne connaissaient donc pas Michaal et François. J’ai été l’entremetteur… Pour revenir à la genèse du projet EMERALD MOON, cela s’est passé en 2021, après l’enregistrement du « Volume 2 » d’’United Guitars’. Nous venions d’enregistrer un titre avec Fred Chapellier, le courant est vite passé et l’envie était commune. C’était aussi une évidence pour nous que François était le bassiste idéal. Yann Coste serait donc le batteur. Chacun de notre côté, Fred et moi avons composé plusieurs titres pour ce nouveau groupe, qui s’appellait alors Silverheads et que nous envisagions, logiquement au vu de nos influences, de faire sonner dans un style Classic Rock. Après plusieurs mois à la recherche d’un chanteur, j’ai proposé Vanessa, qui a fait l’unanimité. Nous devions enregistrer en mai 2022. Mais à quelques semaines du début des sessions, l’emploi du temps de Fred est bousculé en raison de sa collaboration à la tournée des Dutronc. L’album ne se s’est donc jamais ensemble. Mais début 2024, Vanessa, François et moi avons eu envie de faire aboutir ces titres que j’avais composés et sur lesquels Vanessa avait écrit des textes. J’avais quelques idées en tête pour cette place de guitariste et Michaal était mon choix numéro un, il a tout de suite accepté de rejoindre l’aventure. Et Laurent s’est imposé à moi comme une évidence également et il s’est joint à nous.

– Vous avez tous un CV conséquent et une connaissance affûtée du métier. Comment est-ce que cela s’organise pour la composition des morceaux et l’écriture des textes ? Chacun apporte-t-il ses propres idées, ou faites-vous confiance à certains d’entre-vous en particulier ? Je pense au noyau dur ayant évolué ensemble sur ‘United Guitars’ notamment…  

L’organisation, pour cet album, a été en partie dictée par nos emplois du temps respectifs et la distance qui nous sépare. Je dis en partie, car j’ai depuis longtemps l’habitude de composer ainsi, c’est-à-dire que je maquette l’ensemble du titre avec la batterie, la basse et les deux guitares. Les structures sont figées, les parties de  guitares harmonisées également mais, évidemment, la réinterprétation des lignes de chaque instrument est libre pour chacun. J’avais déjà six titres pour le projet initial, j’en ai composé cinq autres avant l’enregistrement de l’album et Michaal a également amené une composition. Après, toutes les idées et les contributions ont été les bienvenues.

– On vous avait découvert en octobre dernier avec « Phase One », un premier EP, presque de présentation finalement. Pourquoi le choix du format court ? C’était faute de temps en raison d’emplois du temps chargés, ou plutôt une manière de prendre la température et de voir quel en serait l’accueil, d’autant que l’on retrouve les quatre morceaux sur l’album ? 

Question très intéressante. Pour tout te dire, cet EP est la restitution de notre première session de répétition. Il n’y avait pas, initialement, l’idée de sortir quelque chose, nous enregistrions juste pour pouvoir prendre du recul. Il faut dire aussi que nous répétions chez Laurent qui, en plus d’être batteur, est plutôt très bon dans le domaine du son. Son local est équipé et il a coutume d’enregistrer toutes les répétions qui se font chez lui. Nous nous étions donc fixés quatre titres, trois compos et une reprise, « Ramble On » de Led Zeppelin, et nous nous sommes retrouvés pendant deux jours. L’objectif était juste d’aboutir un titre, « What You’re Told » et de le clipper, histoire d’avoir la possibilité de démarrer l’aventure. A ce moment-là, le groupe n’avait même pas de nom. Et puis, à la réécoute de cette session, on se dit que ça sonnait plutôt bien et cela confirmait la sensation de cohésion que nous avons tous ressentie dès les premières notes. Et de là a germé l’idée de sortir ces quatre titres. Vu l’esthétique, le format vinyle s’imposait aussi. Et tout cela a permis, effectivement, d’accélérer la naissance d’EMERALD MOON. 

– D’ailleurs, avez-vous apporté des modifications sur ces morceaux entre l’EP et l’album ?

Déjà, il était évident pour moi que ces trois titres faisaient partie d’un tout. Ils devaient figurer sur l’album. Sur la version EP, ils sont joués live, les amplis sont dans la même pièce que la batterie, il n’y a pas d’overdub ou de guitares additionnelles. Pour l’album, ils ont été totalement réenregistrés, au propre, avec plus d’arrangements, notamment sur les parties de guitares. Le fait de garder ces trois titres a également eu une incidence sur l’écriture. Il fallait que les personnes qui avaient déjà découvert ces trois premières compositions aient de la matière avec la sortie de l’album. Avant l’EP, l’idée était plutôt un album de neuf ou dix morceaux, « Phase One » a changé la donne et nous voilà avec 12 titres.

– Lorsque l’on voit par où vous êtes tous passés, le côté Rock et bluesy semble une évidence. EMERALD MOON présente donc un Classic Rock très 70’s dans l’esprit, mais pas forcément dans le son. On sent aussi beaucoup de plaisir entre vous en vous écoutant. C’est ce qui vous guide depuis le départ ?

Le plaisir est ce qui nous guide dans notre métier de musicien. C’est une chance infinie de vivre de notre passion. C’est déjà vrai lorsque l’on joue la musique des autres, c’est encore plus intense lorsque l’on défend ses propres chansons. Pour ce qui est de nos influences et nos parcours, nous avons beaucoup de choses en commun comme des racines Blues et le Rock/Hard Rock Seventies. On a voulu restituer ça avec un son plus contemporain, sans aller trop loin, de sorte à garder la dynamique, le grain et les nuances propres à ce style. 

– D’ailleurs, même si votre registre retrouve des couleurs depuis quelques temps maintenant, est-ce qu’EMERALD MOON est là aussi pour palier un certain manque, car il y a vraiment un public en demande concernant le Classic Rock notamment ?

Il n’y a pas de calcul sur le bon endroit ou le bon moment. Il y a juste l’envie de faire ce que l’on aime faire et que l’on fait chacun depuis longtemps : Michaal avec Gaëlle Buswel, François avec Laura Cox, Laurent avec Jack Bon et moi avec Back Roads. Et surtout, de le faire ensemble. C’est une magnifique équipe et il nous tarde d’être sur scène tous les cinq.

– Vous êtes en autoproduction, ce qui n’est pas franchement une surprise étant donné que vous êtes tous rompus à l’exercice du studio et que trouver votre son n’a dû pas être très compliqué. Est-ce un avantage aussi de pouvoir mener votre projet vous-mêmes, et avez-vous tout de même fait appel à des personnes extérieures pour l’enregistrement, le mix ou le mastering ?

Il est certain, comme je te le disais tout à l’heure, que le fait que Laurent ait les compétences et le matériel pour enregistrer et mixer un album est un atout essentiel. On a pu avancer à notre rythme. De la même manière, Michaal et François peuvent gérer leurs prises chez eux. On peut travailler ensemble ou à distance, c’est très confortable. Et pour ce qui est de la production et des choix artistiques, on avait déjà des idées, puis le temps et les propositions ont affiné tout cela. On a passé, Laurent et moi, le temps nécessaire pour aboutir les titres comme nous le souhaitions. 

– Avec Michaal Benjelloun, vous formez un beau duo de guitaristes. L’esprit est très zeppelinien avec des teintes Blues et Southern. Comment est-ce que deux musiciens aussi aguerris se partagent-ils les rôles, même s’il y a aussi de beaux passages de twin-guitares ?

De manière très naturelle. Déjà, dans l’écriture, il y avait beaucoup de place laissée aux guitares. Et c’est logique, puisqu’initialement, c’est un projet de guitaristes… On aborde un titre avec comme question : ‘tu préfères faire le premier ou le deuxième solo ?’. Après, tout est libre, les idées d’arrangements sur les parties rythmiques, le choix des guitares et des sons. On s’écoute, l’idée de l’un fait rebondir l’autre, on cherche toujours à se compléter et à mettre en valeur nos qualités respectives.

– Est-ce que, lorsque l’on joue et compose du Classic Rock comme EMERALD MOON, l’idée est de toujours faire évoluer le style en y apportant quelques touches modernes, ou plus simplement juste de se faire plaisir ? Car cela impliquerait de fait une certaine finitude du registre… 

Je me souviens d’une chronique d’album qui se concluait par cette phrase : « Ils n’ont pas inventé la poudre, mais ils savent la faire parler ». C’est une très belle formule. Quand je compose, il m’arrive de faire des citations volontairement appuyées comme pour « What You’re Told », qui sonne très Thin Lizzy. Il arrive également que l’on me dise que telle composition est inspirée de tel titre, alors que ce n’était pas une piste de départ consciente… Il est évident que nous sommes imbibés de toutes nos écoutes et que ces influences transpirent fatalement dans notre écriture. Je n’ai absolument pas l’idée de révolutionner le style, mais j’essaie de m’appliquer, lorsque je compose un titre à lui donner une première lecture fluide. J’essaie également de le remplir de petites surprises à travers les arrangements, la réexposition des thèmes, la structure et un ensemble de choses qui fait que la première impression d’évidence évolue au fur à mesure des écoutes. Parce que l’idée est là : façonner et penser notre musique dans l’esprit de celle que nous écoutions il y a trente ans, lorsque les moyens technologiques ne nous permettaient pas d’accéder à tous les albums de tous les groupes en un clic. On avait, en gros, un album par mois, on prenait le temps de l’écouter et d’en extraire la totalité des subtilités. Si les gens qui s’intéressent à notre album nous font l’honneur de prendre le temps de se l’approprier, je veux qu’ils puissent découvrir des choses au fil des écoutes. 

– Enfin, avec un tel premier album, on attend forcément une suite à cette belle aventure. Est-ce que vous vous projetez déjà dans l’avenir avec des concerts à venir, par exemple, et/ou déjà le projet d’un deuxième album en tête ? Comme vous êtes tous les cinq engagés avec dans d’autres formations, j’espère qu’EMERALD MOON n’est pas un one-shot…  

L’album est sorti le 13 juin, via Inouïe Distribution, et nous étions sur scène ce jour-là, ainsi que les trois jours qui ont suivi. Mais nos emplois du temps respectifs ont effectivement limité les possibilités de concerts pour 2025. On travaille sur 2026 pour pouvoir mieux s’organiser et avoir plus de visibilité. Et effectivement, l’idée du deuxième album est déjà là.

Le premier album d’EMERALD MOON, « The Sky’s The Limit », est disponible chez Inouïe Distribution.

Photos : Christian Viala (3) et Richard Guilhermet (4).

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Blues Rock Contemporary Blues

Larry McCray : somptueux

Sur une production exceptionnelle et des morceaux d’une sincérité sans faille, LARRY McCRAY se présente avec probablement son meilleur album. Accompagné d’un groupe cinq étoiles, ses nouvelles compositions rayonnent de toutes parts et son feeling semble même exponentiel. « Heartbreak City » est l’exemple parfait de la version contemporaine d’un Blues qui traverse le temps avec élégance, panache et authenticité. Sans aucun doute, l’une des meilleures réalisations de l’année.

LARRY McCRAY

« Heartbreak City »

(KTBA Records)

Les musiciens comme LARRY McCRAY sont rares. Guitariste virtuose, chanteur habité et songwriter accompli, il mène une carrière somptueuse, faite aussi de combats personnels, depuis les années 90. Aux avant-gardes du Blues Rock moderne, il a su au fil du temps le teinter d’une Soul Vintage et d’un esprit Southern qui le rend aujourd’hui intemporel, pour ne pas dire hors du temps. Intronisé l’an dernier au Michigan Rock And Roll Hall Of Fame, il atteint des sommets de classe avec « Heartbreak City », un disque parfait en tous points.

Signé sur KTBA Records, ce nouvel opus est d’ailleurs produit par Joe Bonamassa lui-même et Josh Smith, enregistré au célèbre Sunset Sound d’Hollywood et mixé par Alan Hertz, on peut difficilement imaginé mieux, mais il fallait bien ça pour mettre en relief et en lumière la fluidité et l’instinctif jeu du natif de l’Arkansas. LARRY McCRAY assume clairement son héritage et se montre à la hauteur de ses modèles, à savoir BB King, Luther Allison et Little Milton entre autres, en poursuivant de la plus des manières leur héritage.

Sur un groove hypnotique, l’Américain peut compter sur les chœurs envoûtants de Jade Macrae et Dannielle De Andrea qui apportent une délicate touche Gospel. Le bluesman brille littéralement sur des chansons assez intimes, et tout en émotion. LARRY McCRAY a même invité les guitares de Bonamassa sur « I Know What I’ve Done », et celles de Kirk Fletcher et Josh Smith sur « Keep On Loving My Baby ». De « Try To Be A Good Man », à « Bye Bye Blues », en passant par « Hangman » ou « Crazy World », c’est tout simplement somptueux !

Photo : Curtis Knapp

Retrouvez la chronique de son précédent album :

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Hard Blues

The Dead Daisies : reloaded Blues

Chaleureux, frais et spontané, « Lookin’ For Trouble » vient s’inscrire dans les très bons albums de Hard Blues. Pourtant, le quintet américano-australien livre un disque de reprises un peu éloigné de ce qu’il propose habituellement. Seul l’actuel line-up de THE DEAD DAISIES était en mesure de produire un tel album et il l’a fait avec la forme et sans dénaturer le fond. La sensation organique qui s’en dégage est tout simplement radieuse. Un entremet qui fait un bien fou et qui remet pas mal de choses à leur place.

THE DEAD DAISIES

« Lookin’ For Trouble »

(Malaco Records)

THE DEAD DAISIES a de la suite dans les idées, ou plutôt son producteur, Marti Frederiksen. Il y a quelques mois, le groupe avait investi le mythique Fame Studio de Muscle Shoals en Alabama pour y enregistrer « Light ‘Em Up », paru en septembre dernier. Et avec ce genre de musiciens, les surprises ne manquent jamais. Alors le soir, pour se détendre, ils jouaient de vieux standards de Blues (l’endroit s’y prête tellement !), et l’idée de capter ses sessions n’a pas été longue à germer. Nous voici donc avec « Lookin’ For Trouble » entre les mains. 

Une formation de ce calibre possède évidemment la culture nécessaire et, même si la majorité des morceaux fait partie du patrimoine du genre et a été reprise par beaucoup d’autres, c’est mal connaître la créativité de nos protagonistes. THE DEAD DAISIES s’est littéralement réapproprié les chansons en les réarrangeant de bien belle manière. Sans être issu de son propre répertoire, on retrouve ici une identité et une patte immédiatement identifiable. Quant au plaisir, on le perçoit à chaque note et sur chaque accord.

Alors quand Muddy Waters, Freddie King, Robert Johnson, BB King, Howlin’ Wolf ou Albert King passent au filtre de David Lowy (guitare), John Corabi (chant), Doug Aldrich (guitare), Michael Devin (basse) et Sarah Tomek (batterie), on atteint des sommets de classe et d’élégance. THE DEAD DAISIES prend de la hauteur et la cover de « Black Betty » par Ram Jam, par exemple, devient franchement risible en comparaison de celle-ci. Le Blues est plus éternel que jamais et « Lookin’ For Trouble » témoigne d’une incroyable vitalité. Une leçon !

Retrouvez les précédentes chroniques des albums de THE DEAD DAISIES :

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Alt-Country Blues Rock International Soul

Samantha Fish : bluesy adventures [Interview]

Affichant désormais neuf albums à son actif, SAMANTHA FISH n’en finit plus de surprendre en empruntant des voies la menant là où on ne l’attend pas. Plus éclectique que jamais, elle se présente avec « Paper Doll », un disque dans lequel son fougueux jeu de guitare fait toujours autant d’étincelles, mais surtout avec une confiance vocale aussi étonnante qu’attendue. S’il est toujours question d’un Blues très Rock, son vagabondage musical nous mène cette fois aussi dans des contrées Alt-Country, Folk et Soul. Entretien avec une artiste qui ne lève que très rarement le pied, et qui s’épanouit en musique.

– Notre dernière interview date de la sortie de « Death Wish Blues », ton album en duo avec Jesse Dayton. Quel souvenir en gardes-tu et surtout de la tournée qui a suivi ? Tes fans ont-ils été un peu surpris ?

J’ai beaucoup appris de cette expérience. Travailler avec Jesse et notre producteur, Jon Spencer, nous a permis de comprendre comment nous démarquer tout en nous soutenant mutuellement. C’est une dynamique intéressante quand on se produit en duo. Jesse et moi avons tous les deux beaucoup travaillé sur cet album et nos concerts étaient vraiment passionnants. Je pense que nous sommes tous les deux connus pour nos styles musicaux particuliers, donc c’était une collaboration un peu inattendue. Cette expérience a réuni de nombreux fans de musique différents. Lorsque nous avons reçu une nomination aux Grammy, nous avons été à la fois surpris et touchés. C’était une expérience formidable à tous les niveaux et quelque chose qui, je le sais, a changé nos vies.

– Ton dernier album studio et en solo « Faster », remonte déjà à quatre ans. Quand as-tu vraiment commencé à te plonger dans l’écriture de « Paper Doll » ? Avais-tu déjà une trame en tête au moment de « Death Wish Blues » ?

Je savais qu’après « Death Wish Blues », j’aurais besoin d’un album qui mette vraiment en valeur mes ‘super-pouvoirs’. Je me pousse constamment à me dépasser, mais j’avais l’impression que celui-ci marquait un retour en forme, d’une certaine manière. En écrivant, les paroles se sont imposées naturellement. J’écris sur ce que je connais, mais j’aime aussi collaborer et écrire avec d’autres. Je voulais créer un album avec des sons de guitare vraiment excellents. Je voulais que le Blues soit la racine et le fondement de tout l’album, mais je voulais aussi m’aventurer dans des contrées captivantes et dépasser les frontières des genres. Et puis, je voulais aussi mettre en valeur mon chant. Mais avant tout, l’essentiel dans les chansons consiste à avoir de bonnes accroches et de belles mélodies.

– On le sait, tu n’es jamais aussi bien que sur scène. Tu es même l’une des rares artistes de Blues à te produire autant. C’est assez rare de donner des concerts de manière aussi soutenue. C’est de là que vient ta créativité ? C’est une manière d’entretenir ton flux artistique ?

Parfois, des idées me viennent sur scène. Je crois que ma méthode personnelle d’écriture la plus efficace est de me promener en voiture. Il suffit de laisser sa concentration vagabonder. Des mélodies me viennent à l’esprit par moments, et il faut les capturer à l’instant où elles sont présentes dans ma tête.

– D’ailleurs, « Paper Doll » a été enregistré en pleine tournée, à la fois à Austin au Texas et à Los Angeles en Californie. Tu n’avais pas envie de te donner un peu de répits et te concentrer sur la scène ? D’attendre la fin des concerts et de te poser plus tranquillement en studio ensuite ?

Bien sûr, mais notre emploi du temps ne le permettait pas. Je savais que je voulais enregistrer un nouvel album. Il s’agissait donc simplement de faire le nécessaire pour y parvenir. Le fait de faire les choses comme il fallait le faire, c’est-à-dire par séquence, a contribué à donner à l’album un côté live et une énergie particulière. Je pense donc que cela a joué en notre faveur.

– On peut aussi y voir une certaine continuité de cette tournée, dans l’esprit en tout cas, avec beaucoup d’énergie et surtout avec les musiciens qui t’accompagnaient à ce moment-là sur scène. L’idée était-elle de garder cette vibration très live ?

Oui et c’est comme ça que cela s’est passé. Le groupe de tournée que j’accompagne est phénoménal, donc c’était agréable d’explorer leur créativité. Je pense que le temps passé sur scène nous a permis de nous entendre assez rapidement.

– Un mot aussi sur la production signée Bobby Harlow de Detroit et avec la collaboration ponctuelle de Mick Collins de The Gories, tous deux issus du Garage Rock. On vous retrouve d’ailleurs en duo sur « Rusty Razor ». Après Jesse Dayton, tu t’aventures à nouveau hors du monde du Blues. C’est une façon aussi de quitter une certaine zone de confort ?

Je pense que tout ce que je fais est ancré dans le Blues. C’est comme ça que j’ai appris à jouer et à chanter. Chaque chanson commence par un hommage à un riff ou à une idée qui vient de là. C’est agréable aussi de pouvoir intégrer d’autres styles pour enrichir ma vision du Blues. Je me sens à l’aise pour créer ma propre version des choses. Je veux écrire des chansons qui définissent mon son, tout en étant ouverte à d’autres influences.

– Et il y a aussi la chanson « Sweet Southern Sounds » que tu as composé avec ton fougueux voisin de la Nouvelle Orleans, Anders Osborne. C’est un morceau incroyablement intense et chaleureux. Vous n’avez pas eu l’envie de le chanter ensemble ? Là encore, cela aurait été un beau duo…

Anders est génial. On a écrit cette chanson ensemble en sachant qu’elle finirait sur mon nouvel album. D’ailleurs, je ne pense pas qu’il ait eu l’intention de la chanter. Mais je suis sûre qu’on le fera ensemble un jour sur scène.

– Vocalement, on te sent très libre et forte à la fois. Tu as dit avoir trouvé ta voix en studio. Que voulais-tu dire ? Que c’est exercice différent de celui de la scène, et qui demande peut-être un placement plus précis et un peu opposé aux concerts, où l’énergie prime ?

Les performances live ont un avantage : elles permettent d’être plus libre. Je cherche à créer une connexion avec le public, donc je ne me concentre pas tant sur la précision et la perfection. Le studio peut être complexe, car il n’y a pas grand-chose à exploiter, si ce n’est sa propre inspiration. Il m’a fallu du temps pour trouver comment me détendre et me concentrer naturellement sur ma voix.

– Musicalement aussi, « Paper Doll » est une fois encore un album très varié, où l’on retrouve ton Blues avec ses côtés Rock et Soul et teinté de Country et de Folk. Justement, est-ce que tu cherches un certain équilibre au moment de la composition, ou c’est seulement ton inspiration qui te guide ?

J’ai parfois une idée en tête quand j’écris une chanson, mais quand on va en studio, quelque chose d’autre prend souvent le dessus. Il faut parfois laisser la chanson se développer toute seule.

– Pour tout le monde, tu es la très électrique guitariste à la cigarbox. Dans quelle mesure cet instrument trouve-t-il sa place dans la composition et dans l’enregistrement de tes morceaux sur ce nouvel album ?

J’essaie de l’intégrer de temps en temps en studio. Mais si ça ne convient pas à la chanson, je ne vais pas l’imposer de force. J’aime bien lui donner une place en concert, mais je ne veux pas qu’un instrument dicte le potentiel d’une chanson. Il faut être ouvert à la nouveauté. J’ai toujours cette idée en tête et je saute sur l’occasion de l’utiliser quand c’est le bon moment.

– Une dernière question plus personnelle pour conclure. Ta sœur Amanda a sorti un très bel album dans un style différent du tien l’année dernière. Evidemment, on imagine qu’une collaboration artistique serait incroyable. Avez-vous déjà évoqué le sujet toutes les deux ?

Amanda et moi avons toujours été assez indépendantes. Je pense qu’étant donné notre âge très proche, il est important pour nous d’être autonomes et libres dans notre musique et nos carrières. Mais peut-être plus tard. Qui sait ? Cela dit, en ce moment, nous aimons nous soutenir mutuellement et faire notre propre musique séparément.

« Paper Doll », le nouvel album de SAMANTHA FISH, est disponible chez Rounder Records.

Photos : Aries Photography (2, 3) et Doug Hardesty (4).

Retrouvez la précédente interview de l’artiste et la chronique de son album avec Jesse Dayton :

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Contemporary Blues

Robin Trower : étincelant

Du haut de ses 80 ans, ROBIN TROWER peut fièrement afficher une carrière hors-norme bâtie sur un répertoire qui frôle l’excellence. Depuis ses débuts avec Procol Harum, puis avec son groupe, le guitariste reste d’une fluidité et d’une précision implacables, servi par un feeling exceptionnel et un sens du groove ravageur. Après quelques problèmes de santé l’an dernier, l’Anglais fait son retour sur scène, ainsi que sur disque avec ce superbe « Come And Find Me ». 

ROBIN TROWER

« Come And Find Me »

(Provogue/Mascot Label Group)

Il nous avait laissé il y a deux ans avec « Joyful Sky », brillant album qu’il partageait avec la chanteuse new-yorkaise Sari Schoor, laquelle offrait un charme et surtout une couleur différente de l’habituel répertoire du bluesman. Une collaboration transatlantique qui reste à ce jour l’un des plus beaux albums de Blues de ses dernières années. C’est seul cette fois, mais avec toujours en main sa célèbre et inséparable Fender Stratocaster, que ROBIN TROWER illumine de toute sa classe « Come And Find Me », merveilleusement accompagné d’un groupe de fidèles. 

Il a enrôlé des compagnons de confiance et l’on retrouve le batteur Chris Taggart, le bassiste américain Glenn Letsch, qui fait son retour auprès du maître sur les morceaux « Tangled Love » et « I Fly Straight To You », ROBIN TROWER jouant comme souvent sur le reste des chansons. Au chant, son ami de longue date Richard Watts enveloppe chaudement et tout en délicatesse les mots toujours très personnels du compositeur… Et quelle voix ! Et puis, cerise sur le gâteau, la britannique Jess Hayes livre une performance incroyable sur le solide « Tangled Love ».

« Come And Find Me » a beau être son 28ème album solo (sauf erreur !) et pourtant ROBIN TROWER conserve cette exigence, tant dans le son que dans la composition. Avec un jeu et un toucher inimitables, il déroule ce nouvel opus avec une telle fraîcheur qu’on en oublierait son âge. Il séduit et percute avec une élégance et une modestie qui forcent le respect («  A Little Bit Of Freedom », « Time Stood Still », « One God Round », et la chanson-titre). Son Blues, à son image d’ailleurs, vit bien et semble même éternel, tant il est porté par une production inscrite dans son temps.

Retrouvez les chroniques de ses deux derniers albums :

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Roots Rock Southern Blues Rock Southern Rock

The Commoners : southern kingdom

Le live est souvent l’épreuve de vérité et un passage obligatoire pour tous les musiciens, au-delà d’un plaisir total et d’un certain aboutissement. L’échange avec son public, une fois gravé, peut être à double-tranchant. Cependant, THE COMMONERS a réalisé de belles captations qui mettent en valeur, en relief et en perspective ce dont il est capable sur scène. L’énergie déployée sur ce « Live In The UK » gomme à elle seule quelques imperfections tout à fait acceptables et carrément pardonnables.

THE COMMONERS

« Live in the UK »

(Gypsy Soul Records)

Même si leurs débuts datent de 2016 avec « No Stranger », les Canadiens ont réellement pris leur envol avec « Find A Better Way », six ans plus tard. Depuis, ils ne cessent de tourner et ont sorti le très bon « Restless » l’année dernière. C’est justement lors de cette venue en Europe, en notamment en Angleterre, qu’ils ont enregistré ce « Live In The UK », fruit de plusieurs concerts. Et c’est vrai que les prestations de THE COMMONERS sont franchement explosives. On y retrouve toute l’énergie et l’enthousiasme de ses disques, le tout en symbiose avec son public.

Alors que le groupe s’apprête justement à fouler à nouveau les planches des salles du Royaume-Uni en élargissant cette fois sa venue en Europe à d’autres pays, ce « Live In The UK » tombe à pic, même s’il ne doit évidement rien au hasard. Passé ces considérations marketing, THE COMMONERS propose neuf morceaux issus de ses deux derniers témoignages et l’on découvre un quintet qui prend toute sa dimension sur scène. Et si l’on connait la précision et le soin apporté en studio, la fougue et l’aspect brut de ses titres sont tout aussi réjouissants.

Sans rien enlever à l’émotion qui transparait du répertoire de la formation de Toronto, son approche scénique est tout autre, et demeure très intéressante. Loin du confort du studio, c’est l’instantanéité de son jeu qui prend ici le dessus avec une sincérité et un côté très instinctif, qui nous ramènent aux fondamentaux de ce Southern Rock très roots. Finalement, c’est la communion avec ses fans qui prend tout son sens, peu importe le style, et de ce côté-là, les Nord-Américains montrent une authenticité qui nous transporte au cœur de la fosse avec un état d’esprit et une attitude hyper-Rock’n’Roll.

Photo : Halukgurer

Retrouvez justement les chroniques des deux derniers albums studio :

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Heavy metal Livre Rock

Des riffs et des bulles [Livres]

Le rapprochement entre la bande dessinée et l’univers du Metal et plus largement du Rock est assez évident et coule même de source. Pour preuve, la qualité des pochettes d’albums, notamment celles datant des années 70/80/90, avant l’arrivée du design à outrance et aujourd’hui de l’IA. Cela dit, les deux mondes sont faits pour s’entendre et se compléter. Les Editions Blueman se sont penchées sur le joyau d’IRON MAIDEN, « Piece Of Mind », tandis que Petit A Petit poursuit sa collection de Docu BD avec SERIAL ROCKERS, narrant les frasques de quelques Rock stars.

IRON MAIDEN / SERIAL ROCKERS

Honneur au plus emblématique groupe de Heavy Metal de tous les temps avec un focus sur un disque qui a autant fait parler qu’il a pu séduire par son audace et sa qualité dès sa sortie en 1983. A l’époque de sa parution, peu de gens imaginait que les Anglais d’IRON MAIDEN entreraient dans la légende avec neuf morceaux qui résonnement toujours, 40 ans plus tard. Présenté sous forme d’histoires courtes, on replonge avec délectation dans ce quatrième album de la ‘Vierge de Fer’ au fil de témoignages d’écrivains, d’artistes et de musiciens, dont Bruce Dickinson d’ailleurs. Chacun y va de son interprétation, laissant libre court à un imaginaire personnel, qui offre d’autres visions de cet opus hors-norme. Un précieux document qui continue de révéler ce chef-d’œuvre et qu’il convient, bien sûr, de parcourir en musique !

IRON MAIDEN, « Piece Of mind », Editions Blueman (152 pages – 20€)

Pour SERIAL ROCKERS, l’éventail est bien plus large. Les Editions Petit A Petit ne se contentent pas d’un seul registre musical, ni d’une même époque. Ce nouveau volume de la désormais incontournable collection Docu BD ravive avec malice et humour les méandres des faits d’armes les plus éloquents et improbables de la scène Rock internationale. Certes, il en manque bien quelques uns à l’appel, mais les présents ne sont pas des moindres et les anecdotes relatées ici en image valent leur pesant d’or. Suivant l’adage inhérent au style, il y est beaucoup question de sexe, d’alcool et de drogue et les nombreux dessinateurs s’en sont données à cœur-joie, en restant tout de même plus soft que la réalité de certains de leurs sujets. D’Ozzy à Bowie en passant par Kiss ou Alice Cooper, ces icones flirtent copieusement avec l’extravagance et l’excès dans ce SERIAL ROCKERS haletant et souvent drôle.

SERIAL ROCKERS, Editons Petit A Petit (120 Pages, 21,60€)

Les points communs ne manquent pas entre les deux ouvrages. Tout d’abord, ils ont été réalisés par des collectifs de dessinateurs, offrant aux visuels beaucoup de diversité à travers des changements d’ambiances constants. Ensuite, que ce soit pour IRON MAIDEN ou la pléthore de musiciens évoqués dans SERIAL ROCKERS, ils nous montrent à quel point ce registre, que l’on dit marginal et confidentiel, fait vivre l’Histoire de la musique depuis des décennies. Enfin, il y a quelques mois les Editions Petit A Petit avaient paru un Docu BD très complet sur un autre monument, du Blues cette fois, à savoir ERIC CLAPTON. De son côté, c’est L’ENFER SELON POPPY qui a été mise en avant par les Editions Blueman dans une bande dessinée aussi hybride que désarmante autour de cette artiste Pop, convertie par opportunisme et avec plus ou moins de réussite au Metal.

ERIC CLAPTON IS GOD, Editions Petit A Petit (128 pages – 24,90€)

L’ENFER SELON POPPY, Editions Blueman (160 pages – 20€)

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Blues Blues Rock Boogie Blues Contemporary Blues Soul Southern Blues

Carolyn Wonderland : une grande dame

L’intensité, qui se retrouve dans le mordant de son approche tant vocale que guitaristique, semble être une seconde nature chez CAROLYN WONDERLAND. La musicienne, qui avait véritablement pris son envol en solo il y a quatre ans avec le génial et audacieux « Tempting Fate » sur lequel elle jonglait avec sa Gibson et sa lap-steel, monte encore en émotion et en virtuosité dans un équilibre musical, qui doit beaucoup à une confiance acquise au fil du temps. « Truth Is » est une sorte d’apothéose, tant au niveau de l’écriture que de cette voix, où la puissance n’a d’égal que sa douceur. Monumental.

CAROLYN WONDERLAND

« Truth Is »

(Alligator Records)

CAROLYN WONDERLAND est une fine gâchette, cela n’aura échappé à personne, et sur ce deuxième effort chez l’institution Alligator Records, on prend pleinement conscience de ses talents de chanteuse et de compositrice. Une reconnaissance qui arrive peut-être un peu tard, mais qui est aujourd’hui incontestable. Elle qui a joué avec presque toutes les légendes Blues du Texas et qui a aussi effectué un beau et assez long passage au sein des Bluesbreakers de John Mayall, semble littéralement épanouie sur ce « Truth Is », marqué de son empreinte. Car la musicienne est loin de manquer de personnalité, bien au contraire.   

D’une rare polyvalence, elle fait un beau tour d’horizon des courants dans lesquels elle se retrouve… et il y en a ! Forcément très sudiste dans le jeu, on retrouve chez la Texane des notes de Soul, de Gospel, de Jazz, de Country et de Roots Rock, qui font de son Blues un refuge éclectique pour des saveurs chaleureuses et sincères. CAROLYN WONDERLAND a de nouveau confié la production de « Truth Is » à Dave Alvin, lequel sublime des compositions entraînantes, mais aussi très touchantes et toujours authentiques. On passe de sa ville natale de Houston à la Nouvelle Orleans, avec un crochet par Memphis, en un clin d’œil.   

Avec son inimitable picking, elle signe l’essentiel de cette nouvelle réalisation, tout en coécrivant quelques titres avec son producteur et Shelley King, et en s’offrant la liberté de reprendre « Wishful Thinking » (Greg Wood/Eddie Hawkins) et « Orange Juice Blues » (Richard Manuel pour The Band). Mais le plus beau et surtout le plus réjouissant vient de ses propres compositions et elles sont franchement renversantes (« Sooner Or Later », « It Should Take », « I Ain’t Going Back » avec Ruthie Foster et Marcia Ball, l’ensoleillé « Deepest Ocean Blue », le bouleversant « Blues For Gene » et la somptueuse chanson-titre. Incontournable.   

Photo : Mary Bruton

Retrouvez la chronique de « Tempting Fate » :