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Blues Contemporary Blues

Bex Marshall : le sourire de l’audace

Originaire de Plymouth dans le Devon, la compositrice, guitariste et chanteuse nous a fait languir plus d’une décennie avant de se présenter avec une toute nouvelle production. Exaltée et scintillante, l’Anglaise interprète un Blues frais et enjoué, entourée d’un groupe à en faire pâlir plus d’un… et d’une ! Mais ce sont bel et bien sa voix rocailleuse et son approche guitaristique qui font d’elle une artiste hors-norme. Avec « Fortuna », on quitte un temps les rives de la Tamise pour celles du Delta du Mississippi avec un détour par la Nouvelle-Orleans.

BEX MARSHALL

« Fortuna »

(Dixiefrog)

Avec seulement quatre albums à son actif depuis 2002, dont celui-ci, BEX MARSHALL se fait bien trop discrète. Sa carrière, elle la mène surtout sur scène où elle a peaufiné et rodé son style en développant son exceptionnelle technique de slide back-porch, notamment, qui libère tant d’émotion sur ses morceaux. Lauréate d’un British Blues Award en 2013 en tant que chanteuse, la Britannique nous aura fait patienter douze ans depuis « The House Of Mercy » pour enfin livrer ce « Fortuna », qui se distingue du paysage musical actuel.  

Par sa voix éraillée, BEX MARSHALL nous captive avec un British Blues dans le son, teinté de Rock, de Gospel, de Funk et de Soul, et s’en va même titiller le Country Blues (« Jungle »). Pour « Fortuna », elle se fait brillamment accompagné par ce que Londres fait de mieux en qualité de musiciens, et dont le feeling et le groove sont le moteur principal. Pourtant enregistrée en une intense semaine dans la capitale anglaise, cette nouvelle réalisation respire et offre un chaleureux moment d’optimisme dans lequel la frontwoman rayonne.

Bien sûr, il y est toujours question d’amour brisé, d’alcool et de regrets (c’est du Blues !), mais le regard plein de malice et d’humour de BEX MARSHALL montre surtout une ténacité et une résilience à toute épreuve. Et si sa voix nous emporte, que dire de son jeu de guitare ? Torride sur l’instrumental morceau-titre, ou plus délicat sur la splendide ballade « 5AM », elle navigue au gré de ses envies dans des atmosphères enchanteresses (« Preaching To The Choir », « Lay Down n’ Die », « Table For One », « Scrapyard Dog »). On en redemande !

Photo : Blackham Images
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Blues Rock

Kid Colling Cartel : association de bienfaiteurs

Tout en assumant d’évidentes affinités avec certaines figures emblématiques du genre, le bluesman s’est bâti un style bien à lui, mariant le Blues et le Rock avec beaucoup de fougue, tout en se présentant avec des titres d’une grande délicatesse, qui dégagent une sorte de force tranquille. « Living On The Wild Side » confirme toute la créativité, le potentiel et le savoir-faire de KID COLLING CARTEL, parfaitement soutenu par une production limpide et soignée.

KID COLLING CARTEL

« Living On The Wild Side »

(Rock & Hall/Dixiefrog)

Cela fait maintenant un moment que KID COLLING collectionne les récompenses et on le connait aussi pour le très bon « In The Devil’s Court », son premier album qui faisait suite à un EP, « Tomorrow’s Far Away », sorti il y a déjà dix ans. Après plusieurs collaborations dont l’une avec l’excellente Ilene Barnes, le Colombien, désormais Luxembourgeois, revient avec son CARTEL pour ce « Living On The Wild Side », qui arbore un Blues Rock contemporain et classique d’où émane beaucoup de chaleur et de sérénité.

Brillamment accompagné par Markus Lauer à l’orgue Hammond, David Franco à la basse et Florian Pons à la batterie, KID COLLING montre une personnalité artistique très variée et intègre des influences Soul, Funky et Rock bien sûr à un Blues qu’il s’est forgé à l’écoute de grands noms comme Stevie Ray Vaughan ou BB King, au même titre que des artistes tels que Kenny Wayne Shepherd, Larkin Poe et Gary Clark JR pour ce qui est de l’explosivité. Et le musicien et son CARTEL n’en manquent d’ailleurs pas. Loin de là !

Vocalement irréprochable et habille dans de multiples registres, KID COLLING est également redoutable à la guitare, grâce à une belle technique au service d’un feeling que l’on retrouve tout au long de « Living On The Wild Side ». Et la grande qualité des morceaux doit aussi beaucoup à son CARTEL, dont l’interprétation est magistrale (« Ain’t Nobody », « Step Out Of Live », « All Night Long », « Long Way To Go »). A noter le très bon duo en espagnol avec Daniel Restrepo et le superbe « I’ll Carry You » avec Johanna Red. De toute beauté !

Photo : Caroline Martin
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Blues Rock Contemporary Blues Southern Blues

Anthony Rosano And The Conqueroos : une intense sincérité

Capable de se faire aussi Heavy que terriblement émouvant, ANTHONY ROSANO porte un Blues Rock très Southern, dont les émotions ne trompent pas. Très live dans son approche, le musicien et ses deux CONQUEROOS s’approprient la formule en power trio de la plus belle des manières avec un son d’une authenticité et d’une rugosité dont on savoure chaque note. Une voix emprunte de vérité, une guitare tranchante et une rythmique d’un groove absolu font de « Cheap The Devil » l’un des meilleurs albums de l’année en matière de Blues.  

ANTHONY ROSANO AND THE CONQUEROOS

« Cheat The Devil »

(Whiskey Bayou Records)

Persuadé d’en avoir pourtant parlé à sa sortie au début de l’été, ce n’était en fait pas le cas. Alors, petite séance de rattrapage, car passer à côté d’un si bon album serait vraiment un sacrilège. ANTHONY ROSANO AND THE CONQUEROOS a commencé à faire parler de lui en 2017 avec une première réalisation éponyme, qui montrait déjà de très belles choses. Produit par Mike Zito, qui y avait d’ailleurs participé avec Anders Osborne et Johnny Sansone, l’album avait trouvé son public et très bien figuré dans les charts US.

Ensuite, le guitariste, chanteur et songwriter a pris la route et a partagé la scène avec de grands noms : Bob Seger & The Silver Bullet Band, ZZ Top, Gov’t Mule, Samantha Fish et surtout Tad Benoit avec qui il a noué de solides liens d’amitié. ANTHONY ROSANO AND THE CONQUEROOS s’est donc retrouvé au Whiskey Bayou Studio et c’est Benoit lui-même qui s’est occupé de l’enregistrement, du mix et de la production. Et « Cheap the Devil » offre enfin au trio toute la dimension qu’il mérite amplement.

Avec Kyle McCormick à la batterie et Jake Fultz à la basse, le groupe libère un Blues très actuel, respectueux des traditions, dont il est très imprégné et avec un côté Rock rassembleur. Car, en plus de livrer un registre musclé et ausi délicat, ANTHONY ROSANO AND THE CONQUEROOS est un lien direct entre le passé et le présent. Il y a ici du Gallagher et du SRV, mais le frontman s’en démarque habillement (« Cheap The Devil », « Sin City », « Jonesboro Blues », « Rosalita », « Isolation Blues », « Scattered Bones », « Shook »). Incontournable !

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Blues Contemporary Blues

Maria Daines : true color

Chaque nouvelle réalisation de MARIA DAINES est toujours un enchantement. Dans un Blues délicat, moderne et envoûtant, la chanteuse et compositrice présente des chansons surtout mid-tempo dans un registre British Blues d’une clarté rayonnante. Avec son complice Paul Killington, musicien et producteur, elle pose sa voix sur une musique pleine de sensibilité et d’émotion. « Blue » est un modèle du genre qu’on ne se lasse pas d’écouter.

MARIA DAINES

« Blue »

(Independant)

Il aura donc fallu attendre trois ans pour réentendre la voix exceptionnelle de MARIA DAINES. En effet, c’est en 2020 que la Britannique avait sorti le très, très bon « The River », toujours en indépendant. Même si elle s’est essayée à d’autres styles, c’est bel et bien au Blues qu’elle revient toujours, et toujours accompagnée par le multi-instrumentiste, producteur et exceptionnel guitariste Paul Killington. Le duo est en symbiose totale et cela s’entend une fois encore sur « Blue ».

On pourrait s’étendre longuement sur la voix cristalline de MARIA DAINES, tant il est rare de voir une chanteuse dotée d’un spectre vocal capable de jouer sur une finesse incroyable et l’instant suivant de se déployer dans une énergie dont la puissance est tout aussi spectaculaire. Le chant de l’Anglaise est un instrument à part entière et, comme tous les virtuoses, elle n’a pas besoin d’en abuser pour marquer ses morceaux d’une empreinte indélébile. Et les dix titres sont d’une classe et d’une justesse absolue.

Le Blues du duo de Cambridge peut paraître d’une grande simplicité, tant il est d’une évidence et d’une fluidité absolues. Pourtant, tous deux guidés par un feeling constant, ils ont bâti un nouvel opus aux multiples détails et aux arrangements très soignés. Ouvrir « Blue » avec « Beyond Me », long de 7mn30, montre toute l’audace et le savoir-faire de MARIA DAINES et de Paul Killington, et d’autres perles suivent ensuite (« Sundown Blues », « Ain’t Your Man », « The River », « Blue », …) Brillant !

L’album est disponible sur le Bandcamp de la chanteuse : https://mariadaines.bandcamp.com/album/blue

L’incroyable duo formé par Maria Daines et Paul Killington

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Blues

Coco Montoya : joy maker

Délicat et précis, le Blues de COCO MONTOYA est aussi contemporain que classique et aussi léger que Rock. Avec « Writing On The Wall », le guitariste et chanteur californien s’offre et nous offre un moment suspendu, où sa capacité à captiver sur des ballades comme des morceaux plus rapides et relevés est brillante. Le bluesman est éblouissant tout au long des 13 plages. Un bonheur !

COCO MONTOYA

« Writing On The Wall »

(Alligator Records)

Le parcours de COCO MONTOYA a quelque chose de magique. Recruté comme batteur par Albert Collins dans les années 70, qui lui apprend le fameux ‘Icy Hot’ à la guitare, il est ensuite enrôlé au début des 80’s par John Mayall. Il lui restera fidèle pendant dix ans au sein des Bluesbreakers. En 1995, il se lance en solo et sort « Gotta Mind To travel » et nous voici avec « Writing On The Wall », son neuvième opus et le sixième sur le légendaire label Alligator Records.

Et s’il y a deux choses qui ne l’ont jamais quitté, c’est l’émotion et la sensibilité avec lesquelles il joue depuis toujours. COCO MONTOYA pourrait en faire des caisses, en mettre partout et s’afficher en ‘shred man’ aiguisé et pompeux, mais non, le Californien est à la recherche de la note qui va sonner juste, au bon moment pour émouvoir son auditoire. Et autant dire qu’avec « Writing On The Wall », l’objectif est magistralement atteint, tant ces morceaux résonnent de manière positive et détendue.

Accompagné de son groupe de tournée, c’est-à-dire Jeff Paris (claviers, guitare, chant), Nathan Brown (basse) et Rena Beavers (batterie), COCO MONTOYA a toujours ce toucher et ce son de guitare incroyable. Très organique, la production de Tony Braunagel (Bonnie Raitt, Taj Mahal) et de son camarade Jeff Paris (Keb’ Mo, Bill Withers) apporte beaucoup d’éclat au talent énorme de l’Américain, dont la fluidité d’interprétation est exceptionnelle. Un très grand moment de Blues !

Photo : Joseph A Rosen
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Blues Blues Rock Contemporary Blues

Micke Bjorklof & Blue Strip : colors of soul

Faisant partie des plus grandes formations Blues d’Europe du Nord aux côtés de Bjørn Berge et de la reine de la slide Erja Lyytinen avec qui il a d’ailleurs travaillé, MICKE BJORKLOF & BLUE STRIP joue du Blues en ne se contentant pas de quelques chapelles, il englobe l’ensemble du style avec un feeling et une dextérité sans faille. Avec « Colours Of Jealousy », le chanteur, guitariste et songwriter éblouit encore une fois de sa classe et de celle de ses partenaires.

MICKE BJORKLOF & BLUE STRIP

« Colors Of Jealousy »

(Hokahey Music Productions)

Depuis plus de 30 ans, le multi-instrumentiste alterne avec ses formations, MICKE BJORKLOF & BLUE STRIP en électrique et Micke & Lefty feat. Chef dans un registre acoustique et en trio. Dix albums sont déjà sortis et c’est avec son quintet qu’il se présente cette fois avec ce « Colors Of Jealousy » de toute beauté. Le bluesman finlandais se montre toujours très inspiré et la qualité d’interprétation est encore irréprochable.

Primé à de nombreuses reprises, le Scandinave affiche une grande créativité, bien aidé dans son effort par un groupe exceptionnel. MICKE BJORKLOF & BLUE STRIP parvient avec une facilité déconcertante à faire le pont entre un Blues contemporain, un Blues Rock enflammé avec quelques touches bien senties d’influences du Delta et un soupçon de Nouvelle-Orléans et de Country. Un rayonnement incroyable.

Si « Colors Of Jealousy » arrive huit ans après « Ain’t Bad Yet », c’est que le groupe a beaucoup tourné, mais notre patience est magnifiquement récompensée. Enveloppé par les chœurs de Lena Lindroos et la slide de Lefty Leppänen, MICKE BJORKLOF & BLUE STRIP joue sur la corde sensible, tout en parvenant à garder un rythme d’enfer (« Highway Highway », « Missing My Woman », « Are You Real », « Through You Were Mine », « Into The Fire », « It Takes Two »). Eblouissant !

Photo : Mikko Parkkonen
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Blues Blues Rock International

Gráinne Duffy : modern & celtic roots [Interview]

Avec ce cinquième album, GRAINNE DUFFY entre définitivement dans la cour des grand(e)s avec une classe et une personnalité très affirmée, qui rayonnent littéralement sur « Dirt Woman Blues ». La songwriter, chanteuse et guitariste irlandaise livre un opus d’où émane beaucoup de force, de caractère sur des sonorités où ses racines celtes se fondent dans un groove très américain. La musicienne est partie sous le soleil de Californie enregistrer ces morceaux très roots et modernes à la fois dans lesquels sa voix s’impose avec puissance, dynamisme et délicatesse. Rencontre avec une artiste brillante.

Photo : The Bedford Blackham Images

– Trois ans après le très bon « Voodoo Blues », tu reviens avec « Dirt Woman Blues » qui est beaucoup plus roots et rugueux. Est-ce qu’après un peu plus de 15 ans de carrière, tu penses que c’est l’album qui te ressemble le plus ? C’est en tout cas l’impression qu’il donne…

Oui, je pense qu’il me ressemble beaucoup, parce qu’il combine mon amour pour le Blues et ses racines et la musique celtique. Les deux ensemble. C’est une réelle unité à travers le son et les éléments. C’est quelque chose que j’ai toujours voulu représenter dans ma musique.

– Tu as co-écrit l’album avec ton mari Paul Sherry. Comment se traduit ce travail ? C’est plutôt une opposition de styles ou une complicité qui grandit au fil du temps ?

C’est clairement une complicité qui grandit au fur et à mesure. C’est une sorte de travail artisanal que l’on fait tous les deux. Nous sommes très ouverts et, même si nous avons chacun notre style, on s’ouvre à celui de l’autre pour en faire quelque chose qui nous ressemble aussi. Au fil du temps, mon état d’esprit a changé également et aujourd’hui, nous sommes très complices musicalement, c’est vrai.

Photo : The Bedford Blackham Images

– « Dirt Woman Blues » emprunte de nombreuses directions à travers le Rock, un Blues souvent Old School, des éléments d’Americana aussi et pourtant l’ensemble sonne très moderne. On a l’impression que ton côté ‘vintage’ est une sorte de façade pour aller encore plus loin dans l’expression de ta musique. C’est le cas ?

Oui, c’est vrai qu’il y a un côté beaucoup plus ‘vintage’ qui s’exprime sur cet album. Cela dit, je suis très ouverte à la scène Blues contemporaine et j’espère même en faire partie, car je suis une artiste de mon temps. Mais c’est vrai que j’écoute beaucoup de musiques plutôt anciennes et les vieux bluesmen, qui ont forgé ce style. Et je pense que ce côté un peu ‘Old School’ vient de là, c’est même certain.

– Tu es originaire de la ville de Monaghan dans le nord de l’Irlande et il se trouve que son nom signifie ‘Les petites collines’. Je ne pense pas que ce soit une coïncidence, mais plutôt une explication à ton style si mouvant et plein de contrastes. Qu’en penses-tu ? Il y a une part d’inconscient ?

Monaghan est une petite ville, un petit coin qu’on appelle aussi ‘Les petites Collines’, c’est vrai. Je pense que l’endroit où tu vis se reflète forcément à travers ses paysages et son atmosphère dans ce que tu écris et composes. Ca rythme aussi ta vie de manière inconsciente avec ses hauts et ses bas. Vivre dans un endroit comme celui-ci a bien sûr une influence, qui va bien au-delà de la musique.

Photo : The Bedford Blackham Images

– Pour rester en Irlande, on retrouve plusieurs inspirations dans la narration de tes morceaux surtout, ainsi que cette fougue qui habitait aussi Rory Gallagher. Dans quelle mesure penses-tu que l’empreinte celtique se lise et influence ton jeu ?

Rory Gallagher fait partie de notre histoire nationale. Et il faut aussi y ajouter Van Morrison, les Cranberries, les Coors et beaucoup d’autres qui ont apporté leur influence à travers leur musique. Je pense que c’est ce que les gens appellent ’celtique’ et je le prends aussi pour moi-même. Je ne sais pas vraiment dans quelles mesures on peut entendre ces influences sur le dernier album notamment, mais j’en suis ravie. Ce mélange est notre héritage. Parfois, tu ne sais pas vraiment d’où ça vient, mais c’est là. C’est naturel et c’est une partie de ce qu’est être irlandais. Et pour revenir à Rory, sa musique m’a beaucoup influencé au même titre que toute cette période avec Gary Moore également, bien sûr.

– Parlons de ce nouvel album que tu es partie enregistrer en Californie. Pourquoi ce choix ? Est-ce parce que les musiciens qui t’accompagnent et ton producteur se trouvent aux Etats-Unis, ou juste pour y trouver certaines sensations et vibrations ?

Oui, c’est un choix de mon nouveau producteur, qui a cherché de nouvelles personnes pour l’album. C’était très important pour nous de trouver des musiciens qui partagent aussi notre vision du Blues, afin d’aller dans le même sens. Il a monté une équipe de très, très haut niveau. L’album a été enregistré à la fois à domicile dans mon studio et dans un studio à Encinitas, en Californie et ce sont Chris Goldsmith (Ben Harper) et Marc Ford (The Black Crowes) qui ont produit l’album. Nous sommes accompagnés du guitariste Marc Ford (The Black Crowes) et de la session rythmique de Gary Clark Jr. composée du batteur et percussionniste JJ Johnson et du bassiste et claviériste Elijah Ford (Le fils de Marc). Tout le monde a pu apporter sa touche et on s’est tous très, très bien entendus.

Photo : The Bedford Blackham Images

– Vous n’avez pas forcément la même culture, mais vos influences pourtant convergent. Comment as-tu présenté tes morceaux et, malgré leur talent, est-ce que leur adaptation à un Blues moins américain que leurs racines a été rapide ?

Les vibrations et le groove sont très américains, je pense. C’est vrai qu’il y a un mix entre les deux cultures. Les morceaux les plus rapides sonnent plus anglais, alors que lorsqu’ils sonnent américain, ils sont plus cools et plus relax. Cela vient aussi surtout du son et de l’ambiance californienne, je pense. L’album combine bien les deux avec des compositions plus britanniques et celtiques sur un son typiquement américain, en effet. Nous avons beaucoup aimé travailler sur ces deux aspects et c’était très agréable de se retrouver tous ensemble et pouvoir confronter nos influences et nos envies.

– D’ailleurs, le Blues américain et le British Blues sont très distinctifs l’un de l’autre et très reconnaissables. Or, sur « Dirt Woman Blues », c’est difficile à définir. C’est ce qui se passe quand une Irlandaise enregistre aux Etats-Unis avec des musiciens américains, ou juste une simple volonté de ta part de te démarquer ?

Oui, je pense que c’était une décision très réfléchie, en tant que femme, d’aller enregistrer aux Etats-Unis avec des musiciens américains. Ce n’est pas facile de se mettre à nu lorsque l’on est une femme irlandaise dans un tel contexte. Nous nous sommes vraiment concentrés sur le son et le côté organique des morceaux. Je voulais aussi mettre en valeur ma voix, bien sûr, mais aussi mes parties de guitare.

Photo : The Bedford Blackham Images

– Pour conclure, j’aimerais que l’on parle de la pochette de l’album. Je la trouve très sombre et emprunte d’une certaine tristesse, alors que l’ensemble de « Dirt Woman Blues » est très lumineux et souvent même enjoué. Quel message, s’il y en a un, as-tu voulu faire passer ?

Je voulais une pochette différente des précédentes avec un design bien précis. Il y a un côté ‘Old Woman Blues’, qui se démarque de ce que l’on peut voir habituellement sur les albums réalisés par des femmes. C’est vrai qu’il y a un côté assez sombre, qui représente aussi une partie de notre Histoire. Elle montre les aspects opposés qui fondent aussi la condition féminine, que ce soit comme mère de famille et également en termes d’émancipation et de liberté. C’est peut-être aussi une autre vision de ce qu’est une blueswoman aujourd’hui.

Le nouvel album de GRAINNE DUFFY, « Dirt Woman Blues », est disponible sur son Bandcamp :

https://grainne-duffy.bandcamp.com/album/dirt-woman-blues

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Contemporary Blues

Monster Mike Welch : in full light

Il est l’un des bluesmen les plus brillants de sa génération et malgré tout, il est aussi d’une discrétion presqu’indécente. MONSTER MIKE WELCH impressionne autant qu’il séduit le monde du Blues depuis presque trois décennies. Enregistré en Californie, « Nothing But Tim » est l’un des disques les plus personnels de l’artiste du Massachussetts et il éblouit par la classe qu’il diffuse.

MONSTER MIKE WELCH

« Nothing But Time »

(Gulf Coast Records)

Surnommé ‘Monster Mike’ à l’âge de 13 ans par Mr Dan Aykroyd des légendaires Blues Brothers, MIKE WELCH a depuis fait du chemin et mené une belle et grande carrière. Originaire de Boston, le guitariste, chanteur et songwriter marque de son empreinte le Blues contemporain qu’il parvient à rendre lumineux grâce à son inimitable signature électrique et un toucher unique, qui le rend si identifiable.

« Nothing But Time » est son huitième album sous son nom, mais MONSTER MIKE WELCH est un musicien plus que chevronné de la scène Blues américaine. Multi-nominé et récompensé à plusieurs reprises, il a œuvré entre autres plus de 15 ans au sein de Sugar Ray And The Bluetone et enregistré avec de nombreuses pointures du genre. Ayant combattu un Covid long pendant de très longs mois, il pensait son avenir incertain, et pourtant…

Présentant 14 morceaux, dont deux reprises de Robert Johnson, une de George Harrison et un autre de Buddy Guy, le virtuose brille surtout sur ses propres compositions, où sa dextérité et son feeling célèbrent la beauté du Blues (« Walking To You Baby », « I Ain’t Sayin’ », « Losing Every Battle », « Hard To Get Along With », « Jump For Joy »). MONSTER MIKE WELCH fait un retour rayonnant et son jeu est juste exceptionnel. Une merveille !

Photo : Jo Welch
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Blues Rock Contemporary Blues

Ivy Gold : la ruée vers l’or

C’est probablement le fait d’être formé de musiciens américains, allemands et anglais qui offre au Blues Rock d’IVY GOLD cette touche universelle et fédératrice assez unique. En effet, difficile de définir les influences à l’œuvre sur « Broken Silence », dont la production est aussi scintillante que lumineuse. Une très belle connexion portée par une voix fantastique pleine de relief.

IVY GOLD

« Broken Silence »

(Golden Ivy Records)

Ce que réalise IVY GOLD depuis trois petites années est tout simplement phénoménal. Le groupe au line-up un international a sorti un premier album, « Six Dusty Winds » en 2021, suivi du DVD « Live At The Jovel » l’an dernier et il nous revient aujourd’hui avec l’excellent « Broken Silence ». Et ce qui rend la formation un peu plus incroyable, c’est de voir la montée en puissance et surtout en qualité d’écriture entre les deux LP studio.

Composé des Américains Manou (chant), Kevin Moore (basse), Tal Bergman (batterie), de l’Allemand Sebastian Eder (guitare) et du Britannique Anders Olinder (claviers, orgue), IVY GOLD a également la particularité d’être totalement indépendant, depuis son management jusqu’à la production de ses disques. Et c’est peut-être cela aussi qui forge l’authenticité du Blues Rock distillé par le quintet.

Très organique, le style d’IVY GOLD s’inscrit dans la mouvance actuelle du Blues avec quelques touches funky et Gospel notamment sur le monumental « Sacred Heart ». Guidé par la puissante voix un brin éraillée de leur frontwoman, les musiciens s’imposent avec force et délicatesse sur des morceaux au groove instinctif et avec un feeling de chaque instant (« Got What I Need », « No Ordinary Woman », « Drifting » et le morceau-titre. Fabuleux !

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Blues Blues Rock Contemporary Blues

The BluesBones : so soulful

Maniant les émotions avec toujours autant de délicatesse et de force, THE BLUESBONES se livre sur un nouvel opus aussi varié que complet dans une voie traditionnelle et des sonorités très actuelles. « Unchained » est taillé pour la scène, tant l’intensité de chaque morceau et l’interprétation des cinq musiciens rayonnent sur l’ensemble des titres. La signature est bel et bien là et plus assumée que jamais.

THE BLUESBONES

« Unchained »

(Naked/Donor Company)

Devenue incontournable sur la scène Blues européenne, le groupe vient assoir encore un peu plus sa position et surtout son style avec ce septième album. Comme ses prédécesseurs, « Unchained » possède ce son si organique qui vient du fait que THE BLUESBONES a toujours tenu à enregistrer en prise directe et en analogique, une marque de fabrique qu’il doit à son amour de la scène. Un acte de vérité et d’authenticité.

Car chez les Belges, la musique est bien vivante et vibre grâce à un groove imparable et inimitable. Si on peut clairement qualifier le registre du groupe de ce que l’on appelle communément le ‘Contemporary Blues’, THE BLUESBONES s’approprie de nombreux courants, passant du Blues Rock à des ambiances plus feutrées et aussi plus roots. Et « Unchained » présente tout cela à la fois avec élégance.

La production est remarquable et le soin apporté aux arrangements met encore plus en lumière la qualité d’écriture des bluesmen. Galvanisé par le chant de Nico de Cock, le quintet propose une approche sensible, ainsi que directe et relevée (« Chain  Gang », « Time To Learn », « Talking To The Lord », « The Road Ahead »). Mention spéciale à « I Cry », véritable machine à frissons que THE BLUESBONES décline en deux versions. Etincelant !