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Grant Haua : une belle respiration

Troisième réalisation (dont un live) sur le label Dixiefrog pour GRANT HAUA, qui nous gratifie d’un très bon « Mana Blues ». L’univers du musicien est aussi joyeux, communicatif et sensible, ce qui rend son Blues très accessible et dynamique. Toujours aussi Rock dans l’approche, l’équilibre est pourtant encore au rendez-vous avec des morceaux où le bluesman livre ses états d’âme avec classe et passion.

GRANT HAUA

« Mana Blues »

(Dixiefrog/Rock & Hall)

Chaque nouvelle production de GRANT HAUA est un enchantement. S’il n’est pas le seul bien sûr, il est l’un des rares à apporter autant de fraîcheur à la scène Blues internationale. Ses origines maori y sont bien sûr pour quelque chose, car elles posent un regard neuf et différent sur cette institution qu’est le Blues, mais ce n’est pas la seule raison. Cette manière très épurée, directe et aérée d’aborder ses chansons le rend particulier et unique en son genre. Et avec « Mana Blues », on tombe une fois encore, inévitablement, sous le charme de l’artiste.

A quelques jours de la Coupe du Monde de rugby en France, un sport qu’il pratique par ailleurs, c’était une évidence pour GRANT HAUA de faire un clin d’œil à ses All-Black de cœur en s’affichant avec une sorte de Haka mimé, histoire d’apporter son soutien à ses compatriotes néo-zélandais. Pourtant, le combat musical mené par le chanteur et guitariste se veut moins guerrier, même s’il n’élude pas certains aspects plus sombres de la vie. Cependant, il reste toujours aussi enjoué et d’une grande ouverture avec un côté plus électrifié cette fois.

« Mana Blues » s’ouvre sur un chant traditionnel saisissant, qui laisse place à « Pukehinahina » où GRANT HAUA croise le fer avec The Inspector Cluzo dans un Blues Rock explosif, qui ressemble d’ailleurs plus aux Français qu’au Néo-Zélandais. Cela dit, on le retrouve aussitôt avec toute la finesse qu’on lui connait et des morceaux qui lui ressemblent tellement (« Billie Holiday », « Jealousy », « Good Stuff », le génial « Embers » qui aurait été parfait pour ouvrir l’album et « Aches »  ou encore « Bad Mofo »). Un régal… encore !

Retrouvez les précédentes chroniques :

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The Inspector Cluzo : free & groovy farmers [Interview]

Plutôt rare en interview, mais d’une grande générosité musicale, THE INSPECTOR CLUZO est de retour avec le très bon « Horizon », neuvième opus d’une discographie qui s’étoffe autant que ses prestations enflamment les scènes où le duo sévit. Toujours entre Rock et Blues, les Gascons ont composé un très bon nouvel album, qui devient vite addictif (voir chronique ci-dessous). Superbement produit, un certain Iggy Pop y est même allé de son petit message personnel avec la délicatesse qu’on lui connait. Un disque qui respire donc la joie, mais qui met aussi le doigt sur de multiples problèmes environnementaux que connaissent bien les deux fermiers. Court donc, mais très agréable, échange avec deux amis, Laurent Lacrouts (chant et guitare) et Mathieu Jourdain (batterie), qui tranchent avec le milieu de l’industrie musicale pour mon plus grand plaisir.   

Photo : Philippe Salvat

– Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce neuvième album porte bien son nom. En effet, il présente un large « Horizon » de votre univers musical et aucun morceau ne ressemble à un autre. Pourtant, il y a une grande homogénéité. Votre désir était-il de faire une sorte de bilan, ou de tour du proprio, de vos 15 ans de carrière ?

C’est le neuvième album en 15 ans, on a toujours beaucoup écrits et composés de chansons. Nous faisons de la musique depuis l’age de 7 ans tous les deux, on a démarré par le sax et la trompette et nous jouons donc de plusieurs instruments. Quand on a co-arrangé le concert des arènes de Mont de Marsan avec le symphonique de Pau l’année dernière, ça a été un peu l’aboutissement là en effet, car quand ta musique est jouée devant 4.000 personnes par une trentaine de grands musiciens. Ca fait quelque chose, surtout 40 ans après. Une forme de parcours. Cet album « Horizon » est la suite logique de l’évolution de notre songwriting et de nos compétences qui évoluent avec les années depuis 40 ans… Nous n’avons cessé, tous les deux, de nous remettre en question en permanence, depuis que nous sommes jeunes et nous continuons à chaque album, car on pense que si tu veux progresser, il faut être humble et toujours se remettre en question.

– « Horizon » a nécessité trois ans de travail, ce qu’on peut comprendre entre votre métier à la ferme et les tournées. En écoutant le résultat et l’atmosphère joyeuse de l’album, on croirait presque que ces trois semaines à Nashville ont été une petite récréation. C’est le cas ?

Oui, de toute façon pour nous l’enregistrement est un accomplissement, c’est la fin du processus de création et donc on s’amuse toujours beaucoup. Le travail dur est fait en amont à la composition. C’est là qu’on travaille énormément et qu’on laisse le temps au temps, souvent quand la chanson a mûri, ça sort en 10mn. Mais le process de digestion peut prendre des années. Par exemple, « Horizon », la chanson elle-même, ça aura pris 15 ans… car elle était sur le premier album, mais on était insatisfait du résultat. On crée tout le temps, souvent à notre insu, en vivant tout simplement.

– Vous êtes donc retournés à Nashville enregistrer avec Vance Powell que vous connaissez maintenant très bien. Comment cela se passe-t-il avec un producteur de cette renommée ? Vous arrivez avec une idée bien précise du son que vous souhaitez, ou est-ce que vous vous laissez guider et suivez ses conseils ?

Vance est très sélectif avec les groupes avec qui il travaille. Il a refusé un paquet de groupes (gentiment), dont la liste est longue comme le bras et certains sont des noms très célèbres. On a pu l’expérimenté, car il a refusé de faire l’un des plus grands bluesmen américains juste devant nous, car on était là et l’autre voulait nous dégager. Et ça Powell, il est un peu comme nous, il s’en fout de qui tu es. C’est un indépendant comme nous, il fait ce qu’il veut et il n’a jamais été dans le show-biz. Et malgré le fait que c’est sûrement l’un des 2/3 meilleurs en Rock aux Etats-Unis, il ne travaille pas forcément son réseau comme on dit, un peu comme nous. Il se concentre aussi sur la musique seulement. Il veut que les groupes aient ‘a thing’, un truc. Tous les groupes qu’il fait ne sont pas des débutants. Ils ont tous un truc ultra-personnel. Du coup, il ne va pas corriger ce que tu es, puisque il t’a choisi pour cela (Rires) ! Il essaie de te guider pour tirer le meilleur de toi, donc en gros, c’est beaucoup d’essai de son, car tout est fait à la source. Mais les chansons ne bougent que très peu entre les démos et l’enregistrement. Par contre, le niveau d’exigence de la performance est ultra-élevé. Le chant sur cet album a été une priorité, car les textes portés sont forts et Vance a fait avec Laurent comme il fait avec Stapleton… C’est-à-dire à fond pour avoir le meilleur.

Photo : Cyrille Vidal

– Vance Powell a d’ailleurs déclaré que c’était votre album le plus personnel. On le comprend très bien à l’écoute des textes, qui parlent essentiellement de votre quotidien. Justement, lorsque vous écrivez et composez vos morceaux, on pourrait penser que vous ayez envie d’échapper un peu à tout ça le temps d’un disque. Votre métier est si viscéral que vous ne puissiez vous en détacher ?

C’est plutôt que le style de musique qu’on fait. En tout cas, c’est vrai que ce qu’on pense a besoin de sens, sinon ça sonne vite creux. Les textes dans ce style de musique, c’est 50%, voire plus, d’une chanson. Elles sont composées à la guitare acoustique et ça fait pareil (Rires) ! Si on n’y mettait pas de sens, on ne ferait plus de musique. Il faut avoir du carburant dans les tripes et ça, c’est la vie qui te le procure et trop de confort ne fait pas bon ménage avec cette musique. Et ce n’est pas notre cas (Rires) ! Donc, on peut continuer… (Sourires)

– Votre album précédent, « We The People Of The Soil », s’est très bien vendu ce qui devient assez rare de nos jours en France surtout et dans ce registre. Vous avez été approchés par plusieurs labels et maisons de disques, et vous avez préféré continuer l’aventure en indépendant. Pourquoi ce choix ? Cela aurait aussi pu vous soulager de pas mal de boulot et aussi de contraintes, non ?

On a eu des propositions. On en a toujours eu, provenant de labels et surtout en tournée où là, ça fait la queue (Rires) ! On aurait pu se refaire la grange avec ce qu’on nous a proposé, mais on trouve ça hors-sol par rapport à notre réelle valeur économique. On essaie de maintenir une certaine idée des richesses économiques, sociales et environnementales. Les trois sont très importants à nos yeux, et nous sommes les seuls qui peuvent faire les trois par nous-mêmes. On veut juste montrer, comme avec la ferme d’ailleurs qui est aussi indépendante, qu’avec de petits moyens et des richesses économiques, sociales et environnementales, on peut faire son truc dans une certaine forme de sobriété, mais aussi d’efficacité. Nous n’avons rien contre les gros, car il en faut, mais les petits autofinancés ont aussi le droit d’exister et c’est important. Il y a de la place pour tout le monde.

L’album et le merchandising du groupe sont disponibles sur son site : https://theinspectorcluzo.com/

Retrouvez la chronique de l’album :

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The Inspector Cluzo : un Blues si fertile

Partagé entre la ferme et la scène, THE INSPECTOR CLUZO a pourtant, et plus que jamais, les pieds sur terre. Mobilisé et entreprenant, le duo Blues Rock reste passionné et enflammé. Militants de la première heure, les Landais livrent avec « Horizon », l’un de leurs albums le plus personnel et le plus abouti de leur discographie. Découverte de l’album donc, avant une interview à venir…

THE INSPECTOR CLUZO

« Horizon »

(Fuck The Bass Player Records)

Il y a 15 ans, THE INSPECTOR CLUZO ouvrait la voie aux duos explosifs, qui sont aujourd’hui légions. Jamais égalés, Laurent Lacrouts (guitare, chant) et Mathieu Jourdain (batterie) viennent de sortir depuis leurs Landes natales un neuvième album ardent et toujours autoproduit, où leur Blues Rock prend encore plus de volume. Toujours aussi inspiré, le groupe nous livre un « Horizon » majestueux et… dégagé.

Trois ans de travail dont trois semaines de studio à Nashville, Tennessee, ont été nécessaires à THE INSPECTOR CLUZO pour élaborer et mettre au point le successeur de l’excellent « We The People Of The Soil », sorti il y a cinq ans. Fort de ce succès, les deux fermiers ont enchainé les concerts, dont une belle prestation au Hellfest cette année, et ont retrouvé le producteur Vance Powell (Raconters, Jack White) pour un résultat brillant.

Toujours aussi roots, THE INSPECTOR CLUZO réussit encore à surprendre grâce à des arrangements très soignés, des compos nuancées et un engagement intact. Magnifié par un violon, un violoncelle et une voix féminine sur « Shenanigans », délicat sur « The Outsider », entraînant sur « Act Local Think Global », musclé sur « Rockphobia » et « The Armchair Activist » et euphorisant sur « Saving The Geese », « Horizon » est un festin musical.