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Doom France Metal Progressif

Welcome-X : un groove sismique [Interview]

Conçu sur les bases d’un Metal Progressif à multiples facettes, WELCOME-X ne se refuse aucune incartades, qu’elles soient Jazz, Doom ou plus extrêmes et c’est ce qui fait sa force. Le quintet vient tout juste de livrer un « Vol.2 » à travers lequel il continue d’explorer de bien belle manière des horizons musicaux inattendus et particulièrement saisissants. Entretien avec Phil Bussonnet, bassiste et compositeur du groupe.

– Tout d’abord, un petit mot sur votre concert de vendredi dernier (interview réalisée le 05/07) au Triton aux Lilas, près de Paris. Comment ça s’est passé ? J’imagine que ça doit être un grand plaisir de retrouver la scène après tout ce temps ?

C’est vrai qu’en dehors d’un festival au mois d’août de l’année dernière en Bretagne, on n’avait pas rejoué du tout depuis et ça fait quand même très long. Ca ne m’est jamais arrivé de toute ma vie de rester aussi longtemps sans faire de scène. C’était vraiment un bonheur ! Même si la jauge est limitée et les gens masqués, tout le monde était content et on sentait une énergie vraiment étonnante.

– Restons un peu au Triton, puisque vous y avez enregistré ce deuxième album, et il y est même produit. C’est votre base ? Quels sont vos liens avec l’endroit ?

Ce sont des gens avec lesquels je travaille depuis très longtemps avec qui on a réalisé beaucoup de choses et différents projets. En ce qui nous concerne, ils sont plus ou moins producteurs. Pour l’album, on a transformé le club en studio, on y a fait toutes les prises et ils prennent toutes les charges de production à leur compte, c’est-à-dire le mix, le pressage et la distribution. C’est un partenariat très précieux pour moi. Et surtout, ils nous laissent toute latitude sur le disque au niveau artistique. Nous sommes complètement libres. C’est essentiel, car on garde un regard sur toute la réalisation de l’album.

– Parlons de votre deuxième album sobrement intitulé « Vol. 2 ». C’est le prolongement et la suite du premier, ou est-ce que justement vous avez souhaité partir dans d’autres directions ?

C’est vraiment la suite immédiate du premier. Ce sont des morceaux qui ont été écrits directement dans la foulée et dans la même veine. L’album n’est pas vraiment détaché du premier, au contraire même. C’est comme si on avait fait un double-album, sauf qu’on a mis deux ans à le faire.

– Musicalement, et pour faire court, WELCOME-X évolue dans un registre Metal Progressif, dans lequel vous vous démarquez franchement. C’est peut-être aussi dû au fait qu’il n’y ait pas vraiment de références purement Heavy Metal dans votre musique. C’est aussi votre sentiment ?

On a des références, mais elles sont vraiment très variées. Cela va de Black Sabbath à Meshuggah et bien d’autres. En fait, on n’a pas la volonté d’écrire dans un style très ciblé. Je suis vraiment mon propre groove et l’inspiration vient sur le moment. Il n’y a aucun cahier des charges sur le plan styliste, donc c’est un mélange de plein de choses qui nous ont nourris au fil du temps.

– Justement, vous affichez un style très Metal à grands renforts de gros riffs, de solides rythmiques et d’un chant qui côtoie souvent les extrêmes. C’est cet aspect qui vous permet de libérer toute cette énergie ? Ces fondations très musclées ?

Exactement. De toutes manières, j’avais envie de faire une musique très pêchue. C’est un projet que j’ai depuis bien longtemps et je voulais faire quelque chose de résolument Rock, c’est-à-dire une écriture à base de riffs de guitare et c’est ce qu’on a réussi à faire. Au niveau des voix, j’aime beaucoup l’approche de Sam (Kün, chanteur – NDR) dans le sens où il possède différents registres. C’est une vraie richesse d’avoir toute cette palette.

– Dans le même temps, WELCOME-X développe aussi beaucoup d’éléments Jazz, dans lesquels vous êtes d’ailleurs très à votre aise. C’est votre passé musical individuel qui veut ça ?

Sans doute, oui. J’en ai pratiqué beaucoup dans toutes sortes de contextes, même si mes premières amours musicales sont vraiment Rock. J’ai été amené à jouer avec beaucoup de musiciens de Jazz de différents horizons et je pense que cela m’a aussi nourri avec ces ouvertures harmoniques et cette possibilité d’improviser, même si on ne l’utilise pas au sein du groupe. Toute la musique que l’on fait est très écrite.

– Est-ce qu’en faisant cohabiter des ambiances Doom avec des atmosphères très aériennes, et notamment jazzy, vous n’avez pas peur de déstabiliser des auditeurs pas forcément adeptes de ces deux styles, mais plutôt de l’un ou de l’autre ?

C’est justement la liberté que je me réserve. Après, j’espère que ce ne sera pas trop déstabilisant et que les gens seront sensibles à ça. C’est vraiment ce que j’avais envie de proposer et c’est peut-être aussi la marque de fabrique de WELCOME-X, avec de multiples facettes et un mélange des genres.

– En parcourant le livret du disque, on observe un environnement assez sombre et même assez énigmatique, qui traduit aussi le contenu des textes. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur l’aspect conceptuel de ce nouvel album ?

Les deux ont été construit de la même manière et illustrer par notre ami Paul d’Emgalaï Grafik, qui a réalisé tous les graphiques et les dessins. Au niveau des ambiances musicales et des textes, c’est un peu une chronique du monde dans le lequel on vit à travers notre ressenti, ainsi que de la vie qu’on mène au milieu de tout ça. Le constat n’est pas forcément très gai, mais sans être forcément pessimiste non plus. On observe ce qui nous entoure et on a envie d’en parler et aussi peut-être de donner notre avis sur le sujet.

– Pour conclure, vous venez tout juste de reprendre les concerts. Est-ce qu’une tournée est prévue dans les mois ou semaines à venir, afin de faire vivre ce « Vol. 2 » sur scène ?

Pour le moment, il n’y a rien de concret, juste quelques pistes. C’est encore un peu compliqué au niveau de l’organisation. Ca commence à bouger un peu pour cet automne, mais très timidement. Pour l’instant, c’est encore un peu flou.

L’album « Vol.2 » de WELCOME-X est disponible depuis le 25 juin (Production Le Triton).

https://www.letriton.com/shop/fr/cd/214-welcome-x-vol2.html?search_query=welcome&results=4

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Blues Folk/Americana Rock

Gary Lucas : essentiel et indispensable

Joueur de Blues, de Rock Psychédélique, de Jazz, compositeur de musique classique et de films, GARY LUCAS est une bande originale de son époque à lui tout seul. Songwriter et guitariste hors-pair et aux mille visages, l’Américain est aussi incontournable que discret, dont le talent et la virtuosité parlent pour lui. Aujourd’hui sort « The Essential », une belle représentation de l’éclectisme et de l’élégance du musicien.

GARY LUCAS

« The Essential »

(Knitting Factory Records/PIAS)

Je sais que je ne chronique habituellement pas les compilations, mais si vous n’avez aucun album de GARY LUCAS, c’est le moment de vous procurer « The Essentiel ». Le double-album retrace sur 36 titres les 40 ans de l’incroyable carrière de ce guitariste de génie. Bien plus qu’un guitar-hero, l’Américain est un héro de la guitare à qui aucun style ne résiste : un touche-à-tout capable de tous les grands écarts possible.

Le leader de Captain Beefheart, puis de Gods & Monsters, a joué avec les plus grands groupes et artistes et compte également une trentaine d’albums solos à son actif et dans des registres très différents. Parmi ses collaborations, GARY LUCAS a côtoyé Leonard Bernstein, Chris Cornell, Nick Cave, Warren Haynes (Allman Brothers), Iggy Pop, Dr John… La liste est très longue !  

Mais le fait le plus marquant et célèbre du guitariste reste la découverte de Jeff Buckley dont il devient le mentor et pour qui il écrira « Mojo Pin » et « Grace », devenus des classiques. Producteur des Français de Tanger et co-compositeur de « Spider Web » de Joan Osborne, GARY LUCAS a même signé des bandes originales de films et de séries TV. Virtuose au jeu élégant, l’Américain est bien plus qu’une référence.

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Blues

Bjørn Berge : en toute liberté

Connu et reconnu pour ses prestations époustouflantes en solo (allez voir!), BJØRN BERGE revient cette fois en trio avec un « Heavy Gauge » plein de groove et tout en feeling. Toujours aussi technique, le Norvégien livre un Blues dont lui seul a le secret. Le musicien est toujours aussi surprenant dans ses compositions et le son de sa guitare.

BJØRN BERGE

« Heavy Gauge »

(Independant)

Qu’elles aient six ou douze cordes, les guitares qui passent entre les mains de BJØRN BERGE laissent toujours exploser des sonorités et des mélodies irrésistibles. Techniquement hors-norme, le maître norvégien du picking et de la slide apporte une nouvelle et indispensable œuvre à sa belle et grande discographie. Et cette fois, le guitariste n’est pas venu seul.

Le Scandinave s’est particulièrement bien entouré pour livrer le digne successeur de « Who Else ? ». On retrouve à la basse Kjetikl Ulland et Kim Christer Hylland derrière les fûts. Et comme d’habitude, ce Blues venu du Nord ne manque pas de groove. BJØRN BERGE y glisse quelques touches Folk, jazzy et Rock bien sûr, le tout avec une déconcertante facilité.

Rugueux et suave à la fois, le guitariste excelle dans un Blues Rock qu’il maîtrise totalement (« The Wrangler Man ») sans négliger quelques fantaisies. Très technique, le songwriter se montre pourtant d’un feeling incroyable à travers des morceaux qui lui ressemblent tellement dans leur diversité (« I Got It Made », « Straydog », « Coliseum » et l’étonnant (« Rip Off »). Un grand bol d’air frais !

Bandcamp : https://bjornberge.bandcamp.com/

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Extrême

Philm : avant-gardiste et instinctif

Psychédélique et vertigineuse, la musique de PHILM se balade entre plusieurs styles dans lesquels les Californiens excellent et affichent une grande maîtrise. Avant-gardiste et expérimental, son leader Gerry Nestler a su créer un univers étonnant où règne une liberté absolue. « Time Burner » est aussi inclassable que subtil.

PHILM

« Time Burner »

(Metalville Records)

C’est d’abord avec son groupe Civil Defiance que le génial multi-instrumentiste Gerry Nestler a fait son apparition sur la scène Metal américaine du côté de Los Angeles. Ce n’est qu’en 2010 qu’il fonde PHILM avec un certain Dave Lombardo derrière les fûts, qui partira assez vite chez Slayer. Devenu une référence de l’expérimental underground, c’est en trio que le musicien fait son retour.

Le leader et fondateur de PHILM n’aime pas être coincé dans un registre et c’est ce que l’on comprend vite à l’écoute de « Time Burner ». Metal, Stoner, Blues et même Jazz, ce nouvel album se veut avant-gardiste. Particulièrement libres dans l’interprétation, les Américains donneraient presque l’impression de faire une grosse jam, si l’ensemble n’était pas aussi bien ficelé et précis.

Après « Harmonic » et « Fire From The Evening Sun », PHILM livre un troisième album dans une atmosphère sombre et mélancolique d’où émane aussi une grande colère. L’incroyable complicité entre les trois musiciens est évidente, et Gerry Nestler a composé des morceaux d’une rare profondeur (« Cries Of The Century », « 1942 », « Spanish Flowers » et le morceau-titre long de 14 minutes). Un gouffre sans fond !