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Metal Progressif

The Progressive Souls Collective : no reset

Deuxième partie du concept amorcé et développé par la tête pensante du projet, Florian Zepf, pour THE PROGRESSIVE SOULS COLLECTIVE. Cette réunion autour du Metal Progressif démarrée il y a quatre ans a trouvé ses repères, son ton et une patte qui le rendent désormais identifiable. Formé autour d’un line-up changeant, hormis son frontman, le collectif présente la suite de « Sonic Birth » avec « Sonic Rebirth », une production exceptionnelle, riche et d’une fluidité de chaque instant qui la rend assez unique.

THE PROGRESSIVE SOULS COLLECTIVE

« Sonic Rebirth »

(Metalville Records)

Lorsque que j’avais interviewé Florian Zepf, guitariste, compositeur et maître d’œuvre de THE PROGRESSIVE SOULS COLLECTIVE en 2020 à la sortie de « Sonic Birth », il m’avait confié qu’il ne s’agissait nullement d’un groupe, mais d’un projet dédié à l’amour de la musique progressive. Et pour mener à bien cette aventure, il avait réuni un casting international de haut vol, qui s’était vraiment investi dans la création d’un album très abouti et moderne. Et grâce à un savant mélange d’éléments numériques et organiques, le résultat était assez bluffant de vérité.

Pour « Sonic Rebirth », l’Américain continue sur cette belle lancée et il est toujours aussi bien entouré. A commencer par le chanteur Vladimir Lalic (Organized Chaos) qui est devenu bien plus que la simple signature vocale du collectif. Sont venus grossir les rangs : Megan Burtt (Gingerbomb), Jamie Powell et Simen Børven (Leprous), Gerald Peter (Jordan Rudess), Tim Korycki (Tomorrow’s Eve), ainsi que des membres de Special Providence et des musiciens d’Eric Clapton, Joe Cocker… THE PROGRESSIVE SOULS COLLECTIVE a donc encore fière allure, tout comme l’ensemble de ce nouvel opus.    

Les deux réalisations s’inscrivent dans un même concept et l’on reprend là où en était « Sonic Birth ». Toujours aussi affiné et élégant, le Metal Progressif du combo brille par la technicité de ses membres, mais pas seulement. Les mélodies sont accrocheuses, les thèmes très bien développés et les compositions de Florian Zepf montrent d’étonnantes facettes dans leurs structures. Si l’on pense parfois à Pain Of Salvation ou Haken, THE PROGRESSIVE SOULS COLLECTIVE s’étend dans un style très personnel et dans des ambiances très variées. Une nouvelle réussite.  

Le créateur du projet : Florian Zepf
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Ethnic Metal Metal Progressif Symphonic Metal

Myrath : prophétique

Avec « Karma », MYRATH semble ouvrir un nouveau chapitre et donne même de l’élan à une carrière déjà bien remplie. Sans renier ce qui constitue son ADN, à savoir un Metal Oriental à la fois Heavy, symphonique et progressif, il met en exergue ce savoureux mélange, et même si les envolées ne manquent pas, l’efficacité paraît être la priorité de ces nouveaux titres qui, pourtant dotés d’arrangements très soignés, évitent toute fioriture. Guidé par son frontman Zaher Zorgati, le combo se montre lumineux, positif et énergique.

MYRATH

« Karma »

(earMUSIC)

Cinq ans après le très bon « Shehili » et le double DVD live au Sweden Rock et à Carthage, les Franco-Tunisiens font un retour exceptionnel. Très bien écrit, « Karma » doit cette petite métamorphose, du moins cette évolution, a une méthode de composition imposée par les circonstances, mais qui aura permis aux musiciens de se recentrer sur leurs fondamentaux et d’expérimenter aussi beaucoup. Direct, fluide et dynamique, MYRATH revient dans une forme éblouissante et cela s’entend sur les onze titres de ce sixième opus qui devraient prendre toute leur dimension sur scène.

Et le groupe commence aussi, d’une certaine manière, à s’émanciper très légèrement du Metal Oriental, dont ils sont bien sûr les fervents représentants. Musicalement, pas de bouleversements majeurs mais, en revanche, « Karma » est entièrement chanté en anglais, une première, ce qui montre à l’évidence que MYRATH se projette de plus en plus à l’international. Et ce n’est pas tout, puisque l’on retrouve le grand Jacob Hansen au mix et à la production. Le son est clair, puissant, équilibré et surtout il conserve et met en lumière les particularités du quintet.

Pied au plancher, c’est « To The Stars » qui ouvre les festivités sur un groove d’enfer et un petit air vintage niché au creux de ce Metal plutôt costaud. Techniquement, MYRATH hausse le ton sans tomber dans une technicité exacerbée pour autant. Incisive et mélodique, cette nouvelle réalisation mise aussi sur les changements d’atmosphères et de tempos. On n’a pas vraiment le temps de s’ennuyer, tant « Karma » ne manque pas d’éclat (« Into The Night », « Candles Cry », « Words Are Falling », « Child Of Prophecy », « The Empire », « Carry On »). Les étoiles sont alignées…

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Metal Progressif

Theraphosa : une introspection du vice

Quatre ans après « Trancendence », qui l’avait propulsé au rang des formations de Metal Progressif les plus prometteuses de l’hexagone aux côtés de quelques autres, THERAPHOSA n’en a pas terminé avec son exploration de l’esprit humain et de ses tourments dans ce qu’il possède de plus obscur. Avec Rémy Deliers aux commandes (Gojira), les Français s’assurent une production très soignée et il fallait bien ça pour saisir pleinement toute la technicité de la structure des titres d’« Inferno », un modèle de finesse, de précision et de puissance.

THERAPHOSA

« Inferno »

(Circular Wave/Season Of Mist)

Depuis plus d’un millénaire, l’œuvre de Dante inspire autant qu’elle peut rebuter, tant la noirceur qu’elle décrit au cœur d’un Moyen-âge sombre à bien des égards est à la fois captivante et terrifiante. Plongeant dans les tréfonds de l’âme humaine, ce périple traverse les trois royaumes des morts en bouleversant les représentations traditionnelles et en affrontant ainsi l’indicible. En prolongeant d’une certaine manière la thématique déjà touchée du doigt sur « Transcendence », THERAPHOSA poursuit son chemin sur des terres musicales qu’il commence à bien connaître et des atmosphères qu’« Inferno » sublime un peu plus.

Presque méconnaissable depuis son EP éponyme sorti en 2018, la fratrie semble être parvenue à faire de cette empreinte très avant-gardiste un style singulier et personnel, où son Metal Progressif, très groove et mélodique, s’exprime pleinement et surtout avec une fluidité resplendissante sur ce deuxième album. Martin (batterie), Matthieu (basse) et Vincent Dubout (chant, guitare) maîtrisent parfaitement leur sujet, se montrent techniquement intraitables et nous emportent sans mal dans des sphères presque cinématographiques avec une luminosité sonore tout en contraste avec son propos.

Envoûtant et entraînant, « Inferno » se développe sur onze plages, puisque l’intro « Vestibule » est aussitôt suivi du morceau du même nom, une habille façon de donner le ton de ce nouvel opus, qui révèle quelque surprises au fil de son écoute. A commencer par « Limbo », chanté en français, où THERAPHOSA se repose sur un texte très bien écrit. Les chœurs font aussi résonnance (« Gluttony », « Heresy »), tandis que les riffs tranchants s’enchaînent sur des rythmiques galopantes et des lignes de basse relevées (« Wrath »). Le trio ne s’interdit rien et va au bout de son ambitieux projet avec un panache éblouissant.      

Photo : Denis Goria
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Metal Progressif

Caligula’s Horse : au sommet

Quand la délicatesse guide la robustesse du Metal avec autant de savoir-faire et d’inspiration, il est très difficile d’y résister. S’affirmant au fil de ses réalisations avec une créativité qui conjugue des moments éthérés avec d’autres résolument fracassants, CALIGULA’S HORSE n’a plus à chercher ou courir après une identité musicale, qui est devenue tellement évidente. « Charcoal Grace » élève encore le niveau dans des sphères où le Metal Progressif proposé n’a que très peu d’égal actuellement dans le monde.   

CALIGULA’S HORSE

« Charcoal Grace »

(InsideOut Music)

Les Australiens peuvent maudire la période du Covid. Un cinquième album, « Rise Radiant », aussi lumineux que puissant presque passé à la trappe, puis le départ du guitariste Adrian Goleby dans la foulée, ont réduit à néant les efforts dans ce (long) moment. Pas, puis très peu de scènes, CALIGULA’S HORSE s’est donc remis à l’ouvrage et même si le contenu de l’album traite du sujet qui a occupé et pollué l’esprit du quatuor, « Charcoal Grace » est de loin la production la plus ambitieuse et audacieuse du groupe depuis ses débuts. En prenant des risques, il se hisse avec force au sommet du Metal Progressif actuel… avec Soen !

Ni le changement de line-up, ni la frustration engendrée par des mois incertains n’ont remis en cause ou en question cette faculté incroyable à composer une musique dont la technique et la technicité se mettent au service de l’émotion. On reconnaît CALIGULA’S HORSE dès l’entame de « Charcoal Grace » et il ne cherche pas à révolutionner le genre, ce qui serait peine perdue. Cependant, s’il est presqu’impossible de réinventer un style déjà très riche, certains parviennent pourtant à renouveler la seule chose qui puisse l’être encore : sa beauté. Et ce sixième opus vient le démontrer avec brio sur une heure intense.

« Charcoal Grace » est un disque assez particulier puisqu’il s’articule autour de sa pièce maîtresse : le morceau-titre courant sur 24 minutes et scindé en quatre parties. Sans pour autant livrer un album-concept, CALIGULA’S HORSE impose un lien entre les morceaux, qui naviguent entre instants suspendus, charges Heavy et massives et une poésie qui croise le fer avec une énergie souvent colossale (le torturé « Golem », le rêveur « Sails », l’accrocheur « The Stormchaser », ou « Mute » et sa flûte enchanteresse). Malgré la longueur des titres, on ne s’y perd jamais, tant l’originalité du combo est unique en son genre.  

Photo : Andrew Basso
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Power metal Progressive Heavy Metal Symphonic Metal

Angra : un nouveau cycle de confiance

Malgré la période difficile qui a suivi la sortie de « Ømni », ANGRA semble avoir fait de ces obstacles et de ses peines une force créatrice qui lui a permis de faire face, mais également de réaliser l’excellent « Cycles OF Pain ». Toujours sous la houlette du producteur Dennis Ward, cette dizième galette est d’une somptueuse diversité et prouve que le combo est bel et bien devenu le fer de lance de la scène Metal brésilienne. Délicat et massif, il navigue habillement entre Power, progressif, symphonique et Heavy Metal avec une technicité redoutable.

ANGRA

« Cycles Of Pain »

(Atomic Fire Records)

Depuis plus de 30 ans et surtout après la sortie du conceptuel « Holy Land » en 1996, ANGRA incarne le Heavy Metal brésilien grâce à des couleurs progressives, parfois symphoniques et même Power Metal plus récemment. Etonnamment, son ascension correspond au départ de Max Cavalera de l’emblématique et pionnier Sepultura. Il y avait donc une place à prendre et ça n’a pas traîné. Au contraire de ses compatriotes qui ne sont toujours pas parvenus à faire peau neuve, le groupe a montré beaucoup d’ambition et de créativité. Des éléments que l’on retrouve sur « Cycles Of Pain », son dixième album.

Toujours guidé par son guitariste Rafael Bittencourt, d’ailleurs seul rescapé du line-up originel et en état de grâce sur l’ensemble du disque, ANGRA livre aussi sans doute son album le plus sombre à ce jour. Les cinq dernières années ont été douloureuses à titre personnel pour le six-cordiste et est venue s’ajouter la disparition d’Andre Matos, ami et chanteur historique de la formation. Si le titre « Cycles Of Pain » parle de lui-même, son contenu n’en demeure pas moins très varié et il est même le plus brésilien jusqu’à présent depuis sa pochette jusque dans son contenu, qui libère paradoxalement une belle luminosité.

Si les compos de Bittencourt et du basiste Felipe Andreoli sont incroyables, que dire de la performance de l’ex-Rhapsody Of Fire, Fabio Lione ? Le frontman célèbre ses dix ans au sein d’ANGRA de la plus belle des manières avec une polyvalence vocale plus impressionnante que jamais (« Ride Into The Storm », « Gods Of War », « Tide Of Changes », « Faithless Sanctuary »). Très technique, mélodique et accrocheur, « Cycles Of Pain » est l’une des meilleures productions des Sud-Américains et la sensibilité et la puissance de ces nouveaux titres montrent à quel point le successeur de « Ømni » le surclasse. Magistral !

Photo : Marcos Hermes
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France Rock Progressif

Nine Skies : guidé par l’émotion [Interview]

A peine « The Lightmaker » sorti, NINE SKIES a pris enfin la route pour une première série de concerts dans le sud de la France, d’où est originaire la majorité de ses membres. Un retour devant le public qui s’est fait attendre et qui s’est soldé par une belle réussite. Pour sa quatrième réalisation, le groupe a vu les choses en grand et livré un album digne des meilleures productions actuelles. Autour d’un noyau dur inamovible, le septet (sur scène) présente un Rock Progressif varié, s’appuyant sur de solides fondations et avec un regard peut-être plus électrique qu’auparavant. Anne-Claire Rallo, claviériste et parolière, et Alexandre Lamia, guitariste, arrangeur et également claviériste reviennent sur ce nouvel opus et les premières dates.   

– Vous nous aviez laissé il y a deux ans avec « 5.20 », un album entièrement acoustique, pour revenir aujourd’hui avec « The Lightmaker » où vous renouez avec l’électrique. Sur le précédent, c’était surtout l’envie de tenter une expérience musicale différente et d’explorer d’autres sonorités qui vous avaient motivé ?

Alex : Oui, il y a un peu de ça, car nous aimons énormément explorer des nouvelles facettes musicales. « 5.20 » était en réalité censé être un album où l’on réarrangeait acoustiquement nos anciens morceaux, mais de fil en aiguille, nous en sommes arrivés à un album entièrement original.

– « The Lightmaker » est votre quatrième album et probablement aussi le plus abouti. Et au-delà de ça, c’est aussi le premier sans Eric (Bouillette). Il y a une profondeur évidente qui s’en dégage d’ailleurs. De quelle manière et dans quel état d’esprit l’avez-vous abordé, puis composé ?

Alex : Merci beaucoup. Ce fut une épreuve terriblement compliquée pour moi, mais en même temps libératrice. J’ai tendance à réfugier et libérer mes émotions par la sincérité de la musique. Elle ne trompe jamais, et j’ai voulu m’investir encore plus pour honorer Eric et tout ce qu’il a donné et m’a donné. J’ai longtemps critiqué le résultat final de « The Lightmaker », mais je suis content que le public reçoive l’album aussi bien.

Photo : Philippe Comodini

– Dorénavant, NINE SKIES repose sur un socle solide et également encore différent. Anne-Claire, tu t’es occupée de l’écriture des textes et du concept de l’album. Comment vous êtes-vous répartis la composition des morceaux de « The Lightmaker » ?

Anne-Claire : A vrai dire, nous n’avons pas eu besoin de nous répartir la composition, puisque nous avons, Alex et moi, travaillé tous les deux sur la base de chaque morceau avant de les envoyer aux musiciens. Alex sur l’instrumental et moi sur le concept et les paroles. Mais nous échangeons toujours nos idées et nos sentiments sur chaque titre : Alex au niveau thématique et moi pour l’aspect musical.

– C’est une habitude chez vous maintenant, on retrouve de nombreux guests, dont certains sont même familiers aux auditeurs. Peux-tu nous faire les présentations et nous expliquer la répartition et le choix de chacun sur les nouveaux morceaux ?

Anne-Claire : Nous sommes très chanceux. D’abord, parce que tous ces musiciens sont des artistes bourrés de talent, mais aussi parce que chaque participation fait sens. Il ne s’agit pas d’une pyramide de lego. D’ailleurs beaucoup d’entre eux sont également des amis. 

Riccardo était une évidence. Il entretenait un rapport très fort avec Eric, et ils sont très proches tant au niveau artistique qu’émotionnel. Il s’est totalement approprié le poème que je lui ai envoyé pour « The Explorer » et a réussi à se l’approprier tout en faisant un superbe hommage à Eric. Arnaud et Laura ont parfaitement cerné l’esprit que nous voulions dégager de « The Chaotic », et Adam Holzman est juste, comme à son habitude, exceptionnel. L’ambiance de ses claviers tout au long de la chanson, et bien sûr avec ce solo dont lui seul a le secret, rendent le morceau magique.

Kristoffer (Gildenlöw) a également été une des plus belles surprises de cet album. Il est non seulement doué au-delà du commun, mais c’est quelqu’un d’exceptionnel humainement. Son travail vocal et de basse sur « The Lost » est exceptionnel et cela a été un réel plaisir de travailler à la création de ce morceau avec lui, étape par étape.

Charlie (Bramald) est également un ami proche. C’était, comme Riccardo, une évidence, pour l’album comme pour Eric. Et il a fait un travail extraordinaire. Je n’ai même pas besoin d’en parler, il vous suffit d’écouter !

Et « The Architect »… Ce morceau est très particulier pour moi, et cher à mon cœur, pour beaucoup de raisons. Je pense que c’est la conclusion parfaite pour l’album et je suis ravie de voir qu’il est très bien accueilli par les auditeurs. Le chant d’Achraf est splendide, Marco Minnemann est, comme à son habitude, royal et la guitare de John Mitchell vit d’elle-même, grâce à cette magie dont lui seul à le secret, et tout en donnant à la fois une seconde vie au morceau et même à l’album lui-même. J’aime vraiment que le disque se conclue ainsi. 

Anne-Claire Rallo – Photo : Philippe Comodini

– Je trouve les titres de ce nouvel album beaucoup plus incisifs que sur les autres. Cela s’explique par le concept, par les circonstances qui ont touché le groupe de très près ou, là encore, c’est un nouvel aspect de NINE SKIES que vous souhaitiez présenter et découvrir peut-être aussi vous-mêmes ?

Anne-Claire : il est certain que les expériences personnelles d’un artiste influencent, consciemment ou pas, ses créations, mais nous n’avons pas réfléchi à un aspect particulier que nous voulions atteindre. C’est juste réellement le résultat sincère des choses telles qu’elles avaient besoin de sortir.

Alex : Ce qui est bien avec NINE SKIES, c’est que nous faisons confiance à nos ressentis plus qu’à une direction déjà définie. Nous essayons de les transformer plutôt que de penser à un concept. Celui-ci vient après les émotions.

– Même si NINE SKIES évolue bien sûr autour d’un noyau dur de cinq musiciens, est-ce que vous ne seriez pas tenté à l’avenir par la réalisation d’un album juste entre vous ? Ou est-ce que ce partage et ces collaborations ne font-ils pas finalement partie intégrante de l’ADN du groupe ?

Anne-Claire : Comme je le disais, nous créons dans l’intensité du ressenti, rien n’est réfléchi. Cela ne signifie pas que nous faisons n’importe quoi non plus, bien sûr ! Le premier album était du 100% NINE SKIES, sans guests. Chaque participation a un sens profond et une réelle signification. Nous ne pensons pas encore au prochain album, nous verrons comment les choses se présentent le moment venu.

Alex : Qui sait ! Nous n’y pensons pas encore et nous voulons pour l’instant nous tourner vers le live, un maximum. Mais nous sommes complètement ouverts pour tester des choses différentes à l’avenir.

Alexandre Lamia – Photo : Philippe Comodini

– Depuis sa création, NINE SKIES s’est produit assez peu sur scène en raison des distances entre vous. Là, une série de concerts vient de s’achever. Comment l’avez-vous abordé étant donné le line-up très fluctuant du groupe ?

Anne-Claire : En effet, les évènements divers et le Covid nous ont forcé à annuler les dates et les tournées prévues après le ’Prog en Beauce’. Nous sommes très impatients de pouvoir enfin leur donner vie. Nous avons enfin le line-up parfait et cela est plus rassurant qu’une source de stress. Tous les musiciens apportent énormément avec leur touche personnelle et nous pouvons facilement adapter en live les morceaux sans les guests présents en studio, surtout dans le sens où nous ne sommes pas un groupe qui joue sur du backing ou qui reproduit une copie parfaite du CD sur scène.

Alex : Je peux, du coup, te répondre après cette première tournée, car elle fut une expérience absolument inoubliable. Les musiciens sont tous des monstres dans leur domaine et nous avons une telle énergie, une communication et une connexion que je peux juste dire que nous attendons vivement la suite, c’est-à-dire la tournée anglaise en mars 2024 !

– Un peu de légèreté pour conclure, et même si j’ai évidemment ma petite idée sur le sujet : que cache cette appellation de ‘Rock Frogressif’, dont vous vous affublez depuis peu ?

Anne-Claire : A vrai dire, c’est un de nos auditeurs qui nous a un jour attribué ce titre. Nous l’utilisons évidemment de manière ironique, notamment en réponse (taquinerie, mais jamais méchante) à certaines classifications, dont nous sommes régulièrement le sujet : néo-prog, prog de chambre, etc… La chose est restée depuis !

« The Lightmaker », le nouvel et quatrième album de NINE SKIES, est disponible sur le Bandcamp du groupe :

https://nineskies.bandcamp.com/album/the-lightmaker

Et chez FTF Music :

https://www.ftf-music.com/shop/nineskies/nineskies.htm

Et une simple recherche sur le site (en haut à droite) vous permettra de retrouver toutes les interviews du groupe et les chroniques d’albums.

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Metal Progressif

Apotheus : univers parallèles

En jouant sur le contraste des émotions avec une telle dextérité et beaucoup d’imagination, APOTHEUS passé le cap des 15 ans d’existence avec panache. Avec un Metal Progressif balayant un spectre très large, les Lusitaniens évoluent dans un cadre Sci-Fi, où ils multiplient les expérimentations entre climats cinématiques et fulgurances intenses et furieuses, offrant à « Ergo Atlas » un relief étonnant.

APOTHEUS

« Ergo Atlas »

(Black Lion Records)

Depuis le début de l’année, APOTHEUS distille au compte-goutte les morceaux de son nouvel album et les plus curieux ont déjà pu découvrir « Shape And Geometry », « The Unification Project », « Firewall » et « Cogito ». Si ces quatre singles donnent une bonne idée et un avant-goût copieux d’« Ergo Atlas », ce troisième opus des Portugais mérite d’être écouté dans son intégralité. Et puisqu’il s’agit de la suite de « The Far Star », un petit détour par son prédécesseur s’impose donc.

Inspiré par l’œuvre de l’écrivain de science-fiction Isaac Asimov, APOTHEUS propose un Metal Progressif où il joue sur les atmosphères, tout en assénant de violents passages souvent growlés. Cependant, le quatuor met aussi en exergue des titres aux mélodies subtiles et accrocheuses. C’est donc dans un univers très futuriste que nous propulse le combo et sa musique est parfaitement au diapason des ambiances explorées. « Ergo Atlas » devient rapidement immersif.

Sur une production moderne et massive, APOTHEUS se montre très aérien et développe des thèmes techniques et exigeants, avant de s’engouffrer l’instant suivant dans des envolées fracassantes et très Groove Metal. Entre un registre accessible et harmonieux et des crescendos flirtant avec un style extrême, « Ergo Atlas » est un disque plein de surprises et très maîtrisé par des musiciens créatifs et dynamiques (« March Of Redemption », « Re-Union », « Re-Genesis »). Transcendant.

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Hard 70's Metal Progressif

Asmodean : monumental

Ils n’ont pas froid aux yeux et c’est même un doux euphémisme. Repoussant les limites du Metal et du Hard Rock dans une sorte de Space Rock futuriste et massif, ASMODEAN risque de vite devenir incontournable, tant la richesse musicale déployée sur « By A thread » montre une élégance et une virtuosité canalisées, mais insaisissables. Progressif et acéré, le style du quatuor défie les codes pour s’imposer avec brio.

ASMODEAN

« By A Thread »

(Rob Mules Records)

Si ASMODEAN commence sa carrière avec un tel premier album, je n’ose même pas imaginer la suite ! C’est suffisamment rare et inédit pour souligner que « By A Threat » est un disque d’une folle créativité et d’une interprétation magistrale. Si on ajoute à cela une production sans fausse note, une magnifique pochette et une audace à toute épreuve, on ne prend aucun risque à affirmer que le quatuor norvégien, pourtant fondé à Liverpool en 2015, est à suivre de très, très près.

Dans un Progressive Metal aux saveurs Hard Rock, ASMODEAN vient se poser quelque part entre Mastodon et Faith No More, sous l’œil bienveillant de Black Sabbath et d’Opeth. Et si les Scandinaves ne manquent pas d’ambition, il n’y a cependant aucune prétention dans la démarche : juste l’envie de toucher l’excellence. Avec « By A Threat », l’échappée musicale est unique, captivante et brillamment mise en lumière par un son clair et puissant, qui devient très vite immersif.

La déferlante de riffs, la cascade de breaks et la finesse des arrangements montrent une maturité et une maîtrise étonnante. A la fois contemplatif, introspectif, expérimental et énergique, le jeu d’ASMODEAN est à l’image de sa fougueuse jeunesse, aussi décomplexée que sûre d’elle (« The Undoing », « Below The Line », « Defying Truth », « I Wait », « Sanguine », « Zooethics », « Best Sold Disguise », « Jack O’Shadows »). Ce premier opus est un bouillonnant chaudron vraiment spectaculaire.

Photo : Stine Knutsen
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Rock Progressif

Nine Skies : frogressive land

Après la tragique disparition d’Eric Bouillette, l’un des principaux maîtres d’œuvre de la formation, on aurait pu s’interroger sur la suite qu’auraient donné les membres de NINE SKIES, et à juste titre d’ailleurs. En lui dédiant « The Lightmaker », le groupe de Rock Progressif opte donc pour la poursuite de leur si belle entreprise et on ne saurait que les en remercier. Très varié, aérien et parfois même aux frontières du Metal, les Français montrent une créativité toujours aussi féconde et basée sur une histoire saisissante.

NINE SKIES

« The Lightmaker »

(Independant/FTF Music)

Depuis ses débuts en 2017, NINE SKIES ne cesse de surprendre en se réinventant au fil des albums. « The Lightmaker » est le quatrième des Français en studio, auquel il faut ajouter « Live @ Prog En Beauce », sorti en 2021. Suite à la disparition de son multi-instrumentiste et compositeur Eric Bouillette, le groupe évolue aujourd’hui autour d’un cercle de six musiciens chevronnés, dont notamment la parolière, musicienne et créatrice du concept de l’album, Anne-Claire Rallo, et Alexandre Lamia (guitares, claviers), qui s’est aussi chargé de l’ensemble de la production dans ses moindres détails.

Suite à « 5.20 », entièrement acoustique, NINE SKIES revient avec un album-concept électrique de haute volée, qui voit se côtoyer de nombreux courants du Rock Progressif. Et si l’éventail musical est large, la liste des invités conviés sur « The Lightmaker » est également impressionnante et d’une qualité toujours aussi éclatante. On y retrouve Marco Minnemann, Adam Holzman, Kristoffer Gildenlöw, John Mitchell, Riccardo Romano, Martin Wilson, Charlie Bramald, Arnaud Quevedo et Laura Piazzai. Autant de talents qui font rayonner cette nouvelle réalisation.

C’est même devenu une marque de fabrique et une habitude qui offrent une belle diversité cette fois encore à des morceaux d’une rare élégance, où l’on retrouve d’ailleurs des aspects très percutants sur des morceaux relativement longs (« The Explorer », « The Dreamer », « The Chaotic », « The Lost », « The Architect »). Désormais incontournable sur la scène progressive hexagonale, le sextet livre un brillant opus, et c’est donc assez naturellement qu’ils s’exprimeront très prochainement ici même pour une explication plus en détail de la conception et de l’enregistrement de « The Lightmaker ». A suivre…

Retrouvez les précédentes interviews :

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Metal Progressif Sludge

Baroness : des émotions non-figées

Entièrement autoproduit et sortant sur son propre label, ce sixième album de BARONESS tient plus que jamais son rang en refusant clairement d’adopter un chemin linéaire, ce qui le rend beaucoup plus créatif et novateur que la plupart des formations actuelles. « Stone » surprend, s’aventure là où on ne l’attend pas et élargit encore un peu plus le monde du Metal.

BARONESS

« Stone »

(Aloraxan Hymns)

Depuis 20 ans, BARONESS séduit de plus en plus, ou sombre dans un marasme musical irrécupérable, c’est selon. Bien sûr, les fans du Sludge Metal des débuts peuvent être déçus et peinent à s’y retrouver, même si l’on décèle toujours des riffs bien sentis, véloces et bien musclés. A chaque disque, le quatuor fait sa mue, se remet en question et explore de nouveaux cieux en se réinventant avec beaucoup d’élégance et de savoir-faire. Et avec « Stone », le processus suit son cours.

Quatre ans après « Gold And Grey » qui avait déjà donné la ligne artistique que BARONESS entendait suivre, « Stone » vient enfoncer le clou à l’instar d’Opeth dont le parcours reste aussi exemplaire. Mais cela ne vaut bien sûr que pour la démarche des deux groupes, pas pour leur musique. Les Américains prennent donc une direction plus progressive, sans pour autant donner le Prog à proprement parler. Ce nouvel opus regroupe de très nombreux courants et c’est cela toute sa force.

Agressif sur « Beneath The Rose », « The Choir » et « The Dirge », plus flexible sur « Last World » et son incroyable solo, tout comme sur « Shine », BARONESS se montre d’une grande diversité dans les atmosphères. Folk sur l’intro de « Magnolia » et plus nerveux sur « Under The Wheel », il montre la même habileté peu importe l’univers dans lequel il évolue. Délicat et audacieux, le gang de Georgie affiche une confiance, une assurance et une maîtrise totale sur ce « Stone » monumental.

Photo : Ebru Yildiz