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Folk/Americana International Stoner/Desert

Tony Reed : une vision positive de l’avenir [Interview]

Producteur reconnu dans le milieu du Stoner Rock et au-delà, le multi-instrumentiste TONY REED a mis entre parenthèse ses groupes Mos Generator et Big Scenic Nowhere pour sortir il ya quelques mois son premier album solo. Acoustique, très épuré et touchant, le compositeur américain a livré un « Funeral Suit » étonnant, sincère et très personnel. Rencontre avec ce monument de Seattle.

– Il y a quelques mois, tu as sorti « Funeral Suit » dans un registre où on ne t’attendait pas forcément. Quel regard portes-tu sur ce premier album solo avec un peu de recul ?

Au cours des dernières années, on m’a demandé de faire un album acoustique à plusieurs reprises. Certaines des chansons de « Funeral Suit » ont été écrites il y a plus de cinq ans. C’est un style dans lequel je suis aussi à l’aise que dans du Rock lourd et, au niveau des paroles, il ne s’éloigne pas trop du contenu des trois derniers albums de Mos Generator. La grande différence ici, c’est que les voix et les paroles sont présentées dans un cadre sans grosses guitares, ni de section rythmique agressive.

– Malgré de multiples productions, on te connait surtout en tant que leader de Mos Generator et plus récemment avec Big Scenic Nowhere. Qu’est-ce qui t’a poussé à réaliser un album Folk et presqu’Americana ? C’est un projet que tu mûris depuis longtemps ?

En fait, chaque chanson a été enregistrée telle qu’elle à l’exception de deux chansons initialement interprétées par Mos Generator. Ce sont presque toutes des démos. Je trouve que dans certains styles de musique, si tu passes trop de temps à améliorer la performance ou les arrangements, tu perds l’énergie et le sentiment de départ. Sur la plupart de ces chansons, j’ai enregistré la guitare très rapidement, puis j’ai enregistré les voix au moment où je les écrivais. Il y a beaucoup d’erreurs sur l’album, mais je ne pense pas que je changerai quoi que ce soit. Cela donne vraiment aux chansons une sensation différente.

– « Funeral Suit » est un album assez sombre et intimiste, presqu’introspectif. C’est la situation due à la pandémie qui a guidé ce choix, ou c’est quelque chose de plus profond ? Et il y aussi ce changement radical de style…

Toutes ces chansons ont été achevées avant la pandémie. Si je me souviens bien, les derniers enregistrements de l’album ont été faits en novembre 2019. Tu as raison de dire que c’est un album intime et introspectif. Je n’ai jamais été aussi transparent dans mon écriture. Au cours des dernières années, j’ai jeté un coup d’œil sur les choses que je n’aime pas chez moi et les choses que j’ai faites et qui ont blessé les personnes que j’aime. De nombreux textes de Mos Generator reflètent également ce type d’auto-analyse. Entre « Funeral Suit » et l’album de Mos Generator « Shadowlands », je pense avoir exorcisé ces sentiments et les avoir remplacé par une vision positive de l’avenir.

La mort de mon père en 2019 a également joué un grand rôle dans la création de cet album.  « Funeral Suit », la chanson, parle de son décès et de la façon dont cela affectera le reste de ma vie. Il s’agit aussi des êtres chers qui sont toujours là et qu’ils peuvent partir à tout moment. Alors, chérissez cette vie que vous avez avec eux. J’ai l’impression que mon père comprendrait tous ces sujets sombres sur lesquels je chante, s’il pouvait écouter l’album. Je l’aime beaucoup et je peux honnêtement dire que bon nombre de mes propres défauts de caractère sont ceux que je pouvais voir en lui. Il aurait compris cet album. Il était un grand fan de mon travail et m’appelait régulièrement pour me le dire. Je porte ces mots partout avec moi.

En ce qui concerne le style de musique, j’écris et j’enregistre de la musique acoustique depuis plus de 30 ans. Dans mes archives personnelles, il y a des centaines de chansons que j’ai enregistrées dans de nombreux styles. Certaines ont été publiées ou rééditées au fil des ans, et il pourrait y en avoir d’autres dans un proche avenir. En ce moment, j’ai cinq projets et groupes actifs qui écrivent et enregistrent. Le seul avec des horaires de répétition réguliers est Hot Spring Water. Cela ressemble beaucoup au Rock Country du début des années 70 en Californie du Sud. C’est une sorte de mix Country alternative et sombre. C’est un groupe formidable et c’est très sympa à jouer sur scène.

– Sur cet album, tu es seul aux commandes. « Funeral Suit » est un disque que tu tenais toi-même à mener de bout en bout ?

Je suis un maniaque du contrôle donc, pour moi, ce n’est pas si différent que pour d’autres disques. Je gagne ma vie en tant qu’ingénieur du son et producteur depuis mes vingt ans environ, ce qui me permet également d’avoir le contrôle sur mes chansons. Au fil des ans, j’ai sorti pas mal de disques où je joue de tous les instruments. Cela vient vraiment du fait que je ne suis pas une personne très sociale et que je passe la plupart de mon temps à côté d’un enregistreur avec toute sorte d’instrument de musique à la main. Et j’ai eu la chance de pouvoir en faire l’œuvre de ma vie.

– En plus de cet album très touchant, Il y a également eu « Lavender Blues » avec Big Scenic Nowhere cette année. Finalement, elle aura été assez riche pour toi. Doit-on s’attendre maintenant à un nouvel album de Mos Generator en 2021 ?

Bob (Balch, également guitariste de Fu Manchu) et moi avons une excellente relation musicale. Nous sommes tous les deux mélomanes et essayons de jouer et d’apprendre sans cesse. Big Scenic Nowhere est génial, parce que j’arrive à saisir de longues jams et à les rendre très structurées en studio. C’est un processus que je connais, mais que je n’ai jamais fait avec autant d’intensité. C’est vraiment un défi amusant. En ce qui concerne Mos Generator, j’ai passé l’année dernière à essayer de trouver des morceaux pour maintenir la présence du groupe auprès du public. Actuellement, je suis très heureux de travailler sur de nouveaux morceaux. Le problème est que nous ne vivons pas les uns à côté des autres. Jono (batterie) habite à 3.500 kilomètres de Sean et moi. Et en ce moment, il est très difficile de se réunir et de travailler sur de nouvelles compos. Mais nous prévoyons au moins d’écrire et d’enregistrer un nouvel album (peut-être un double) d’ici la fin de l’année. C’est notre objectif.

Retrouvez la chronique de l’album :

https://rocknforce.com/tony-reed-la-surprise-folk-du-chef

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Stoner/Desert

Dozer : maître du Stoner européen

On attendait DOZER avec de nouvelles compositions, enfin actuelles, mais il faudra encore attendre un peu. Les Suédois proposent des titres datant du début des années 2000… ce qui ne gâche rien au plaisir. Et avec une pochette signée du chanteur de Lowrider, « Vultures » fait plus que ravir.

DOZER

« Vultures »

(Heavy Psych Sounds Records)

En mars dernier, lors d’une interview à l’occasion de la réédition de trois de leurs albums, Tommi Holappa, guitariste de DOZER, m’avait confié qu’aucun nouveau morceau n’était en cours d’écriture. Et malgré l’insistance des fans (et la mienne !), il semblerait que le Suédois ait tenu parole. Certes, « Vultures » est constitué d’inédits, mais…

Se distinguant par un Stoner Rock hors-norme élevé par la voix incroyable de Fredrik Nordin, DOZER a su rendre son style aussi singulier que référent pour toute une génération de groupes. C’est à l’occasion de leur quatrième album, « Through The Eye Of Heavens », que les Scandinaves avaient alors mis en boîte ces six morceaux (et un bonus).

Enregistrés en 2004-2005 aux Rockhouse Studios de Borlänge en Suède, les morceaux de « Vultures » étaient au départ des démos de pré-production. Cela dit, il y a de quoi se ravir de les voir sortis du placard, tant certains rappellent la grande époque de DOZER (« The Blood Is Cold », « The Impostor », « Head Ghost » et le morceau-titre). On attend maintenant un vrai retour.

Retrouvez l’interview de Tommi Holappa (mars 2020) :

https://rocknforce.com/un-rocher-dans-le-desert/
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Hard Rock

Inglorious : la relève du Hard Rock anglais

Mariant avec beaucoup de talent le côté mélodique avec la fougue d’un Hard Rock qui prend son inspiration dans les 70’s jusqu’à aujourd’hui, INGLORIOUS apporte beaucoup de fraîcheur et de créativité à un style qui se repose sur ses glorieuses années passées. « We Will Ride » offre une superbe combinaison de nombreux courants, qui distingue les Anglais grâce à un jeu ambitieux et solide.

INGLORIOUS

« We Will Ride »

(Frontiers Music)

Fondé en 2014 à Londres, INGLORIOUS commence à se faire un nom dans le monde du Hard Rock et pas seulement du côté de l’Angleterre. Fort de trois premiers albums (« I », « II » et « Ride To Nowhere ») qui ont reçu un très bon accueil, le groupe enchaine sur sa belle dynamique avec ce « We Will Ride », toujours dans un style très vigoureux, mélodique et remarquablement interprété par le quintet britannique. 

Alors que les Anglais avaient enregistré leur précédent opus avec Kevin Shirley (Led Zeppelin, Aerosmith), c’est aux Pays de Galles et avec Romesh Dogandoda (Motörhead,  Bullet For My Valentine) qu’ils ont enregistré « We Will Ride ». Et le résultat est exceptionnel faisant de cet album l’une des meilleures productions du genre en ce moment. Racé et accrocheur, INGLORIOUS se montre très inspiré.

Mené par son chanteur Nathan James, connu pour ses prestations avec Trans-Siberian Orchestra et Uli Jon Roth, le groupe est plus mature que jamais et propose un Hard Rock aux multiples facettes. Armé de gros riffs percutants sur « Where Are You Now » ou « Freak Show », le combo sait aussi se faire plus bluesy (« I Don’t Know You ») ou carrément acoustique (« Glory Days »), INGLORIOUS se présente comme la relève anglaise tant attendue.

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France Progressif

Nine Skies : sous des cieux bienveillants [Interview]

Avec « Sweetheart Grips », NINE SKIES présente un double-album concept brillant à plus d’un titre. Particulièrement inspiré, le groupe niçois a invité des artistes de grands talents et, aussi, a décidé de reverser la totalité des bénéfices à une association (« Ian’s Chain »), qui œuvre pour la prévention contre le suicide. Autant de bonnes raisons pour poser quelques questions à cette belle formation…

– Après la réédition l’an dernier de votre premier album « Return Home » dans une version spéciale, « Sweetheart Grips » vient de sortir. Là encore, il s’agit d’un concept-album. Pouvez-vous nous en décrire le thème principal ?

Ce titre fait référence à la pratique datant de la Seconde Guerre mondiale, lorsque les soldats prenaient de précieuses photos de famille (et de Pin-ups) et les plaçaient sous les crosses de leurs pistolets 1911, appelées « Sweetheart Grips ». La plupart de ces poignées étaient fabriquées à partir de morceaux de fenêtres en plastique brisées par des  bombardiers.

Les différents titres de l’album mettent en lumière les souvenirs et les sentiments d’un jeune soldat exposé à un syndrome post-traumatique, soulevant le paradoxe entre la violence  évidente de la guerre et l’humanité sous-jacente enfouie en chacun de nous.

 – Musicalement, « Sweetheart Grips » est encore plus riche et la production particulièrement soignée. L’ampleur sonore de votre musique y est parfaitement restituée. Comment s’est passé le travail de studio et de production?

Pour « Sweetheart Grips », nous avons également voulu privilégier le son dans notre concept; un son le plus organique possible, mais plus puissant que « Return Home », compte tenu du concept qui lui est associé. Nous avons eu la chance de travailler avec Shahin Rafati (Studio Mercure) pour les enregistrements de batterie, puis Alexandre a fait le mixage et le  mastering dans son studio, comme pour « Return Home ». Ce processus a été particulièrement complexe, vu l’utilisation de plus de matériel analogique que dans le premier album.

– Un palier semble aussi avoir été franchi dans l’écriture, la composition et la structure des morceaux. On sent « Sweetheart Grips » plus complet. Vous aviez une idée précise de la  façon dont ce nouvel album devait sonner en entrant en studio ?

Merci beaucoup ! L’écriture, tout comme pour « Return Home », s’est faite par paliers de composition. A savoir que nous avons d’abord tous les deux (Alexandre et Eric) proposé des idées et parfois composé directement des morceaux ensemble (« Burn my Brain » par exemple), puis les démos se sont finalisées. Nous sommes ensuite revenus sur des arrangements, des modifications harmoniques, rythmiques et de structure après certains enregistrements. Enfin, le dernier palier consistait à travailler sur les finitions des morceaux.

Rien n’a été définitif jusqu’au dernier moment.

– « Sweetheart Grips » est un double-album, ce qui se fait de plus en plus rare. Votre intention était de créer deux parties distinctes, ou simplement de pouvoir développer des  titres plus complets et plus longs ?

L’album est devenu un double album naturellement, en écoutant les morceaux et en créant deux atmosphères bien distinctes ; la première partie est beaucoup plus sombre et torturée que la seconde, ce qui renforce encore plus l’idée de concept-album. Mais nous n’avions aucunement l’intention à la base d’en faire un double album.

– On note également une multitude de guests (et pas des moindres !), alors que NINE SKIES compte déjà huit musiciens. Pouvez-vous nous les présenter et revenir sur le contexte de ces participations ?

Nous avons eu la chance de travailler sur ce nouvel album avec de très grands musiciens tels que Craig Blundell (Steven Wilson, Steve Hackett, Frost, …) à la batterie et Clive Nolan (Pendragon, Arena…) au solo clavier sur « Burn my Brain », également Riccardo Romano (Ranestrane, Steve Rothery Band, Riccardo Romano Land) au chant sur le titre, Dave Foster (Steve Rothery Band, Panic Room, So & So, Dave Foster Band) à la guitare solo sur « Fields of Perdition », Johnny Marter (Annie Lennox, Marillion, Peter Gabriel, Roger Taylor, Brian May, Jeff Beck, Zucchero, Gloria Gaynor…) à la guitare  sur « The Thought Trader » et Pat Sanders (Drifting Sun) aux claviers sur « Soldiers of Shame ».

Etant basé en Angleterre depuis deux ans, Eric a entreprit l’initiative de contacter des musiciens pour leur proposer une participation sur l’album, ce à quoi ils ont répondu avec beaucoup de gentillesse et très favorablement, et nous les remercions chaleureusement pour leurs superbes contributions aux morceaux.

– Justement, j’imagine que vous allez défendre ce nouvel album sur scène. Cela ne doit pas être évident pour une formation nombreuse comme la vôtre … Certains invités sur le disque seront-ils aussi de la partie ?

Notre première scène sera le festival « Prog en Beauce » le 26 Octobre (immortalisé sur les photos illustrant l’interview – NDR) en compagnie de Clepsydra, Albion et Mystery. Je pense malheureusement que cela sera compliqué de solliciter la venue des invités sur scène, eux-mêmes étant très impliqués et investis dans leurs projets respectifs. Nous espérons défendre cet album, tout comme « Return Home », le plus possible par la suite !

– Enfin, les bénéfices des ventes de « Sweetheart Grips » iront à l’association « Ian’s Chain », qui soutient la prévention contre le suicide. Pourquoi ce choix ? De nos jours, c’est plutôt rare de voir des groupes à but non-lucratif … 😉

Nous avons opté pour ce choix car c’est une cause qui nous tient à cœur. De plus, Alan et Wendy Savill, les présidents de cette association, organisent tous les ans un festival appelé le « Savfest », où tous les groupes viennent jouer bénévolement pour soutenir cette cause. Nous avons trouvé le geste très honorable, et c’est pourquoi nous avons voulu les suivre dans cette démarche.

Retrouvez le groupe :

https://www.facebook.com/nineskiesmusic/

https://nineskiesmusic.com

http://youtube.com/nineskiesmusic

Pour soutenir la sortie du prochain album « 5.2 » :

https://www.kickstarter.com/projects/nineskies/album-520
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Progressif

Nine Skies : l’élégance d’un concept inédit

Avec « Sweetheart Grips », NINE SKIES livre un excellent double-album, doté d’un concept très original et d’une magnifique palette d’invités. Ce superbe disque renvoie à un Rock Progressif original et riche en virtuosité… En attendant le nouvel album du groupe, « 5.2 » à paraître dans les mois à venir, (re)découvrez cette pépite en deux volets.

NINE SKIES

« Sweetheart Grips »

(Anesthetize Productions)

Pour son deuxième album, NINE SKIES a placé la barre très haut. Non contents de faire simple, les Niçois sortent, avec « Sweetheart Grips », un double-album concept et le résultat est vraiment à la hauteur du projet : très accompli. Autour d’un noyau dur de huit musiciens, le groupe a même fait appel à de nombreux guests, et non des moindres. Le Rock Progressif du combo français se pose désormais aux côtés des meilleures formations du genre, et ce très bel album parmi les indispensables du registre pour cette année (2019 – NDLR).

Autour d’un concept basé autour de la seconde guerre mondiale, NINE SKIES narre une pratique ayant réellement existé. C’est donc sur cette idée que se décline ce double-album. Des titres comme « Vestige », « Burning my brain » ou le morceau-titre démontrent la qualité exceptionnelle du travail de production. Les guitares sont en harmonie totale avec les claviers et le saxophone, tandis que la paire basse/batterie fait des merveilles et garde le cap de compositions très inspirées.

Les deux volets composant « Sweetheart Grips » se complètent parfaitement et offrent finalement une belle respiration à l’ensemble. Très modernes dans leur approche, les morceaux du double-album naviguent entre fougue avec des passages très Rock et douceur avec des parties acoustiques très sensibles et délicates. Toute cette maîtrise artistique fait de cet opus un vrai monument, lequel est embelli par le magnifique artwork signé par Steve Anderson. Avec « Sweetheart Grips », NINE SKIES va marquer le petit monde du Rock Progressif pour un moment !

Bandcamp : https://nineskies.bandcamp.com/album/sweetheart-grips

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Blues Folk/Americana

Théo Charaf : l’appel des grands espaces

Pour son premier album éponyme, THÉO CHARAF sort des sentiers battus en livrant dix très bons morceaux entre Folk, Blues et Americana. Avec un art très personnel du storytelling, le songwriter s’accompagne à la guitare acoustique sur une production élégante et éthérée. Le musicien français peut aller se frotter à la scène américaine sans crainte.

THÉO CHARAF

« Théo Charaf »

(Wita Records/Dangerhouse Skylab/Baco Distribution)

Ce premier album du Lyonnais THÉO CHARAF est la vraie belle surprise de ce début d’année en matière de Folk. Eponyme, l’opus est aussi épuré qu’il est abouti. Sans fioriture et soigneusement arrangé, il nous emmène en voyage dans les grands espaces américains avec un large et généreux détour par le delta du Mississippi. Et à la manière des mythiques folksingers, le musicien déroule des morceaux très bien ficelés. 

Le Français s’est forgé un style très personnel assez rare dans l’hexagone. Sa Folk aux accents bluesy prend un relief saisissant grâce à une production très brute. Et la profondeur de la voix de THÉO CHARAF prend toute son ampleur à travers une belle diversité où il joue sur différentes intonations et brille complètement sur « Oh Sister », où il est doublé et accompagné par une voix féminine qui apporte beaucoup d’élégance au morceau.

Folk pour l’essentiel, le songwriter traverse évidemment des contrées Americana (« Forward », In Vain », » Waiting Around To Die ») avec un sens du storytelling que l’on retrouve aussi sur « Vampire » plus Folk. Avec beaucoup d’émotion, THÉO CHARAF se fait plus bluesy sur « Going Down » et « Devil Got My Woman ». Et ce n’est qu’en fin d’album qu’il branche sa guitare pour le très bon « Hard Time Killing Floor Blues ». Une vraie réussite.

Bandcamp : https://theocharaf.bandcamp.com/releases  

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Folk/Americana

Tony Reed : la surprise folk du chef

Malgré une discographie impressionnante et une réputation qui le précède très largement, TONY REED, leader de Mos Generator entre autre, parvient encore à surprendre, comme avec ce premier album solo, « Funeral Suit », délicat et attachant.

TONY REED

« Funeral Suit »

(Ripple Music)

Multi-instrumentiste chevronné et consacré, en plus d’être un producteur génial, TONY REED est aussi reconnu à travers les très nombreux projets musicaux qu’il a conduit (encore très récemment avec Big Scenic Nowhere). Leader du trio Heavy Rock Mos Generator, c’est en solo qu’il se présente cette fois et sous son nom.

Faisant une petite entorse à son registre de prédilection, c’est seul aux commandes que le musicien de Seattle présente « Funeral Suit », son premier album solo. Et avec sa guitare et son piano (et quelques autres instruments plus discrets), TONY REED se livre comme rarement à travers huit morceaux introspectifs, très personnels et touchants.

Dans un registre Folk Rock très Americana, le songwriter dévoile une facette qu’on ne lui connaissait pas. Délicat, légèrement progressif et toujours aussi riche et assez complexe, « Funeral Suit » est aussi immersif que varié et même émouvant sur certains passages. Décidemment, TONY REED est un touche-à-tout de génie et vient encore de le démontrer.

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Extrême

Treyharsh : le côté Thrash/Death de la force

Sur une base assez Old School qui auraient fait un bond dans le temps, le quatuor Thrash/Death français revient, après quelques changements, avec des morceaux costauds, sombres et robustes. « Eternal Cycles » révèle enfin TREYHARSH dans ce qui a de meilleur avec un aspect plus dense et incisif qu’auparavant.

TREYHARSH

« Eternal Cycles »

(Wormholedeath)

Récemment signé chez Wormholedeath, TREYHARSH semble avoir trouvé un nouveau souffle et c’est, en tout cas, ce que laisse entendre et présager ce très bon nouvel album. Depuis dix ans, le quatuor de la région lilloise continue de forger un son qui lui est de plus en plus personnel. Assez éloigné de « Reverse » (2013) et de « When The Sun Sets In The East » sorti en autoproduction en 2017, le combo revient plus costaud que jamais.

Sûrement du au changement de line-up et à la production de Gwen Kerjan du Slab Sound Studio de Lorient, « Eternal Cycles » présente des compositions nettement plus massives et construites qu’auparavant. Mais si TREYHARSH a fait évoluer son univers Thrash/Death, il a aussi gagné en intensité et les dix nouveaux titres déploient une énergie et une puissance beaucoup plus maîtrisée et explosive (« The King’s Name », « Lust », « Agoraphobic »).

Plus dur, plus compact et plus tranchant, le quatuor français distille des morceaux très bien structurés (« The Inside Part I & II », « Constantly Oppressed »), beaucoup plus rentre-dedans et à travers lesquels le mix entre un Thrash virulent dans les rythmiques et les riffs se coordonne parfaitement avec un chant Death très percutant. TREYHARSH met aussi l’accent sur des textes très mûris et un univers qui s’est assombri. Une grosse claque !

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Hard Rock

Joel Hoekstra’s 13 : un modèle du genre

Guitariste de Whitesnake et du Trans-Siberian Orchestra, le musicien américain profite de ce début d’année pour livrer le deuxième album de son projet solo, JOEL HOEKSTRA’S 13. Et les fans de Hard US au parfum des 70-80’s livré dans une production très actuelle vont être ravis par « Running Games » qui, sans être nostalgique, met en lumière un style intemporel.

JOEL HOEKSTRA’S 13

« Running Games »

(Frontiers Music)

Ancien guitariste de Night Ranger, Joel Hoekstra n’a pas attendu de rejoindre les rangs de Whitesnake, suite au départ de Doug Aldrich, pour se faire un nom dans le monde de la six-cordes et bien au-delà. L’Américain originaire de l’Illinois a notamment déjà sorti trois albums solos, fait de multiples participations et « Running Games » est son deuxième opus sous la bannière JOEL HOEKSTRA’S 13. Et pour ce nouvel effort, il a fait appel au même line-up que pour « Dying To Live », et il faut avouer que ça fait rêver !

Quand vous avez ce genre d’amis, autant leur proposer de venir poser quelques notes, non ? On retrouve donc au casting Vinny Appice (ex-Black Sabbath, DIO) à la batterie, Tony Franklin (ex-The Firm, Blue Murder) à la basse, Derek Sherinian (Sons Of Apollo, Dream Theater) aux claviers, ainsi que  Russell Allen (Symphony X) et Jeff Scott Soto (Sons Of Apollo, Trans-Siberian Orchestra) aux chœurs… Oui, juste aux chœurs ! Ce JOEL HOEKSTRA’S 13 a plutôt fier allure et cela s’entend sur ce très bon « Running Games ».

Et comme ce projet est avant tout solo, le guitariste et compositeur a géré lui-même toutes les compositions (paroles et musique), ainsi que les arrangements et la production. Seul Chris Collier a été autorisé à s’occuper du mix. Il en résulte un très bon album de Hard US mélodique et accrocheur, où le riff est à l’honneur, tout comme des solos terriblement efficaces et peu démonstratifs (« Fantasy », « How Do You », « Lonely Days », « Finish Line » ou « Reach The Sky »). JOEL HOEKSTRA’S 13 met la banane sans donner la leçon.

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Stoner/Desert

Around The Fire : Ethnic Stoner Doom

Réduire AROUND THE FIRE à un simple groupe, certes original, de Stoner Doom serait plus que réducteur. Dans une transe omniprésente, les Grecs réalisent l’un des meilleurs albums du genre depuis très longtemps. Et il le restera ! Sur six titres, « Celestial Keepers » hypnotise autant qu’il captive avec une force et une puissance démoniaque. Un must !

AROUND THE FIRE

« Celestial Keepers »

(Independant)

Nichée au cœur de la Méditerranée, la Grèce tient une place géographique de choix, lui permettant de brasser un nombre important de cultures différentes plus ou moins voisines. C’est ce qu’a décidé de faire AROUND THE FIRE sur son deuxième album, « Celestial Keepers », qui fait preuve d’une grande créativité en puisant dans plusieurs héritages ancestraux. Et à travers six titres incroyables, le combo traverse les âges avec modernité.

Originaire de Thessalonique sur la mer Egée, c’est donc assez naturellement que le groupe a intégré des sonorités byzantines avec d’autres issues de Mongolie. Et l’ensemble fondu dans un puissant Stoner Rock souvent Doom offre des perspectives musicales singulières à AROUND THE FIRE. Les Grecs ont été jusqu’à adopter un instrument à trois cordes ancestral, le kemenje, qui rend cet album quasi-mystique et d’une authentique spiritualité.  

Dès « Kau Ano Meha », on plonge dans l’univers du combo, qui manie l’art du crescendo avec brio sur des rythmiques aux percussions tribales. Shamanique sur « Ubdi » ou « Echoes Of Oblivion », on se laisse guider par l’univers troublant d’AROUND THE FIRE. « Astral Edifer » et ses chœurs grégoriens combinés à des riffs lourds très Doom élève encore cet état de transe avant un somptueux « Awakening » envoûtant et transcendant. Exceptionnel.  

Bandcamp : https://aroundthefire.bandcamp.com/album/celestial-keepers