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Dark Folk Progressif

Los Disidentes Del Sucio Motel : une spontanéité si naturelle

Depuis bientôt deux décennies, les Alsaciens n’ont de cesse de faire évoluer leur style au fil des albums et des EP. Tout en gardant un pied dans un Stoner Prog souvent proche d’un post-Rock/Metal insaisissable, LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL multiplie les expériences, et celle-ci n’est peut-être pas la plus évidente. Légers, fins et presque mis à nu, ses propres morceaux s’exposent sur « Breath » dans une lumière nouvelle et flottante, où l’acoustique se revêt de cordes, comme pour mieux souffler et livrer ses mélodies dans une Dark Folk somptueuse.  

LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL

« Breath »

(Klonosphere)

C’est devenu une bonne habitude et même la marque de fabrique de LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL que de sortir un format court entre deux albums. Deux ans après « Polaris », le groupe s’offre donc une petite respiration avec le bien nommé « Breath », qui présente d’ailleurs deux nouveautés dans la démarche du quintet. Tout d’abord, on a le droit ici à cinq reprises, quelque chose d’assez inhabituel, et surtout pour la première fois en version acoustique, laissant les gros amplis de côté. 

Lorsqu’une chanson est bien écrite, elle se décline sans mal sous à peu près toutes les formes. Tous les musiciens vous le diront. On peut donc, sans exagérer, dire que les morceaux de LDDSM sont très bien composés car, en mode acoustique, ils ne souffrent d’aucune lacune, tant le passage de l’électrique à l’unplugged est évident et coule de source. Pour autant, il ne faut pas imaginer que les Strasbourgeois ont simplement épuré leur jeu et leurs compos, c’est même presque l’inverse.

LDDSM est donc allé puiser dans son dernier opus pour trois morceaux, avant de remonter le temps avec « Z » issu d’« Arcane » (2013) et le titre « From 66 To 51 », qui figure sur « Soundtrack from The Motion Picture » (2010). Réarrangées et livrées dans une interprétation aussi originale que délicate, ces cinq chansons mettent en avant les guitares sèches, le piano et le violoncelle, preuve qu’elles ont une intemporalité certaine. Peut-être un peu nostalgique, on retiendra plutôt la grande qualité artistique du répertoire.

Photo : Benjamin Hincker

Retrouvez la chronique de « Polaris » :

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Dark Folk Doom Rock

Ockra : doomy Folk

C’est dans le studio d’un petit village près d’Hambourg qu’OCKRA s’est rendu pour l’enregistrement de son premier opus. Au-delà de bien porter son nom, la réalisation des Scandinaves se veut très personnelle et une manière pour le combo d’évacuer certains évènements qui les ont touchés durant la pandémie. Puissant et mélodique, « Gratitude » conjugue douceur, créativité et force.

OCKRA

« Gratitude »

(Argonauta Records)

Né sur les cendres de Sulphur Dreams, groupe de Stoner Metal de Göteborg, OCKRA mène dorénavant sa barque depuis début 2018 dans un registre légèrement différent, et plus en phase avec l’état d’esprit des musiciens, désireux de s’ouvrir d’autres portes musicales. Désormais en trio, ils n’ont pas renié l’esprit Doom qui les habitait, mais l’orientation est plus Rock et flirte même avec le folk et certains passages Americana.

Depuis leur premier EP en 2020 (« Infinite Patterns »), les Suédois ont franchi un nouveau cap avec « Gratitude », où ils se montrent très sereins, presqu’apaisés, mais sans pour autant désavouer l’essence-même du Doom. Pourtant derrière une certaine noirceur et une mélancolie ambiante, OCKRA laisse passer une lueur d’espoir et un faisceau lumineux, qui viennent éclaircir des compositions très travaillées et solides.

Outre le classique guitare-basse-batterie, du mellotron vient ponctuer les morceaux de « Gratitude » pour lui donner à la fois du volume et un côté aérien irrésistible. Les titres de ce premier opus sont relativement longs, ce qui laisse à OCKRA le temps de poser des atmosphères captivantes, grâce aussi à une voix claire très planante (« Weightless Again », « Tree I Planted », « Imorgon Här » et le génial « We, Who Didn’t Know »). Très original !

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Dark Folk post-Rock Progressif Rock

The Ascending : le temps de l’élévation

Cela fait maintenant quelques décennies que la Cité des Ducs, c’est-à-dire Nantes, fleurit de belles histoires musicales et montre une grande diversité à travers les groupes qui la représentent. C’est d’ailleurs presque devenu un gage d’authenticité. THE ASCENDING en est le parfait exemple et son premier opus éponyme offre des sensations très pertinentes sur notre époque, où l’ancrage humain et naturel prédomine. Une réussite totale.

THE ASCENDING

« The Ascending »

(Frozen Records/Klonosphere)

Tous issus de la scène Rock et Metal nantaise, les six musiciens qui composent THE ASCENDING n’en sont pas à leur coup d’essai. Et pour preuve, on y retrouve des membres de Stinky, Alan Stivell, Les Hommes Crabes, Tsar, 20 Seconds Falling Man ou Kaiser. Autrement dit, du beau monde qui s’est réuni au sein d’un projet en forme de collectif, et surtout guidé par une liberté artistique qui prend ici une dimension saisissante.

Forcément avec de tels parcours et venant d’horizons aussi différents et même parfois opposés, il est assez difficile de définir avec précision le style de THE ASCENDING. Mais au fond, est-ce bien nécessaire ? Pour mieux appréhender ce bel éclectisme, il suffit d’être curieux et de se laisser aller, voire se perdre, dans ce savoureux mix de Dark Rock, de Folk atmosphérique teinté de Garage, de Post-Rock, de violon et d’une touche progressive.

Même s’il ne compte que six titres, « The Ascending » offre une belle idée des contours musicaux à l’œuvre. Mené par une chanteuse, Jessica Delot, et deux chanteurs, Clair et Eddy Kaiser, on croise dans ce premier opus des moments de poésie (« Circles In The Same Sky ») comme des passages plus engagés (« Waiting A Storm »). THE ASCENDING libère une force organique dans laquelle on se laisse prendre (« The Ascending », « Herons »). Très généreux !

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Dark Folk Dark Gothic Neo-Folk

Lisieux : religieusement éthéré

Très enveloppant, ce nouvel opus des Français de LISIEUX joue sur des tonalités à la fois inquiétantes et d’un éclat intense. L’esthétisme de « Abide ! » se forge dans les détails, ceux de la subtile voix de sa chanteuse pleine de nuances et dans des arrangements où l’Electro se joint à l’acoustique des guitares comme une évidence. Folk, sombre et très mélodique, le quatuor montre un style aussi baroque qu’intemporel. Il suffit d’y consentir…

LISIEUX

« Abide ! »

(Throatruiner Records)

Original et d’une grande liberté artistique, le style musical de LISIEUX peut paraître déroutant pour peu que l’on ne soit curieux et ouvert s’esprit. Car, après immersion, les Toulousains s’avèrent d’une fraîcheur et d’une créativité très développée. L’univers du groupe s’articule autour d’un imaginaire où se croisent des ambiances liturgiques et médiévales, mais pas seulement. De quoi donc aiguiser la curiosité.

Formé en 2014 autour de Cindy Sanchez (chant) et Hugo Campion (guitare), le duo est devenu quatuor deux ans plus tard avec les arrivées de Michael De Almeida et Christèle Gaye, ouvrant ainsi le champ des possibilités. Très atmosphérique, LISIEUX se pose au croisement de la Dark et de la Néofolk, mâtinées d’un soupçon d’Electro-gothique. Et malgré ce spleen ambiant, « Abide ! » ne manque pas de luminosité.

Enregistré par le groupe lui-même et masterisé par Michael Lawrence (Ulver, Current 93), ce deuxième album saisit par l’enchevêtrement de sonorités acoustiques et électroniques. Les harmonies de l’orgue rendent souvent le propos austère ou grandiloquent, c’est selon, mais LISIEUX parvient toujours à rebondir en se livrant là où on ne l’attend avec délicatesse (« Lys Noir », « Abide ! », « Herb Harp », « Le Chant de Fer », « Déluge »). Ensorceleur !

Photo Alexandre Ollier