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Acid Mammoth : unstoppable [Interview]

Avec « Supersonic Megafauna Collision », le quatuor grec s’impose définitivement comme l’une des références du Doom européen. Si l’ascension du groupe d’Athènes a été fulgurante, elle ne doit rien au hasard, mais à la passion et au travail de ses membres. Sans se reposer sur ses acquis, ACID MAMMOTH continue sa quête musicale, tout en installant un son et une touche dorénavant très personnels. L’univers reste Doom, mais le Metal et surtout le Stoner cette fois sont autant de terrains de jeu que la formation hellène maîtrise avec une rare élégance… et s’entretenir avec Chris Babalis Jr (chant, guitare) est toujours un réel plaisir.

– L’an prochain, ACID MAMMOTH fêtera ses 10 ans d’existence et le bilan est assez exceptionnel avec quatre albums, un split EP et une belle notoriété acquise. Non seulement la pandémie ne vous a pas arrêté et vous avez aussi conservé le même line-up, ce qui devient assez rare aussi. La satisfaction est-elle totale, ou referiez-vous certaines choses différemment avec le recul ?

Quand il s’agit de regarder en arrière tout ce que nous avons fait jusqu’à présent, nous sommes clairement satisfaits. Nous vivons notre rêve, nous sortons des albums et nous donnons des concerts en dehors de notre pays. Même si ce n’est pas un travail, mais simplement un plaisir, nous vivons pour cela. Il y a certainement des choses encore à réaliser, nous avons beaucoup de projets pour l’avenir et nous travaillons tout le temps sur le groupe. Donc, il y a toujours quelque chose à l’horizon. Quand il s’agit des choses que nous ferions différemment, il y en a sûrement aussi. Cependant, chaque fois que nous y réfléchissons, on sait que nous l’avons fait, parce que c’est ce que nous ressentions à ce moment-là. Tout ce qui a été créé par le passé, on le ferait différemment maintenant, parce qu’on a changé et on a évolué. Mais il n’y a rien que nous regrettions.

– A la sortie de « Caravan », qui avait été entièrement réalisé pendant les confinements, tu m’avais dit que cette période avait finalement été très créative et même apaisante. Cette fois pour « Supersonic Megafauna Collision », cela fait suite à une belle série de concerts. Dans quel état d’esprit avez-vous composé et pris le chemin du studio ?

Nous avons composé et enregistré le nouvel album l’an dernier, tout en jouant dans toute l’Europe. On enregistrait, puis on prenait l’avion pour un concert. Et on revenait pour reprendre l’enregistrement, et ainsi de suite. Même si ce processus peut paraître intimidant à première vue, ce n’était pas le cas pour nous. Bien au contraire, cela nous a vraiment donné beaucoup d’énergie. Parfois, de retour chez nous après des concerts à l’étranger, nous avions un sentiment de vide, comme si quelque chose de beau était terminé et que nous devions retourner à notre routine quotidienne. Mais ce n’était pas le cas cette fois-ci, car chaque fois que nous terminions un spectacle et que nous devions rentrer, quelque chose d’aussi beau nous attendait à la maison : notre nouvel album !

– Je trouve que l’album présente une nouvelle dynamique à travers ses morceaux, comme si vous étiez totalement débridés. Est-ce que c’est justement le contact direct avec le public qui a changé vos perspectives et peut-être aussi la perception de votre jeu ?

Très certainement. Enregistrer un album après deux tournées a définitivement influencé la façon dont nous avons composer nos nouveaux titres. L’enthousiasme, l’énergie et tous les sentiments que nous avons ressentis sur la route ont joué un rôle crucial dans la définition du son des chansons du nouvel album. L’ensemble du processus semblait naturel lors de la composition. Nous n’avons ressenti absolument aucune pression, quant à savoir si elles seraient bonnes, ou pas. Et même si nous examinons toujours tout au microscope pendant le processus d’écriture et de production, le débat n’a jamais été de savoir si les morceaux seraient bons ou non, mais plutôt de savoir comment ils pourraient sonner encore mieux. Toute l’écriture de cet album a été remplie d’enthousiasme et de bonnes vibrations. Pas de stress, pas de pression, juste une envie de créativité et de plaisir à être et à jouer ensemble. Et quand on fait ce que l’on aime, il y a de fortes chances que quelqu’un d’autre l’appréciera aussi.

– D’ailleurs, « Supersonic Megafauna Collision » est beaucoup plus fuzz et donc Stoner que « Caravan », qui était très Metal. L’intention était d’être plus direct et frontal sur ce nouvel album ?

Pour être tout à fait honnête avec toi, en composant les chansons de ce nouvel album, nous n’avions pas de plan précis en tête, principalement parce que nous ne voulions pas tomber dans le piège du ‘il faut sonner comme ça’, car cela aurait peut-être pu être limitant et restrictif. Au lieu de ça, nous avons suivi le courant, nous avons simplement pris nos instruments et nous avons commencé à jouer. Et ce que tu entends sur le disque en est vraiment le résultat. Bien sûr, il y avait des choses que nous avions déjà en tête comme, par exemple, le concept de chaque chanson, les thèmes et l’atmosphère que nous voulions transmettre. Mais dans l’ensemble, tout s’est déroulé de manière assez organique et simple. Les nouvelles chansons ne sont pas l’assemblage de différents riffs. Une fois qu’une première idée de chanson était proposée, toute la structure se développait à partir de là jusqu’à finalement se couvrir de chair et d’os et prendre forme.

– Ce qui surprend aussi cette fois, c’est la progression que l’on ressent au fil des morceaux, un peu comme si vous développiez un concept sur l’album. Est-ce le cas ? Et y a-t-il un lien entre les chansons, une sorte de fil conducteur sur « Supersonic Megafauna Collision » ?

Bien qu’il n’y ait pas d’histoire globale sur tout l’album, au moins sur le plan musical, les chansons sont liées, car elles expriment nos sentiments au moment où elles ont été composées. En ce qui concerne les concepts derrière « Supersonic Megafauna Collision », chaque chanson a son propre thème et sa propre direction. Les ambiances que nous avions en tête ont ensuite joué un rôle crucial dans la composition de la musique. Nous avons fermé les yeux et nous nous sommes imaginés dans les situations que décrivent les morceaux. Cela nous a vraiment aidés à nous immerger dans ces histoires et à composer d’une manière sincère et sans retenue ce qui, selon nous, rend vraiment justice aux nouveaux titres.

– ACID MAMMOTH conserve ici encore ce côté hypnotique et aérien sur plusieurs morceaux pour atteindre un sommet sur « Tusko’s Last Trip » et ses 12 incroyables minutes. Clore l’album avec un tel titre est une belle synthèse d’ailleurs. C’est aussi comme ça que vous l’avez écrit, avec cette ambition de terminer sur un moment très fort ?

Pour ce qui est de « Tusko’s Last Trip », ce qui est venu en premier était le concept, puis la musique s’est développée en conséquence. Cette histoire nous brise vraiment le cœur. ‘Tusko’ était un éléphant qui vivait dans le zoo d’Oklahoma City dans les années 1960. Il est mort tragiquement après de nombreuses souffrances dues à de cruelles expérimentations humaines, au cours desquelles des scientifiques lui ont injecté une gigantesque dose de LSD. Il ne l’a pas supporté, il a immédiatement eu des spasmes, il souffrait et ne pouvait plus respirer. Il a énormément souffert jusqu’à sa mort. Dans notre nouvel album, nous avons voulu lui rendre hommage en lui écrivant cette chanson, en racontant sa triste et tragique histoire. Nous sommes contre les expérimentations humaines sur les animaux, car elles leur infligent des douleurs et des souffrances, tant physiques que psychologiques, qui peuvent aller jusqu’à la mort. C’est dans cette optique qu’a été composé « Tusko’s Last Trip ». C’est une chanson triste, mais qui parle directement à notre cœur chaque fois que nous pensons à sa douleur, à sa peur et à son sentiment de désespoir dans ses derniers instants. Nous avions envie de raconter son histoire, et nous avons pensé qu’un morceau gigantesque comme celui-ci pour clôturer l’album était le moyen idéal.

– « Supersonic Megafauna Collision » est toujours aussi organique et authentique dans le son. Sur les deux albums précédents, vous aviez travaillé avec votre ami Dionysis Dimitrakos, dont tu me disais qu’il était le cinquième membre du groupe. Est-ce toujours le cas, car l’identité musicale d’ACID MAMMOTH est de plus en plus claire ?

Dionysis est définitivement le cinquième membre du groupe. C’est notre ingénieur du son et il est chargé de bien nous faire sonner. Il connaît très bien notre son et il sait exactement ce que nous voulons avant même que nous le lui disons. Il a rendu justice à nos albums et nous ne nous voyons pas travailler avec quelqu’un d’autre dans le futur. C’est l’homme idéal pour ce poste et nous ne pourrions être plus heureux que de travailler avec lui. On le dit souvent, mais c’est vrai : nous aimons toujours travailler avec les mêmes personnes pour chaque sortie, à savoir le même label, le même ingénieur du son, le même line-up et le même artiste pour la pochette de l’album ! Ainsi, Dionysis fait partie de ces personnes avec qui nous continuerons à travailler, car il est une partie très importante du groupe et de sa musique.

– D’ailleurs, en préparant l’interview, je me suis replongé dans votre discographie et l’évolution technique, comme purement sonore, est assez flagrante et c’est très normal. J’ai le sentiment qu’un cap avait déjà été franchi sur « Caravan » et qu’avec « Supersonic Megafauna Collision », vous vous affirmez beaucoup plus nettement dans un Doom très Stoner et Fuzz. L’équilibre est-il définitivement le bon à vos yeux ?

Chaque fois que quelqu’un nous pose la question, nous répondons toujours que nous faisons du Doom. Et c’est vrai que notre musique est fondamentalement ‘doomesque’. Cependant, nous ne pouvons pas nier le fait qu’elle comporte également des éléments de Stoner Rock. C’est d’ailleurs quelque chose qui s’est produit un peu accidentellement, sans un réel désir de l’incorporer directement. En ce qui concerne l’équilibre, on a l’impression que cela change d’un album à l’autre. Nous pensons que le nouveau, tout comme « Under Acid Hoof », contient définitivement des éléments Stoner, qui étaient absents sur « Caravan », qui était bien plus sombre et déprimant. Pour les prochains albums, nous pensons qu’il est temps d’adopter une approche plus ‘psychédélique’, ce qui nous semble très intéressant à expérimenter.

– Enfin, avec dorénavant quatre albums à votre actif, votre répertoire s’est considérablement élargi, ce qui vous laisse le choix pour concevoir des setlists très différentes pour vos concerts. Est-ce quelque chose à laquelle vous réfléchissez déjà ? Créer en quelque sorte des ‘concepts-concerts’ ?

Nous avons beaucoup de projets pour nos prochaines setlists, y compris ajouter de nouvelles chansons, ainsi que des plus anciennes que nous n’avons jamais jouées en live auparavant. Par exemple, mis à part les nouveaux titres, nous avons toujours voulu jouer en live « Eternal Sleep » de notre premier album éponyme, ainsi que d’autres comme « Black Dust » et « Under Acid Hoof ». Nous allons certainement faire quelques ‘concepts-concerts’ dans le futur. Peut-être même jouer l’un de nos albums dans son intégralité, comme nous l’avions fait l’année dernière à Athènes lorsque nous avons joué l’ensemble d’« Under Acid Hoof ». Nous verrons. C’est passionnant, car les possibilités sont multiples et elles sont toutes passionnantes à envisager !

« Supersonic Megafauna Collision », le nouvel album d’ACID MAMMOTH, est disponible chez Heavy Psych Sounds.

Retrouvez le groupe en interview, ainsi que la chronique de « Caravan » :

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Greyborn : clair-obscur

Les Limougeauds continuent leurs explorations Stoner Doom avec un nouvel effort, qui vient faire suite à « Leeches », sorti il y a deux ans. Sur une production-maison très organique, GREYBORN côtoie le lugubre sans s’apitoyer et en se montrant plutôt obstiné. En s’immergeant aussi dans des atmosphères Space Rock, « Scars » avance dans cette introspection torturée, où seule la voix de son batteur libère quelques éclaircies, même fragmentées.

GREYBORN

« Scars »

(F2M Planet)

Avec « Scars », son deuxième EP, GREYBORN continue son cheminement dans un style où, forcément, le gris est teinté d’autres variations de gris. Une façon aussi et sûrement pour le power trio de ne pas se perdre dans le trop sombre, ou dans le trop lumineux, mais d’évoluer dans des ambiances claires-obscures et de bénéficier d’un champ d’action bien plus vaste. Comme pour « Leeches », le groupe s’est encore attelé à l’enregistrement et au mix de son nouveau format court, une manière de garder la main sur un univers très personnel, où la lourdeur des notes et la clarté du chant font cause commune.

Loin du Heavy Stoner Blues de Blackbird Hill, l’autre formation menée par Maxime Conan (guitare) et Théo Jude (chant, batterie – ex-Mama’s Gun), GREYBORN évolue sur un Doom écrasant et épais, tout en restant dans un Stoner Rock massif. Ils sont accompagnés par le bassiste Guillaume Barrou (ex-Mama’s Gun), une nouvelle histoire entre amis qui se connaissent bien en somme. Le groupe tire ici sa force d’une rage et d’une violence à l’œuvre sur les quatre morceaux, auxquels s’ajoute « Tetany », une virgule instrumentale suspendue, qui apporte une note de légèreté dans ce sombre océan.

Malgré une formation assez récente, GREYBORN a déjà parfaitement cerné les contours de son style et pour mieux en saisir l’entièreté, rien de mieux que d’écouter les deux EP dans l’ordre. C’est le gros et ultime défaut de ce genre de réalisations car, en l’occurrence, le groupe se savoure sur la longueur. Dès le morceau-titre, on entre dans le vif du sujet et « Ravenous » vient confirmer cette densité presque hypnotique, qui se forme dans un fuzz appuyé. Plus véloce sur « A Thousand Dreams Away », c’est « The Grand Design » qui clot ce chapitre d’un Doom solide. On attend maintenant impatiemment le premier album.

Photo : Victor Leonchenko

Retrouvez la chronique du premier EP du groupe, « Leeches » :

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Doom Doom Rock France Stoner Doom

Witchorious : dans les pages du grimoire [Interview]

WITCHORIOUS, c’est un trio composé d’Antoine Auclair (guitare) et des frère et sœur Paul (batterie) et Lucie (basse) Gaget, qui s’est forgé un univers Doom autant Metal que Rock et débordant à l’envie dans des atmosphères Stoner. En quelques années, les Franciliens ont su façonner un son et une identité très personnelle, au point de taper dans l’œil du label italien Argonauta Records. Antoine se fait porte-parole du groupe pour revenir sur ce premier album plus que réussi. Entretien.  

Photo : Cred Faallaway

– Avant de parler de ce premier album éponyme, j’aimerais que l’on revienne sur la création du groupe, qui est aussi une histoire de famille… Quel a été le déclic ?

On avait déjà joué ensemble avec Lucie, au sein de différents groupes. Au moment de créer ce nouveau projet, on a naturellement pensé à Paul pour nous rejoindre. On savait qu’il aurait beaucoup à apporter à ce nouveau projet de part ses influences et son jeu de batterie. Et puis, quand tu montes un groupe avec des gens, tu vas passer énormément de temps avec eux et ce n’est pas toujours pour rigoler, donc autant le faire avec des gens que tu aimes.

– WITCHORIOUS a vu le jour il y a cinq ans et vous aviez commencé par sortir un single avec les titres « 3 AM » et « Evil Creature ». Malheureusement, la pandémie a brisé ce premier élan. Quelle a été votre réaction à ce moment-là. Car, comme pour beaucoup, de nombreux espoirs et investissements se sont envolés…

On avait prévu d’enregistrer un EP au moment où le premier confinement est tombé. On a naturellement été déçu de devoir le repousser. Mais avec le recul, c’est ce qui nous a permis d’affirmer notre projet en travaillant davantage nos morceaux et notre identité. On en a profité pour travailler sur d’autres riffs, d’autres thèmes. C’était un moment très propice à la réflexion, notamment sur la vie avec cette ambiance de fin du monde, et de ce point de vue là, ça tombait plutôt bien. On a aussi évolué pendant ce temps, et donc on a intégré d’autres influences. Au final, l’album qu’on a produit ressemble vraiment à la proposition artistique qu’on rêvait de sortir, et je pense qu’il est beaucoup plus riche et abouti que le potentiel EP qu’on aurait pu sortir à la base. De toute façon on n’a pas eu le choix, il a fallu laisser faire le karma !

Photo : Brian Downie

– Après votre single, vous aviez donc en tête de sortir un EP de 5 titres. Finalement, vous avez revu vos ambitions à la hausse et décidé de vous lancer dans un album complet. Souvent, les groupes sortent des formats courts par manque de moyens, ou pour jauger leur following essentiellement. Cette étape ne vous a finalement pas paru nécessaire ?

C’est vrai qu’on s’est d’abord posé la question de ce qui serait le mieux stratégiquement : EP ou album ? En discutant avec les gens, les points de vue étaient tellement divergeants qu’on n’a pas trouvé de réponse, et comme chaque parcours est particulier, on a choisi de plutôt faire comme on le sentait. Avec cette histoire de pandémie, qui nous a donné un répit sur les répétitions et les enregistrements et donné beaucoup de temps pour écrire, c’est devenu limpide. Alors c’est vrai que ça a été un plus gros investissement, autant en efforts que financièrement, mais on ne regrette pas du tout. On adore écouter des albums où le propos peut être complètement développé, et on avait trop envie de faire un LP. Les conditions étaient réunies, alors on n’allait pas se priver.

– Ensuite, vous avez cherché un label, ce qui n’est jamais une mince affaire. Vous faites votre entrée sur le très bon label italien Argonauta Records, dont le catalogue est de grande qualité. Comment cette signature a-t-elle eu lieu et les avez-vous facilement convaincus ?

On trouvait le roster d’Argonauta excellent, il travaillait déjà avec quelques groupes français qu’on apprécie comme Conviction, Goatfather et Oaks. Au moment de chercher un label pour préparer la sortie de l’album, on l’a contacté et le projet l’a tout de suite emballé. On est très heureux de travailler avec Argonauta pour ce premier album. Gero, qui gère le label, est un passionné et il sait parfaitement nous conseiller.

Photo : Cred Faallaway

– J’aimerais que l’on parle de l’univers de WITCHORIOUS qui, forcément, tourne autour du personnage de la sorcière qui endosse d’ailleurs de multiples rôles. Est-ce que vous pensez que cela deviendra récurrent, ou voyez-vous plutôt « Witchorious » comme un album-concept ?

On ne voit pas vraiment ce premier album comme un album-concept, mais plutôt comme un recueil de morceaux présentant notre identité. On aime bien utiliser des métaphores dans nos textes et on trouvait intéressant de développer celle de la sorcière car, pour nous, c’est une figure à la fois rebelle et oppressée, qui effraie et fascine. Ce personnage de la sorcière est présent jusque dans le nom du groupe et fait fortement partie de notre identité, je pense qu’on continuera à la faire vivre par la suite. Et puis, c’est aussi un cliché dans le genre du Stoner Doom, et ça nous amuse beaucoup d’en jouer.

– Musicalement, votre Heavy Doom oscille entre Metal et Rock et j’y vois même un certain parallèle avec Candlemass et Avatarium. Est-ce que leur parcours et leur histoire commune et respective ont pu avoir une influence dans votre processus de création et d’exploration de ce vaste registre ?

Ce sont des groupes qu’on adore, et je trouve que le Doom d’Avatarium a un côté particulièrement grandiloquent, qui m’a toujours fasciné. Les deux font clairement partie des groupes qui ont influencé certains de nos morceaux, parce qu’ils ont exactement cette démarche d’un Doom qui reste très traditionnel dans les riffs et l’approche, mais avec des structures et des esthétiques qui apportent vraiment du renouveau. Le travail vocal incroyable d’Avatarium, le ton en permanence hanté de Candlemass, ce sont des sons qu’on a directement en tête quand on écrit, quand on cherche des modèles d’ambiance… We are bewitched !

Photo : Brian Downie

– L’une des particularités de WITCHORIOUS réside aussi dans le fait que vous soyez deux au chant et surtout qu’il y ait une voix féminine et une autre masculine. C’est quelque chose qui s’est imposé dès le début ? Sans compter que cela ouvre de nombreuses possibilités…

On a toujours apprécié ajouter des chœurs. Les deux voix, et mêmes les alternances entre voix chantées et criées, nous permettent de jouer sur les nuances. C’était important pour nous de mettre les deux voix en avant sur ce projet. Cela nous permet d’avoir deux présences en travaillant sur nos différents personnages. Et c’est quelque chose qu’on aimerait travailler davantage à l’avenir.

– Un petit mot aussi sur la production de « Witchorious », qui est puissante et équilibrée, ce qui est toujours une belle performance pour un premier album. Comment s’est déroulé l’enregistrement ?

On a enregistré l’album avec Francis Caste au studio Sainte-Marthe et on est vraiment très contents du résultat. Le travail en studio nous a permis d’affirmer notre son, notre identité, et Francis, qui avait très bien compris où nous voulions aller avec ce premier album, nous a parfaitement guidés. C’était un vrai plaisir de travailler avec lui, il nous a beaucoup apporté sur la définition des ambiances. Nos morceaux étaient déjà très matures, alors il nous a fait réfléchir à l’histoire globale qu’on voulait raconter, faire en sorte que les morceaux forment un tout cohérent. Il nous a fait gagner en efficacité en nous aiguillant pour renforcer certaines structures. Il y a aussi eu un gros travail sur l’identité sonore des instruments et des voix, sur lesquels on a vraiment pris le temps d’explorer. Le but était que ça sonne hanté.

Photo : Brian Downie

– Outre la qualité sonore, il se dégage beaucoup de maîtrise de vos morceaux. Vu le soin apporté aux arrangements et à la structure des titres, j’imagine que cela est dû à un travail minutieux et de longue haleine pour apporter aussi du renouveau à un style comme le Doom ?

Lorsqu’on a créé le groupe, l’idée était vraiment de faire un groupe de Doom. Si on ne peut pas nier leur influence, on ne voulait pas cloner Black Sabbath ou Monolord. Assez naturellement, d’autres influences sont venues se greffer à nos compositions. Un côté Stoner, mais aussi des influences plus modernes de post-Metal ou de Black Metal. On était aussi assez friand d’ajouter des voix et des guitares d’ambiance, des sons bizarres… On voulait vraiment garder le côté brut des morceaux joués sur scène en trio, en ajoutant un vernis de studio ensorcelé.

– Enfin, vous allez probablement partir sur la route défendre ce bel album. Avez-vous prévu une certaine scénographie, afin de restituer au mieux ses ambiances et ses atmosphères saisissantes ?

Oui bien sûr, on a déjà une quinzaine de dates de prévues et on travaille à rallonger la liste ! Pour l’instant, on a beaucoup travaillé sur la fluidité et l’efficacité du set, notre jeu de scène, comment on donne vie à nos personnages en étant le plus authentique possible. Et on essaie de rajouter des éléments au fur et à mesure. On a beaucoup d’idées qu’on voudrait tester sur les prochains mois.

Le premier album éponyme de WITCHORIOUS est disponible chez Argonauta Records.

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Stoner Doom Stoner Metal

Slower : slayerized

Reprendre l’un des plus éminents membres du ‘Big Four’ californien avec la crème de la scène Stoner Doom, c’est l’ambition de Bob Balch de Fu Manchu accompagné de musiciens de Kylesa, Kyuss, Monolord et Lowrider. Sur des ambiances sombres et chargées, SLOWER présente sa vision d’un Slayer qui passe presqu’en mid-tempo et surtout qui se pare de voix féminines aériennes et vaporeuses, loin de la rage d’Araya et de sa bande. Le projet est ambitieux et le regard apporté sur ces cinq titres incontournables a de quoi dérouter par son approche, toute en décélération, mais non sans volume.

SLOWER

« Slower »

(Heavy Psych Sounds)

Si les fans de Slayer sont inconsolables depuis cette soirée du 30 novembre 2019, où le groupe donnait son dernier concert au Forum de Los Angeles, il se peut que l’EP de SLOWER leur apporte un peu de baume au cœur. A mi-chemin entre le Tribute et la cover, l’entreprise menée par Bob Balch a de quoi de surprendre, c’est vrai, mais aussi séduire à bien des égards. Le guitariste de Fu Manchu a décidé de réinterpréter cinq morceaux des rois du Thrash Metal dans des versions… très inédites. Loin des riffs acérés de Kerry King et de Jeff Hanneman, du chant rageur de Tom Araya et surtout des rythmiques de Dave Lombardo et de Paul Bostaph, « Slower » ne manque pourtant pas de sel.  

Il est donc question ici de Stoner et de Doom, ce qui est à l’opposé du style racé et véloce du quatuor de la Bay Area, donc pas la moindre trace de Thrash à l’horizon. Pour faire court, l’idée avec SLOWER est d’avancer dans un concept ‘slow and low’, à savoir lent et bas. Et pour mener à bien l’ensemble, Balch s’est entouré d’un super-groupe avec Amy Barrysmith (Year Of The Cobra) et Laura Pleasants (Kylesa) au chant, les bassistes Peder Bergstrand (Lowrider) et Scott Reeder (Kyuss), ainsi que le batteur Esben Willems (Monolord). Leurs reprises prennent une tournure lourde, épaisse et lancinante, tellement les structures ont été repensées et refaçonnées dans un climat Doom pesant.

Et les Américains ont choisi cinq titres parmi les plus emblématiques de Slayer : « War Ensemble », « The Antichrist », « Blood Red », « Dead Skin Mask » et « South Of Heaven ». Difficile de faire plus fédérateur… sur le papier en tout cas. Car dans les faits, les tempos sont très ralentis, même si une double grosse caisse se fait parfois délicatement entendre, et surtout, le chant exclusivement féminin donne une tout autre perspective. SLOWER s’éloigne à un tel point des versions originales qu’on peine même à les reconnaître. L’exercice est cependant très réussi, malgré la distance avec le modèle. Les thrashers de la première heure risquent de s’y perdre rapidement, tandis que les fans de Stoner Doom se régaleront.

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Qilin : un rêve éveillé

Toujours très organique, la musique de QILIN prend de l’ampleur et beaucoup d’épaisseur sur ce nouvel opus. Une maturité finalement très naturelle, si l’on tient compte de la qualité d’écriture des titres de « Parasomnia ». Capable de se faire planant comme de laisser s’abattre une véritable chape de plomb, le combo pose son empreinte sur un Stoner Psych envoûtant et un Doom, parfois Sludge, qui déconcerte sans pour autant perdre le fil narratif de cette dernière réalisation, qui en impose… à tous les niveaux !     

QILIN

« Parasomnia »

(Independant)

Le chemin parcourut par QILIN depuis 2017, date de la sortie de son premier EP éponyme, force le respect. Révélé avec « Petrichor » en 2020, album qui sera d’ailleurs distribué à l’international par Wormholedeath, le quatuor a pu s’aguerrir sur scène, enrichissant son jeu et surtout le son de son Psych Stoner Doom. Avec « Parasomnia », il franchit encore un cap que ce soit dans la composition, l’interprétation et la production de ce deuxième disque. Les contours de ce style si tortueux et captivant se dessinent de plus en plus et sont désormais beaucoup plus personnels et originaux, témoignant d’une grande maîtrise.

Thomas Vachy (lead guitare), Benoît Caillet (basse), Frédéric Bonneau (guitare) et Mathieu Guibert (batterie) font grandir et évoluer QILIN ensemble depuis sept ans maintenant et laissent ainsi apparaître une belle complémentarité. Il en émane une complicité évidente, comme on a d’ailleurs pu le voir sur le live des ‘Smoky Van Sessions’, filmées sur les côtes normandes en pleine nature, suivant le concept auxquels se sont prêtés d’autres avant eux, comme Appalooza, notamment. Les Parisiens, qui sortaient tout juste de l’enregistrement de « Parasomnia », annoncent en musique leur flagrante évolution.

Le registre instrumental offre aussi beaucoup de liberté dans laquelle le groupe s’engouffre avec détermination. Le travail sur les tessitures sonores, comme sur le son en lui-même, est véritablement à la hauteur de ces nouvelles compositions toujours très progressives. QILIN nous fait passer par de multiples sensations et émotions à travers le concept-même de « Parasomnia », celui du rêve paradoxal. Puissants, lourds ou aériens, les morceaux nous transportent avec beaucoup de fluidité dans un univers saisissant (« Lethean Dreams », « On Migoi’s Trail », « Hundred – Handed Wards »). Immersif à souhait.  

 « Parasomnia » est disponible sur le Bandcamp du groupe :

https://qilin.bandcamp.com/album/parasomnia

Retrouvez la chronique du premier album, « Petrichor » :

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Burn On The Bayou : swamp symphony

Diriger une maison de disques ne consiste pas seulement à sortir des albums, cela permet aussi de monter de beaux projets et, lorsqu’une collectivité artistique unie est à l’œuvre, cela offre aussi la possibilité d’avancer vers sur un dessein commun. Avec BURN ON THE BAYOU, une trentaine de ‘groupes maison’ s’est attelé à rendre un hommage hors-norme à Creedence Clearwater Revival de la plus heavy des manières qui soit. Masterisée par Kent Stump des légendaires Wo Fat, cette première compilation de Ripple Music est unique en son genre.   

BURN ON THE BAYOU

« A Heavy Underground Tribute To Creedence Clearwater Revival »

(Ripple Music)

C’est en 2021 que Todd Severin a décidé de fonder le label Ripple Music avec John Rancik. Basé à San Reno en Californie, il est aujourd’hui une instruction dans les domaines du Stoner, du Doom, du Heavy Rock, du Fuzz, du Metal underground, du Psych et affiliés. Avec une portée internationale, son catalogue en impose et compte parmi les incontournables du genre. Jamais à court d’idées, le boss a proposé à plusieurs groupes de sa belle écurie de reprendre à leur compte un morceau du mythique Creedence Clearwater Revival et voici BURN ON THE BAYOU, un double-album aussi surprenant que passionnant.

Cependant, c’eût été trop simple et évident de rendre un hommage à un représentant phare du registre de Ripple Music, dont l’influence aurait pesé sur tout le monde (oui, on pense aux mêmes !). Non, il fallait créer la surprise et Creedence Clearwater Revival et son appartenance au Bayou se sont rapidement imposés. A noter au passage l’excellente reprise du classique « Born In The Bayou », datant de 1969 sur l’album « Bayou Country », par Hot Spring Water. La grande majorité des artistes ici sont de près ou de loin attachés à la brume et la boue des marécages et c’est donc avec beaucoup de naturel que ces 32 morceaux brillent d’un nouvel éclat.

S’ils ne sont, bien sûr, pas de la génération de John Fogerty et sa bande, la majorité des formations ici présentes étant pour l’essentiel américaines, elles ont toutes plus ou moins grandi au son des hits des gars de la baie de San Francisco depuis leur opus éponyme en 1968. Evidemment, BURN ON THE BAYOU n’élude aucune de ces pièces maîtresses de l’Histoire du Rock. On retrouve donc sans surprise, mais avec beaucoup de plaisir, « Fortunate Son », « Suzy Q », « Rumble Tamble », « Bad Moon Rising », « Sailor’s Lament », « Proud Mary », « Heart It Through The Grapevine », « Cotton Fields », « Lodi », « Midnight Is The Right Time » et quelques autres.

Ce qui est étonnant, et très agréable aussi, c’est de voir avec quel respect chaque groupe interprète les morceaux de Creedence Clearwater Revival, tout en restant dans son propre registre qu’il soit Stoner, Doom, Psych, … Sur le papier, certaines covers sont aux antipodes des originales et pourtant l’ensemble est exceptionnel, d’une grande justesse et surtout dans l’esprit des compositeurs. Enfin, sur la trentaine de combos, on retrouve Bone Church, Great Electric Quest, Kind, High Priestess, Kabbalah, La Chinga, Thunder Horse, Void Vator, War Cloud, Curse The Son, Cortez… Du beau monde et des habitués du site !  

Todd Severin, patron de Ripple Music
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Occult Hand Order : une captivante noirceur

Sombre et ténébreux, « Silence By The Raging Sea » regorge de détails qui viennent se nicher avec une belle fluidité au creux des morceaux, qui se découvrent et se dévoilent un peu plus à chaque écoute. Stoner autant que Metal, le subtil Doom d’OCCULT HAND ORDER tend également vers le post-Rock et le Prog Rock 70’s avec une musicalité très organique. L’esthétisme poétique des Français peut paraître brumeux de prime abord et pourtant un bel éclat s’en échappe.

OCCULT HAND ORDER

« Silence By The Raging See »

(Independant)

Après des débuts remarqués avec un bon premier album éponyme en 2019, un an tout juste après sa formation, suivi du EP « The Chained, The Burned, The Wounded » qui a confirmé son intension et ses ambitions, OCCULT HAND ORDER semble décidé à passer à la vitesse supérieure. Pourtant autoproduit, le trio a confié le mastering de « Silence By The Raging Sea » au grand Magnus Lindberg, qu’on ne présente plus, pour un résultat très convaincant qui fait honneur aux morceaux de ce nouvel opus.

Sur six titres étendus, les Lyonnais prennent le temps de poser des atmosphères sur des structures psychédéliques et progressives qui se distinguent par des passages faisant l’équilibre entre des moments rugueux et dynamiques et d’autres légers et aériens. OCCULT HAND ORDER parvient à définir et distinguer son univers unique forgé de Stoner et de Metal avec beaucoup de précision, grâce également à une très bonne production. Très Doom, « Silence By The Raging Sea » a également des saveurs 70’s très envoûtantes.  

Sur des ambiances occultes (forcément !) et ésotériques, le power trio parvient rapidement à captiver et le chant lointain se fait même incantatoire et parfois légèrement chamanique, tant il donne l’impression de s’évaporer. De plus, OCCULT HAND ORDER étonne encore sur la richesse instrumentale qu’il affiche malgré une formation assez restreinte. Les teintes sont multiples, les fulgurances transcendent et les mélodies portent l’ensemble avec générosité (« Sink », « Pyre », « Fever », « Tidal Waves »). Renversant !

Photo : Quentin Dassibat
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Heavy Psych Rock Stoner Doom Stoner Metal

[Going Faster] : Superlynx / Orbiter

Les plus fidèles d’entre vous se souviennent sûrement des [Going Faster] que j’avais mis en place, afin de pouvoir parler d’un maximum d’albums pour faire face à l’avalanche de sorties. Les groupes ne semblaient pas vraiment apprécier la formule, alors j’avais arrêté, histoire de ne froisser personne, mais aussi au risque de passer à côté de bien belles choses. Cela dit, il faut faire des choix et ce sont souvent les mêmes qui en pâtissent.

L’une des conditions était que les planètes soient alignées, qu’il y ait donc des points communs et une démarche artistique proche. C’est le cas ici avec les Norvégiens de SUPERLYNX et les Finlandais d’ORBITER. Les deux voisins évoluent dans un registre Psychedelic Doom Rock/Metal, sont guidés par une frontwoman et surtout partagent le même label : Argonauta Records. Alors, allons-y !

SUPERLYNX

« 4 10 »

(Argonauta Records)

Pour leurs dix ans d’existence, les Norvégiens opèrent quelques changements avec la sortie de « 4 10 ». Tout d’abord, le groupe fait son arrivée sur le label italien Argonauta Records et surtout il accueille à la guitare et en live Espen Krøll. Musicalement, on retrouve le style si particulier de SUPERLYNX voguant dans un Psych Rock profondément Doom et Heavy. Au chant, Pia Isaksen (également bassiste) hypnotise toujours autant, parfaitement soutenue par Ole Teigen (batterie) et Daniel Bakken (guiatre). Très atmosphérique, le registre du combo peut laisser penser à une jam directement inspirée par les rêves et une part de surréalisme. Et si la noirceur de « 4 10 » est envahissante, la lumière entre aussi de bien des manières. Avec ce quatrième album, SUPERLYNX s’impose avec classe et une sincérité débordante.

ORBITER

« Hollow World »

(Argonauta Records)

Derrière cette fascinante pochette se cache un opus qui l’est tout autant. Déjà enthousiasmant sur « The Deluge », son premier EP sorti en 2020, la formation d’Helsinki se présente avec un long format, qui en dit déjà long sur ses ambitions et son talent. Mixé et produit par Hiili Hiilesmaa (Him, Apocalyptica) et masterisé par Ted Jensen (Alice In Chains, Mastodon), « Hollow World » fait l’écart et surtout la jonction également entre un Doom Metal massif et un Stoner Rock puissant et dynamique. ORBITER montre beaucoup d’assurance et de créativité, à l’instar de sa chanteuse Carolin, qui enveloppe les morceaux de sa voix captivante, tranchant ainsi avec les riffs acérés et l’ambiance psychédélique à l’heure tout au long de ce premier album. Une montée en puissance très réussie sur des morceaux qui ne manquent pas de créativité.  

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Psych Stoner Doom

Rocky’s Pride & Joy : le bal des fantômes

C’est une réalisation hantée que proposent les Australiens de ROCKY’S PRIDE & JOY avec « All The Colours Of Darkness », sorte de plongeon dans les ténèbres sur un son imposant où se croisent le Doom Metal et le Stoner Psych dans une harmonie morbide, mais tout sauf repoussante. Au contraire, le groove méchamment puissant vient habillement faire contraste avec une voix lointaine, des riffs agressifs et des rythmes organiques et très nuancés. Une belle découverte.

ROCKY’S PRIDE & JOY

« All the Colours of Darkness »

(Electric Valley Records)

Il semblerait que cette maison de chemin de fer maudite en photo sur la pochette, nichée dans la banlieue ouest d’Adélaïde, soit le point de départ de l’inquiétante aventure de ROCKY’S PRIDE & JOY. S’y sont passés des évènements morbides, des rencontres paranormales, des rites occultes, des actions violentes et c’est ce qui a inspiré Brenton Wilson (guitare, chant), Jessi Tilbrook (batterie) et Dominic Ventra (basse). Et ces trois-là sont tellement soudés que l’onde de choc qui secoue ce premier album est assommante, particulièrement vibratoire et dotée d’une interprétation musclée.

En place depuis 2020 et après de nombreux concerts dans son Australie natale, le trio est fin prêt pour se livrer sur huit titres où son Stoner Doom pose une empreinte singulière et originale. Déjà perçue sur les singles « Time’s Up » et « Future Sell » à ses débuts, la démarche de ROCKY’S PRIDE & JOY ne consiste pas seulement à tout écraser sur son passage, elle se révèle bien plus fine et complexe que ça. Certes, les riffs saturés de Fuzz ne manquent pas d’épaisseur, la rythmique est d’une lourdeur absolue, mais le groupe laisse parfois entrer la lumière.

Simple de prime abord, la musique du combo ne brille pas seulement par son efficacité, mais aussi par les détails qui donnent beaucoup de relief aux arrangements de « All The Colours Of Darkness ». ROCKY’S PRIDE & JOY déploie soigneusement sa noirceur avec une dynamique infaillible (« Red Altar », « Revenge », « Crawl », « Tunnel Vision », « Your Hell », « Pure Evil »). La batteuse/cogneuse mène la formation avec force pour nous embarquer dans un univers presque désertique, où l’acoustique « Lucifer’s Lullaby » vient apporter un peu de douceur (!) sur ce très bon premier opus.

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Psych Stoner Doom Stoner Rock

Moon Coven : exploration solaire

Sauf incident majeur, MOON COVEN est en passe de s’installer dans la durée avec cette nouvelle galette, tant son style, sa technique et sa créativité sont à leur zénith. Sur une base Psych et Fuzz, le Stoner Rock asséné sur « Sun King » est d’une maturité absolue et d’une belle diversité. Effet bulldozer garanti !

MOON COVEN

« Sun King »

(Ripple Music)

Au printemps 2021, « Slumber Wood » avait tout balayé sur son passage et l’arrivée du groupe chez Ripple Music ne pouvait se faire de manière plus fracassante. Alors plongés dans un Stoner Doom très brumeux et massif, les Suédois avaient livré une copie parfaite après moins de dix d’existence. Mais MOON COVEN aime débarquer là où on ne l’attend pas. Et « Sun King » en est la preuve éclatante.

Le quatuor renoue avec les fondamentaux du Stoner Rock en gardant bien sûr un côté Heavy et très Fuzz. Et si l’on perçoit quelques riffs et rythmiques Doom, « Sun King » est bien plus lumineux que son prédécesseur. MOON COVEN n’a rien perdu non plus de son aspect obscur et occulte, mais il est beaucoup plus canalisé et distillé dans un registre plus aéré et beaucoup plus dynamique. Le combo n’a pas levé le pied !

Enregistré et mixé par David Regn Leban, guitariste et chanteur de la formation, ce quatrième opus se révèle aussi solide et Psych que ce à quoi nous ont habitué les Scandinaves. Compacts et aussi plus variés, les morceaux de « Sun King » ont un côté obsédant, qui les rend particulièrement puissants (« Wicked Words In Gold They Wrote », « The Yawning Wild », « The Last Color » et le morceau-titre. MOON COVEN est inarrêtable !

Retrouvez la chronique du précédent album :