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Dark Metal Occult Rock

Saturday Night Satan : occult fever

Entre mystère, sorcellerie et ésotérisme, « All Things Black » ouvre les voies à SATURDAY NIGHT SATAN dans une atmosphère, qui n’est pourtant pas aussi sinistre qu’il n’y paraît. Mené par une frontwoman qui joue sur les contrastes avec une belle assurance et beaucoup de talent, cette nouvelle formation hellène est à la fois un brin vintage dans l’esprit et très actuel dans l’écriture. Metal et Rock, aérien et lourd, le disque des deux architectes à l’œuvre propose une obsédante fusion mélodique, subtile et solide.  

SATURDAY NIGHT SATAN

« All Things Black »

(Made of Stone Recordings)

Issu de l’underground athénien, SATURDAY NIGHT SATAN est la rencontre et le fruit du travail d’un duo, qui vient montrer avec « All Things Black » que le Dark Metal de son pays ne manque toujours pas d’imagination et qu’il est bel et bien vivace. Kate Soulthorn (chant) et Jim Kotsis (guitare, basse, chœurs) livrent un premier effort très abouti, bien produit et surtout d’une richesse assez étonnante. Outre les différentes époques passées en revue, les courants Metal, Rock et Hard Rock se fondent brillamment dans un même et seul élan créatif et homogène.

Le duo, qui est complété par un groupe en live, s’était au départ lancé dans ce qui devait rester un projet studio, mais il faut croire que l’avancée de la composition les a fait changer d’avis. Et c’est une très bonne chose ! Le multi-instrumentiste (également membre du groupe de Heavy Metal ‘Black Soul Horde’) et sa chanteuse s’inscrivent dans une mouvance Rock Occult en s’appropriant les codes du cinéma d’horreur et de sa sombre imagerie. Frissons de plaisir garantis avec SATURDAY NIGHT SATAN, dont le spectre musical s’étend aussi à travers le temps dans ses références.

S’appuyant sur les décennies allant des 70’s aux 90’s pour l’essentiel, les Grecques n’en sont pas moins modernes dans leur approche. Certes, la voix féminine n’est pas sans rappeler Lucifer, mais le groupe possède bien d’autres atouts. Nourri de quelques claviers, de sonorités psychédéliques, de thérémine (« Witch’s Dance ») et même de flûte sur l’excellent « Of Love And The Void » qui clôt l’album, SATURDAY NIGHT SATAN provoque la fièvre par des incantations dynamiques et accrocheuses (« 5AM », « Devil In Disguise », « Lurking In The Shadows » « Crown Of Arrogance » et le morceau-titre). Belle première !  

Photo : Petros Poulopoulos
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Stoner Rock

Waste A Saint : rockin’ angels

Peut-être dû à la rudesse du climat, les pays du Nord de l’Europe ont toujours eu une réelle prédisposition pour le Stoner Rock et, de fait, un talent certain. Venant s’incruster avec insistance dans le crâne, les morceaux de « Ravenous », deuxième effort studio des Scandinaves, marient avec beaucoup d’habileté la dureté du style avec une voix féminine qui captive, mais n’apaise pas pour autant les choses. WASTE A SAINT tient un line-up performant, qui sert des compos grisantes.

WASTE A SAINT

« Ravenous »

(All Good Clean Records)

WASTE A SAINT a réellement pris son envol il y a deux ans avec « Hypercarnivore », un premier album qui lui a permis de sillonner sa Norvège natale et de roder son style. Après quelques concerts, le quatuor est d’ailleurs aussitôt retourné en studio. Avant cela, il avait sorti un EP, « At Quarter Speed » en 2017, puis quelques singles épars. Avec « Ravenous », le combo fusionne avec force des inspirations qui vont du Hard Rock au Psych Rock avec quelques touches bluesy et surtout à travers un Stoner Rock mélodique et accrocheur.

Solide et épais, le registre des nordiques peut s’apparenter, même de loin, à celui de QOTSA pour ce qui est de l’efficacité des refrains, qui deviennent vite entêtants. Mais l’ensemble est beaucoup plus âpre et rugueux. Et cet atout résolument solaire et fédérateur, on le doit notamment à Bogey Stefandottir, la frontwoman de WASTE A SAINT. Cependant, si elle apporte une belle dose de féminité au Stoner Rock du groupe, grâce à un entrain véloce, elle se montre tout aussi capable de durcir le ton et de montrer les crocs.

« Ravenous » démontre que l’on peut faire un Stoner accessible, sans forcément en renier ses fondements et jouer au bulldozer. Mais que tout le monde se rassure : la puissance est bel et bien au rendez-vous. Les riffs appuyés d’Alexander Skomakertsen et le duo basse/batterie formé par Ole Nogva et Øivind Fossem viellent au grain. Moderne et entraînant, WASTE A SAINT est la vraie bonne surprise du moment (« Schizofriendia », « Sore Spot », « Femme Fatale », « Avoid My Wits », « Aeronaut »). A suivre de très près !

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Stoner Metal Stoner Punk

Bokassa : une joyeuse apocalypse

Déjà remis de « Molotov Rocktail » (2021), BOKASSA revient à la charge avec son cocktail de Metal HxC, de Stoner et de Punk. Entièrement confectionné par Tue Madsen, dont on connait le travail pour Meshuggah, The Haunted ou Halford, « All Out Of Dreams » dresse avec véhémence et pas mal de légèreté malgré tout, une sorte de possibilité très réelle du paysage sociopolitique actuel. Eprouvante et lourde, mais aussi dynamique et percutante, cette nouvelle réalisation montre un engagement poing levé très déterminé.

BOKASSA

« All Out Of Dreams »

(Indie Recordings)

Quatrième album en huit ans pour le power trio norvégien, qui avait tapé dans l’œil de Metallica il y a quelques années avant les suivre en tournée à l’invitation des Four Horsemen. Nous étions alors en 2019 et BOKASSA en avait bien sûr profité pour accroitre sa notoriété et faire connaître son Heavy Stoner Metal aux multiples facettes au monde entier et avait même signé chez Napalm dans la foulée. 2024 : retour aux fondamentaux et sur un label qui semble mieux respecter la nature et la démarche de nos furieux Scandinaves, difficiles à faire entrer dans le moule d’un système qu’ils ne cautionnent pas forcément.

Car il y a un côté Punk qui prend de la place chez BOKASSA et peut-être même encore un peu plus sur « All Out Of Dreams », qui est assez pessimiste dans le fond, malgré un humour noir constant. S’il se veut dystopique (c’est très en vogue actuellement), ce nouvel opus semble pourtant dépeindre une société dans laquelle nous vivons déjà. Fataliste mais vigoureux et la tête haute, le combo sort la sulfateuse à grand coup de riffs épais, avec un batteur au jeu musclé et un bassiste aux lignes véloces (« The Ending Starts Today », « Everyone Fails in The End », « Let’s Storm The Capitol »).

Jouant sur des ambiances très Metal ou carrément Hard-Core, des passages clairement Stoner et des aspects Punk californien estampillé 90’s, et un brin pénible, au niveau du chant et des chœurs, « All Out Of Dreams » a de quoi perturber par ses grands écarts. Mais peu importe finalement, car BOKASSA est avant tout une débauche d’énergie brute, une sorte de défouloir, mais bien joué ! A noter le chant de Lou Koller des légendaires Sick Of It All sur « Garden Of Heathen » et le soutien d’Aaron Beam de Red Fang sur « Bradford Death Squad ». Un disque qui va en faire transpirer plus d’un(e), à n’en pas douter !

Photo : Troll Toftenes
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Atmospheric Avant-Garde Doom

The Answer Lies In The Black Void : l’envoûtement

Rompu aux registres avant-gardistes, Martina Horváth et Jason Köhnen se sont attelés à la création d’un deuxième opus et celui-ci s’avère encore plus fascinant. Entre Metal et passages très aériens, THE ANSWER LIES IN THE BLACK VOID aborde le Doom sous tous les angles dans une approche atmosphérique très novatrice. Sur « Thou Shalt », la magie opère brillamment  pour produire un ‘Avant-Doom’ astral et fulgurant.

THE ANSWER LIES IN THE BLACK VOID

« Thou Shalt »

(Burning World Records)

La chanteuse hongroise Martina Horváth (Thy Catafalque) et le multi-instrumentiste hollandais Jason Köhnen (Celestial Season, The Lovecraft Sextet, Bong-Ra) continuent leurs expérimentations musicales communes, en marge de Mansur, et présentent le nouvel album de THE ANSWER LIES IN THE BLACK VOID, « Thou Shalt ». Deux ans à peine après l’étonnant « Forlorn », le duo nous replonge dans les méandres saisissants de son Doom Metal atmosphérique avec tout que cela comporte de nuances et de paysages sonores panoramiques.

Accompagné de Botond Fogi (guitare), Attila Kovacs (guitare) et de Mark Potkovacz (batterie), le combo se fond dans l’obscurité pour mieux jaillir sur des fulgurances très Metal. La frontwoman se fait presqu’obsédante tant la variété et la qualité de son chant sont exceptionnelles. THE ANSWER LIES IN THE BLACK VOID repousse l’univers du Doom dans ses derniers retranchements avec une créativité d’une grande richesse. A la fois complexe et évidente, la musique du quintet donne des frissons de plaisir tout en s’ouvrant à des dimensions multiples.

Tour à tour extrême et très mélodique, le style affiché est hallucinant de variations et « Thou Shalt » demande donc plusieurs écoutes avant d’en saisir l’entièreté. Lentes, écrasantes, mystérieuses, sauvages, démoniaques ou sensibles, d’une rare beauté et insaisissables, les atmosphères et les ambiances explorées par THE ANSWER LIES IN THE BLACK VOID transcendent les frontières du genre pour se faire ‘Avant-Doom’, comme le décrit la formation. Et pour que l’expérience soit totale, il faut se perdre dans ce monument artistique hors-norme. 

Photo : Peter Palotas
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Hard Rock Heavy Rock Sleaze

Torrential Thrill : Australian lightning

Ample et généreux, TORRENTIAL THRILL fait enfin son retour avec un opus fédérateur, racé, mélodique et très pêchu. De quoi entretenir la flamme Hard Rock et Heavy Rock qui brûle en lui depuis ses débuts en 2014 sur son île-continent. Depuis l’autre bout du monde, le gang de rockeurs hausse le ton sans jamais se prendre vraiment au sérieux, et c’est tout ce qui fait sa force. « State Of Disaster » regorge d’influences et pourtant une réelle originalité et une forte personnalité en émanent. Explosif !

TORRENTIAL THRILL

« State Of Disaster »

(Independant)

Dans la plus pure tradition du Hard Rock australien, le quatuor de Melbourne se présente avec son troisième album après cinq longues années de gestation. Il faut aussi reconnaître qu’avec ses onze morceaux, « State Of Disaster » atteint l’heure d’écoute et il s’inscrit dans la lignée des deux premières réalisations du groupe (« Mars » en 2015 et « Nothing As It Seems » en 2017). Et cette fois, TORRENTIAL THRILL balance du gros son, grâce à une production exemplaire.

Dans la lignée de leurs aînés Rose Tattoo, Airbourne, The Angels et plus récemment The Poor ou Koritni (à retrouver d’ailleurs très bientôt en interview !), le combo électrise et galvanise sur un Hard Rock assez Heavy et un brin Sleaze. L’intensité rappelle les 90’s et la fougue irrévérencieuse qu’elles dégageaient. TORRENTIAL THRILL applique, certes, des recettes éprouvées, mais avec une résonnance très actuelle et une interprétation moderne et puissante.  

Sorte d’hybride de Hard Rock et de Metal, la formation océanique s’avère rapidement être une véritable machine à riffs, aussi épais que tranchants (« Illusion », « Role Model », « Dangerous Game »). Au chant, Chris Malcher agit comme une locomotive, la rythmique bastonne et à la guitare, Steve Morrell fait des étincelles (« Color Of Rose », « Animal Like Me », « State Of Disaster »). TORRENTIAL THRILL est à la fois fulgurant et accessible, et on ne peut que s’interroger sur le fait qu’aucun label n’ait encore mis la main dessus !

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Doom Post-Metal Sludge

Gavran : des nuances de noir

En jouant sur la force des émotions déployées dans son Sludge/Doom, GAVRAN sort un deuxième album très rugueux, qui laisse également de la place à des ambiances post-Metal très précises. La production à l’œuvre sur les titres des Hollandais libère des parties instrumentales qui gravitent sur des crescendos survitaminés et rendent « Indistinct Beacon » totalement évanescents.

GAVRAN

« Indistinct Beacon »

(Dunk! Records)

A eux trois, Jamie Kobic (batterie, chant), Freek Van Roogen (guitare) et Ritsaart Vetter forment GAVRAN, un combo Sludge/Doom aux climats post-Metal singuliers. Le trio hollandais évolue tout en contraste dans un style sombre et absorbant où les sentiments d’anxiété, de doute et de détresse dominent pour finalement donner un instantané troublant de notre époque.

Fondé en 2018, ce n’est que deux ans plus tard que le groupe sort le single « Uska », suivi de près par un premier album, « Still Unavailing », qui annonce déjà un goût prononcé pour un registre fait de lourdeur et de riffs écrasants, mais que des breaks éthérés allègent avec finesse. Les thèmes des textes de GAVRAN traitent de l’existence, de la vie et de la mort et d’une société très sombre sous un prisme assez pessimiste.

Construit sur cinq titres dépassant tous les neufs minutes, « Indistinct Beacon » alterne entre moments calmes et très progressifs et des souffles Sludge assourdissants. Le trio de Rotterdam avance sans fioritures sur des répétitions hypnotiques. L’épaisseur des guitares et les variations vocales entre chant clair et growl offrent à GAVRAN une robustesse très atmosphérique aussi. Subtil et herculéen !

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Stoner Doom

Stones Of Babylon : au coeur des ruines antiques

Imposant et psychédélique, STONES OF BABYLON ne quitte pas la voie qu’il emprunte depuis cinq ans maintenant. Le trio de Lisbonne voyage à travers les mythes et les légendes en arborant un Stoner Doom instrumental massif. Très organique, la production de « Ishar Gate » confère à la musique des Portugais un relief qui la rend pour le moins intrigante.

STONES OF BABYLON

« Ishtar Gate »

(Raging Planet Records)

C’est dans une ancienne Babylone totalement décimée que nous plonge cette fois le trio portugais trois ans après « Hanging Gardens », qui peignait une cité florissante. Forcément, l’ambiance est devenue sombre et pesante et le Stoner Doom de STONES OF BABYLON, même s’il conserve toujours quelques touches orientales lumineuses, traverse l’antiquité avec une lourdeur incroyable.

Toujours instrumental, ce deuxième album studio explore de nouvelles dimensions musicales dans un registre hypnotique et presque rituel. Les riffs monolithiques chargés de Fuzz s’agrémentent de psychédélisme aux allures parfois inquiétantes. STONES OF BABYLON se montre aussi puissant que subtil avec des atmosphères souvent menaçantes. Et cette impression monte en puissance au fil de cette nouvelle réalisation.

Avec six morceaux s’étendant sur près d’une heure, les Lisboètes ont réalisé un gigantesque travail sur les ambiances, qui naviguent dans des sonorités à la fois progressives et capables aussi de brutales déflagrations. Crépusculaire et oppressant, STONES OF BABYLON n’a pas son pareil pour livrer un Stoner Doom captivant (« Giganesh », « Pazurn », « The Gate Of Ishar », « Tigris & Euphrates »). Un baffe !

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Post-Metal Sludge

Rongeur : bestial !

Sombre et rugueux, le deuxième album des Scandinaves vous saute à la gorge pour ne plus vous lâcher. « Glacier Tongue » ne passe pas par quatre chemins pour déverser un Sludge Metal aux accents post-Metal ravageur et sauvage. Très technique et surpuissant, le trio norvégien propose un style qui vient bousculer la quiétude des ténèbres avec détermination. Corrosif, RONGEUR ne grignote pas : il dévore !

RONGEUR

« Glacier Tongue »

(Fysisk Format)

Ecrasant tout sur son passage, le trio norvégien RONGEUR débarque pleine balle avec un deuxième album aussi robuste qu’inspiré et affichant une variété musicale étonnante. Originaire d’Oslo, le groupe est composé de Dag Ole H. Huseby (guitare, basse, chant), Jon Dahl Tveter (batterie, chant) et d’Audun G. Jakobsen (guitare, chant), tous trois aguerris à la scène locale pour avoir œuvré dans de multiples formations.

C’est fin 2012 que le trio se réunit pour la première fois avec pour objectif de livrer une musique brute, lourde et honnête. Pari réussi haut la main ! Après plusieurs démos et quelques splits, leur premier album, « An Asphyxiating Embrace », voit le jour et annonce déjà un style décapant. A travers son Sludge Metal qui vire même au post-Metal par moment, RONGEUR s’inspire autant de groupes extrêmes que de Schopenhauer.

Enregistré dans trois studios différents, « Glacier Tongue » se déploie sur des riffs précis et épais, une rythmique ferme et un chant aussi ténébreux que sauvage. Décrivant son époque avec un regard acide, RONGEUR appelle à la révolte et à la prise de conscience avec des textes scandés et avec une férocité permanente. Très bien produit, ce deuxième album met en lumière la technicité et la puissance de frappe d’un trio dont on va entendre parler !