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Heavy Psych Rock Stoner Rock

Void Cruiser : transcender l’infini

Entraîné par des guitaristes rivalisant de fuzz, un chanteur pleinement libéré et ténébreux et une rythmique assommante, VOID CRUISER parvient à faire jaillir un groove surpuissant sur des mélodies ténébreuses, parfois lugubres, dans une quête effrénée d’espoir et d’une luminosité qui se fait pourtant rare dans ce Stoner Heavy Psych, où la mesure et la tempérance n’ont pas leur place. « Call Of The Void » appelle à un lâcher-prise sans retenue.

VOID CRUISER

« Call Of The Void »

(Argonauta Records)

Depuis un peu plus d’une décennie maintenant, les Finlandais de VOID CRUISER assènent leur Stoner Heavy Psych avec une progression qui se lit au fil des albums. S’il reste quelques réminiscences du Grunge très 90’s qui a été la base de son jeu sur « Overstaying My Welcome » sorti en 2015, le quintet lorgne aujourd’hui sur un style plus efficace, direct et massif qu’auparavant. Une manière d’affirmer une puissance qui déborde sans relâche sur ce nouvel opus à l’esthétique sonore très travaillée.

Car, ce qui impressionne dès les premières notes de « Dragon’s Tail » qui ouvre les hostilités, c’est cette incroyable férocité portée par un chant à la fois agressif et mélodique qui surprend. VOID CRUISER sait comment emporter l’auditeur dans un registre très maîtrisé. L’imposante rythmique basse/batterie donne le ton à des morceaux qui cognent en emportant tout sur leur passage. Pourtant le quintet joue avec les atmosphères, comme pour mieux nous guider dans son monde tortueux.

Les titres de « Call Of The Void » dépassent tous (ou presque) les six minutes et il est parfois même difficile de reprendre son souffle. Mais VOID CRUISER sait aussi imposer des ambiances plus mélancoliques et envoûtantes (« Wiser Man », « When Gravity Pulls »). L’autre marque de fabrique du groupe est ce mur de guitare implacable, épais et qui frôle parfois même la saturation (« Happiness », « Woe », « Pariah »). A noter aussi le groove massif de ce troisième album qui libère des compos souvent sombres, mais captivantes.

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France Progressif Stoner Doom

Oaks : une puissance organique sculpturale [Interview]

Fort d’un premier album très réussi, OAKS propose une aventure musicale singulière en évoluant dans des atmosphères progressives et Metal, dominé par un Stoner Doom lourd et épais. Le trio parisien se déploie dans un registre entièrement instrumental avec un travail sur le son très pertinent. Pleine de relief, la musique du groupe se fait aussi envoûtante que percutante, et c’est son guitariste, Thibault, qui nous en dit un peu plus sur cette première réalisation qui en appelle déjà d’autres.

– On vous a entendu pour la première fois en février dernier avec votre premier single « The Void », suivi de « The Chasm » en juillet. Avant de parler de l’album, pouvez-vous revenir sur votre parcours respectif et la création d’OAKS ?

Nous nous connaissons avec Julien (basse) depuis 20 ans. Nous sommes tous les deux de Strasbourg et nous avons joué dans de nombreux groupes avec des potes communs, mais finalement jamais ensemble. Naturellement, quand nous nous sommes retrouvés tous les deux à Paris, on a voulu créer un groupe. Nous voulions qu’il ne soit pas stigmatisé par un style particulier, mais le reflet de tout ce qu’on a pu écouter et digérer musicalement. On a également la chance d’avoir trouvé très rapidement notre propre studio de répétition et d’enregistrement, ce qui nous permet de stocker notre montagne de matos et d’avoir la liberté de répéter autant qu’on le souhaite. OAKS est né de notre envie de jouer ensemble sans se mettre de limite.

– Pourquoi avez-vous laissé passer huit mois entre le premier single et l’album ? De l’accueil de « The Void » dépendait la sortie de « Genesis Of The Abstract » ou est-ce que, plus simplement, tout n’était pas encore prêt ?

Le plan initial était de sortir l’album en autoproduction début 2022. A ce moment-là, nous avons eu un deal avec Argonauta Records et il nous a fallu revoir notre stratégie. Au début, l’album devait sortir en mai, mais notre batteur de l’époque nous a quitté juste après la sortie de « The Void » et l’annonce de la signature avec Argonauta. Nous avons heureusement rapidement trouvé Nathan, mais nous avions quand même besoin de temps pour être prêts pour de la sortie. Nous avons donc décidé de repousser la sortie à septembre.

Photo : Bill Castle

– Vous vous décrivez comme un ‘trio conceptuel’, qu’entendez-vous par là ? C’est une définition globale du groupe, ou cela ne s’applique qu’à ce premier album ?

En tant que groupe instrumental, il est très intéressant de réussir à raconter quelque chose sans mot. Lors de la création du projet, le désir était d’avoir un ensemble cohérent autant musicalement que visuellement. Nous travaillons donc nos titres dans une globalité, comme un projet complet. Nous avons créé un show vidéo pour nos concert afin de renforcer ce côté synesthésique du projet. D’ailleurs en live, nous jouons l’album dans son intégralité comme si c’était un seul long titre.

– Alors que vous évoluez en instrumental, seule une voix féminine se fait entendre en début et en fin d’album. Est-ce que vous pouvez en parler, pour ceux qui ne connaissent pas encore le disque, et en détailler son contenu ?

J’ai écrit un texte qui résume le concept de cet album. Nous voulions une intro et une outro et j’ai toujours eu en tête une voix grave et monocorde de femme pour réciter ce texte très imagé, voire carrément lyrique ! La voix de Fanny Fourquez, que je connais très bien, était parfaite pour ça.

– Musicalement, OAKS déploie un Stoner Doom teinté de Metal et de Prog, qui crée un univers très sombre malgré quelques passages plus lumineux. C’est pour accentuer un peu plus cette atmosphère assez obscure que vous avez opté pour une guitare baryton ?

Nous aimons particulièrement cet accordage, car nous voulions un son lourd. Je joue principalement sur Les Paul, et le diapason court des Gibson donne ce côté bourdonnant et organique à l’ensemble. Et Julien et moi adorons acheter du matos, essayer des nouveaux sons et amasser des amplis et des pédales.

– « Genesis Of The Abstract » présente une production massive et très organique. Il s’en dégage un aspect très live et spontané. Malgré une lourdeur apparente, l’album reste aussi très vif et véloce. Est-ce que c’est cette formule en trio qui vous permet d’obtenir ce son si particulier ?

Nous avons enregistré l’album dans notre propre notre studio avec Julien Tota aux manettes. Nous voulions ce côté live et organique que tu décris. Nous ne cherchions pas un son trop moderne, ni surproduit. C’est d’ailleurs exactement notre son en live. Julien et moi avons vraiment travaillé pour être complémentaires. Etant un trio, et instrumental de surcroit, chacun doit couvrir un large spectre de fréquence pour éviter que la sauce ne retombe. Les lignes de basse sont régulièrement assimilables à des lignes mélodiques, alors que je martèle la rythmique. C’est très intéressant de sortir des carcans classiques du basse/batterie/guitare/chant, tout en essayant de garder la même dynamique à l’écoute.

– OAKS ayant opté pour un registre instrumental, la question du chant ne se pose donc pas. Mais si vous deviez poser des textes sur votre musique, quelle en serait la teneur ?

Honnêtement, je ne sais pas quoi te répondre. Sur cet album, j’ai écrit un texte qui résume les différentes parties du voyage sonore et conceptuel que nous avons créé. Nous commençons à travailler sur le prochain album et un thème se dégage déjà. J’aime l’idée qu’il y ait un fil rouge dans chacune de nos créations. Sur « Genesis Of The Abstract », c’était celle d’une longue et unique plage musicale. Pour le suivant, j’aimerais intégrer plus de samples, qui seront justement le lien entre chaque titre. On ne se fixe aucune limite, alors peut-être que nous aurons des titres chantés à l’avenir.

– Outre la musique, vous travaillez aussi beaucoup sur le visuel du groupe en collaboration avec des artistes d’autres disciplines. Pouvez-vous en dire un peu plus, car vous abordez OAKS comme une entité aux multiples facettes finalement ?

Nous aimons effectivement intégrer différents aspects artistiques à notre projet. Nous avons, par exemple, la chance de collaborer avec Clément Sautet, qui est réalisateur de film et photographe. Nous travaillons avec lui sur l’aspect visuel du projet ce qui, comme je le disais, est primordial dans notre démarche artistique. J’ai également approché certains artistes visuels pour la création des loops du show vidéo live. Notre envie est de proposer un projet global de l’album au live, en passant par le contenu de nos réseaux et des clips que nous tournons.

L’album d’OAKS, « Genesis Of The Abstract », est disponible depuis le 30 septembre chez Argonauta Records.