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France Post-Metal Progressif

Maudits : un destin en main [Interview]

Le Metal post-Progressif de MAUDITS prend une nouvelle tournure et continue de s’affiner. A peine un an après la sortie de son premier album éponyme, le groupe poursuit sa route et livre « Angle Mort », un nouvel EP original, pointu et sans complexe. Forte d’un univers original, la formation a aussi vu son line-up évoluer ce qui semble même lui avoir apporté une motivation supplémentaire. Olivier Dubuc, le guitariste du duo, revient sur la création de cette nouvelle réalisation très protéiforme.

– Quand je vous ai interviewé en décembre dernier peu après la sortie de votre premier album, vous aviez déjà profité des deux confinements pour composer et vous étiez même prêts à enchainer. Depuis, que s’est-il passé en marge de l’enregistrement de ce nouvel EP ?

Cet EP n’était pas prévu. Au départ, nous voulions commencer à défendre en live l’album après le premier confinement, et enchainer par l’enregistrement du matériel composé pendant ce temps-là. Mais tout le monde sait que ça ne s’est pas passé comme ça, et nous nous sommes retrouvés une nouvelle fois coincés à la maison. Je me suis donc mis à travailler sur une nouvelle version de « Résilience », seul avec ma pédale de loop pour l’enregistrement d’une vidéo live, histoire de mettre un peu de matière sur les réseaux. Finalement, nous nous sommes dit avec Chris (batterie, samples) qu’il serait bien d’étendre ça sur un ou deux morceaux, de les enregistrer proprement et pourquoi pas de les proposer en téléchargement sur notre Bandcamp. Dans le même temps, Raphaël Verguin, le brillant violoncelliste, dont je connaissais très bien le travail avec Spectrale (mais sans le connaître personnellement à l’époque), nous a commandé l’album sur Bandcamp. Je me suis donc permis de le contacter pour savoir s’il serait partant à l’idée de travailler avec nous sur ces nouvelles versions. Il a accepté et comme nous ne savons pas faire les choses à moitié, nous nous sommes mis à fond dans le projet, le tout à distance. L’idée était de pouvoir enregistrer très rapidement pour enchaîner sans laisser passer deux ou trois ans entre deux sorties. Et honnêtement, nous étions extrêmement satisfaits de la matière proposée, ce qui nous a donné l’envie et la confiance pour continuer. Cet EP est devenu pour nous une sortie à part entière, et pas juste un petit amuse-gueule avant le deuxième album, et nous l’avons chéri et travaillé avec la même intensité que le précédent.

– La surprise de cet EP vient aussi du line-up. D’une formule en trio, vous êtes devenus un duo. Que s’est-il passé et MAUDITS a-t-il rapidement trouvé un nouvel équilibre ?

Oui, nous avons construit et maquetté « Angle Mort » presqu’exclusivement à deux avec Chris. Puis, Anthony, notre ancien bassiste, a quitté le groupe peu de temps avant l’enregistrement. Avec du recul, je pense que ces deux confinements ont largement contribué à sa perte de motivation pour MAUDITS. L’éloignement physique imposé durant cette longue période a creusé un fossé entre nous, et comme les nouvelles technologies ne sont pas vraiment son truc, il a un peu lâché et ne s’est jamais vraiment intéressé au projet avec le boulot à distance que cela nécessitait.

Je pense aussi que l’idée de base ne l’intéressait pas plus que cela. Il souhaitait enchaîner directement avec ce que nous avions mis en place durant le premier confinement. Bref, nous étions à fond dedans et lui pas du tout. Et outre cette mésentente artistique, plusieurs choses sont ressorties, notamment sur notre manière d’avancer, nos prises de décisions et notre conception de ce projet qu’est MAUDITS. L’écart s’est creusé et le point de non-retour est arrivé.

Si ces situations arrivent à beaucoup de groupes en temps normal, le contexte d’enfermement et de distance forcée a accéléré le processus de séparation et l’a donc précipité. Plus concrètement, cela ne nous a pas réellement déséquilibré, car nous avions presque intégralement fonctionné avec la même méthode depuis le premier album, en posant les bases avec Chris.

Olivier Dubucq (guitares)

– Sur « Angle Mort », on découvre deux nouvelles compositions et trois autres titres présents sur votre album dans des versions réenregistrées et réarrangées. Concernant ces dernières, vous n’étiez pas satisfaits des premières moutures ?

Si, nous les adorons ! Pour nous, l’intérêt de ses nouvelles versions était de déconstruire complètement les plages d’origine en ne gardant que les thèmes de base, afin d’en faire quasiment des nouveaux morceaux. Et à la rigueur, tant mieux si les auditeurs ne les reconnaissent pas du premier coup, cela prouve qu’on aura atteint notre objectif ! Nous les avons d’ailleurs renommé pour brouiller les pistes. Le point de départ était la réinterprétation de « Résilience », qui nous a vraiment donné envie de pousser le concept sur « Verdoemd » et « Perdu d’Avance » (initialement titrés « Maudits » et « Verloren Strijd »).

– Les deux nouveaux titres  ont-ils été composés alors que vous étiez déjà à deux, ou s’agit-il de morceaux datant de l’album ?

Non, nous les avons composé à deux et à distance comme pour les trois réinterprétations.  D’ailleurs, « Epäselvä », notre premier single, a volontairement été composé au dernier moment sur une période très courte en le construisant sur plusieurs rythmes Dub et très énergiques, improvisés directement en studio par Chris, le tout sur un tempo choisi sur le moment un peu au hasard. Par la suite, j’ai peaufiné mes ambiances, mes arpèges et les riffs sur ses parties, juste avant l’enregistrement final de la guitare. Nous avions déjà procédé comme ça pour le premier album sur « Verloren Strijd », et nous avons voulu retenter l’expérience. On a appris à aimer cet exercice, car tout ce qui sort quand on est dans l’urgence est très spontané et, à chaque fois, cela a donné un résultat très particulier et organique. Raphaël a par la suite improvisé une très belle ligne de violoncelle (nous avons d’ailleurs gardé sa première prise) et pour finir, Erwan a enrobé l’ensemble d’une ligne de basse bien Dub et entêtante. Le morceau dégage une émotion plus brute et sans filtre, qui tranche avec le côté très réfléchi du reste.

– Finalement, lorsqu’on voit la durée d’« Angle Mort », vous auriez pu le compléter d’un ou deux titres et sortir un deuxième album, non ? A moins que c’était vraiment un format EP que vous aviez en tête ?

Oui, l’idée initiale était un EP. Il ne devait d’ailleurs contenir que les trois réinterprétations. Mais les idées d’« Angle Mort » et d’« Epäselvä » sont arrivées toutes seules et ça collait bien avec le reste. Et puis, même si nous avions eu d’autres morceaux à disposition et qui collaient à l’ambiance, je pense nous aurions laissé comme ça car tout s’imbriquait bien tel quel. Un ou deux morceaux de plus auraient nui à la dynamique et la cohérence de l’ensemble.

Christophe Hiegel :(batterie) 

– Même si MAUDITS conserve ce côté très organique dans la production, on note la présence plus importante de samples notamment. L’intention est toujours d’explorer de nouveaux horizons sonores et musicaux ?

Oui, nous avons développé et mis en avant un peu plus les samples sur « Angle Mort ». Je n’ai jamais caché mon amour pour le Trip Hop avec, entre autre, Portishead, Massive Attack, Ezekiel ou encore Scorn et leur manière si particulière d’intégrer les samples. Chris est un expert sur tout ce qui concerne le Dub. Il avait d’ailleurs un excellent projet du nom de Blue Mountain, avec qui il a enregistré un superbe album. Ces influences, si elles étaient déjà présentes sur le premier album, ressortent encore plus sur « Angle Mort ». Je pense que le format et le contexte dans lequel on l’a travaillé ont naturellement favorisé ce genre d’expérimentation et a naturellement fait ressortir un peu plus cet aspect de notre univers musical.  Et pour info, il n’y a absolument rien de programmé : tout a été joué. Chris tenait à tout faire lui-même et c’est sûrement pour ça que le côté organique est conservé.

– Cette fois encore, vous avez intégré des cordes, en l’occurrence du violoncelle. La musique de MAUDITS fait toujours la part belle aux arrangements avec également du synthétiseur Moog, ce qui est devenu assez rare, et différents effets. L’aspect expérimental demeure toujours très palpable, malgré le côté accessible de vos morceaux…

Oui, comme je l’ai dit lors de notre précédente interview, nous ne nous fixons aucune limite musicalement, tant que cela nous plaît et qu’à l’arrivée ce soit cohérent. En effet, on aime beaucoup expérimenter avec différents instruments et textures pour enrichir notre musique. Cela vient probablement de notre passé progressif avec notre ancienne formation The Last Embrace. Bien que le son et l’orientation de MAUDITS soit très différente, nous partageons probablement inconsciemment l’approche aventureuse d’une certaine frange du Rock Progressif.

– Même si on entend quelques voix, l’idée d’intégrer un chanteur n’est toujours pas à l’ordre du jour ? MAUDITS est et restera instrumental ?

C’est vrai que sur l’album, nous souhaitions intégrer un spoken words sur « Verdoemd ». Il a été écrit et enregistré par Nicolas Zivkovitch (Ddent, Fiend, Krv, Les Tigres du Futur), qui est un très bon ami et un super musicien. Mais en effet, je pense que MAUDITS restera un projet majoritairement instrumental. Après, si certains passages appellent une voix, nous n’hésiterons pas à en mettre, mais intégrer un chanteur n’est pas une option pour nous. Nous sommes très bien comme ça.

– Enfin, concernant la scène, comment allez-vous vous produire ? Juste en duo et avec l’aide de diverses programmations, ou avec quelques invités comme sur vos disques ?

En fait, nous sommes redevenu un trio, même si nous sommes effectivement deux sur les photos promos. Erwan, notre nouveau bassiste, est arrivé seulement deux semaines avant l’enregistrement final, donc il n’a pas pu participer à la composition à proprement parler. En revanche, il a composé et arrangé toutes ses lignes de basse dans ce lapse de temps très court. Je tiens d’ailleurs encore une fois à le remercier, car le résultat est fantastique et pertinent. C’est un bassiste très doué et une belle personne, qui dégage une énergie positive et qui nous a mis un bon coup de fouet. C’est un plaisir de l’accueillir officiellement parmi nous.

Nous avons d’ailleurs fait nos deux premiers concerts récemment avec lui et la formule trio marche très bien ! Chris contrôle, joue et lance les divers samples (violons, claviers, etc…) avec son PAD et j’utilise une grosse pédale de loop avec beaucoup d’effets, ce qui nous permet de reproduire presqu’à l’identique en live la masse sonore qu’on entend sur les albums. Cela représente un sacré boulot pour tout le monde, mais c’est une sensation grisante de pouvoir tout gérer soi-même. On verra en fonction des endroits et des événements, mais il n’est pas impossible qu’on fasse appel à des invités sur scène pour certaines occasions. On aimerait beaucoup le faire avec le violoncelliste d’« Angle Mort », Raphaël Verguin. On verra si c’est possible !

« Angle Mort » de MAUDITS est disponible depuis le 5 novembre chez Klonosphere.

Retrouvez la première interview du groupe pour Rock’n Force :

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Doom Post-Metal

SaaR : par-delà les dieux

Et si l’épopée d’Ulysse, sorti de l’imaginaire d’Homère, se déroulait finalement dans un dédale de tours et d’immeubles aussi froids qu’impersonnels et insensibles ? C’est une hypothèse soulevée par SAAR, brillant quatuor parisien de post-Metal, sur son troisième album « Gods ». Subtil et massif.

SAAR

« Gods »

(Source Atone Records/Klonosphere)

Plus de deux millénaires après son écriture, « L’odyssée » d’Homère continue d’inspirer les artistes quelque soit leur domaine d’expression. Cette fois, c’est une vision post-Metal que nous propose le quatuor parisien SAAR, qui sort « Gods », un troisième album toujours instrumental et toujours très créatif.

S’engouffrant dans de sombres abîmes musicaux et malgré la teneur de l’œuvre mythologique, le groupe offre une version globalement très urbaine dans le son et jusque sur la pochette. Très moderne dans son approche, SAAR semble avoir voulu actualiser le propos, et il faut reconnaître qu’il a vu juste.

Sans effet de manche, mais non sans nuances, « Gods » nous propulse dans un post-Metal où le Doom et le post-HardCore font bon ménage (« Ulysse », « Bridge Of Death », « Tirésias »). SAAR interprète ses sept nouvelles compositions avec force en disposant d’une excellente production. Souvent hypnotique, l’album est imposant.

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Post-Metal Sludge

Rongeur : bestial !

Sombre et rugueux, le deuxième album des Scandinaves vous saute à la gorge pour ne plus vous lâcher. « Glacier Tongue » ne passe pas par quatre chemins pour déverser un Sludge Metal aux accents post-Metal ravageur et sauvage. Très technique et surpuissant, le trio norvégien propose un style qui vient bousculer la quiétude des ténèbres avec détermination. Corrosif, RONGEUR ne grignote pas : il dévore !

RONGEUR

« Glacier Tongue »

(Fysisk Format)

Ecrasant tout sur son passage, le trio norvégien RONGEUR débarque pleine balle avec un deuxième album aussi robuste qu’inspiré et affichant une variété musicale étonnante. Originaire d’Oslo, le groupe est composé de Dag Ole H. Huseby (guitare, basse, chant), Jon Dahl Tveter (batterie, chant) et d’Audun G. Jakobsen (guitare, chant), tous trois aguerris à la scène locale pour avoir œuvré dans de multiples formations.

C’est fin 2012 que le trio se réunit pour la première fois avec pour objectif de livrer une musique brute, lourde et honnête. Pari réussi haut la main ! Après plusieurs démos et quelques splits, leur premier album, « An Asphyxiating Embrace », voit le jour et annonce déjà un style décapant. A travers son Sludge Metal qui vire même au post-Metal par moment, RONGEUR s’inspire autant de groupes extrêmes que de Schopenhauer.

Enregistré dans trois studios différents, « Glacier Tongue » se déploie sur des riffs précis et épais, une rythmique ferme et un chant aussi ténébreux que sauvage. Décrivant son époque avec un regard acide, RONGEUR appelle à la révolte et à la prise de conscience avec des textes scandés et avec une férocité permanente. Très bien produit, ce deuxième album met en lumière la technicité et la puissance de frappe d’un trio dont on va entendre parler ! 

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Black Metal Post-Metal

Owl Cave : profondeur sonore

Après plus de trois ans d’un travail qu’on imagine facilement très prenant, OWL CAVE livre enfin son premier album, dont l’univers très torturé et intense est l’œuvre d’un seul musicien. Dans un post-Black Metal aux multiples et complexes facettes, « Broken Speech » se livre et se déguste d’un seul élan.

OWL CAVE

« Broken Speech »

(Time Tombs Productions)

Derrière cette très belle pochette d’OWL CAVE se cache un album pour le moins étonnant. S., l’instigateur du projet qui se présente en one-man-band, a donc pris les choses en main et… prend même la nôtre. Car ce premier opus, « Broken Speech », est constitué d’une seule et unique piste, qui s’articule en six mouvements. L’ensemble s’écoute donc du début à la fin, pour mieux en saisir la progression.

Dans une atmosphère Black Metal, OWL CAVE propose un véritable voyage musical entre ambiances lourdes et climats très changeants, et où les sensations succèdent aux émotions avec une fluidité assez surprenante. Pourtant, le nombre de textures sonores et de superpositions pourraient rendre « Broken Speech » étouffant, voire brouillon. Et il n’en est rien, tant l’album est homogène.

Certes, OWL CAVE ne propose pas un périple musical de tout repos, car l’ensemble diffuse un Black Metal dans lequel viennent s’immiscer des passages Indus et tribaux, le tout avec des fulgurances tantôt sauvages, tantôt éthérées. La production brute et organique rend définitivement ce premier effort saisissant et très immersif. « Broken Speech » nous plonge avec un univers unique.

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Hard-Core International Post-Metal

She Said Destroy : retour aux affaires [Interview]

Après deux albums et un dernier EP en 2012, les très prometteurs et novateurs norvégiens décident, selon les termes-mêmes du groupe, d’hiberner. Près d’une décennie plus tard, fidèle à son style si particulier et également à son label, SHE SAID DESTROY revient à la charge (c’est peu de le dire !) avec un nouvel album, « Succession », construit autour de morceaux composés en l’espace de 13 ans. Le post-Metal Hard-Core très Blackened des Scandinaves a conservé tout son volume et sa créativité. Anders Bakke, chanteur de la formation, nous en dit un peu plus.

Anders Bakke, chanteur du groupe

– On était sans nouvelle de SHE SAID DESTROY depuis « Bleeding Fiction » en 2012. J’imagine que chacun de son côté, tout le monde a continué la musique. Comment avez-vous passé ces dernières années ?

Ouais, on a mis du temps à se remettre sur les rails ! Nous n’avons jamais eu l’intention de faire une pause de huit ans, mais nous étions tous très occupés chacun avec nos propres projets, à la fois musicaux ou non. Le temps a juste passé. Pendant cette période, nous avons écrit de la musique lentement et régulièrement que nous avons mise de côté pour une utilisation future.

– Avant de parler de « Succession », je me suis rendu compte que le groupe avait presqu’autant d’années d’activité que d’inactivité. Ce n’est pas banal ! Vous vous considérez aujourd’hui comme un jeune groupe ou plutôt des vétérans au final ?

(Rires) Ouais, c’est vrai. Je suppose que nous nous considérons comme des vétérans, car nous avons été impliqués dans la musique depuis le début, même si SHE SAID DESTROY, en tant que groupe, a eu des temps d’arrêt. Cela dit, lorsque vous prenez presque 10 ans de congés dans le climat musical actuel, où les gens vous oublient dès qu’ils tournent la tête et que quelque chose d’autre apparaît dans leur fil d’actualité, vous êtes probablement considérés comme un nouveau groupe lorsque vous revenez. Surtout quand on vient de l’underground. Ce n’est pas comme si nous pouvions compter sur nos efforts passés pour que ce nouvel album fasse son chemin. Plus personne ne sait vraiment qui nous sommes ! (Rires)

– Votre nouvel album vient tout juste de sortir après huit ans de silence. Est-ce que SHE SAID DESTROY a conservé le même line-up, ou y a-t-il eu des changements de personnel ?

Les principaux membres et compositeurs, qui faisaient partie de la dernière moitié de notre période active (2006-2012) sont toujours là. C’est toujours moi, Snorre (guitare, basse, claviers – NDR) et Bjørn (Holmesland, composition et arrangements – NDR) qui formons le socle principal. Notre batteur, Sindre, fait son apparition pour la première fois sur un album de SHE SAID DESTROY, mais il a travaillé en étroite collaboration avec Snorre et Bjørn pendant plusieurs années sur d’autres projets.

L’album « Succession » de SHE SAID DESTROY est disponible depuis le 15 octobre chez Mas-Kina Recordings.

– « Succession » a été enregistré à Vilnius en Lituanie dans le studio de votre guitariste. Comment se sont passées les retrouvailles ? Il devait y avoir une grande motivation chez chacun d’entre vous, non ?

Oui, l’album a été enregistré au Ymir Audio entre janvier et février 2020. Je ne pense pas que cela ressemblait vraiment à une réunion, car nous ne jouions à aucun moment ensemble et les sessions d’enregistrement ne nous incluaient pas tous. Cet album est purement un projet de studio, où nous sommes restés en contact et avons discuté de l’avancement des sessions par mail et par téléphone. Je suis le seul à vivre encore en Norvège, donc je n’étais pas là pour les sessions d’enregistrement des instruments principaux. Mais j’avais fait la pré-production vocale moi-même avant de les rejoindre à la mi-février 2020.

Nous étions absolument motivés pour que tout soit opérationnel. Snorre et moi parlions de faire un autre album depuis plusieurs années, et en 2018/19, nous avons décidé qu’il était enfin temps. Heureusement pour nous que nous l’avons fait à ce moment-là, puisque le monde entier s’est arrêté quelques semaines seulement après les dernières sessions d’enregistrement. Je me souviens avoir vu beaucoup de masques dans les aéroports lors de mon retour en Norvège depuis la Lituanie, sans vraiment comprendre les implications de ce qui se passait.

– L’album est composé de morceaux écrits entre 2007 et 2019, et pourtant on sent une belle unité et une continuité. Vous avez retravaillé certains titres pour rendre l’ensemble plus homogène ou plus actuel, ou pas du tout ?

Les chansons sont toutes des pistes plus ou moins autonomes. Quelques unes ont été écrites dans le même intervalle et pourraient avoir une sensation similaire. Quelques autres consistent en des riffs plus anciens, qui ont été arrangées et  achevées en studio, mais il n’y a jamais eu de plan global, de corpus cohérent de travail. Nous avons même eu recours à différentes configurations de guitare et de batterie, afin de nous assurer qu’elles servent la chanson plutôt qu’elles aient un son défini, qui ne correspondrait pas à leur style.

La continuité à laquelle tu fais référence vient probablement du style d’écriture et de notre jeu. Nos personnalités transparaissent même si la musique représentée sur l’album se situe dans un éventail très large. Et en fin de compte, le mix de l’album aide également à lier le tout.

– « Succession » bénéficie également d’une très bonne production, très organique. Je crois que l’enregistrement s’est fait un peu à l’ancienne en privilégiant vraiment un son plus analogique. C’est ça ?

L’album a été enregistré numériquement, mais nous avons essayé de mettre des limites pour le rendre plus chaleureux, plus dynamique et plus analogique aussi. Par exemple, les sons de guitare sont tous basés sur des pédales d’effets et différentes combinaisons d’instruments et d’amplis au lieu d’utiliser simplement des plug-ins informatiques. Les batteries ont été enregistrées en prise directe, puis reconstituées à partir de trois prises maximum. Snorre est très doué pour travailler avec les micros et pour exploiter l’ambiance du studio. Ce sont des choses qui semblent probablement évidentes pour de nombreux anciens, mais je pense que c’est devenu moins courant de travailler comme ça. Cela prend du temps et peut vite devenir trop cher pour un groupe underground. C’est l’un des nombreux avantages d’avoir son propre studio.

– Il me semble que vous avez été très attentifs aux parties de batterie, qui sont d’ailleurs incroyables…

Merci ! Oui je suis d’accord. Il y a beaucoup de parties de batterie impressionnantes sur le disque. Nous prenons grand soin de choisir la bonne configuration pour chaque chanson et bien sûr, cela aide d’avoir un batteur extrêmement talentueux comme Sindre, qui comprend immédiatement où nous voulons aller. SHE SAID DESTROY a de la chance à ce niveau-là. Thor Henrik, qui a joué sur tous nos albums précédents, est également un batteur extrêmement talentueux. Ils sont l’épine dorsale du groupe. Lorsque vous jouez de la musique comme la nôtre, tout s’effondre si le batteur ne fait pas son travail.

– Ce troisième album s’inscrit parfaitement dans son époque et d’ailleurs beaucoup de groupes se sont engouffrés dans ce style post-Metal Blackened. Est-ce que vous vous sentez un peu précurseurs à ce niveau-là ?

Je ne veux pas prétendre que nous étions avant-gardistes à l’époque, mais incorporer ces parties atmosphériques influencées par le Black Metal dans notre musique fait partie de notre ADN depuis notre premier album. Je suis certain que de nombreux groupes l’ont fait en même temps que nous, mais ce n’est qu’au cours de la dernière décennie que c’est devenu beaucoup plus courant.

– Enfin, j’imagine qu’après huit ans, vous devez avoir une terrible envie de remonter sur scène ! Une tournée est-elle déjà prévue, ou au moins quelques dates ?

Nous ne savons pas encore s’il y aura des concerts. Après tout, nous avions décidé d’arrêter de jouer en live en 2009 et de nous concentrer sur le travail en studio. Garder une unité de groupe et caler des dates avait commencé à devenir un casse-tête à l’époque. Mais après dix ans, je dois admettre que j’ai envie de revenir sur scène avec SHE SAID DESTROY. Ces nouvelles chansons passeraient vraiment très bien en live. Cependant, il y a quelques défis à relever pour que ça tienne la route. Nous dépendons aussi de musiciens de studio pour pouvoir jouer en live, car seuls quelques-uns d’entre nous sont intéressés par les concerts. Et nous vivons également dans différents pays, ce qui rend la préparation assez pénible. Je suppose que tout se résumera à des problèmes d’argent si des demandes commencent à arriver.

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Hard-Core Post-Metal

Parlor : like or die !

Incisif et frontal, le HardCore de PARLOR semble avoir franchi un palier grâce à des nouveaux titres acérés et imposants, magnifiquement servis par une production aux petits oignons où rien n’est laissé au hasard. « Comments » montre un quatuor parisien très combatif et l’ensemble mérite bien un gros Like… ou un rapide commentaire !

PARLOR

« Comments »

(Source Atone Records)

Que la récente panne géante et mondiale de Facebook et de ses réseaux annexes a dû bien faire rigoler les membres de PARLOR ! Car sur « Comments », le quatuor passe au vitriol les addictions aux commentaires et autres Likes que beaucoup déversent au quotidien. Satirique et plein d’humour, ce nouvel EP pose un regard brutal, HardCore et décalé sur ce phénomène ambiant.

Après une démo (2017) et un album (« Softly » en 2019), c’est donc avec un EP six-titres de 20 minutes intenses que PARLOR refait surface. Si le combo revendique un Chaotic HardCore, ce sont surtout des morceaux bien ficelés, massifs et très structurés qui composent « Comments » (« Dive In Motion », « Fighting The Blue »). Le songwriting s’avère ici redoutable.

En se frottant au Punk HardCore et au post-Metal, PARLOR élargit encore un peu plus son spectre et s’ouvre bien des horizons (« Pervitine »). Grâce à un chant hargneux et volontaire, les morceaux du quatuor prennent un volume conséquent et la massive rythmique, ainsi que les riffs tranchants développent parfaitement l’ensemble (« Instacat », « Comments », « Q & A »). Moins chaotique, certes, mais plus mordant !

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Post-Metal

Guhts : des sensations ardentes

Glacial et pourtant très attachant, l’univers de GUHTS ne peut laisser insensible. Le quatuor new-yorkais est à la fois déroutant et addictif, et son post-Metal atypique prend une ampleur rare et très subtile. Un régal, et « Blood Feather » laisse présager d’une belle carrière pour la nouvelle formation guidée par ces musiciens aguerris.

GUHTS

« Blood Feather »

(Independant)

Autoproduit et seulement disponible sur Bandcamp (et depuis sur les autres plateformes), ce premier EP de GUHTS aurait mérité une mise en lumière digne de ce nom, tant les émotions qui émanent de « Blood Feather » sont troublantes et authentiques. Le quatuor new-yorkais évolue dans un post-Metal tourmenté et très créatif, et les 25 minutes présentées sont plus que prenantes.

C’est en travaillant pour son autre groupe Witchliss que Scott Prater, chanteur, guitariste et claviériste a eu le déclic de la création de GUHTS. Aussitôt sa femme, Amber Burns également chanteuse et batteuse du même groupe, s’est jointe à lui, et le line-up a rapidement été complété par le bassiste Jesse Van Note (Bask et Black Mountain Hunter) et le guitariste Dan Shaneyfelt.

Profond et puissant, le post-Metal dans lequel nous plonge GUHTS a quelque chose d’hypnotique et de fascinant. Les guitares et la rythmique très organique viennent se fondre avec élégance et une émotion incroyable (« Eyes Open », « The Mirror », « The Forest »). Porté par un chant déchirant emprunt de tourments, les Américains livrent un EP magnifique. On en redemande !

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Death Metal Extrême Groove Metal Metal Progressif

[Going Faster] : Fear Factory / Fractal Universe / Kollapse

Parce qu’il y a beaucoup, beaucoup de disques qui sortent et qu’il serait dommage de passer à côté de certains d’entre eux : [Going Faster] se propose d’en mettre plusieurs en lumière… d’un seul coup ! C’est bref et rapide, juste le temps qu’il faut pour se pencher sur ces albums, s’en faire une idée, tout en restant toujours curieux. C’est parti !

FEAR FACTORY – « Aggresion Continuum » – Nuclear Blast

Alors qu’on célèbre les 25 ans de « Demanufacture », album emblématique et inégalé du groupe, FEAR FACTORY revient avec « Aggression Continuum », son onzième opus en presque 30 ans de carrière. Désormais seul rescapé du line-up originel, Dino Cazares (guitare) semble en avoir terminé avec les procès à répétition et continue l’aventure. Etonnamment, on retrouve Burton C. Bell au chant avec une bonne prestation et, pour le reste, l’impact chirurgical est toujours à l’œuvre tant à travers les riffs que dans la froide rythmique qui sévit sur l’album. Pourtant, « Aggression Continuum » a une sonorité plus organique que ses prédécesseurs et ce malgré la présence plus marquée des claviers. Aussi, l’ensemble fait penser au chant du cygne de FEAR FACTORY, qui va devoir se réinventer, afin de retrouver la créativité et la puissance qui ont fait sa force.

FRACTAL UNIVERSE – « The Impassable Horizon » – Metal Blade Records

Originaire de Lorraine, le quatuor commence à avoir une solide discographie. Après un EP, trois albums et un Live, FRACTAL UNIVERSE signe donc un quatrième opus dans lequel le combo confirme déjà tout le bien que l’on pense de lui. Créatif, complexe et remarquablement bien produit, le groupe n’en finit de surprendre et « The Impassable Horizon » est sans doute l’une de ses réalisations les plus concluantes. Technique et mélodique, le Death Metal des Français fait aussi la part belle à des parties progressives avec même un saxophone qui se fait assez présent. Costaud et massif, FRACTAL UNIVERSE fait preuve de maîtrise et ne semble connaître aucune limite dans l’expérimentation d’un style qui se détache peut à peu. Le groupe s’avère très, très convaincant.

KOLLAPSE – « Sult » – Fysisk Format

Malgré sa courte existence et « Angst », premier album sorti il y a quatre ans, KOLLAPSE a marqué de son empreinte la scène la scène danoise et même bien au-delà. C’est aujourd’hui sous la forme d’un power trio que le groupe livre « Sult ». Hors-norme et décapant, ce deuxième opus frappe fort avec son Sludge post-Metal et post-HardCore et cette fois mâtiné de sonorités Noise, qui viennent se répandre sur des titres massifs et gras. Fracassant et puissant, le trio scandinave appuie là où ça fait mal et, entre désespoir et réalisme, « Sult » vient jeter un énorme pavé dans le petit monde du Metal. KOLLAPSE réveille autant qu’il assomme et ne laisse pas indifférent. Anticonformiste au possible, le combo affiche une force et une détermination sans faille. Une belle et grosse claque.

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Extrême France Metal Progressif

Dirge : entre testament et héritage [Interview]

Créé en 1994, DIRGE a écumé pendant 25 ans les scènes françaises et internationales jusqu’à sa dissolution il y a deux ans. Tout d’abord dans un registre Metal Indus puis en évoluant vers un post-Metal atmosphérique et progressif, le groupe aura marqué de son empreinte la scène hexagonale et laisse un bel héritage en ayant ouvert de très nombreuses portes à la scène actuelle. Alain B. (batterie) et Stéphane L. (guitare, chant, samples) reviennent sur ce parcours et présentent « Vanishing Point », compilation testamentaire et inédite sortie le 26 mars dernier.

Photo : Stéphane Burlot

– J’aimerais tout d’abord qu’on revienne en 1994 à la création du groupe, une époque où le Metal Indus, notamment en France, était assez marginale malgré des groupes comme Treponem Pal et vous. Aviez-vous le sentiment d’être au début de quelque chose sur la scène hexagonale ?

Stéphane L. : Pour être honnête, Treponem Pal était là depuis bien longtemps quand le groupe s’est formé et ils avaient déjà une certaine notoriété (C’est vrai ! – NDR). Les premières démos de DIRGE, sorties au milieu des 90’s s’inscrivaient certes dans une tendance à la fusion machines/guitare, très inspirées par des groupes anglais comme Scorn ou Godflesh, sauf que ce Metal Industriel, qui comme tu le rappelles restait peu développé ici, me semblait alors, avec le recul, déjà sur le déclin. Donc, je n’ai pas le sentiment que DIRGE ait été au début de quoi que ce soit par rapport à ce style en France. C’est plutôt en développant une facette plus viscérale et atmosphérique à la fin de la décennie que le groupe s’est retrouvé, sans le savoir, à l’avant-garde de quelque chose de nouveau. Et pour le coup, pas seulement en France. Sauf qu’on était évidemment loin de parler de post-Metal ou je-ne-sais-trop-quoi à l’époque. Il me semble qu’il n’y avait alors guère qu’Isis, Breach et nous pour trouver un intérêt dans l’héritage sonique de Neurosis.

– Après plusieurs changements de line-up avant 2001, DIRGE a ensuite pris un virage plus atmosphérique avec des morceaux plus longs et beaucoup plus d’expérimentations sonores. Quel était votre leitmotiv à ce moment-là ?

SL. : Je ne sais pas si on peut parler de leitmotiv… Disons qu’on ne voulait se fixer aucune limite en termes d’expérimentations. C’était une tendance tacite entre nous tous, une envie commune et logique.

Alain B. : Le truc c’est qu’à partir de 1999 et mon arrivée à la batterie et celle de Zomber aux samples, le groupe est parti dans quelque chose de beaucoup plus organique et naturel. Le côté machine a ainsi commencé à s’estomper au profit d’une approche plus humaine. L’arrivée de Stéphane en 2001 n’a fait qu’amplifier cette mutation.

SL. : Avoir un véritable batteur en lieu et place d’une boîte à rythme et un mec qui joue les samples en direct a logiquement influé sur la forme de la musique, notamment en explosant le carcan imposé par les programmations et les BPM (qui constituaient paradoxalement l’ADN du DIRGE d’origine). L’abandon de cette rigidité électronique nous a d’un coup laissé beaucoup plus de liberté pour expérimenter, tester, en particulier en étirant les rythmes et les riffs et en jouant sur les répétitions et les durées. Il y a aussi eu tout un travail de recherche sur le volume sonore, le grain et les textures des amplis, un ré-accordage pour renforcer les basses et générer les vibrations les plus telluriques qui soient. Et en contrepoint de ces partis-pris de lourdeur et de puissance, on a aussi voulu introduire une véritable approche progressive et atmosphérique, pour mettre un peu d’air dans tout ce magma. Bref, on s’est retrouvé en 2001/2002 à l’orée d’un champ d’expérimentation incroyablement étendu. Tout cela a débouché sur de longues sessions d’impros pendant les répétitions, qui ont fini par devenir le corps de notre troisième album « And Shall The Sky Descend ».

– « Wings Of Lead Over Dormant Seas », votre quatrième album, a aussi marqué un tournant et une évolution dans le style de DIRGE. L’idée, là encore, était de toujours expérimenter et d’explorer de nouveaux espaces musicaux ?

AB. : On avait une idée bien précise avec « Wings Of Lead… », on voulait enregistrer tout l’album en live, avec le moins de prises possibles, afin de retranscrire au mieux les émotions. On voulait faire les choses naturellement. On a du coup énormément travaillé en amont pour traduire au mieux cette envie.

SL. : Pouvoir jouer et enregistrer d’une traite de si longs morceaux, aux structures labyrinthiques, passait évidemment par une longue préparation d’avant-studio. Apprivoiser et retranscrire au mieux les sessions d’improvisation a peut-être été le plus gros challenge. On savait que les nouveaux titres seraient encore une fois très longs et progressifs, mais il n’était pas questions pour autant d’étirer les choses gratuitement, juste pour le plaisir d’être monolithique. On voulait que tous les éléments, même les plus extrêmes (les tempos, les durées, les sons parasites, les larsens, etc) soient pertinents et servent notre vision de l’époque. Les morceaux ont dans leur majorité été profilés pour être enregistrés live et donc retranscriptibles comme tel une fois sur scène. C’est un disque qui a été fait avec très peu d’artifices studio.

AB. : Quant à l’évolution du style, je crois qu’on ne l’a absolument pas calculé, le processus de création a toujours été un peu le même entre nous.

Le visuel original (146×170 cm), « Ouverture» , par Axël Kriloffv et l’album…

– DIRGE a réellement pris son envol avec « Elysian Magnetic Fields » et « Hyperion », qui vous ont valu une belle reconnaissance et un statut de leader de la scène Indus française. Les années 2010 étaient-elles, selon toi, les meilleures du groupe ?

AB. : Disons surtout que 2011 a été le début de nombreux concerts dans toute l’Europe, avec deux tournées par an. Alors les conditions n’étaient pas simples, mais au final cela a été le début d’une super aventure. On y a noué de nombreux contacts.

SL. : C’est effectivement la période pendant laquelle le groupe a le plus existé en live, en particulier à l’étranger. Avec donc tout ce qui va avec : rencontres, découvertes de nouveaux pays, bons souvenirs et expérience douloureuses, bref, tout ce qui fait la vie d’un groupe en tournée. On est aussi devenu logiquement bien meilleurs sur scène. Et surtout, ce sont des années qui nous ont enfin permis de mieux diffuser notre musique et de toucher plus de gens. Donc pour moi, c’était de loin la meilleure période pour DIRGE. Et les trois albums sortis entre 2011 et 2018 restent mes préférés.

– Pourtant en mars 2019, il n’y a pas si longtemps, vous annoncez la fin du groupe. Qu’est-ce qui a mené à une telle décision ? Vous aviez chacun envie de vous investir dans d’autres projets ?

AB. : Tu sais, le groupe a été créé en 1994 et au bout d’un moment, tu as aussi envie d’avoir une autre reconnaissance, de monter des tournées plus facilement et de jouer dans de meilleures conditions.

SL. : Et comme rien de changeait, qu’on continuait de galérer pour monter les tournées, de s’épuiser sur la route, de dormir par terre et de perdre de la thune, on a compris que rien ne changerait, même avec un nouvel album (« Lost Empyrean »), dont on était pourtant super fier.

AB. : Du coup au bout plus de 20 ans, tu te dis effectivement que tu as fait le tour, et qu’il faut passer à autre chose. Après, au vu des très bons retours qui ont suivi « Lost Empyrean », on aurait bien un peu plus défendu l’album sur scène, mais bon c’est comme ça !

SL. : Le manque de reconnaissance et les galères on en outre fatalement abîmé l’équilibre au sein du groupe où tout commençait à devenir vraiment compliqué. On a donc décidé de terminer l’écriture et l’enregistrement de « Lost Empyrean », de tourner une dernière fois avant sa sortie, d’assurer la promo puis de saborder le groupe juste après. On a préféré arrêter tant que nous étions encore créatifs et pertinents, plutôt que de sortir le disque de trop. Histoire d’arrêter en étant honnête et au clair avec nous-mêmes. Mais il y a beaucoup de regrets et d’incompréhension, c’est sûr.

Photo : Stéphane Burlot

– Aujourd’hui, vous sortez le conséquent et très dense « Vanishing Point » qui regroupe surtout des versions inédites et live. Tout d’abord, qu’est-ce qui vous a motivé à sortir cette compilation testamentaire ? C’est pour mettre un point final à l’aventure ?

SL. : En fait, on voulait juste regrouper sur un même disque (trois au final), les inédits et les raretés qui nous semblaient importants dans l’histoire et la chronologie du groupe. Sachant que 90% de ce qui constitue « Vanishing Point » est soit inédit, soit totalement devenu introuvable, il y a derrière ce projet une dimension exhaustive et définitive qui nous semblait nécessaire pour effectivement mettre un point final à l’aventure.

AB. : Cela faisait un bout de temps qu’avec Stéphane, nous avions envie de faire enfin paraître certains inédits, de ressortir quelques raretés, de remasteriser certains titres et de les rassembler dans une compilation. Donc, cela nous a pris une bonne année pour faire le tri, retrouver les morceaux, s’arrêter sur une set-list et entreprendre toute la partie restauration et mix.

– Ces trois CD passent en revue tous les lines-up et les albums de DIRGE et vous avez confié ce travail de « restauration » au talentueux Raphaël Bovey. Comment cela s’est-il passé et comment avez-vous défini le choix des titres et des versions ?

AB. : Après le super travail de Raphaël sur « Lost Empyrean », il nous semblait évident que cet énorme boulot de mix, de nettoyage, d’harmonisation et de mastering lui revienne ! C’est d’ailleurs grâce à lui qu’il y a ce troisième CD ; son travail de restauration et de mix sur le live de 2005 nous a tellement bluffé qu’on a décidé de compléter « Vanishing Point » avec ces titres, ce qui permettait ainsi d’ajouter la dimension scénique qui manquait à la compil.

SL. : On avait besoin de quelqu’un de très compétent bien sûr, mais aussi qui connaisse bien notre musique, en qui on avait toute confiance et avec qui il serait très facile de bosser et de communiquer. Le choix était donc évident. Raph a vraiment eu un rôle décisif dans ce projet, tant il a su homogénéiser ces 25 ans de musiques, de sources et de productions parfois très différentes pour en faire un tout très cohérent.

– Après 25 ans d’une carrière très créative menée tambours battants, quelle image et quelle empreinte pensez-vous et aimeriez-vous laisser au public ? Et qu’avez-vous à dire à celles et ceux qui vont vous découvrir avec « Vanishing Point » ?

AB. : On aimerait laisser une image de sincérité. On a toujours fait les choses le mieux possible, joué avec la même intensité dans une salle vide ou dans une salle pleine ! On aime partager ce que l’on ressent, ce que l’on crée avec les gens qui nous suivent depuis longtemps, comme avec ceux qui nous découvrent.

– Enfin, il faut bien que je vous pose la question qui brûle toutes les lèvres : a-t-on une chance de revoir un jour DIRGE sur scène ou avec un nouvel album ?

AB. : Franchement, non je ne pense pas.

SL. : En tous cas, pas avec un nouvel album, ça c’est certain.

« Vanishing Point » est disponible depuis le 26 mars chez Blight Records et Division Records.

Bandcamp : http://dirgeparis.bandcamp.com

Facebook : https://www.facebook.com/DIRGE.fr

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Hands of Attrition : une exigence et une motivation sans faille [Interview]

Avec un album de ce niveau, le quintet britannique HANDS OF ATTRITION a fait l’effet d’une bombe à sa sortie en fin d’année dernière. Armé d’un post-Metal HardCore, le combo est d’une efficacité redoutable et d’une énergie débordante. Et « Colder places » n’est qu’un coup de semonce, les Anglais pensent déjà à l’avenir.

– J’aimerais que l’on parle de votre parcours car arriver avec un premier album aussi mature et puissant est une chose inhabituelle et assez rare…

Merci pour cet excellent retour sur notre album, nous sommes vraiment ravis. Pour commencer, tous les membres de HANDS OF ATTRITION ont déjà joué dans des groupes, donc rien de tout cela n’est vraiment nouveau pour nous. Toutefois, la direction sonore et musicale dans laquelle nous nous trouvons est une combinaison des pensées et des sentiments collectifs avec une connaissance musicale solide pour faire exactement comme nous l’entendions. En écrivant les morceaux, les riffs et même les mélodies vocales, chaque membre s’est impliqué pour s’assurer que nous en tirions le meilleur. Si cela signifie réécrire le riff plusieurs fois, alors on le fait. Nous avons tous nos propres préférences, donc être conscients des goûts de chacun facilite l’écriture et nous permet de choisir les meilleures parties pour faire progresser les chansons. C’est une combinaison de groove, de mélodies et de Heavy. Tout le reste est un bonus. Être ensemble depuis maintenant trois ans permet aussi de comprendre plus facilement ce que nous voulions et comment l’album devait sonner.

– Vous présentez sur « Colder Places » un registre novateur et d’une maîtrise totale. C’est le fruit de nombreux mois de travail ?

La plupart des chansons de « Colder Places » sont assez anciennes. Le line-up est complet depuis 2018, et nous avons donc eu le temps de nous assurer que ce que nous faisons est vraiment personnel. Les chansons ont été travaillées, enregistrées, réécrites et finalisées au cours des trois dernières années. « Leap of Faith » est un morceau qui a trois ans et les couplets de « I’m Gone » sont encore plus anciens. Heureusement, nous pouvons enregistrer chez nous et envoyer nos idées à chacun avant de décider qu’une chanson soit complète. Cela donne le contrôle total que tu mentionnes. Les principaux mois de travail ont eu lieu pendant l’été 2020. Nous avons décidé d’enregistrer chaque partie, chaque session et chaque chanson nous-mêmes. Nous avons la chance d’avoir un endroit où nous pouvons enregistrer aussi longtemps que nécessaire. Donc, prendre le temps de planifier un programme nous a aidé à garder une certaine routine et nous assurer que nous étions bien reposés entre chaque session.

– Un mot sur cette production massive. Comment un jeune groupe se retrouve à travailler avec des personnes qui ont parfaitement su mettre en valeur son travail ?

En ce qui concerne l’enregistrement, nous avons pris notre temps et nous avons beaucoup appris en enregistrant de la batterie en direct, en construisant une cabine vocale mobile et en apprenant les techniques d’enregistrement. Nous avons finalement obtenu le son que nous voulions et enregistré chaque partie de l’album nous-mêmes. Un total de quatre mois a été nécessaire les soirs et les week-ends pour obtenir les meilleurs enregistrements et performances possibles. Si quelque chose ne sonnait pas bien, nous la refaisions en voulant tirer tout ce que nous pouvions l’un de l’autre. Nous avons pu nous pousser mutuellement pour nous sentir vraiment au point pour l’enregistrement. Et puis, nous avons pu approcher un fantastique, sinon l’un des meilleurs producteurs de Metal et ingénieurs du son, Justin Paul Hill. Nous lui avons envoyé une démo et notre mix de « They Come at Night ». Sa réaction a été très positive. Il a mixé et masterisé chacun de nos morceaux : « They Come at Night » est sorti en juillet 2019, « I’m Gone » en janvier 2020 et « Threadbare » en octobre 2020. Ce sont nos premiers singles. L’album a été travaillé pendant plus d’un an, donc perfectionner tout ce que nous pouvions était la clef pour que nous puissions construire une relation avec Justin et obtenir cet album, dont nous sommes si fiers aujourd’hui.

– Comment se sont passés la composition et l’enregistrement de « Colder Places » ? J’imagine que tout a été réalisé durant cette année de pandémie ? Cela n’a pas trop contrarié votre démarche ?

En fait, la plupart des chansons était déjà presque prête à l’exception de « Nightingale », « From the Void », « The Only One » et « Subjugation ». Elles ont été écrites lors du premier confinement et finalement retravaillées en juillet, lorsque les restrictions se sont un peu assouplies. Les autres chansons étaient déjà composées, et nous savions exactement comment elles devaient être enregistrées. Quelques paroles et des sessions de batterie ont été modifiées sur quelques chansons, mais à part cela, nous sommes un groupe qui planifie les choses. Nous avons tous convenu que si nous ne sortions pas d’album en 2020, nous attendrions la prochaine opportunité. Mais nous avions le temps et l’énergie. La seule chose que nous savions, c’est que nous avions jusqu’en octobre pour terminer l’album en entier, car c’était le seul créneau dont disposait Justin dans son emploi du temps. Il travaille avec de nombreux groupes, c’était soit en octobre, soit en 2021 …

– Justement, l’année 2021 démarre. Avez-vous réussi à planifier aussi votre promotion et vos concerts normalement en suivant à peu près ce que vous aviez prévu ?

On a beaucoup parlé de la promotion de l’album tout au long du processus d’enregistrement. Le Covid nous a beaucoup perturbé… Travailler avec Purple Sage PR pour mener à bien une campagne de relations publiques entièrement numérique était la voie à suivre et une excellente façon de lancer les choses. D’ailleurs, travailler avec Purple Sage nous a permis de profiter de leur travail acharné et de leurs connaissances. Ils nous ont jusqu’à présent menés vers de nouveaux sommets que nous n’aurions pas atteints seuls. Pour les concerts … Eh bien, nous n’avons jamais pensé que nous n’en aurions joué qu’un seul, c’était le 29 février 2020. Cela nous manque énormément. Nous n’avons pu caler que deux concerts jusqu’à présent pour l’ensemble de 2021. La planification et le lancement de l’album comme nous l’aurions souhaité ont été manqués. Cependant, lorsque le moment sera venu, nous jouerons cet album en live dans son intégralité à tous ceux qui voudront nous rejoindre. HANDS OF ATTRITION ne fait que commencer et nous sommes bien décidés à rester. Qui sait ? Notre deuxième album sera peut être plus proche que nous ne le pensons tous, si les concerts restent annulés pendant un moment…

Bandcamp : https://handsofattrition.bandcamp.com

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