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Blues Rock Soul / Funk

The Black Keys : funky vibes

L’heure est à la détente pour THE BLACK KEYS, qui s’autorise le temps de ce nouvel opus une sorte de récréation nettement plus vaporeuse, mais non sans livrer un ardente prestation. Souvent galvaudée, le terme de groove prend ici tout son sens à travers 14 morceaux où l’objectif du groupe est clairement de prendre du plaisir et surtout d’en donner. Très 70’s dans les sonorités, des effluves de Soul, de Funk et d’un Blues tendre et généreux font cause commune sur « Ohio Players », qui donne autant le sourire que la patate !    

THE BLACK KEYS

« Ohio Players »

(Easy Eye Sound/Nonesuch Records)

Joie et félicité ! THE BLACK KEYS est de retour, clope au bec, avec une pêche d’enfer et sur un groove aussi démoniaque que réjouissant ! Alors ok, Dan Auerbach et Patrick Carney ne sont pas complètement seuls. « Ohio Players » n’est pas non plus complètement un album de leur composition. Et alors ? Le duo est particulièrement bien entouré et la tracklist est joyeuse, funky et, on ne va pas se mentir, ça fait plutôt du bien par les temps qui courent ! Il y a forcément aussi une explication très rationnelle à ce douzième effort studio des Américains, qui nous emmènent assez loin de l’âpreté du Blues Rock de « Dropout Boogie ».

En titrant ce nouvel opus du nom du cultissime groupe de Funk, THE BLACK KEYS annonce la couleur : elle sera festive, légère et explosive. L’idée de cette création inattendue et originale est née lors de soirées organisées par le groupe, où il passait de vieux 45tr de sa collection. Et c’est l’esprit de ces fêtes qui a constitué le fil rouge de l’album. A l’exception de « I Forgot to Be Your Lover », une chanson écrite par William Bell et Booker T. Jones, l’ensemble de « Ohio Players » est signé et produit par le tandem de la petite ville d’Akron. En revanche, les collaborations ne manquent pas et elles ont même parfois assez surprenantes.

Le guitariste/chanteur et le batteur ne renient pas une seule seconde leur patte musicale et encore moins ce son si particulier qui les distingue depuis leurs débuts. L’approche est la même et on la ressent jusqu’à cette production, certes, plus lisse cette fois, mais tellement riche en arrangements. Facile et aérien, THE BLACK KEYS a donc convié l’ami Beck sur près de la moitié de « Ohio Players », tandis que Noël Gallagher (oui, oui !) intervient aussi dans la composition de trois morceaux. Et la participation des rappeurs Juicy J et Lil Noid libère quelques instants de Hip-Hop langoureux. On sait s’amuser dans l’Ohio et ça fait du bien !

Retrouvez les chroniques de leurs deux derniers albums :

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Metal Fusion

Slope : funky blast

Le groove est monumental, les riffs aussi funky que tranchants, la rythmique virevolte et claque et le flow du frontman est aussi accrocheur que revendicatif. SLOPE a su s’approprier les codes d’un genre né au siècle dernier : le Metal Fusion. Avec « Freak Dreams », nos amis germaniques manient de multiples ambiances avec une énergie contagieuse et un songwriting dont le processus est redoutable d’efficacité. Ca slape, ça percute, ça harangue de toutes parts pour fédérer avec une malice et une légèreté qui font mouche avec talent.

SLOPE

« Freak Dreams »

(Century Media)

A Duisburg, près de Düsseldorf, se trouvent cinq jeunes gens dont les goûts et les influences sont restés figés dans les 90’s et dans ce qu’elles avaient de plus imaginatif et explosif. Dans cette décennie bénie entre toutes, le Metal se mêlait avec ingéniosité, savoir-faire et beaucoup d’audace à d’autres styles, donnant lieu à une fusion des genres restée depuis inégalée. Si les modèles sont évidents, la créativité de SLOPE nous replonge avec plaisir dans une registre tellement rafraîchissant.

Dix ans après sa formation, le groupe continue sa remontée dans le temps et fait jaillir de belles sensations restées enfouies quelque part dans de nombreuses discothèques et aujourd’hui, malheureusement, submergées par de fades expérimentations dérivées du MetalCore et autres éléments sonores de supermarché. SLOPE se sert très habillement de cette scène un peu vintage et lui redonne du brillant et du lustre à travers une production moderne et irrépressible. Un régal.

Mais revenons à ce très bon album des Allemands, « Freak Dreams », qui fait suite à « Street Heart » (2021), lui-même précédé des EP « Helix » (2014) et « Losin’ Grip » (2017). Si le quintet est fortement imprégné des premiers Red Hot, le combo a également très bien assimilé les œuvres de RATM, Faith No Moire, Bad Brains, Suicidal Tendencies et même celles des Beasties Boys. Réjouissant, donc ! Le Metal Fusion de SLOPE se pare de Funk, de Rap et de Hard-Core avec brio et c’est la belle surprise de ce début d’année !

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Metal Progressif

Theraphosa : une introspection du vice

Quatre ans après « Trancendence », qui l’avait propulsé au rang des formations de Metal Progressif les plus prometteuses de l’hexagone aux côtés de quelques autres, THERAPHOSA n’en a pas terminé avec son exploration de l’esprit humain et de ses tourments dans ce qu’il possède de plus obscur. Avec Rémy Deliers aux commandes (Gojira), les Français s’assurent une production très soignée et il fallait bien ça pour saisir pleinement toute la technicité de la structure des titres d’« Inferno », un modèle de finesse, de précision et de puissance.

THERAPHOSA

« Inferno »

(Circular Wave/Season Of Mist)

Depuis plus d’un millénaire, l’œuvre de Dante inspire autant qu’elle peut rebuter, tant la noirceur qu’elle décrit au cœur d’un Moyen-âge sombre à bien des égards est à la fois captivante et terrifiante. Plongeant dans les tréfonds de l’âme humaine, ce périple traverse les trois royaumes des morts en bouleversant les représentations traditionnelles et en affrontant ainsi l’indicible. En prolongeant d’une certaine manière la thématique déjà touchée du doigt sur « Transcendence », THERAPHOSA poursuit son chemin sur des terres musicales qu’il commence à bien connaître et des atmosphères qu’« Inferno » sublime un peu plus.

Presque méconnaissable depuis son EP éponyme sorti en 2018, la fratrie semble être parvenue à faire de cette empreinte très avant-gardiste un style singulier et personnel, où son Metal Progressif, très groove et mélodique, s’exprime pleinement et surtout avec une fluidité resplendissante sur ce deuxième album. Martin (batterie), Matthieu (basse) et Vincent Dubout (chant, guitare) maîtrisent parfaitement leur sujet, se montrent techniquement intraitables et nous emportent sans mal dans des sphères presque cinématographiques avec une luminosité sonore tout en contraste avec son propos.

Envoûtant et entraînant, « Inferno » se développe sur onze plages, puisque l’intro « Vestibule » est aussitôt suivi du morceau du même nom, une habille façon de donner le ton de ce nouvel opus, qui révèle quelque surprises au fil de son écoute. A commencer par « Limbo », chanté en français, où THERAPHOSA se repose sur un texte très bien écrit. Les chœurs font aussi résonnance (« Gluttony », « Heresy »), tandis que les riffs tranchants s’enchaînent sur des rythmiques galopantes et des lignes de basse relevées (« Wrath »). Le trio ne s’interdit rien et va au bout de son ambitieux projet avec un panache éblouissant.      

Photo : Denis Goria
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Funk Rock

FFF : FFFou FFFurieux !

Pierre angulaire de la scène Rock dont il a marqué les années 90 au fer rouge, FFF fait un furieux et gourmand come-back. Aussi inattendu qu’inespéré, « I Scream » renoue avec l’essence-même de cette Fédération Française de Fonck survitaminée et finalement inoxydable. Ce nouvel opus promet de prochaines prestations scéniques enflammées, et pour en avoir vécu quelques unes dans une autre vie, surveillez bien les dates qui arrivent dès le printemps … Ça va être chaud et explosif !

FFF

« I Scream »

(Verycords)

Est-ce qu’après deux décennies d’absence, un groupe qui a laissé une telle empreinte à travers un style, dont il a été le principal artisan en France, peut encore renouer avec un enthousiasme qui l’a tellement caractérisé ? 23 ans après un album, « Vierge », qui n’a pas franchement marqué les esprits, Marco Prince, Yarol Poupaud, Nicolas Baby et Krishoo Monthieux ont-ils retrouvé la fougue de leurs premiers émois discographiques ? Comme l’ont laissé entrevoir les premiers singles, le doute n’est plus de mise : FFF a retrouvé la foi et déborde d’énergie.

S’ils ont juré par tous leurs dieux ne s’être jamais séparés, les Parisiens font un retour qui ressemble presque à une résurrection. A priori, ils attendaient le bon moment pour se mettre à l’ouvrage d’un cinquième album, dont ils savaient mieux que personne qu’il serait très attendu par une communauté de fans impatiente et pas encore rassasiée, mais également scruté et décortiqué par la presse, ce qui est importe finalement assez peu. Ce qui compte, et qui entretient aussi un peu le mystère, c’est ce qu’il a bien pu se passer dans cette campagne niortaise, où FFF a refait parler la poudre.

« I Scream » contient tout l’ADN du fulgurant quatuor. L’instinct, la fraîcheur et le groove sont intacts. Le flow de Marco fait des merveilles (« Les Magazines »), tout comme son trombone, les riffs de Yarol sont incandescents (« Won’t You ») et la bouillonnante rythmique gouvernée par Nicolas et Krishoo oxygène l’ensemble (« On Devient FFFou », « Death On The Dance FFFloor », « Smile »). Moderne dans le son comme dans le propos, FFF livre avec classe l’album qu’on attendait et avec cette luminosité qui a fait sa réputation. « I Scream » est positif et concentre décidemment tous les parfums. Bravo, FFFallait le FFFaire !

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post-Rock Progressif

Glen : une grisante stimulation

Derrière ce titre énigmatique, cette nouvelle réalisation reprend les choses, musicalement, là où le très créatif duo nous avait laissé avec « Pull ! ». Même si le ‘propos’ est différent dans l’intention, il est le même dans la forme. Dynamique, parfois épique et cinématique, le post-Rock Progressif de GLEN joue sur des concepts très modernes et assez visionnaires avec une technique et une élégance toujours aussi délicates. « I Can See No Evil » est envoûtant à plus d’un titre.

GLEN

« I Can See No Evil »

(Sound Effect Records)

Avec « Pull ! », son précédent album sorti il y a deux ans, la formation basée entre Berlin et Athènes, nous propulsait dans un post-Rock Progressif étonnant. Toujours emmené par le multi-instrumentiste allemand Wilhelm Stegmeier et la guitariste et pianiste Eleni Ampelakioutou, GLEN réédite l’exploit de faire aussi bien en plus de se renouveler. D’ailleurs, sur « I Can See No Evil », il accueille les batteurs Lucia Martinez et Achim Faeber, ainsi que Roland Feinaeugle à la basse. Et l’unité demeure.

Ce qui rend si spéciale la musique du groupe, c’est alors qu’elle est entièrement instrumentale, elle nous raconte plein de choses. Chaque album donne lieu à des morceaux directement liés aux réflexions du binôme et notamment de son compositeur. GLEN possède un sens de l’expressivité musicale, qui se dilue dans un groove obsédant, lui-même guidé par un style narratif qui se passe facilement de mots. Et ce troisième opus est toujours aussi polymorphe, inspiré et véloce.

Comme sur « Pull ! », on retrouve le légendaire producteur allemand Reinhold Mack au mix, qui offre cette fois encore un relief saisissant à des morceaux d’une grande finesse, mis en lumière par des arrangements très soignés (« Paradigma », « Neos Kosmos » et sa trompette aérienne, « In The Midday Sun » et le nerveux « Strike »). GLEN n’a pas son pareil pour nous inviter au voyage, grâce à des envolées lumineuses, des instants suspendus et un art du crescendo inouï. « I Can See No Evil » est exaltant, séduisant et explosif. Un grand moment.

Photo : Benjamin Talsik

Retrouvez l’interview du groupe parue à la sortie de « Pull ! »…

… et la chronique de l’album :

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France Grunge Heavy Rock Stoner Rock

7 Weeks : d’une ardente authenticité [Interview]

Le malheureux timing subi par l’excellent « Sisyphus » il y a deux ans est loin d’avoir refroidi 7 WEEKS. Bien au contraire, le trio fait de nouveau sensation avec « Fade Into Blurred Lines », un album certes moins solaire que le précédent, mais qui livre une vérité musicale comme on n’en voit peu. Le Heavy Rock teinté de Stoner et un brin Grunge des Français dévoile beaucoup de fragilité dans un sens, mais elle vient renforcer une puissance émotionnelle sincère et intense, qui se fond dans des sonorités Blues très personnelles. Julien Bernard, chanteur et bassiste, revient sur le récent parcours du groupe et l’élaboration de ce sixième opus. Entretien.

Photo : Marie d’Emm

– Il y a trois ans vous commenciez la série « Sisyphus » avec un très bon album, suivi de l’EP « What’s Next ? » l’année suivante. Avec le recul, qu’en retiens-tu ? La période a été pénible et malgré tout, 7 WEEKS sort deux très belles productions…

Ca a été une période très productive, on a compensé le fait de ne pouvoir jouer l’album sur scène par des projets annexes, c’est-à-dire l’EP, des sessions live acoustiques, des livestreams, etc… On ne pouvait pas tout laisser s’arrêter, on a tenu bon et notre structuration en label indépendant autogéré nous a permis de faire ça, là où tout le monde était en ‘sommeil’. Si on avait été sur un autre label, ou une major, jamais on aurait pu le faire. Ca montre aussi qu’en cas de crise, les petits arrivent à survivre là où les grosses productions s’arrêtent. Le problème est quand ça repart, les ‘gros’ trustent tout ! (Sourires)

– Est-ce qu’après la pandémie, vous avez pu reprendre le chemin des concerts normalement et enfin défendre votre album dans les meilleures conditions ?

Oui, on a réattaqué les dates dès juillet 2021 et on a fait une belle tournée sur l’automne, puis une nouvelle série de concerts jusqu’à l’été 2022, avant de s’attaquer au nouvel album.

Photo : Jérémie Noël

– Vous revenez aujourd’hui avec « Fade Into Blurred Lines » sur lequel vous vous affirmez encore plus. Quand avez-vous commencé sa composition, car on le sent très spontané ?

Les premières idées datent de début 2021, mais le travail réel sur l’album s’est fait à partir de janvier 2022. Puis à la fin août, notre clavier a décidé de ne pas repartir sur un nouvel album. On s’est donc retrouvé à trois et nous avons tout repensé et composé dans cette dynamique de trio. C’est effectivement assez spontané dans le sens où on a voulu faire ça de manière très organique, très live.

– Malgré la puissance qu’il dégage, ce nouvel album a aussi un côté encore plus personnel et aussi très intimiste. Comment combinez-vous ces deux aspects, car on vous sent aussi très libérés dans le jeu ? Et il y a l’importance accordée aux textes également…

Exactement, pour la première fois, j’ai pu déléguer la guitare, que je faisais jusque-là sur quasiment tous les albums. J’ai donc vraiment pu me concentrer sur l’écriture dans sa globalité avec mes instruments de prédilection, à savoir le chant et la basse. J’ai travaillé les textes avec une amie anglaise (Katy du groupe Lizzard) et on a été assez loin. On a pris le temps de comprendre ce que je voulais exprimer et trouver la bonne formulation, celle qui sonnerait le mieux avec la musique. Les textes sont écrits de manière à vraiment se livrer en les chantant, d’où le côté intimiste sur des morceaux comme « Mute » ou « Shimmering Blue ». De manière générale, chacun a pu se concentrer sur son instrument et sur la manière d’exprimer au mieux l’état d’esprit ou l’émotion du morceau. Et le fait de se retrouver à trois pour bosser en profondeur sur les titres a permis une musicalité qui est très expressive.

Photo : Romain Mouneix

– Pour « Fade Into Blurred Lines », vous avez enregistré l’album en condition live, ce qui lui confère un son très organique, et d’ailleurs la sincérité et l’authenticité qui s’en dégagent sont éclatantes. En quoi cela était-il important pour vous, car la production et les arrangements sont également très soignés ?

On tenait à capturer des prises live très brutes dans le jeu et le feeling pour ensuite ajouter les arrangements, sans se soucier de savoir si on pourrait les jouer sur scène. Si les prises brutes fonctionnent, les arrangements ne sont que la cerise sur le gâteau et non un cache-misère.

– Votre Heavy Rock est toujours teinté de Stoner, légèrement de Grunge et cette fois, il y a également des éléments bluesy qui viennent se greffer. Ca va dans le sens et dans le propos général de l’album ? Ou est-ce juste une volonté artistique et sonore ?

Il me semble qu’on a toujours eu cette fibre Blues, dès « Carnivora » en 2013 sur un morceau comme « Shadow Rider », par exemple. Peut-être était-elle moins ressentie, car la production des disques qui était moins organique. Cette influence-là est logique vu la musique que l’on fait. Mais c’est vrai que cet album s’y prête beaucoup. Le Blues est une forme d’expression, c’est chanter et jouer ce qu’on ressent ou ce qu’on vit de manière très crue. En ce sens-là, nous faisons du Blues sur ce disque. Simplement, nous ne sommes pas du Mississipi ou de Chicago. La forme est différente, mais pas le fond.

Photo : Jérémie Noël

– J’aimerais que tu nous dises un mot sur cette très belle pochette, ce qui est d’ailleurs une habitude chez vous. Quelle est ton interprétation de cette statue étonnante et très expressive de Don Quichotte ? Elle est d’ailleurs présente dans le clip de « Gorgo ». Et de qui est-elle l’œuvre ?

Nous avons effectivement la chance de travailler avec Gilles Estines, qui est un ami et qui fait quasiment tous nos visuels. Il nous sort toujours des choses magnifiques. Pour cet album, on lui avait donné plusieurs pistes, dont celle d’un Don Quichotte, qui en en rapport avec le morceau « Windmills ». Après plusieurs propositions, il nous a semblé que ce visuel très fort conviendrait parfaitement au sentiment général du disque et à son titre. Pour le titre « Gorgo », on a eu cette idée de créer la statue en vrai pour la filmer dans le sable pour mieux coller au texte. Puis, on a demandé à une connaissance, Loïc Delage de Hom’ort, de s’inspirer de la pochette et il a crée ce personnage. C’est un sculpteur sur métal très doué. On adore sa statue et elle trône dorénavant dans mon jardin !

– Depuis vos débuts, vous avez produit six albums et deux EP via votre label F2M Planet, et vous gérez également vous-mêmes vos tournées. On comprend facilement votre désir d’indépendance et de liberté, mais est-ce que ce n’est pas trop contraignant dans la mesure où cela pourrait empiéter sur la création musicale ?

Ca empiète surtout sur nos vies personnelles ! (Sourires) C’est une somme de travail considérable, mais ça nous permet de faire les choses comme on l’entend. On respecte les gens qui font ça et on est respecté aussi pour ça. On ne lâche rien et on est honnête dans notre démarche.

– La sortie de « Fade Into Blurred Lines » correspond au démarrage de la première partie de votre tournée. C’est important de le livrer en live, tant qu’il est encore ‘chaud’ ?

Oui, on a hâte de rejouer. Le premier concert était un vrai soulagement après tous ces mois de travail et d’attente. Le trio fonctionne très bien en live et les nouveaux morceaux sont super à jouer.

Le nouvel album de 7 WEEKS, « Fade Into Blurred Lines » est disponible chez F2M Planet.

Retrouvez la chronique du précédent EP du groupe :

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Blues Southern Blues

Bobby Rush : diamonds are forever

Imperturbable et passionné, BOBBY RUSH est fascinant. Au-delà de son incroyable longévité sur la scène Blues et un talent d’écriture d’une rare constance, il est l’un des seuls à s’être approprié le style de Chicago, tout en conservant une inimitable touche Southern. Cet énième album, « All My Love For You », regorge de petites merveilles d’une fraîcheur confondante et presqu’insolente… Un bonheur !

BOBBY RUSH

« All My Love For You »

(Deep Rush Records/Thirty Tigers)

Agée de 89 ans, la légende a encore frappé… et de quelle manière ! L’Américain semble inépuisable, tout comme sa source d’inspiration qui ne tarit jamais. L’incroyable bluesman de Louisiane possède toujours cette folle énergie qui le guide depuis ses lointains débuts. Et histoire de ne rien laisser au hasard, c’est BOBBY RUSH lui-même qui a entièrement composé et produit ce délicieux « All My Love For You », qui se révèle tellement captivant et séduisant.

Certes moins médiatisé que John Lee Hooker, Muddy Waters ou BB King, son parcours et surtout sa musique ont pourtant marqué de nombreuses générations. Pour rappel, le songwriter a bien sûr été intronisé au ‘Blues Hall Of Fame’ de Memphis, a reçu deux Grammy Awards et a été 16 fois lauréat des Blues Music Awards. Ca vous pose un homme et surtout un artiste, tout de même. Cependant, en dehors de ses récompenses, BOBBY RUSH porte le Blues avec classe et un sourire qui ne le quittent pas.

Et sur « All My Love For You », la malice et le feeling guident chacune des dix chansons avec tellement de naturel qu’on ne résiste pas à son humour si distinctif. L’harmonica étincelant, la guitare précise et le groove chevillé au corps, BOBBY RUSH demeure ce grand chanteur intemporel et si funky (« I’m Free », « TV Mama », « I’m The One », « One Monkey Can Stop A Show »). Emouvant, authentique et drôle, le mythe a encore beaucoup de ressources et on s’en délecte une fois encore.

Photo : Laura Carbone
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Alternative Metal

Any Given Sin : dynamitage en règle

Si le souffle de l’Alternative Metal est loin de retomber, c’est probablement grâce à des groupes comme ANY GIVEN SIN qui assurent une belle relève. Dynamique et personnel, « War Within » repose sur une base résolument Hard Rock, qui prend de l’ampleur et du volume, bien aidée par une production très moderne. Intemporel dans le songwriting, le groupe propose une entrée en matière irrésistible.

ANY GIVEN SIN

« War Within »

(Mascot Records)

Si, contrairement à moi, vous écoutez de la musique sur un ordinateur, un téléphone ou une plateforme quelconque, vous devez connaître ANY GIVEN SIN et ses 20 millions de flux en ligne. Pour ma part, je découvre avec plaisir ce premier album du combo du Maryland et, à l’écoute de « War Within », je comprends pourquoi les Américains ont déjà tant de fans. Au-delà de livrer un style pertinent, ils le font très bien. Le ratio mélodie/puissance est optimal et ils le savent d’ailleurs très bien.

Oscillant entre Rock et Metal avec un groove lourd et accessible, ANY GIVEN SIN balance de gros riffs sur des titres aux refrains accrocheurs. Sans pour autant être outrageusement mainstream, il se veut rassembleur et le calibrage minutieux des morceaux va en ce sens. Et il faut bien avouer que « War Within » s’écoute tout seul et dispose de solides arguments. L’un des principaux est son frontman, Victor Ritchie, capable d’autant de férocité que d’émotion.

Du côté de Rich Stevenson (basse) et de Mike Showalter (batterie), ça tabasse sévère également et le mordant du jeu acéré du guitariste Mike Conner apporte ce relief si particulier à ANY GIVEN SIN (« War Within », « Cold Bones », « Insidious », « Ball And Chain », « House On Fire », « Still Sinking »). Très en place et redoutable d’efficacité, le quatuor déroule et passe haut la main l’exercice toujours délicat du premier effort. Son avenir s’annonce donc radieux et ce n’est qu’un début.

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France Metal Indus

Treponem Pal : groove, Metal & tattoo [Interview]

Identifiable entre mille, les pionniers du Metal Indus français sont enfin de retour avec « Screamers », un nouvel album toujours aussi fracassant et Heavy. Entre samples et riffs tranchants, la voix de Marco Neves s’engouffre et vient sondé les âmes sur des textes percutants. Ce huitième album de TREPONEM PAL reste marqué de cette empreinte groove et Metal, qui fait la force du groupe depuis plus de trois décennies maintenant. Entretien avec le chef de la meute, prêt à en découdre sur une tournée qui s’annonce déjà musclée et envoûtante.   

Photo : Suzanne Brun

– Vous nous avez laissé il y a six ans avec « Rockers Vibes » où vous passiez en revue vos influences à travers des reprises très marquées de l’empreinte TREPONEM PAL. Finalement depuis « Survival Sounds » en 2012, vous n’aviez pas énormément composé. J’imagine que la motivation et l’envie n’ont pas manqué pour « Screamers »…

Oui, la motivation était forte, ainsi que l’envie de revenir aux sources et d’avoir une diversité assez conséquente sur l’album avec trois grosses tendances. Et puis, on a aussi trouvé ce deal avec At(H)ome, car ce n’était pas évident de trouver un bon label. On voulait qu’il soit français et indépendant et on est tombé dans le mille. Pour la France, ça démarre bien et on ne va pas tarder à attaquer l’étranger. Tout le monde est motivé et c’est formidable !

– J’ai pu lire que vous aviez réalisé une première version de l’album et que, mécontents du résultat, vous aviez retravaillé l’ensemble. D’autres s’en seraient sûrement contenter, qu’est-ce qui n’allait pas ?

On a surtout retravailler les voix et les textes, en fait. On a aussi habillé et monter quelques morceaux différemment. On a refait environ 70% de ce qui avait été réalisé.

Photo : Muriel Delepont

– Comme souvent chez TREPONEM PAL, il y a du mouvement au niveau du line-up, mais avant de parler des deux nouveaux musiciens, j’aimerais que tu nous parles du retour de Laurent Bizet à la guitare, qui est un membre historique du groupe. Dans quelles conditions son retour s’est-il effectué ? Il y avait un goût d’inachevé de part et d’autre ?

Ce qu’il faut savoir tout d’abord, c’est que Laurent, Nicki et Bastien, qui nous ont tous rejoint pour « Screamers », n’ont pas travaillé sur l’album. Nous l’avons fait à quatre avec Polak, Didier et Jean-Pierre Mathieu. Je le précise à chaque fois, car c’est la vérité de ce disque. Et en fait, une fois qu’on avait terminé tout ça, nous nous sommes dit qu’il nous fallait un bon bassiste, un bon batteur et pour Laurent, on s’est retrouvé par hasard, en fait. On habitait au même endroit sans le savoir et de fil en aiguille, on s’est revu. On s’est ensuite dit qu’on repartirait bien ensemble pour vivre cette aventure avec le reste de l’équipe de TREPONEM. Pour le moment, il est question de la scène et pour l’avenir, on attaquera ensemble le prochain album.

– « Screamers » voit donc l’arrivée de Nicky Tchernenko à la basse et de Bastien Amy à la batterie. Vous vous connaissiez déjà ou est-ce qu’on auditionne aussi chez TREPONEM PAL ?

Oui, on a fait des sortes d’audition. C’est aussi quelque chose qu’on fait toujours de toute façon. Et ça a été long évidemment.

Photo : Muriel Delepont

– Il y a une impression qui domine encore cette fois, c’’est que peu importe le temps qui passe, on retrouve le son et la patte de TREPONEM PAL au fil des albums. Est-ce que finalement la faculté d’adaptation à chaque époque ne résiderait pas dans de solides fondations ?

Oui bien sûr et les nôtres sont là depuis le début. On a une identité, un truc bien à nous et auquel on tient. Nous, on sait que ce que c’est, même si on ne se l’explique pas. On a les sonorités qu’on veut, les rythmes qu’on veut et des ambiances bien définies.

– Avec Polak et Laurent Bizet, TREPONEM PAL est particulièrement bien pourvu au niveau des guitares et pourtant les samples sont aussi très présents. Sans dévoiler vos secrets de composition, comment l’équilibre se fait-il pour rester aussi Metal ?

Je ne sais pas vraiment. Si tu prends un groupe comme Prodigy, ils ont fait quelques morceaux avec des guitares et ils y arrivent très bien. Sur les anciens Ministry, même s’il y a surtout des samples parlés, il y a ce même savoir-faire. Cela dit, on a essayé des trucs électroniques et ça ne fonctionne pas avec les guitares. C’est vrai qu’on a l’habitude de savoir gérer les samples, les claviers et autres avec un équilibre basé sur des guitares très Heavy.

Photo : Muriel Delepont

– A l’écoute de « Screamers », on a le sentiment que vous avez effectué une fois encore un gros travail sur le groove des morceaux. Est-ce que c’est finalement ça qui vous guide ?

Le groove, on l’a toujours eu. Je n’écoute que ça, que ce soit du Reggae et en parallèle des trucs Indus et Punk que j’ai toujours kiffés. J’adore le Reggae Dub surtout et tout ce qui est expérimental en général. C’est vraiment ce que j’aime avec le HardCore-Punk et l’Anarcho-Punk, qui sont des styles droits dans la tête. J’ai aussi besoin de ça par moment, je navigue entre différentes choses.

– D’ailleurs, toujours à propos de sample, ‘machine’ est un mot qui revient souvent dans tes textes avec également ‘Sound System’. Depuis l’album « Higher », les deux termes sont très présents. C’est inconscient ou c’est plus simplement la marque de TREPONEM PAL ?

Oui, c’est un peu la marque de TREPONEM, c’est vrai. En même temps, c’est aussi quelque chose d’inconscient. Cette obsession à la machine est quelque chose qui revient souvent chez moi. Je ne saurais pas te l’expliquer, j’ai besoin de dire ce mot ! (Rires)

– J’aimerais qu’on dise un mot de la pochette, qui renvoie à celle de « Survival Sounds » avec son graphisme asiatique réalisée par Keuns. Celle de « Screamers » est signée Rafto Dilo, qui est aussi tatoueur. Comment est née cette collaboration ? Est-ce lors d’un tatouage et faut-il y voir l’élaboration d’une trilogie d’albums, par exemple ?

En fait, Rafto Dilo a son salon de tatouage, ‘Utopia Tattoo’, à Poitiers et il travaillait auparavant avec Keuns, avec qui je suis entré en contact par le Net. Je l’avais découvert en interview dans un magazine. Il se trouve qu’il connaissait bien TREPONEM. De là, on s’est vu et il m’a tatoué un baku sur le bras droit (créature folklorique japonaise, qui se nourrit des mauvais rêves – NDR). C’est un éléphant et un chasseur de cauchemar, ce qui m’a m’allait très bien ! Ensuite, j’ai rencontré Rafto Dilo, puisqu’il travaillait ensemble, et de fil en aiguille, je lui ai demandé de faire mon bras gauche. Peu de temps après, Keuns a fait la pochette de « Survival Sounds » et en 2020/21, j’ai branché Rafto pour faire la nouvelle, celle de « Screamers ». Alors une trilogie, pourquoi pas ? Je pense que la pochette du prochain viendra encore d’un tatoueur, mais dans un autre style, je pense.

Photo : Muriel Delepont

– Concernant tes textes, ils sont toujours aussi concis et souvent revendicatifs. Comment les travailles-tu, car on peut prendre certains refrains notamment comme des punchlines ?

Oui, depuis toujours. C’est quelque chose qu’on retrouve aussi dans le Hip-Hop ou dans les groupes Electro HardCore. C’est vrai que les punchlines sont un truc que j’aime bien et qui sort naturellement chez moi.

– Il y a un peu plus de 20 ans, en 2001, tu avais sorti un album monumental avec Elephant System. Est-ce que, par un heureux hasard, on pourrait imaginer une suite ?

Oui, mais pas tout de suite. Mais on y a déjà travaillé un peu. C’est vrai que le premier a un son en béton, c’est Adrian Sherwood, quoi ! 

– Enfin, vous allez fouler en juin prochain pour la troisième fois la scène du Hellfest. Tout d’abord, comment abordes-tu un rendez-vous comme celui-ci qui est devenu depuis majeur et surtout est-ce qu’une tournée plus conséquente est-elle en cours de préparation ?

Oui, on a déjà 5/6 dates avant à Paris, Rouen, Strasbourg, Lyon et Lille et ensuite ce sera le Hellfest. On a aussi des concerts prévus pour l’été et la rentrée et on en fera l’annonce un peu plus tard. Mais pour en revenir au Hellfest, Ben Barbaud a vraiment créé un truc de fou ! Il va falloir qu’on montre au public qu’on est toujours là et on va donner le meilleur !

Le nouvel album de TREPONEM PAL, « Screamers », est disponible depuis le 10 mars chez At(H)ome.

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Blues Hard 70's Rock 70's Soul / Funk

DeWolff : délicatement affiné

Par bonheur, il existe toujours des groupes pour qui l’analogique signifie encore quelque chose et qui parviennent encore à en extraire des petites merveilles. C’est le cas de DEWOLFF qui poursuit son aventure vintage entre Rock, Blues et Hard 70’s avec une touche de Soul et de Funk et basée sur un groove permanent. Avec « Love, Death & In Between », le trio néerlandais atteint encore des sommets.

DEWOLFF

« Love, Death & In Between »

(Mascot Label Group)

Cela fait maintenant 15 ans que DEWOLFF est resté bloqué dans les années 70, une époque qu’aucun de ses membres n’a connu et pourtant qu’aucun d’entre-eux ne souhaite quitter. Les Hollandais, nourris de Blues, de Rock Psychédélique, de Soul, de Gospel, et même de Southern Rock et de Hard vintage livrent un huitième album studio dantesque et plus élaboré que jamais. Le trio a vu les choses en grand et cela s’entend.

Les frères Van de Poel, Pablo au chant et à la guitare et Luka derrière les fûts, accompagnés du fidèle Robin Piso à l’orgue Hammond, offrent une synthèse incroyable d’une période musicale qui a forgé leurs influences pour obtenir ce style à la fois unique et intemporel. Et pourtant, DEWOLFF ne se répète, ne tourne pas en rond et se concentre sur un jeu incroyablement fluide délivrant des mélodies enivrantes d’un autre temps.

Superbement produit, « Love, Death & Between » est chaleureux et organique bénéficiant d’un soin tout particulier apporté aux cuivres, qui libère une superbe luminosité. Groovy et entraînant, DEWOLFF enchaine les morceaux sur une allure stellaire (« Night Train », « Message From My Baby », « Counterfeit Love », « Gilded »). Avec une mention spéciale à « Rosita » et ses 16 fabuleuses minutes, magnifique point d’orgue de l’album.

A noter que DEWOLFF se produira en Bretagne au festival ‘God Save The Kouign’ le 23 juin prochain à Penmarc’h, Finistère (29).

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Photo : Satellite June