Avec un immense mur de guitare, une paire basse/batterie imparable et un chanteur qui fait preuve d’une énergie incroyable, SAXON déroule avec une facilité bluffante sur ce « Hell, Fire And Damnation », pourtant réalisé en quelques semaines seulement. Jouant les équilibristes entre Hard Rock et Heavy Metal, le groupe reste un modèle de longévité et de créativité. Près de 50 ans après ses débuts, le quintet est plus convaincant et aiguisé que jamais et s’apprête prochainement à enflammer les foules.
SAXON
« Hell, Fire And Damnation »
(Silver Lining Music)
Mais jusqu’où iront-ils ? Alors que la tournée avec Judas Priest ce printemps se profile, il semblerait que son annonce, il y a quelques mois, ait mis un petit coup de pression aux Anglais, qui ne pouvaient se présenter sur scène sans quelques nouveautés. Et a priori, SAXON supporte très bien, mieux, apprécie beaucoup de se retrouver au pied du mur. Avec « Hell, Fire And Damnation », il livre l’un de ses meilleurs albums depuis longtemps et c’est déjà, et pourtant, le 24ème… C’est dire si l’inspiration est toujours aussi vive.
Le moins évident lorsque l’on fait partie de cette légendaire NWOBHM, et que l’on en est autant un pionnier que l’un de ses principaux architectes, est de se renouveler et d’apporter encore quelque chose à l’édifice. Et le sentiment qui domine, à l’écoute de « Hell, Fire And Damnation », est que SAXON n’a franchement pas eu besoin de forcer son talent, tant les dix titres sont d’une fluidité absolue et surtout gorgés de ce naturel qui en fait l’une des formations les plus authentiques de son registre et de son époque.
Et justement, les Britanniques réussissent parfaitement à faire le lien entre leurs meilleures réalisations, désormais mythiques, et un son très actuel. C’est d’ailleurs avec son ami de longue date, Andy Sneap, que Biff Byford a co-produit « Hell, Fire And Damnation ». Et outre l’époustouflante prestation du frontman, le résultat est magistral. Solide et groovy, la rythmique ne faiblit jamais, tandis que le tandem guitaristique Doug Scarrat/Brian Tatler régale par ses mélodies épiques et racées, et ses solos virtuoses. Du SAXON, taille patron !
Très attendu par des fans toujours très nombreux qui entretiennent sans doute une certaine nostalgie, « Heaven Comes Down » ne parvient pas complètement à raviver le feu qui brûlait chez DOKKEN quelques décennies en arrière. Si son guitariste Jon Levin est époustouflant et très inspiré et les compos plutôt bien écrites, on ne peut que regretter que son leader ne soit plus tout à fait à la hauteur. S’il n’y a pas non plus de quoi rougir, le quatuor n’est plus aussi incendiaire qu’il le fut.
DOKKEN
« Heaven Comes Down »
(Silver Lining Music)
Il y a toujours un peu d’émotion à présenter un nouvel album de DOKKEN, notamment lorsqu’on a suivi et vécu en temps réel l’ascension et le parcours plus que chaotique du groupe. Onze ans après « Broken Bones », ce treizième opus surgit alors même qu’on avait du mal à imaginer cette institution des années 80/90 faire son retour et renaître de ses cendres. Mais Don Dokken n’est pas homme à plier les gaules si facilement, et avec une formation pareille, il aurait d’ailleurs bien tort. Et voilà donc « Heaven Comes Down » sur les platines et ça pique forcément la curiosité.
En confiant le mix à Kevin Shirley (Aerosmith, Maiden, Bonamassa), DOKKEN a misé sur l’homme de la situation et quant à la production, elle est assurée par le frontman et Bill Palmer. Côté line-up, on retrouve l’excellent Jon Levin, fidèle depuis 20 ans, à la guitare et la rythmique de House Of Lords, à savoir Chris McCarvill à la basse et BJ Zampa à la batterie. Autant dire que ça joue vraiment bien et l’expérience se fait d’ailleurs sentir sur chaque titre de « Heaven Comes Down ». Mais la principale interrogation se trouve ailleurs.
Dès « Fugitive », DOKKEN fait du DOKKEN et il y a quelque chose de réjouissant, bien sûr. Seulement, et comme on pouvait s’en douter, Don Dokken n’est plus aussi puissant que jadis. Cependant, tout en évoluant dans un ton en dessous, il a su s’adapter et c’est son six-cordiste (comme souvent !), qui donne l’élan et parfois même le tournis (« Gypsie », « Is It Me Or You ? », « Over The Mountain »). Sans accabler son fondateur, et malgré l’énergie et la volonté affichées, les Américains ne ressuscitent pas vraiment le mythe.
Même s’il est le fils d’une légende du Heavy Metal, Seb Byford n’entend pourtant pas marcher dans les pas de son père musicalement. Cela dit, il est parvenu à l’embraquer dans l’aventure HEAVY WATER loin de l’institution Saxon. Avec « Dreams Of Yesterday », l’ambiance est plutôt Rock, même si quelques sonorités assez Old School et un brin Hard Rock émanent de ce deuxième effort rondement mené par le mythique frontman et sa progéniture.
HEAVY WATER
« Dreams Of Yesterday »
(Silver Lining Music)
Si le rapprochement artistique père/fils qui a donné lieu à « Red Brick City » il y a deux ans en pleine période de Covid, il semblerait que la Byford Family ait décidé de récidiver et d’inscrire HEAVY WATER dans le temps. Même si Biff a depuis sorti « Carpe Diem » et le navrant « More Inspirations » avec Saxon, le duo créé avec le fiston n’a pas été un one-shot, puisque les revoilà avec « Dreams Of Yesterday », un deuxième album varié et solide, dans la lignée du premier.
A la guitare et au chant, Seb paraît toujours tenir la boutique avec force et talent, Biff assurant la basse et les chœurs avec son inimitable timbre de voix. Loin de son Heavy Metal habituel et même s’il avait laissé entrevoir d’autres registres sur les deux non-essentiels opus de covers de Saxon, c’est assez surprenant de le retrouver dans certains styles abordés sur « Dreams Of Yesterday ». Mais il ne fait que tenir la basse sur HEAVY WATER… et d’ailleurs cela s’entend !
Le groupe a trouvé ses marques et même s’il se cherche encore un peu, une empreinte et une identité commencent à se dessiner. Très ancré dans les années 80 et 90, HEAVY WATER rappelle autant Led Zeppelin que Soundgarden ou Alice In Chains et penche sur des titres assez nerveux dans un Rock Hard classique, bluesy parfois, alternatif et légèrement Stoner (« Another Day », « Be My Savior », « Don’t Take It Granted », « Castaway »). Un peu éparse, mais très soudé !
Si c’est par nostalgie que vous comptez écouter ce nouveau GIRLSCHOOL, vous risquez d’être surpris car « WTFortyFive ? » sonne résolument actuel et, malgré le temps qui passe, nos quatre Londoniennes n’ont pas dit leur dernier mot. Principale référence pour les groupes féminins, elles ont conservé cette volonté qui a fait d’elles un mythe du Hard Rock. Et c’est sans complexe et avec assurance qu’elles fêtent leurs 45 ans d’activité décibélique.
GIRLSCHOOL
« WTFortyFive ? »
(Silver Lining Music)
Orphelines de leur grand ami Lemmy depuis huit ans déjà, les musiciennes de GIRLSCHOOL poursuivent leur bonhomme de chemin. Huit ans, c’est aussi le nombre d’années passées depuis « Guilt As Sin », dernier opus réalisé avec Enid Williams, fondatrice, bassiste et chanteuse du combo depuis 1978. Remplacée par Tracey Lamb, une vieille connaissance qui avait déjà faite de l’intérim chez elles, les Anglaises sont de retour au taquet avec un album, le quatorzième, qui sent bon le Rock’n’Roll.
De la première mouture de GIRLSCHOOL, il reste donc Kim McAuliffe (guitare, chant) et Denise Dufort (batterie), alors que la guitariste Jackie Chambers est fidèle au poste depuis plus de deux décennies maintenant. Les Britanniques sont donc très soudées et ce « WTFortyFive ? » vient célébrer 45 ans de carrière avec éclat et panache. Le cuir est un peu usé, certes, mais l’envie et la détermination n’ont pas bougé d’un iota. Mieux ! Le quatuor livre son meilleur album depuis très longtemps.
Redoutable d’efficacité et techniquement irréprochable, GIRLSCHOOL affiche un plaisir évident sur ses nouvelles compos. Les riffs sont toujours bruts et le groove rugueux comme au bon vieux temps des débuts de la NWOBHM (« It Is What It Is », « Cold Dark Heart », « Barmy Army », « Invisible Killer », « Up To No Good », « Party »). Cerise sur le gâteau, elles ont invité Biff Byford de Saxon, Phil Campbell, ex-Motörhead, et Duff McKagan de G N’R à pousser la chansonnette sur « Born To Raise Hell ». Royal !
Précurseur et même pionnier du Thrash Metal, RAVEN est toujours resté fidèle à ce style Heavy et Speed, et en mode power trio, qui fait sa force et a forgé sa légende depuis maintenant un demi-siècle. Fondé par les frères Gallagher, ossature indestructible du combo, les Britanniques sont de retour avec leur 15ème album, « All Hell’s Breaking Loose », toujours aussi rageurs et athlétiques. Entretien calme et tout sourire avec John (basse, chant).
– Votre dernier véritable album studio date de trois ans, « Metal City ». Mais l’année dernière, vous avez sorti « Leave’Em Bleeding », qui était aussi le dernier chez Steamhammer. C’était la manière la plus simple de quitter votre label avant de venir chez Silver Lining Music ?
Oui, « Leave’Em Bleeding » était une sorte de compilation, qui faisait le bilan de nos dernières années chez Steamhammer et sur laquelle on a pu ajouter des morceaux en version inédites et notamment live. Et cela tombait bien aussi, puisque le nouvel album n’était pas encore terminé. Ensuite, nous avons reçu une très belle proposition de Silver Lining Music. Steamhammer a fait du bon boulot avec nous, c’est vrai, mais ce nouveau deal nous permettait d’avoir une exposition différente et également de toucher un public plus large et un peu différent.
– « All Hell’s Breaking Loose » est aussi le second album complet avec votre batteur Mike Heller et on a franchement l’impression qu’il a toujours été là. Je trouve même que c’est peut-être le meilleur line-up affiché par RAVEN depuis longtemps. C’est aussi ton sentiment ?
Oui et j’espère que c’est vrai ! (Rires) Il suffit de le voir sur scène ! Et puis, il gère très bien les interviews, la presse, les vidéos : il s’occupe vraiment de beaucoup de choses au sein de RAVEN. Il est très impliqué et il a fait du super boulot sur l’album.
– D’ailleurs, c’est votre 15ème album et l’an prochain, vous fêterez vos 50 ans de carrière. C’est une incroyable longévité et vous faites partie d’un cercle très fermé. Qu’est-ce que tout ça t’inspire et est-ce que tu aurais pu l’imaginer en 1974 à Newcastle ?
Bien sûr que non ! On a commencé à faire de la musique pour s’amuser et on n’aurait jamais imaginé que cela dure aussi longtemps. C’est incroyable pour nous de nous voir dans le Top 10 des groupes les plus anciens encore en activité. C’est même fou ! Aerosmith s’est formé juste deux ans avant nous, tu imagines ? (Rires) L’an prochain, nous allons essayer de préparer quelque chose de spécial pour célébrer cet anniversaire. Nous avons toujours eu cette motivation pour continuer le groupe et surtout pour faire ce que nous faisons. On a toujours voulu être meilleur à chaque album. Nous avons toujours en nous cette étincelle qui nous pousse plus loin et qui continue à nous inspirer. Et nous n’avons pas l’intention de nous arrêter en si bon chemin ! (Sourire) D’ailleurs, je pense que ce nouvel album en est un parfait exemple. Nous ferons des choses très spéciales en tournée l’an prochain, c’est une certitude.
– Vous avez enregistré ce nouvel album à Los Angeles dans vos propres studios. Vous êtes désormais installés là-bas, ou est-ce que c’est juste parce que le soleil de Californie qui vous donne toute cette énergie ?
En fait, Mike (Heller, le batteur – NDR) vit là-bas et possède son propre studio. Nous sommes en Floride avec Mark, mais cela ne change rien au processus d’écriture. Mike a apporté beaucoup d’idées et fait de nombreuses propositions pour obtenir ce son sur ce nouvel album. Pour ce qui est des arrangements, nous nous en occupons toujours tous les trois, ensemble. Nous lui avons tout envoyé : les guitares, la basse, les solos et il a fait un travail de fou avec tout ça, ainsi que sur les voix ! Il a réussi à faire un mix génial, tout en conservant ce côté très organique, qui caractérise RAVEN. Il nous a suffit de livrer la meilleure performance possible finalement.
– Cette fois encore, l’album est bâti autour des riffs et vos morceaux sont toujours très compacts. Il y a un côté intemporel dans votre écriture, ce qui fait que RAVEN sonne très actuel et moderne. Comme l’expliques-tu, car la plupart des groupes sont marqués par une époque et cela ne concerne pas seulement le son ?
En fait, on essaie de garder à l’esprit ce qui fait RAVEN : les riffs, bien sûr, un rythme soutenu, etc… mais sans jamais regarder vers le passé. On ne perd pas de vue nos racines, elles sont définitivement ancrées en nous. Et il y a aussi ce côté un peu extravagant et exagéré dans les textes, une certaine attitude de mauvais garçons peut-être aussi. Parfois, la basse et la guitare prennent des directions différentes et lorsqu’on se rend compte que ça devient un peu trop commercial : on se dit ‘Oups ! Il faut changer ça !’. Mais on garde un œil sur l’aspect mélodique, c’est un truc de fou en fait ! Il y a de l’intensité, on frôle souvent le chaos, mais il faut que ce soit accrocheur. Notre truc, c’est notre relation de musicien et la destruction ! (Rires)
– Il y a aussi une chose que je trouve incroyable chez RAVEN, c’est que votre Heavy Thrash ou Speed Metal ne baisse pas en rapidité et en percussion. Beaucoup de groupes de votre génération ont tendance à lever le pied et diminue en intensité, mais pas vous. Quel est le secret de toute cette nervosité si généreuse ?
C’est juste qu’on adore ce que l’on fait et nous sommes très ouverts ! Je me souviens que gamin à Newcastle, ce qui me fascinait dans certains concerts, c’était justement cette intensité et cette puissance, qui étaient saisissantes. Ca me transportait littéralement. Mon héritage musical vient de là, de tout ça. Depuis, j’essaie de délivrer la même chose, les mêmes sensations que j’avais adolescent. Et il y a aussi bien sûr cette connexion avec le public, qui est incroyable. C’est aussi pour ça qu’on ne prend pas de drogue, par exemple. Si tu fais ça, tu ne peux pas capter l’attention, tu restes dans ton coin à faire ton truc. Tu comprends ça en vieillissant et tu te rends vite compte que tu n’as pas d’excuse si tu n’as pas la passion. Balancer toute cette énergie est ce que tu dois faire ! C’est ça la liberté ! Regarde les Rolling Stones, ils sont probablement meilleurs aujourd’hui qu’ils ne l’ont jamais été ! Mick Jagger n’a jamais arrêté, il n’a jamais perdu l’inspiration. Si on peut le faire, alors faisons-le ! (Rires)
– Tout en restant très puissant et massif, RAVEN n’a jamais négligé les mélodies. Vous les travaillez plutôt en fonction des lignes vocales ou de la guitare ?
La plupart du temps, cela vient de la guitare. Souvent, Mark (Gallagher, son frère – NDR) m’envoie des trucs par téléphone qui ne veulent pas dire grand-chose et il me dit : ‘Tu vois, c’est ça qu’il faut faire !’ (Rires) Plus sérieusement, cela vient de la musique, pas du chant. Elle dicte la structure de la chanson, mais pas seulement, elle guide aussi la mélodie qui installe le titre. Ensuite, c’est une question de feeling. Il pose des voix avec des mots qui ne veulent rien dire au début pour installer la charpente en quelque sorte. Les paroles viennent après, suivant l’ambiance, et la ligne directrice apparaît d’elle-même. La fin de la pandémie a aussi réveillé beaucoup de choses en nous et nous a ouvert tellement de voies. Il a fallu canaliser tout ça et se demander de quelle manière devaient sonner nos nouveaux morceaux et je pense que cela nous a rendu encore meilleurs. On trouvait les choses plus rapidement, les breaks venaient d’eux-mêmes… Cela a provoqué ce genre de choses chez nous. Pas mal de trucs sont devenus assez évidents et nous avons expérimentés tellement de choses également ! (Rires) Lorsque nous enregistrons un album, il y a toujours environ 20% d’improvisation en studio. C’est quelque chose que nous adorons et qui ne nous fait pas peur du tout. Il y a un peu de magie là-dedans… (Sourire)
– Enfin, beaucoup de groupes dénoncent les difficultés économiques engendrées par les tournées. Comment cela se passe-t-il pour RAVEN ? Vous n’avez pas trop de problèmes au niveau de l’organisation financièrement ?
On en a eu, oui, mais ce n’était pas de notre fait. Nous devions participer à des festivals qui ont été annulés. Mais nos fans n’ont pas demandé à être remboursé. Ils ont en grande partie gardé leur billet. Après, c’est vrai que beaucoup de choses s’annulent, car les organisateurs n’ont aucune idée du nombre de gens qui viendront et combien d’argent ils pourront faire. Ils ne prennent donc aucun risque et annulent. Ils veulent l’argent avant de faire le concert. La pandémie a bousculé beaucoup de choses également jusqu’en 2021. Depuis deux ans, les concerts ont repris et certains endroits où nous étions programmés ont reportés en gardant la même affiche. Et pour nous, c’est très bien, car nous avons un nouvel album et nous ferons tous les festivals l’an prochain, même s’il y en aura aussi cet été. Et nous allons tourner avec Saxon également en Italie, puis nous jouerons aussi quelques concerts en Belgique. Et nous serons en France le 9 septembre dans les Pyrénées pour le ‘Pyrenean Warriors Open Air’, et ensuite en Allemagne. En octobre, nous serons ici en Angleterre pour une série de concerts, puis l’an prochain en Australie et au Japon. Donc, tout va très bien !!! (Sourire)
Le nouvel album de RAVEN, « All Hell’s Breaking Loose », est disponible chez Silver Lining Music.
Même si le frontman Doogie White fait le job, il faut bien avouer qu’ALCATRAZZ a perdu de sa superbe depuis le limogeage de Graham Bonnet. Pourtant le groupe poursuit sa route, emmené par des musiciens chevronnés, virtuoses et dont les morceaux sont toujours bien écrits. « Take No Prisoners » ne renversent pas la table, mais ne manque pas non plus d’intérêt.
ALCATRAZZ
« Take No Prisoners »
(Silver Lining Music)
Depuis 1983, la vie est loin d’être un long fleuve tranquille chez ALCATRAZZ. C’en est même au point que l’on suit les évolutions du line-up comme on suit un feuilleton. Pour faire court, le chanteur Graham Bonnet a laissé sa place (!) à Doogie White, qui livre ici son deuxième album avec la formation américaine qui a aussi, rappelons-le, vu passer Yngwie J. Malmsteen et Steve Vai et qui peut aujourd’hui compter sur l’excellent Joe Stump et son légendaire toucher shred.
Une chose reste cependant immuable chez ALCATRAZZ, c’est la présence de Gary Shea à la basse et de Jimmy Waldo aux claviers, véritables piliers depuis le début. Quant au style du quintet, on oscille toujours entre Hard Rock et Heavy Metal avec une touche très british de plus en plus perceptible. Et il faut dire que l’ex-Rainbow et MSG, Doogie White, y est pour beaucoup. Pour un peu, on croirait entendre ce bon Biff Byford de Saxon à la manœuvre, c’est dire.
Quant au contenu de « Take No Prisoners », on reste dans la continuité de « V » avec même un léger mieux au niveau des compos. Dès « Little Viper », ALCATRAZZ donne le ton d’un album qui s’annonce dynamique (« Bring On The Rawk », « Battle Lines »). Le groupe a même convié ces Dames de Girlschool sur « Don’t Get Mad… Get Even », un morceau mélodique et accrocheur qui résume d’ailleurs assez bien l’ensemble. Pour le reste, Joe Stump semble porter les titres à bout de bras. En demi-teinte.
Magnifiquement produit par Jay Ruston (Anthrax, Black Star Riders, Steel Panther), « Chaos & Colour » vient rappeler ô combien URIAH HEEP a su imposer sa patte et influencer un nombre incalculable de musiciens en plus de 50 ans d’existence. Fondateur d’un Hard Rock aux contours progressifs avec quelques autres au début des années 70, le quintet n’a jamais dévié de sa trajectoire, et, mieux, réussit avec une facilité toute naturelle à nous faire encore vibrer.
URIAH HEEP
« Chaos & Colour »
(Silver Lining Music)
Contrairement à beaucoup de groupes dont je ne ferai pas la liste ici tant elle serait longue, URIAH HEEP est de ceux qui ne semble pas prendre une ride, ni lever le pied un seul moment et surtout, les très rares à pouvoir encore compter avec une créativité hors-norme. Certes, « Chaos & Colour » ne vient pas révolutionner le genre, mais l’énergie déployée et la technicité de ses membres font de la formation anglaise l’une des plus attrayantes du siècle passé toujours en activité.
A la tête de URIAH HEEP depuis 1969, le jamais-rassasié guitariste Mick Box et sa célèbre wah-wah insufflent une fois encore une dynamique très Hard aux nouvelles compositions avec ce côté intemporel, qui fait la force de URIAH HEEP depuis cinq décennies. A ses côtés, le chanteur Bernie Shaw et le claviériste Phil Lanzon, arrivés ensemble en 1986 dans l’institution, sont l’autre point de repère et la force distillés sur ce 25ème album. Classique bien sûr, mais toujours aussi relevé, le quintet bouillonne encore.
Grâce à sa rythmique exemplaire, Russell Gilbrook (batterie) et Dave Rimmer (basse), URIAH HEEP continue s’assumer avec brio l’aspect très positif de son répertoire sur des envolées guitaristiques incroyables, des refrains et des chœurs imparables et un clavier insaisissable. Les Britanniques n’ont pas changé de braquet et conservent cette envie des premiers jours (« Save Me Tonight », « Silver Sunlight », « One Nation, One Sun », « Closer To Your Dreams », « Fly Like An Eagle »). Progressif et Rock, ces géants restent toujours d’actualité.
Presque méditatif et d’une rare sensibilité, SOEN se présente avec « Atlantis », une nouvelle réalisation live enregistrée dans le légendaire studio du même nom dans la capitale suédoise. Accompagné de musiciens classiques, les morceaux issus de la discographie du groupe prennent ici une dimension et un relief d’une grande profondeur.
SOEN
« Atlantis »
(Silver Lining Music)
En dix ans de carrière, les Suédois n’ont eu de cesse de surprendre et surtout de sublimer leur Metal Progressif. Après cinq opus d’une égale intensité, SOEN se renouvelle à nouveau avec « Atlantis », du nom du mythique Studio Atlantis Grammofon, situé à Stockhölm. Cet ancien cinéma a vu passer de grands noms, c’est pourquoi le quintet a tenu à y enregistrer un disque très spécial.
Capté le 10 décembre 2021 (il sort aussi en DVD), « Atlantis » se présente sous la forme d’un concert de 80 minutes particulièrement immersif et, bien sûr, sans public vu le lieu. A travers 13 morceaux, SOEN parcourt ses albums en revisitant leurs titres les plus emblématiques accompagné d’un orchestre classique pour encore plus d’élégance. Et le résultat est plus que convaincant, il est captivant.
C’est donc entouré de huit musiciens, dont deux chanteuses, que le groupe fondé par le batteur Martin Lopez livre des versions d’une rare beauté de « Monarch », « Lucidity », « Antagonist » ou « Jinn ». SOEN rayonne littéralement et parvient même à donner de la grâce à « Snuff » de Slipknot, un sacré défi. Au chant, Joel Ekelöf est étincelant et la grande technicité des Scandinaves fait le reste. Majestueux !
SAXON a le cuir épais et de la suite dans les idées. Après tant d’années passées à servir la cause d’un Heavy Metal solide et insaisissable, le quintet britannique en a encore sous le pied. Et « Carpe Diem », avec son incroyable collection de riffs racés et de solos virevoltants, s’inscrit dans la légende du groupe. Sans se réinventer, les Anglais ne bousculent pas leurs habitudes. Mieux, ils aiguisent leur talent.
SAXON
« Carpe Diem »
(Silver Lining Music)
C’est vrai que l’album « Inspirations », triste et insipide recueil de reprises sorti l’an dernier, avait de quoi dérouter tant les vétérans de la NWOBHM paraissaient à côté de la plaque et si loin de leur niveau. Dans la foulée, Biff Byford avait fait amende honorable en sortant « Heavy Water » avec son fils Seb (qui fait d’ailleurs les chœurs sur « Carpe Diem »), mais c’est le grand et inspiré SAXON que tout le monde attendait.
Force est de constater que ce 23ème album vient remettre les choses au clair et contribue à maintenir tout le respect dû à la légendaire institution britannique. Basé sur la culture du riff, dont SAXON a toujours été un grand artisan et un fier bâtisseur, « Carpe Diem » renoue avec un Heavy Metal fougueux, galopant et acéré. Le duo Paul Quinn et Doug Scarrat aux guitares fait des merveilles et embarque tout sur son passage.
Dès le morceau-titre qui ouvre l’album, la rythmique implacable de Nibbs Carter (basse) et de Nigel Glockler (batterie) montre que SAXON reste une référence incontournable et fiable. De son côté, Biff Byford a littéralement retrouvé une seconde jeunesse et se présente avec une fraîcheur incroyable (« Age Of Steam », « The Pilgrimage », « Lady In Gray », « All For One »). Quant à la production signée Andy Sneap, elle met brillamment en lumière « Carpe Diem ». De la belle ouvrage !
Exit Graham Bonnet, fondateur et chanteur emblématique du groupe, et place au non moins très bon Doogie White, dont le parcours force aussi le respect. ALCATRAZZ semble presqu’immortel et livre « V », qui vaut bien que l’on s’arrête un moment. Les vétérans californiens ont toujours la pêche et le Heavy Metal chevillé au corps.
ALCATRAZZ
« V »
(Silver Lining Music)
S’il y a bien un groupe dont le parcours est chaotique et qui refuse de rendre les armes, c’est bien ALCATRAZZ. Célèbres pour avoir notamment compté dans leurs rangs Yngwie J. Malmsteen et Steve Vai, les Californiens n’ont pourtant sorti que cinq albums, dont celui-ci, ce qui fait assez peu finalement. Mais le quintet attire toujours les projecteurs, grâce à une solide réputation.
Si ALCATRAZZ joue aux montagnes russes depuis 1983, il faut lui reconnaître une certaine constance dans la qualité de ses albums. Côté line-up, il ne reste que deux membres originaux, Jimmy Waldo (claviers) et Gary Shea (basse), on retrouve Mark Benquechea (batterie) et Joe Strump (guitare) et on découvre Doogie White (Rainbow, Michael Schenker) au chant.
Très bien produit, l’album d’ALCATRAZZ porte le titre de son cinquième opus, mais revendique aussi le V de la victoire, synonyme d’un retour aux affaires inspiré. C’est vrai que les vétérans du Heavy Metal livrent douze morceaux aussi vintage qu’intemporels, et qui devraient faire leur petit effet sur scène. Le combo reste une valeur sûre du style depuis des années.