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Heavy metal International

Night Demon : un classicisme éclatant [Interview]

Passe de trois pour le combo formé en 2011 à Ventura en Californie, qui surgit avec « Outsider », sorte de madeleine de Proust métallique. Conceptuel, l’album des Américains s’inscrit en effet dans la veine de la NWOBHM, soutenue cependant par une production très actuelle. Egalement bassiste du mythique Cirith Ungol depuis 2016, Jarvis Leatherby, frontman du power trio, revient sur la création de ce nouvel opus, l’évolution du groupe et sur son amour de la scène. Entretien.

– Tout d’abord et malgré ces dernières années compliquées pour tout le monde, on sent avec ce nouvel album que NIGHT DEMON est en pleine forme et très créatif. Vous en avez profité pour réfléchir sur le groupe et peut-être aussi lui donner de nouveaux objectifs ?

Oui, c’est vrai que cette pandémie a impacté l’ensemble de la société. Nous l’avons assez mal pris, parce que cela nous a empêché de tourner… et nous adorons tourner ! Depuis 2016, nous avons fait plus de 600 concerts. Cela dit, ça a été une bonne chose d’avoir un peut de temps pour pouvoir travailler sur ce nouvel album, c’est vrai. Mais je suis content que ce soit terminé, même si cela a été intéressant pour plusieurs raisons.

– En un peu plus de dix ans, vous comptez trois albums et même une compilation. Ce qui étonne aussi, c’est la sortie de neuf singles en plus de votre premier EP et d’un Live. Pourquoi autant de singles, c’est pourtant assez rare dans le Heavy Metal traditionnel ?

Oui, c’est vrai qu’on a sorti pas mal de singles. Nos albums sont très différents les uns des autres et finalement, c’était une bonne solution. On a fait ça en 2020 surtout. C’était juste histoire de changer un peu notre fonctionnement et d’essayer autre chose. Mais nous préférons bien sûr sortir des albums complets.

– Vous revenez donc avec « Outsider », qui est sans doute votre album le plus abouti, notamment au niveau de sa composition. En intégrant des passages plus lents et mélodiques, l’objectif était-il de peaufiner votre son et votre style ?

En fait, on ne voulait surtout pas se répéter. Tous nos albums ont toujours été un peu progressifs et on voulait revenir au son et au style beaucoup plus classique du Heavy Metal. On essaie de se renouveler à chaque album et on se pose toujours la question de savoir dans quelle direction nous allons aller. On voulait un son frais. Nous ne sommes pas un groupe comme AC/DC, par exemple, nous sommes incapables de faire ça. On a besoin de changer à chaque fois et c’est précisément ça qui nous intéresse et nous motive. 

– Même si l’on retrouve toujours l’influence de la NWOBHM, on a aussi le sentiment que votre style s’est également beaucoup américanisé. Tu le vois comme une sorte d’émancipation ?

Je ne sais pas trop. Je pense que les choses arrivent naturellement. Ce n’est pas quelque chose de conscient, ni de calculé. On essaie de sonner comme nous le ressentons sans trop prêter d’attention à ce qui nous entoure. C’est une question intéressante, je n’y avais jamais vraiment pensé auparavant. Il y a peut-être plus d’influences américaines sur ce nouvel album, mais je ne pense pas que nous sommes vraiment identifiables comme étant typiquement américain dans le son. Et il y a tellement de très bons groupes de chaque côté de l’Atlantique.

Jarvis Leatherby

– Pour la première fois, NIGHT DEMON se présente avec un album-concept. C’est quelque chose que tu avais en tête depuis longtemps, ou cela s’est finalement imposé assez spontanément ?

Oui, on avait ça en tête depuis un moment, mais c’est très compliqué à réaliser. On a déjà enregistré des albums qui contenaient deux-trois morceaux qui tenaient sur la même histoire. Cette fois, j’avais plus de temps pour me poser et écrire, car l’exercice n’est pas facile. Ecrire une histoire est comme écrire le scripte d’un film. J’ai toujours eu envie de le faire. Et cette fois, j’ai enfin pu le réaliser.

– Il y a un aspect très cinématographique et narratif justement sur « Outsider ». Selon toi, c’est le résultat d’un travail plus pointilleux sur les riffs, ou ce sont plutôt les textes qui ont donné le ton et la dynamique ?

Je pense que c’est surtout le fil de l’histoire qui donne cette dynamique. Il faut ensuite trouver la bonne musique qui va venir se poser dessus. On a vu ça comme un nouveau challenge et on a vraiment trouvé ça très cool à faire.

– La force et la particularité de NIGHT DEMON sont aussi d’évoluer en power trio. Et on a l’impression qu’il ne peut en être autrement. C’est aussi ton avis ?

En fait, on ne l’a pas fait exprès ! (Rires) Nous sommes vraiment très investis dans ce que nous faisons. C’est même assez saisissant ! On pourrait avoir un deuxième guitariste, mais je ne sais pas ce qu’il ferait. Cela apporterait sûrement un plus gros son, mais être à trois est vraiment quelque chose qui nous pousse encore plus et nous sommes heureux du résultat. On a déjà eu un second guitariste, mais bon… C’était un peu le bordel ! (Rires)

– Plusieurs passages plus lents de ce nouvel album débouchent aussi sur des aspects plus progressifs et même Doom par rapport à vos précédentes réalisations. C’est le fait de plus prendre le temps de poser certaines atmosphères qui vous y a conduit ?

En fait, c’est vraiment l’histoire qui nous guide et nous conduit à ces types de sonorités et d’ambiances. L’album s’écoute en entier et il est difficile de prendre les morceaux séparément. Il y a un réel fil conducteur. La partie Doom correspond aux passages plus sombres et pesants de l’histoire, alors que d’autres seront plus dans l’émotion. On a essayé de jouer la musique qui correspondait le mieux aux paroles. Ce sont les textes qui te disent où aller. On ne se pose pas de milites, nous ne sommes ce genre de groupe.

– Comme souvent chez NIGHT DEMON, les moments épiques ne manquent pas sur « Outsider » avec un côté sombre et aussi des passages accrocheurs et très speed. L’album étant assez narratif, votre intention est-elle de le jouer dans son intégralité et chronologiquement sur scène ?

Oui, absolument, à 100% ! Il y a beaucoup de groupes qui composent des morceaux très longs de 20 minutes. « Outsider » dure 35 minutes et nous avons choisi d’écrire des chansons assez courtes. On peut le jouer dans son intégralité, même s’il manquera quelques ‘classiques’ aux fans. (Rires) Mais oui, c’est notre objectif avec ce nouvel album.

– Enfin, si les groupes références sont toujours très nombreux dans le Heavy Metal, ils se font aussi vieillissants. N’est-ce pas l’heure pour NIGHT DEMON de s’imposer enfin, d’autant que vous êtes soutenus par le solide label qu’est Century Media ?

Ce n’est pas à nous de décider de ça, mais bien sûr que c’est notre volonté. Il y a beaucoup de groupes qui sont dans notre position et qui sont très bons. Mais c’est vrai que lorsque tu as déjà cinq ou six albums derrière toi, tu es en droit de te dire que c’est ton tour. C’est aussi la responsabilité des fans, des festivals et de la presse également. C’est aux festivals de mettre de jeunes groupes un peu plus haut sur l’affiche. Si les groupes sont bons, alors c’est leur place ! Et c’est l’occasion de montrer au public à quel point ils sont bons et qu’il faut les soutenir. Et si cela n’arrive pas très vite, il va y avoir un problème, parce que le fossé entre les anciens et les nouveaux va encore plus se creuser. Et si on n’arrête pas tout ça rapidement, ça va être la fin de beaucoup de choses. Il ne restera plus que des vieux groupes et des Tribute bands et donc, au final, la même musique tout le temps !

« Outsider » est disponible depuis le 17 mars chez Century Media Records.

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Heavy metal

Manigance : sans frontières

Alors qu’ils auraient pu surfer encore un peu sur « Le Bal Des Ombres », où ils ont montré de bien belles choses, les musiciens de MANIGANCE se sont donné un nouveau challenge. En réarrangeant et surtout en interprétant ce dernier album en anglais, l’objectif est clairement affiché : s’exporter le mieux possible au-delà de nos frontières. Si certaines tentatives se sont révélées plutôt approximatives, celle des compagnons de François Merle s’avère très convaincante.

MANIGANCE

« The Shadows Ball »

(Rockshots Records)

Il y a un an, presque jour pour jour, MANIGANCE sortait « Le Bal Des Ombres » (Verycords) et amorçait un retour fracassant avec un registre riche et très bien arrangé. Très Heavy et surtout porté par sa nouvelle chanteuse Carine Pinto, en lieu et place de Didier Delsaux, et juste après la sortie de « Machine Nation » en 2018, l’album avait reçu un bel accueil et le groupe a livré quelques concerts mémorables. Très à l’aise dans cette nouvelle formule où le chant féminin apporte un vrai plus, le groupe a pris une nouvelle envergure.

A l’aube d’une tournée européenne avec les Italiens de Rhapsody Of Fire, le quintet a eu la riche idée de réinterpréter son dernier opus, cette fois en anglais. L’objectif est bien sûr de communier plus facilement avec le public et aussi de s’ouvrir des portes à l’international que le chant en français ne permet souvent pas. Et MANIGANCE a vu juste car, devenu « The Shadows Ball », la neuvième réalisation des Pyrénéens présente une saveur, certes différente, mais tout aussi à propos et surtout bluffante à bien des égards.  

Armé d’une puissance vocale à la fois sensuelle et solide, le combo perpétue un Heavy Metal aux reliefs Old School penchant vers un Power très moderne avec une vigueur de chaque instant et tout en conservant son identité première. Sur une production de son guitariste François Merle, MANIGANCE réussit parfaitement l’adaptation de son disque dans la langue de Shakespeare, et celle-ci offre même beaucoup de volume à plusieurs morceaux. Les Français nous font traverser une multitude d’ambiances avec une belle assurance.

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Heavy metal Modern Metal

Liv Sin : brutale méditation

Quatre ans après son dernier opus, la Suédoise LIV SIN ressurgit avec son groupe pour un troisième effort, « Kali Yuga », qui n’a rien de méditatif, mais qui sillonne plutôt des sentiers explosifs et chaotiques. Intenses et compacts, ses nouveaux morceaux ne laissent aucun répit et libèrent une éclatante férocité.

LIV SIN

« Kali Yuga »

(Mighty Music/Target Group)

Après 13 ans et cinq albums avec Sister Sin, Liv Jagrell, alias LIV SIN, mène une carrière en solo dans laquelle elle semble épanouie. Depuis « Follow Me » (2017) et « Burning Sermons » (2019), la frontwoman monte en puissance et gagne aussi en assurance. Sur « Kali Yuga », il règne un air de folie où le Heavy Metal de la Scandinaves se fait d’une modernité très musclée.

Evoluant en quintet, la Suédoise a mis au point un style costaud basé sur des riffs massifs, une rythmique très percutante et un chant agressif et polymorphe. La chanteuse multiplie les expériences vocales en étant très pertinente et en évoluant dans des sphères qui empruntent autant à l’Alternative Metal qu’au Heavy le plus classique, façon King Diamond. LIVE SIN s’éclate !

Magistralement produit par Simon Johansson (Wolf) et Mike Wead (Mercyful Fate) sur un mix et un master signés Tue Madsen (At The Gate), « Kali Yuga » regorge de pépites comme « The Process », « King Of Fools », « I Am The Storm » ou « D.E.R. », sur laquelle apparaissent en guests Zak Tell (Clawfinger), Madeleine Liljestam (Eleine) et Wenderson D’Paula (Army Of Souls). LIV SIN sort l’artillerie lourde !

Photo : Post-Mortem Photography
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Heavy metal Heavy Psych Rock International Proto-Metal

Warlung : une question d’équilibre [Interview]

Au croisement entre le Psych et le vintage, WARLUNG présente une Heavy Metal tranchant et mélodique. Bardé de solos enflammés, de chorus très NWOBHM et d’un travail très précis sur les voix, le style des Texans repose sur autant de traditions que sur un aspect visionnaire où l’esprit et le son du Doom a laissé une forte empreinte. Sorti en novembre dernier, le quatrième album du quatuor embrasse les générations avec malice et puissance. Entretien avec un combo ravit de venir poser ses valises en Europe le mois prochain pour quelques dates.  

– Dès 2017 avec « Sleepwalker », vous avez conquis la scène underground Heavy Rock, et moins de six ans après, WARLUNG en est déjà à son quatrième album. Vous imaginiez que les choses iraient aussi vite ?

Eh bien, je ne suis pas sûr que nous ayons encore conquis la scène underground, mais nous y travaillons ! Le projet a commencé par une jam amusante et c’est vrai que nous n’aurions jamais pensé faire quatre albums. Heureusement, nous avons des fans géniaux et avec l’aide de Heavy Psych Sounds Records, nous nous sentons plus inspirés que jamais. L’écriture peut être rapide même si, pour nous, nous sommes toujours impatients de travailler sur de nouveaux morceaux. Et malgré ce nouveau disque tout juste sorti, nous discutons déjà des prochains et de tournées.

– Avec « Optical Delusions », vous aviez déjà placé la barre très haut et sur « Vulture’s Paradise », vous vous surpassez à nouveau. Dans quel état d’esprit étiez-vous au moment de la composition ? Vous sentiez que vous aviez un nouveau challenge à relever ?

Il peut être à la fois effrayant et inspirant de se fixer un objectif. D’un côté, nous nous inquiétons de la façon dont nous sommes censés améliorer les choses, mais de l’autre, nous nous disons : « Qui s’en soucie ? Faisons simplement la musique que nous voulons entendre ! ». À chaque enregistrement, nous regardons en arrière et discutons de ce que nous avons bien fait et de ce que nous pourrions mieux faire. En théorie, tout devrait être plus élaboré. Que cela se produise, ou pas, dépend aussi de nos auditeurs. Mais quand on compose, c’est avant tout pour s’amuser.

– En réécoutant votre précédent album, j’ai trouvé que « Vulture’s Paradise » se présentait comme une suite logique. Vous semblez ne pas avoir tout dit sur « Optical Delusions », c’est le cas ?

Jusqu’à présent, chaque fois que nous répétons, chaque concert que nous faisons et chaque fois que nous sommes allés en studio, c’était génial. On arrêtera de faire de la musique uniquement quand ça cessera d’être amusant. Je ne peux pas parler pour l’avenir, mais à l’heure actuelle, le puits créatif n’a pas fini d’être exploité. Nous avons toujours plus de matériel, donc il reste beaucoup d’idées. Sur « Vulture’s Paradise », par exemple, nous avions environ 60 minutes de musique et nous n’en avons enregistré que 44. Chaque album est un mélange de morceaux plus anciens et retravaillés avec des choses plus récentes, de sorte que les albums ont tendance à ressembler à une transition naturelle.

– Il y a un côté obsédant dans la musique de WARLUNG, qui vient sûrement de l’ambiance et de l’esprit jam qui règnent sur vos albums. Pourtant, tout semble très écrit malgré tout. A quel moment l’improvisation intervient-elle lors de l’écriture ?

Nous apportons tous nos idées. Parfois, l’un d’entre-nous enregistre un brouillon de quelque chose sur lequel il a travaillé ou le joue simplement lorsque nous sommes ensemble. Qu’il s’agisse d’un riff, d’une mélodie ou simplement de paroles, il y a généralement suffisamment de matériel pour concevoir un morceau. Nous voyons tellement de groupes jouer un riff et rester dessus. C’est agréable de temps en temps, mais ça devient vite fatigant d’entendre ça chanson après chanson, disque après disque, groupe après groupe. Nous préférons concevoir notre musique avec un peu plus d’intention pour la garder intéressante et unique. Cependant, nous avons envisagé d’ajouter de l’improvisation dans nos concerts et sur un futur disque également, alors nous verrons !

– J’aimerais que vous nos disiez aussi un mot sur les textes. Ils traitent souvent de la mort et de la destruction. Vos paroles semblent en totale opposition à la luminosité de votre musique. C’est un contraste sur lequel vous aimez jouer ? Ou c’est par ironie ou une sorte de contre-pied ?

Même si nous ne nous considérons pas comme ‘Doom’, nous aimons toujours explorer les thèmes sombres inhérents à ce type de musique. Nous explorons consciemment des concepts et des récits pour que chaque chanson ait sa propre identité. Nos paroles vont d’événements historiques au psychédélisme ou même de la vente d’organes sur le marché noir, par exemple. Mais finalement, les histoires de création et de destruction sont les plus anciennes jamais racontées. La plupart des religions, des films et de la littérature fait aussi très souvent référence à ce concept, parce qu’il est tellement familier avec l’expérience humaine.

– Par ailleurs, WARLUNG combine un registre basé sur l’héritage de la NWOBHM avec des éléments proto-Doom, Psych et Prog 70’s. Et pourtant, la production de vos albums est très actuelle. Alors que beaucoup de groupes s’immergent dans des réalisations entièrement vintage, WARLUNG joue encore sur le contraste entre la modernité et le passé. Vous semblez aimer toutes formes de dualité finalement. C’est un exercice qui vous plait à ce point-là ?

A un moment donné du processus d’enregistrement, nous avons une conversation avec les ingénieurs du son sur ce point précis. Nous nous efforçons de trouver un juste milieu entre le son vintage et moderne. Les groupes qui font un son totalement vintage sont impressionnants, mais nous n’y arriverons probablement pas. Nous ne sommes pas un groupe basé sur le jam ou le psychédélisme, donc notre musique nécessite une touche moderne. De plus, nous apprécions autant les groupes modernes que les classiques. Nous n’avons donc aucune raison de nous en tenir à l’un ou à l’autre. Nous pouvons faire l’équilibre entre ces deux mondes.

– Enfin, un mot sur la tournée européenne qui se profile en février. Comment l’abordez-vous et qu’en attendez-vous par rapport au public américain que vous connaissez bien maintenant ?

Nous avons été signés chez Heavy Psych Sounds Records pendant la pandémie et comme nous n’avons pas encore pu nous déplacer, nous sommes très, très excités à l’idée d’aller à l’étranger ! Malheureusement, notre section rythmique reste chez nous pour s’occuper d’un souci de santé familial. Même s’ils vont nous manquer, nous croyons en la famille d’abord et soutenons leur décision de rester. Heureusement, nos amis Travis et Austin de Houston’s Kill The Lizard vont nous rejoindre à la basse et à la batterie ! En Amérique, nous pouvons jouer devant deux personnes ou 200, donc nous n’avons aucune attente. Nous sommes simplement heureux d’être là. L’opportunité de jouer devant des gens du monde entier et de voir des endroits où nous ne sommes jamais allés est un rêve absolu. Alors si vous nous voyez dans votre ville, venez partager une bière avec nous !

« Vulture’s Paradise » est disponible chez Heavy Psych Sounds Records.

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Hard 70's Heavy metal Thrash Metal

Dungeon Crawl & Throne Of Iron : house of dragon

Depuis quelques temps maintenant, on assiste à un certain revival des split-albums de la part de certains labels. Convaincre deux groupes de partager la même production n’est pas forcément chose aisée et que l’osmose se créé en est encore une autre. Avec DUNGEON CRAWL et THRONE OF IRON, l’entente est parfaite et la complémentarité évidente sur ce « The Side Quest » conceptuel.

DUNGEON CRAWL & THRONE OF IRON

« The Side Quest »

(Wise Blood Records)

Le label américain Wise Blood Records a eu la brillante idée de réunir deux groupes habités par le même amour du Heavy Metal et surtout la même folie. A travers ce split-album de sept titres, DUNGEON CRAWL et THRONE OF IRON se sont inspirés de ‘Dungeons & Dragons’ et on ne pouvait vraiment pas trouver mieux que ces deux furieux combos pour s’exprimer en musique sur le thème choisi ici. « The Side Quest » régale !

DUNGEON CRAWL

Et c’est le trio originaire de la célèbre baie de San Francisco qui ouvre les hostilités avec « Minions Of A Dark Master », une intro de deux minutes qui plante parfaitement le décor avant les trois brûlants morceaux à suivre. Dans une mouvance Thrash très Heavy, DUNGEON CRAWL se présente dans un style très brut, live et offensif. Alors que son album, « Roll For Your Life », vient de sortir, le groupe s’éclate encore !

THRONE OF IRON

Dans un Heavy Metal plus traditionnel, mais pas vraiment plus calme, THRONE OF IRON emboîte le pas de ses camarades et le gang de l’Indiana a lui aussi du répondant. Dans un esprit vintage façon Cirith Ungol et Manilla Road, les Américains enchainent les riffs dans un registre épique très old school et réjouissant. Vigoureux, les trois pistes ont même un goût de trop peu. Un split-album court, frontal et dynamique.

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Dark Gothic Heavy metal Horror Metal

Deathless Legacy : le diable au corps

Occulte et horrifique, DEATHLESS LEGACY n’a pourtant pas peur de faire un Metal accessible, très mélodique aux teintes progressives dans un écrin où la production massive joue un rôle essentiel et fédérateur. Capable de se fondre dans un Dark Rock comme dans un Power Metal costaud, les Italiens ouvrent la voie à une carrière qui n’attend dorénavant que son décollage. Et « Mater Larvarum » devrait sans problème les y aider.

DEATHLESS LEGACY

« Mater Larvarum »

(Scarlet Records)

Même si le groupe a été fondé en 2006, on compte sur les doigts d’une main les fois où les Italiens ont quitté leur Italie natale pour se produire. Pourtant, à l’écoute de ce « Mater Larvarum », la puissance et les mélodies qui en émanent sont d’une grande intensité et d’une maîtrise totale. Mené par sa fougueuse frontwoman, DEATHLESS LEGACY s’impose avec talent sur ce sixième album, qui devrait enfin les installer sur la scène européenne.

Héritier direct du mythique combo transalpin Death SS, le quintet (accompagné d’une ‘performeuse’ sur scène) affiche un style à la fois musclé et tendu mais évolue également dans des sphères plus progressives et même symphonique et gothique dans leur approche. En réalisant un album-concept renouant avec un Heavy Horror cher à King Diamond, DEATHLESS LEGACY nous projette dans un monde de férocité féminine pourtant sexy. 

En démarrant ce très bon opus avec « Ora Pro Nobis », la formation annonce la couleur. Dark et effrayante, les atmosphères se révèlent accrocheuses et regorgent de refrains entêtants (« Moonless Night », « Nightfall »). Au chant, Steva livre une performance solide en jouant sur une grande puissance vocale et un timbre qui lui permet bien des audaces (« Hollow », « Altar Of Bones », « Run » et le morceau-titre). DEATHLESS LEGACY s’impose de belle manière !

Photo : Andrea Falaschi (Frater Orion)
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Heavy metal Progressif

Pyramid : une structure inébranlable

Le casting réuni sur « Rage » fait encore des merveilles sur ce cinquième album du groupe new-yorkais. Grâce à un trio vocal de haut vol accompagné de musiciens à la technicité et au feeling imparables, PYRAMID réussit le tour de force de livrer une réalisation très aboutie, inspirée et remarquablement bien produite. Un modèle de Fusion progressive et Heavy.

PYRAMID

« Rage »

(Sleaszy Rider Records)

Fondé à New-York en 2017 par le bassiste Lance Sawyer, PYRAMID fait partie de ces supergroupes, ou plutôt projets car les lines-up sont changeants, qui fascinent et régalent les amateurs de virtuoses du Metal. Dans un registre assez progressif, l’identité du groupe est très Heavy et n’est pas sans rappeler Savatage ou même Dream Theater. Et l’ensemble sur « Rage » atteint encore des sommets.

Autour de son bassiste se tient le noyau dur de PYRAMID, à l’œuvre depuis les débuts, et constitué de Chris Quirarte (batterie), Adam Bentley (guitare) et Joey Izzo (claviers). Redoutables et expérimentés, ces quatre-là reçoivent leurs invités comme il se doit et « Rage » est déjà la cinquième réalisation du collectif. Un rythme d’enfer mené avec habileté, talent et fermeté de bien belle manière.

Au chant, ce nouvel opus présente Tim ‘Ripper’ Owens (ex-Judas Priest), Andry Lagiou (The Harps) et Harry Conklin (Jag Panzer), et accueille aussi le guitariste de Fates Warning Mike Abdon. Sur 85 minutes, PYRAMID livre de très bons titres (« Greed », « Empty Roads », « Control », « Beast », « Slayer »), mais on retiendra surtout le morceau final, « Dungeons And Dragons »… et ses 20 minutes. Eclatant et épique, il clôt « Rage » brillamment.

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Heavy metal Progressif

Ellefson-Soto : addition de talents

Passé un peu inaperçu un peu partout, il serait pourtant dommage de faire l’impasse sur cette première collaboration d’ELLEFSON-SOTO, « Vacation In The Underworld ». Le bassiste et le frontman se sont entourés d’un guitariste au jeu fougueux et incisif et d’un batteur pointilleux. Mélodique et percutant, cette entrée en matière est brillante à bien des égards.

ELLEFSON – SOTO

« Vacation In The Underworld »

(Rat Pak Records)

Evincé l’an dernier de Megadeth suite à des accusations d’échanges à caractère sexuel sur Internet, finalement peu en phase avec ses activités de pasteur de l’église luthérienne, David ELLEFSON n’a pas mis longtemps à se remettre en selle. Alors que le premier album de Dieth, supergroupe Thrash/Death récemment créé, sortira l’année prochaine, c’est avec son ami Jeff Scott SOTO qu’il s’est associé pour ce projet Heavy Metal aux contours progressifs.

Très dynamique et parfaitement produit par Chris Collier (Korn, Prong), ce premier effort tient toutes ses promesses, ce qui n’est d’ailleurs pas très surprenant quand on connait le jeu d’ELLEFSON et la puissance vocale de SOTO. Tout en variation, « Vacation In The Underworld » se veut fédérateur avec des mélodies imparables, des rythmiques passant du Rock au Thrash avec quelques échos assez Prog. Le duo n’élude rien.

Brillamment accompagné par les Italiens Paolo Caridi à la batterie et Andy Martongelli (Arthemis) à la guitare et aux claviers, ELLEFSON-SOTO s’affiche comme un quatuor tonique et créatif et il faut vraiment souhaiter que cet opus soir le premier d’une longue série. A noter la belle présence de la chanteuse Jade Etro (Frozen Crown) sur « The Day Before Tomorrow » et du tandem de Flotsam & Jetsam, Steve Conley et Ken Mary, sur le morceau-titre. Enthousiasmant !

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Heavy metal International

Leather : icône Metal [Interview]

Authentique et sincère, Leather Leone a le Heavy Metal chevillé au corps et demeure son porte-voix depuis plus de trois décennies maintenant. Avec une puissance vocale intacte et une envie qui semble décupler à chaque album, la frontwoman américaine sort son troisième album en solo, « We Are The Chosen », véritable plaidoyer à ce style qu’elle incarne littéralement. Avant d’entamer les concerts, LEATHER revient sur son parcours et sur cette nouvelle réalisation. Entretien.

Photo : Rockin Ryan Richardson and Marisol Richardson

– Notre première et unique interview date de 1989 pour la sortie de « Shock Waves » et pour avoir suivi ta carrière, ce qui m’étonne le plus, c’est que ta voix n’a pas changé. Comment fais-tu pour conserver une telle puissance et une telle énergie ?

Merci beaucoup. C’est une sorte de force primale qui me traverse quand j’entends une guitare électrique ! Sinon, je fais du cardio, je bois des quantités incroyables d’eau, je travaille ma voix (parfois) pendant 30 à 40 minutes avec un bon volume sonore et j’essaie bien de dormir. Mais c’est vrai que c’est une bénédiction de posséder une telle puissance.

– A cette époque-là, tu chantais dans Chastain avec David, avec qui tu as sorti de très bons albums comme « The 7th Of Never » ou « The Voice Of The Cult ». Et après « For Those Who Dare », tu as fait un long break de 20 ans. Pour quelles raisons as-tu quitté la scène à ce moment-là et pendant si longtemps ?

Je voulais que le groupe développe un Metal plus agressif. Mais je n’ai pas eu beaucoup de chance, car personne n’était intéressé par ce nouveau projet. Comme je ne suis pas du genre à faire des compromis, pour quelque raison que ce soit, je suis partie. Cependant, je suis fière de la marque que j’ai laissée avec Chastain. Cela n’a pas vraiment été un gros problème, et puis le temps s’est écoulé. Au final, je voulais prendre six mois de congés, et puis…

– Ensuite, tu es revenue toujours au sein de Chastain pour deux albums avant de sortir « Leather II » il y a cinq ans. A quel moment, as-tu ressenti le besoin de continuer en solo, ou en tout cas avec un autre groupe et sous ton nom ?

C’est juste parce que j’ai encore pas mal de choses à dire. Et je voulais écrire mes propres chansons, faire mon propre truc. Je n’avais jamais réalisé à quel point je ressentais cela jusqu’à ce que l’opportunité se présente. J’ai rencontré Vinnie Tex et le chemin s’est ouvert à moi. On écrit bien ensemble, il me comprend musicalement. Et je suis très excitée sur ce que nous réserve l’avenir.

Photo : Rockin Ryan Richardson and Marisol Richardson

– Te voici de retour avec « We Are The Chosen », dont le titre est lourd de sens. On y décèle beaucoup de motivation et de persévérance. On a le sentiment que tu as du faire face à de nombreux obstacles pour parvenir à tes fins. C’est le cas ?

Oui, comme tout le monde, je pense… La vie est un voyage permanent où on essaie d’aller quelque part… Beaucoup de situations ont changé pour moi musicalement en 2019. J’ai juste pris une profonde respiration et j’ai avancé. J’avais déjà tout ça en tête depuis un certain temps. Ca a été un vrai soulagement de pouvoir l’exprimer à travers le Metal. Et je savais que tout le monde me comprendrait : « Nous sommes les élus » !

– Parlons des musiciens qui t’accompagnent et notamment du Brésilien Vinnie Tex avec qui tu as travaillé en étroite collaboration sur l’album. Comment vous êtes-vous rencontrés et quel a été le déclic de cette complicité qui paraît si évidente ?

J’ai rencontré Vinnie en 2016 lors d’une tournée en Amérique du Sud avec Rob Rock. Nous sommes devenus amis. Finalement, c’était la seule personne qui était à mes côtés. Et nous étions tous les deux un peu incertains quant à nos efforts musicaux respectifs… (Rires) Mais nous avons vite découvert que nous étions sur la même longueur d’onde artistiquement. Nous sommes deux personnes complètement différentes, mais nous nous retrouvons totalement dès qu’il s’agit de Metal. Je suis bénie !

– On sent aussi que ton amour pour le Heavy Metal est toujours intacte et très vivant même ! « We Are The Chosen » sonne très actuel et pourtant il y a ce côté intemporel que d’aucun appelle ‘Old School’. On te sent presqu’imperméable aux modes d’ailleurs. Est-ce que tu gardes un œil sur ce qui se fait de nouveau en matière de Metal, et pas uniquement de Heavy ?

Oui, un peu. Je suis une grande fan de Metal extrême. Ma playlist Spotify est composée d’Arch Enemy, Jinjer, Lamb of God, Spiritbox et bien sûr Dio !! L’agressivité du Metal d’aujourd’hui est tout simplement fantastique… Elle me nourrit énormément.

Photo : Rockin Ryan Richardson and Marisol Richardson

– Ce troisième album contient des morceaux très forts et très caractéristiques de ton style et aussi de ta carrière comme « We Take Back Control », « Who Rules The World » ou « Off With Your Heart ». On a presque l’impression que « We Are The Chosen » est une ode au Heavy Metal originel et à sa vitalité malgré les années qui passent…

Merci beaucoup. C’est ce que je fais depuis toujours. En fait, je n’ai jamais entrepris d’écrire de la musique de telle ou telle manière… C’est juste ce que je suis. Et je le fais fièrement.

– Il y a aussi « Hallowed Ground » qui est dédié au grand Ronnie James Dio, qui est une influence majeure chez toi et que tu as croisé à de nombreuses reprises. Ca t’a paru une évidence de lui consacrer un morceau ?

Oui, et c’est toujours le cas. Quand j’ai l’opportunité de créer, il est là avec moi. Son influence sur moi est stupéfiante, c’est vrai. La moindre des choses que je puisse faire, c’est du Metal pour lui, pour lui dire merci.

Vinnie Tex

– Pour parler de la production de l’album, comment une chanteuse américaine et un guitariste brésilien se retrouvent-ils en Pologne pour enregistrer un disque ? C’est quelque chose de peu banal…

J’ai donc rencontré Vinnie en 2016 sur la tournée de Rob Rock avec qui il jouait. Et nous avons fini par faire « II » ensemble. A ce moment-là, on était sur la route, près de la Pologne, et on a décidé de refaire quelques pistes vocales sur l’album. Vinnie était en relation avec les studios Hertz, puisqu’il a une grande expérience du Metal extrême. Ils m’ont invité et l’expérience a été exceptionnelle. Le Metal est imprégné jusque dans les murs du studio, grâce à des groupes comme Behemoth, Vador, Hate… Il y avait un réel sentiment de créativité et de détente, et c’est exactement ce dont j’avais besoin et aussi de faire partie d’une telle équipe.

– J’aimerais que tu nous dises un mot sur la pochette de « We Are The Chosen », qui est signée Marcelo Vasco qui a aussi travaillé pour Slayer, Kreator et Testament. Là aussi, tu avais le désir de perpétuer une certaine tradition ?

J’aime les icônes et l’imagerie du Metal extrême. Ma vie musicale à ce moment-là était si chaotique que c’était exactement ce qu’il me convenait. Et puis, c’est un ami de Vinnie. Je lui ai envoyé la photo et je lui ai demandé s’il pouvait essayer de créer quelque chose de légèrement démoniaque, un peu dérangé… et il a réussi ! Je suis tellement fière de l’avoir maintenant dans mon équipe !

– Enfin, on sent une grande fraîcheur sur ce nouvel album et beaucoup d’envie surtout. Il dégage beaucoup de force comme si tu nourrissais ces morceaux depuis un long moment, malgré leur spontanéité. Tu dois être vraiment impatiente d’aller le défendre sur scène, j’imagine…

Oh oui ! C’est mon objectif principal… Tourner, tourner, tourner ! D’ailleurs, je vous invite à me suivre sur les réseaux sociaux, je les actualise au fur et à mesure que les dates s’ajoutent. Et encore un immense merci à vous tous pour votre soutien à « We Are The Chosen » !

L’album de LEATHER, « We Are The Chosen », sera disponible le 25 novembre chez Steamhammer/SPV.

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Doom Heavy metal

Candlemass : l’essence du doom

Sinistre, théâtral ou hargneux, le Doom de CANDLEMASS agit toujours comme par magie et comme au premier, où ses fondations prenaient forme sur un « Epicus Doomicus Metallicus » devenue la référence du genre. Et c’est justement sur leurs racines que se sont penchés les Suédois usant de la force et de la précision qui ont forgé leur légende.

CANDLEMASS

« Sweet Evil Sun »

(Napalm Records)

En phase de boucler leur quatrième décennie d’existence, les Suédois continuent sur leur lancée et c’est sous le line-up établi en 1987 qu’ils présentent le massif « Sweet Evil Sun », leur treizième album studio. Grand architecte du Doom, CANDLEMASS n’est toujours pas à bout de souffle et il faut reconnaître que le retour de son chanteur Johan Längquist depuis l’opus précédent fait beaucoup de bien.

Sans surprise mais toujours aussi imposant, le Doom des Scandinaves libère de multiples atmosphères très prenantes et d’une lourdeur écrasante. Grâce à la production très organique de Marcus Jidell (guitariste d’Avatarium, groupe créé par Leif Edling), « Sweet Evil Sun » fait trembler les murs tout en évoluant dans les brumes épaisses du Heavy Metal tellement identifiable de CANDLEMASS.

Toujours guidé par son leader, fondateur et bassiste Edling, le quintet peut compter sur la frappe et le groove de Jan Lindh (batterie). Cependant, c’est le travail effectué sur les guitares qui transcende ces nouveaux titres. Les riffs de Mats Björkman combinés aux solos sauvages de Lars Johansson donnent ce relief si particulier à CANDLEMASS depuis 38 ans maintenant.

Quant à « Sweet Evil Sun », il nous ramène en partie aux premières heures du groupe. Dès « Wizard Of The Vortex », la puissance se fait sentir tout comme sur le morceau-titre. CANDLMEMASS délivre majestueusement son Doom épique sur « Scandinavian Gods » et sur « When Death Sighs », où la chanteuse Jennie-Ann Smith d’Avatarium méritait bien plus que quelques mots sur le refrain. Pas essentiel, mais solide.

Photo : Linda Åkerberg