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Knuckle Head : une liberté absolue [Interview]

Les Alsaciens de KNUCKLE HEAD ont créé leur propre style : la Dark Country. A base de Country bien sûr, de Southern Rock et de Stoner, l’incandescence de leur musique est manifeste et prend toute son ampleur en concert. Loin des stéréotypes, le duo travaille à l’ancienne, en analogique, et son nouvel album, « Holsters And Rituals », est véritablement pensé et taillé pour la scène, qui reste leur terrain de jeu favori. Rencontre avec Jock, batteur virevoltant, libre et puissant de ce combo hors-norme.    

– Pour vous resituer un peu, KNUCKLE HEAD a sorti un premier EP, « First Drive » en 2016, puis l’album « II » en 2019 et aujourd’hui « Holsters And Rituals ». Pourquoi êtes-vous restés indépendants toutes ces années ? Des labels ont pourtant du se manifester, non ? C’est pour conserver une liberté artistique totale ?

Exactement, c’est pour garder notre liberté. On travaille avec Dominique Bérard de Muzivox, qui fait le travail de tourneur-manageur, car nous n’avons pas ces contacts-là. Comme nous, il est aussi en indépendant, ce qui fait que nous sommes vraiment en famille. Et on garde aussi notre droit à l’image. On n’a jamais eu ce genre de contrat, et on ne veut pas ce que cela change. Il y a tellement de groupes qui changent au fil des années à cause du marketing. On veut rester seul à faire notre truc.

– D’ailleurs, un petit mot sur la campagne de crowdfunding mise en place pour ce nouvel album, qui a d’ailleurs très bien fonctionné. Vous pensez que cela peut devenir une solution viable sur le long terme ?

On évite quand même ce genre de projet, mais cet album nous a énormément tenu à cœur. Et pour sa progression, on a été malheureusement obligé de le faire comme ça. Là où nous avons été surpris, c’est par la fan-base, car tout a été très vite. Nous sommes très satisfaits et nos fans aussi. Pour le long terme, comme nous partons sur une certaine indépendance, il y a aura un moment où nous aurons de l’argent de côté pour le mettre nous-mêmes. L’avantage avec ce système est bien sûr la précommande, car les gens ont pu réserver le vinyle et les boxes en version très limitée, car cela est parti très vite. C’était mieux pour eux. Mais sur le long terme, on évitera de faire ce genre de campagne. C’est aussi beaucoup de travail, car on fait tout nous-mêmes, même si ça reste un plaisir !  

– Comme votre nom l’indique, vous faites partie du monde des bikers. En quoi cela vous inspire et qu’est-ce qu’il évoque plus largement et musicalement ?

C’est le symbole de la liberté ! La moto est un plaisir et une liberté absolue. C’est aussi un moyen d’évacuer, d’oublier ses problèmes et c’est exactement le même principe que lorsque je suis sur ma batterie. C’est un réel exécutoire ! C’est ce qui touche vraiment à notre musique. Les deux ont un rapport très, très fort, d’où le nom du groupe.

– L’une de vos particularités est aussi d’évoluer en duo. C’est un choix qui s’est imposé de lui-même ? Ca ne vous intéresserait pas de jouer au sein d’une formation plus conséquente ?

Non, car notre son est suffisamment travaillé pour qu’il n’y ait pas ce manque justement. Sur scène, Jack bosse avec trois amplis : un Fender, un Orange, un ampli basse et tout est branché ensemble. Et puis, le fait d’être à deux comporte beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients, parce qu’on fonctionne un peu comme un couple. Il n’y a jamais eu de souci entre nous, et les choses se règlent beaucoup plus simplement. Pour caler une date, il suffit très souvent d’un seul coup de fil et c’est bon. Par ailleurs, Jack fait partie de ma famille, comme je fais partie de la sienne : il est comme mon frère !  

– Ce qu’il y a de surprenant chez KNUCKLE HEAD, c’est que vous intégrez à peu près tous les styles de musique peu représentés en France, comme la Country même si elle est Dark, ainsi que certains aspects d’Americana en version très musclée et du Stoner bien sûr. Comment avez-vous bâti votre univers sonore au départ ?

Cela a été beaucoup de recherches au fil des années, en fait. On voulait faire quelque chose qui se démarquait des autres. A l’époque, j’étais très Country avec Johnny Cash, Willie Nelson et d’autres, et Jack était très Stoner et Sludge. On a commencé à mélanger tout ça pour obtenir, et je le dis sans narcissisme, sans doute notre meilleur album aujourd’hui. Le temps passe, on mûrit et on arrive à se trouver parfaitement. Nous avons travaillé deux ans sur cet album et j’en suis vraiment très fier. Il représente vraiment le Stoner et la Country mélangés.

– Vous qui tournez beaucoup, comment s’est déroulé l’enregistrement de « Holsters And Rituals » ? Vous avez réalisé l’essentiel de l’album lorsque tout était à l’arrêt ?

Oui et finalement, cela a été un grand avantage, bien plus qu’un inconvénient. On a eu beaucoup de temps pour tout préparer. Il y avait aussi beaucoup moins de stress. Comme nous faisons tout nous-mêmes, c’est assez tendu parfois d’enchainer les concerts, de revenir le lendemain en studio, puis repartir, etc… Là, on a eu tout notre temps pour travailler sur l’album. Ca s’est super bien passé, même si cela a été énormément de travail, car nous avons aussi enregistré tout en analogique sur bande. Tout est fait à l’ancienne et en direct, c’est-à-dire batterie et guitare dans un premier temps, les voix et les arrangements arrivant après. Alors, si tu foires ta prise, c’est toute la bande qui est à jeter. Et puis, nous jouons sans click. Il y a un peu plus de stress, mais cela te donne une autre qualité sonore que peu de gens connaissent finalement.

– Un petit mot aussi sur la production de l’album, qui est particulièrement massive et qui, je trouve, reflète parfaitement l’énergie de vos concerts. C’était important pour vous de restituer un son finalement très live et assez brut ?

Ah oui ! Je pars du principe que nous ne sommes pas un groupe à écouter en streaming. On est un groupe à voir en live ! Quand on construit la tracklist de nos albums, tout est d’abord travaillé pour le live. Il faut toujours garder cette énergie et ce son-là avec ce bourdon venant de l’ampli de Jack. On nous dit souvent qu’il ressemble à un gros nid d’abeilles. Il faut que les gens qui ne peuvent pas nous voir ressentent l’énergie des morceaux.

– Par ailleurs, les arrangements de « Holsters And Rituals » sont particulièrement soignés et offrent beaucoup de profondeur et de relief à l’album, et lui confère une ambiance singulière. Même si vous n’êtes que deux, ce troisième opus est dense et très riche. En plus d’être efficaces, vous semblez aussi très pointilleux…

Exactement. On ne voulait pas faire un album remplis d’arrangements derrière, car il fallait qu’on puisse le faire en live. Sur scène, Jack travaille avec des samples et il fonctionne avec un système de pédaliers, donc c’est comme jouer du piano. En concert, les gens sont très surpris, car ils ont le sentiment que nous sommes beaucoup plus nombreux. En fait, c’est ce qui a été le plus à travailler, car il fallait pouvoir tout contrôler et garder ces mêmes arrangements en concert. On a passé des jours de résidence à jouer et répéter 7/7 jours, et nous sommes aujourd’hui très fiers du résultat. Le retour des gens est incroyable et ça me fait un immense plaisir, car on se cale sur eux ! Quand on a autant de retours positifs, constructifs, de la bonne humeur et de la bonne entente, c’est sublime ! Je ne peux qu’être fier.

– Il y a également un guest de renom sur l’album avec la présence au chant d’Albert Bouchard, ex-Blue Öyster Cult, sur le morceau « Existential Anger », qui est aussi un moment fort du disque. Comment cela s’est-il passé ? Vous vous connaissiez déjà ?

Pas du tout, c’était n’importe quoi ! (Rires) Lorsqu’on a rencontré Dominique, notre patron actuel chez Muzivox, on parlait des groupes que l’on aimait. Je lui ai dit que, pour moi, il y a avait Depeche Mode, Black Sabbath et Blue Öyster Cult. Et il m’a dit qu’il avait travaillé pendant 15 ans avec Blue Öyster Cult. Et lors des pré-prod’ de l’album, je lui ai demandé s’il pensait que ce serait possible de faire un featuring avec l’un des membres du groupe. Il m’a dit qu’Albert Bouchard, l’un des fondateurs, était un très bon ami. Il lui a envoyé un mail, alors qu’il enregistrait son album à San Francisco. Et trois jours après, je recevais sa réponse et c’était carrément fou ! (Rires) J’en ai chialé le matin au réveil lorsque je l’ai lu. Il était hyper-positif en disant : « Ces mecs sont super bons. La musique est phénoménale et ce serait bien sûr un plaisir et un honneur de pouvoir chanter pour eux ». Ca s’est fait comme ça, et c’est pour moi le summum ! C’est l’une des grandes fiertés de l’album, c’est clair !

– Enfin, vous êtes un groupe de scène comme on en trouve assez peu en France. J’imagine que vous avez déjà pu interpréter une bonne partie de ce nouvel album en concert. Quel est l’accueil fait aux chansons ? Se fondent-elles facilement dans le reste de la set-list ?

On a été assez surpris, car l’album change quand même des précédents, même si nous nous sommes vraiment trouvés sur celui-ci. Il y a toujours cette touche KNUCKLE HEAD qui est là, mais en beaucoup plus sombre et plus Stoner aussi, voire un peu psyché, gothique et occulte dans un certain sens. Et l’accueil est très bon. Au départ, on avait un peu peur pour le visuel sur scène, car il y a des vitraux et une grande croix derrière, et puis aussi avec celui de l’artwork de l’album. L’ambiance générale est beaucoup plus sombre qu’auparavant. Après un an de travail là-dessus, le retour des gens est vraiment incroyable ! Et honnêtement, je n’en reviens pas ! On est les seuls à faire cette musique en Europe, et elle est à nous… pour le moment (Sourires).   

L’album, « Holsters And Rituals » est disponible depuis le 18 mars chez Knuckle Head Prod (www.knuckle-head.com).

Retrouvez la chronique de l’album : https://rocknforce.com/knuckle-head-electric-road-trip/

Photos live prises le 16 octobre 2020 à la salle Cap Caval de Penmarc’h (29) par François Alaouret – Rock’n Force.

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Stoner Rock

Steak : céleste

Sobre et presqu’épuré, et tout en jouant sur une densité particulièrement maîtrisée, STEAK affiche une ambition à la hauteur de son inspiration… très élevée. Le quatuor anglais absorbe des codes Stoner pour mieux se les approprier, variant la puissance de ses guitares, la souplesse de son duo basse/batterie et présentant un chant solaire sur lequel les voix de Chantal Brown (Vodun) et Tom Cameron (ex-Crystal Head) ajoutent une dimension quasi-mystique. Parfaitement produit, « Acute Mania » est un modèle du genre, un mètre étalon.

STEAK

« Acute Mania »

(Ripple Music)

Avec ce troisième album, les Londoniens de STEAK viennent définitivement assoir leur talent et leur influence devenue majeure sur la scène européenne du Stoner Rock. Depuis bientôt 15 ans, le quatuor se forge un style original, mélodique et surpuissant, s’affranchissant de belle manière des références assez naturelles et presqu’instinctives de ses débuts. Et en pionnier du registre en Angleterre, c’est aujourd’hui avec le statut de fer de lance que le groupe livre « Acute Mania ».

Après avoir fait ses armes en indépendant sur une série d’EP, puis avec « Slad City » (2014) et « No God To Save » (2017), STEAK affiche dorénavant une identité unique et singulière, loin des stéréotypes Stoner habituels. Edifié sur des riffs massifs et aériens, des rythmiques soufflant le chaud et le froid et intégrant même des percussions et surtout sur des parties vocales à couper le souffle, « Acute Mania » devient très vite addictif.  

Dès « Wolves », STEAK pose les jalons de ce nouvel album. Départ planant et en douceur sur la voix envoûtante de son chanteur Kippa avant une explosion de décibels libératoire, qui annonce déjà ce que nous réserve ce nouvel opus. Grâce à une chaleur Blues très Desert Rock, le Stoner des Britanniques offre une variété de sonorités incroyables entre puissance et délicatesse (« Ancestors », « Last Days », « System », « Mono »). Epoustouflant et monumental !   

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Stoner Rock

[Going Faster] : Greyborn / Yojimbo

Parce qu’il y a beaucoup, beaucoup de disques qui sortent et qu’il serait dommage de passer à côté de certains d’entre eux : [Going Faster] se propose d’en mettre plusieurs en lumière… d’un seul coup ! C’est bref et rapide, juste le temps qu’il faut pour se pencher sur ces albums, s’en faire une idée, tout en restant toujours curieux. C’est parti !

GREYBORN – « Leeches » – F2M Planet

Après le split du très bon groupe de Stoner Blues Mama’s Gun, qui avait pourtant pris un départ enthousiasmant, Théo Jude (chant, batterie) et Guillaume Barrou (basse) n’ont pas tardé à se remettre à la tache pour fonder GREYBORN. Rejoints par Maxime Conan (guitare) qui œuvre aussi chez Blackbird Hill, le trio évolue dans un Stoner Rock assez sombre et Heavy. Si le propos n’est pas franchement chaleureux, il montre un visage volontaire sur cinq morceaux assez directs et solides. Même si GREYBORN n’en est qu’à ses premiers émoluments musicaux, on perçoit dans l’épaisseur des riffs et la massive rythmique toute l’expérience du combo, dont le jeu doit prendre une toute autre dimension sur scène.

YOJIMBO – « Yojimbo » – Independant

Premier EP intergalactique pour le combo strasbourgeois YOJIMBO, qui distille un Stoner Rock efficace et profond. Jouant sur la lourdeur des riffs et des tempos, le quatuor propose  des morceaux accrocheurs où la voix de sa chanteuse navigue habillement entre une obscurité pesante et des éclats très lumineux. Très bien produit, ce premier effort éponyme montre une belle variété où le Fuzz se frotte au Doom avec quelques pointes Psych. YOJIMBO traverse des atmosphères spatiales entre mid-tempos et crescendos appuyés avec une belle assurance, en nous propulsant parfois même dans des ambiances post-Rock créatives et dynamiques. Vite, la suite !

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Heavy Psych Rock Stoner Rock

Jack And The Bearded Fishermen : contre vents et marées

Un vent de liberté souffle sur ce quatrième album de JACK AND THE BEARDED FISHERMEN, et l’univers dans lequel nous plonge « Playful Winds » regorge de nuances et d’inattendu. Le Heavy Rock teinté de Psych, de Stoner et d’un soupçon d’Indie du quintet français n’a aucune limite et il s’amuse habillement sur des contrastes saisissants.  

JACK & THE BEARDED FISHERMEN

«Playful Winds »

(Independant)

S’il s’est passé huit longues années entre « Minor Noise » et le tout nouveau « Playful Winds », c’est que les membres de JACK AND THE BEARDED FISHERMEN étaient bien occupés avec Horskh, Red Gloves et Go Spleen, groupes dans lesquels œuvrent certains d’entre-eux. Mais le quintet de Besançon est bel et bien de retour, et ce quatrième album vient confirmer un style toujours plus personnel.

Bruyant et épais de prime abord, « Playful Winds » se révèle être une réalisation très riche et organique où les détails se cachent souvent derrière des arrangements soignés et pertinents. Avec un line-up brut composé d’une rythmique basse/batterie, de trois guitares et de deux voix, JACK AND THE BEARDED FISHERMEN possède tous les arguments pour aborder les ambiances et les tessitures avec une grande liberté.

De profondeur et de relief, le groupe n’en manque pas. Mieux, il en joue au point de se faire hypnotique tout en restant tranchant et percutant (« Beware Of Birds », « From Above », « Lips As Martyr », « Silent Film »). Sur un Heavy Rock solide où s’invitent des sonorités Stoner et Noise, JACK AND THE BEARDED FISHERMEN libère une énergie, où le Psych des Français vient très souvent créer la surprise.

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Sludge Stoner Metal

Witchpit : southern detonation

Particulièrement attentif au son et amoureux de matériel vintage, WITCHPIT parvient dès son premier album à se saisir de sonorités classiques pour offrir un Stoner Metal très Sludge décapant et sauvage. « The Weight Of Death » transpire l’authenticité et la démarche du quatuor de Caroline du Sud n’en est que plus légitime. Basé sur des textes engagés chantés par la voix roque et robuste de Denny Stone, le combo frappe fort d’entrée de jeu.  

WITCHPIT

« The Weight Of Death »

(Heavy Psych Sounds Records)

C’est avec une rage non-dissimulée que WITCHPIT sort son premier album, et force est de constater que le combo américain n’a jamais entendu parler des Bisounours…. à moins qu’il ne les ait avalé. Après un premier single en 2018 (« Infernal »), le groupe n’a eu de cesse de travailler à la rugueuse élaboration (mais pas seulement) de son Southern Sludge, qui s’inscrit dans un Stoner Metal revendicatif et surpuissant.

Grâce à la production profonde et pleine de relief de Phillip Cope (Kylesa), qui a entièrement réalisé l’album, on plonge sans retenue aucune dans le monde terriblement organique et forcené du quatuor. « The Weight Of Death » réunit à la fois toutes les composantes d’un Stoner Metal massif, d’un Sludge engagé, le tout sur un groove très Southern aux fulgurances Heavy Punk tranchantes. WITCHPIT affiche une force incroyable.

Dès les premières notes de « OTTR », on sent tout le poids de la guitare de Thomas White, par ailleurs, fondateur du groupe, qui transperce radicalement la rythmique pourtant épaisse de Zach Hanley (basse) et de Harold Smith (batterie). Résolument politique, ce premier album de WITCHPIT dénonce le fossé grandissant entre les élites et le peuple américain avec une perspective peu reluisante (« The Blackened Dee », « Autonomous Deprivation », « Mr Miserum »). Enragé !

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Blues Rock Psych Southern Rock Stoner/Desert

Knuckle Head : electric road-trip

Pour son troisième album, KNUCKLE HEAD a encore laissé parler sa créative liberté artistique pour livrer un nouveau chapitre de sa Dark Country. Sur la base d’un Southern Rock très roots mâtiné de Blues, de Stoner et autour d’un son très brut où l’équilibre se fait naturellement, « Holsters And Rituals » est accrocheur et intense. Quant à la production et les arrangements, ils rendent l’ensemble irrésistible.

KNUCKLE HEAD

« Holsters And Rituals »

(Independant)

Toujours aussi atypique et indépendant, KNUCKLE HEAD continue son bonhomme de chemin, façon road-trip fiévreux aux embardées mystiques. Tout en continuant à explorer la Dark Country qui a fait sa réputation, le duo alsacien a encore étoffé son jeu pour libérer sur ce très bon « Holsters And Rituals » une énergie Rock Blues très directe, rugueuse et envoûtante. Ce troisième album vient confirmer l’énorme potentiel du groupe, dont les concerts sont vibrants à souhait.  

Digne successeur de « II » sorti en 2019, ce nouvel opus nous propulse dans un univers toujours aussi sombre, où le côté très roots du duo ressort de manière volcanique sur les neuf morceaux. Les lourdes rythmiques se conjuguent aux riffs sauvages et KNUCKLE HEAD déroule un registre où les nuances Psych, Stoner et Hard Blues s’accordent de façon jubilatoire. Jack Crowes (guitare, chant) et Jock Alva (batterie) se sont encore surpassés et l’atmosphère est électrique.

Comme toujours, l’alchimie est au rendez-vous et les deux musiciens avancent dans une complicité qui rend leur style si Southern unique et entraînant (« The Right Way », « Ritual »). Laissant parler le Fuzz (« Living Deep/Into The Night »), KNUCKLE HEAD se fait intense et massif (« The Necromancier », « Burn ») et s’offre même le luxe d’accueillir l’ancien fondateur du Blue Öyster Cult, Albert Bouchard, sur le génial « Existential Anger ». Chaleureux et bouillonnant !

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Blues Rock Psych Rock Stoner/Desert

Dirty Sound Magnet : le psychédélisme à son paroxysme

Imprévisibles et insaisissables, les Suisses de DIRTY SOUND MAGNET prennent un malin plaisir, album après album, à brouiller les pistes, à surgir là où on en les attend pas pour développer un Psych Rock très Blues et 70’s tout en nuances, et où la richesse de leur écriture est aussi déconcertante que déroutante. Et « DSM – III » est un modèle du genre.

DIRTY SOUND MAGNET

« DMS – III »

(Hummus Records)

Très prolifique, le trio suisse de Psych Rock 70’s mêlé à un Blues Rock endiablé fait déjà son retour. Depuis 2017, DIRTY SOUND MAGNET s’en finit plus d’étonner par son inspiration, sa dextérité et sa façon de livrer un style au centre duquel le psychédélisme tient une place de choix, et où l’ombre des Doors surtout et de Led Zeppelin un peu, plane sur un groove imparable.

Dans la lignée d’une nouvelle génération portée par des formations comme Kadavar notamment, DIRTY SOUND MAGNET se détache grâce à un sens de l’improvisation et un esprit jam quasi-instinctif et d’une incroyable effervescence. Les Helvètes nous guident à travers des styles où le Rock côtoie le Blues et où le Stoner Psych n’est jamais bien loin. Une vision très live et dense.

Furieusement addictif, « DSM – III » nous plonge dans les méandres d’une musique aussi pointue que pointilleuse autour d’une douce folie très maîtrisée. Rock et Funk (« Pandora’s Dream »), Heavy Blues ou Boogie (« Heavy Hours ») et intensément Psych (« Toxic Monkeys », « Body In My Mind »), le trio se montre d’une grande et étonnante créativité (« Sunday Drama »). DIRTY SOUND MAGNET est d’une richesse inépuisable. 

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Doom Sludge

Crowbar : une puissance titanesque

Les maîtres du Sludge Metal sont enfin de retour avec un nouvel album, « Zero And Below », féroce et massif. Après une escapade en solo en 2020 (« Dream In Motion »), Kirk Windstein a rassemblé ses troupes pour une grand-messe imposante et fracassante. CROWBAR n’est pas prêt de lâcher le morceau… C’est même tout le contraire !   

CROWBAR

« Zero and Below »

(MNRK Heavy)

Prêt depuis presque deux ans, CROWBAR a rongé son frein et pris son mal en patience avant de livrer enfin « Zero And Below », son douzième album. Et il faut reconnaître qu’après plus de 30 ans de carrière, Kirk Windstein et ses hommes en ont encore sous le pied. Le Sludge du combo de la Nouvelle Orleans reste massif et rutilant. Les Américains n’ont pas leur pareil pour vous sauter à la gorge pour ne plus vous lâcher.    

Brutalement emmené par les riffs épais de Matthew Brunson et de Windstein, dont la voix est plus rocailleuse que jamais, la lourdeur de la basse du nouvel arrivé, Shane Wesky, et la férocité des coups portés sur ses fûts par Tommy Buckley, CROWBAR en appelle aux profondeurs abyssales d’un registre qu’il a tant contribué à forger et le porte aux nues. Cela ne fait aucun doute, le combo a mûrement pensé ce nouvel effort.

Entre un Doom menaçant et des fulgurances HardCore frénétiques (« Bleeding From Every Hole », « Reanimating A lie »), le quatuor fait parler la poudre sans pour autant être plombant. Grâce à la très organique production signée Duane Simoneaux, CROWBAR prend du volume tout en usant d’une finesse chirurgicale (« Chemical Godz », « Zero And Below », « Crush Negativity »). Ebouriffant et déjà classique !   

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Post-Metal Sludge

Kyoty : post-apocalyptique

Surprenant et captivant, ce deuxième album de KYOTY, duo atypique du New Hampshire, dépasse à peu près tout ce qui a pu être réalisé en termes de Sludge atmosphérique aux sonorités Indus. Le groupe arrive avec facilité à ensorceler son auditoire en parcourant des ambiances vacillant entre désespoir et coups de tonnerre. « Isolation » n’aura jamais aussi bien porté son nom.

KYOTY

« Isolation »

(Deafening Assembly)

KYOTY est un OVNI musical comme on en rencontre assez peu. Composé de Nick Filth (guitares) et de Nathaniel Parker Raymond (basse), le duo américain parvient à offrir des tessitures étonnantes à sa musique. Ayant testé plusieurs batteurs, c’est cette formation qu’a adopté le groupe, qui signe ici son deuxième album, « Isolation ».

Un album qui porte bien son nom, puisqu’il a été entièrement enregistré à distance durant les phases de confinements que le duo a aussi essuyé en 2020. Et le résultat est étonnant autant que bouleversant. Entièrement instrumental, « Isolation » s’étend sur 1h10 à travers dix titres puissants, témoins de l’état de la solitude vécu par KYOTY.

Le post-Metal enrobé de Sludge atmosphérique et d’ambiances et de sonorités obscures fait d’ailleurs assez froid dans le dos. Conçus par le groupe, la pochette est toute aussi éloquente et dépeint une lourdeur démonstrative et pesante. KYOTY possède un univers rare, évocateur et singulier et qui prend ici toute son ampleur. Une vraie réussite.

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Doom Stoner/Desert

Fostermother : atmosphères doomesques

La lumière qui régnait et se dégageait du premier album éponyme du trio américain a laissé place à une sorte de pénombre saisissante dans laquelle FOSTERMOTHER se meut avec une aisance assez déconcertante. « The Ocean » s’inscrit dans son époque et l’heure n’est plus à la réjouissance, mais à un Doom solide et lancinant.

FOSTERMOTHER

« The Ocean »

(Ripple Music)

En juillet 2020, les Texans avaient déjà impressionné grâce à un premier album très réussi. En dehors d’un changement de batteur avec l’arrivée de Jason Matomedi derrière les fûts, FOSTERMOTHER est toujours guidé par son leader, le chanteur et guitariste Travis Weatherred, dont les compositions sont de plus en plus pertinentes à travers un Stoner Doom toujours plus maîtrisé.

Le trio d’Austin se montre cette fois beaucoup plus massif, lourd et pesant que sur son premier album éponyme. « The Ocean » traite de l’isolement et de ses conséquences. De fait, FOSTERMOTHER affiche un côté plus sombre, plus Doom et loin des touches Heavy et Fuzz, qui ont depuis disparu. Très efficace et aussi très enveloppant, ce deuxième opus n’est pas des plus optimistes.

Le volume de la rythmique et l’épaisseur des riffs donnent l’impression d’une brume omniprésente, qui rend les morceaux de « The Ocean » très compacts et presqu’oppressants. FOSTERMOTHER développe sur ce deuxième album un son identifiable et très personnel, qui le rend même assez inconfortable par moment. Le trio américain affiche une force et une détermination décuplées. Dur et obscur.