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Blues Soul / Funk

The Boneshakers : funky vibes

Rayonnant et électrisant sont les deux sentiments qui émergent de l’écoute de « Live To Be This », le nouvel opus de THE BONESHAKERS. Les Américains ont vu les choses en grand et entre duos, featurings et un esprit funky chevillé au corps, c’est un large panorama du Blues qui prend vie sur cette belle production. Groovy et cuivrée à souhait, c’est l’une des plus savoureuses du genre de l’année, dotée d’un esprit Soul irrésistible et d’une vivacité omniprésente.

THE BONESHAKERS

« Live To Be This »

(Gulf Coast Records)

Avec ce onzième album, le guitariste de Detroit Randy Jacobs et la chanteuse californienne Jenny Langer font une fois de plus parler la poudre et il se pourrait bien que « Live To Be This » soit même le meilleur disque des BONESHAKERS. Alliage de Blues et de Funk où vient s’inviter un Rythm’n Blues incandescent, on se balade ici entre la Motor City, Muscle Shoals et Memphis. De l’amour, du punch et de la Soul, tout cela resplendit grâce à ce duo hors-norme, qui a concocté une tracklist de rêve.

Alors que THE BONESHAKERS a accompagné la saxophoniste et chanteuse Mindi Abair le temps de nombreuses tournées et de plusieurs enregistrements, la renaissance vient sans doute de l’arrivée au chant de Jenny Langer sur « One Foot In The Groove » (2023). Etincelante, elle donne encore le meilleur sur « Live To Be This », constitué de titres originaux et de reprises aussi méconnues que surprenantes. Mais à travers les 14 chansons, le voyage est beau et surtout, il traverse plusieurs contrées musicales avec la même force.

Et afin de rendre cette nouvelle réalisation encore plus lumineuse, le tandem moteur de THE BONESHAKERS a convié quelques invités de renom. Dans ce beau feu d’artifice se succèdent Bobby Rush, Don Was, Charlie Musselwhite, Coco Montoya et Greg Bissonette derrière les fûts. Pour les covers, le groupe dépoussière et dynamise des chansons de Betty Davis, Iggy Pop, Jimmy Hall, Ike et Tina Turner, Screamin’ Jay Hawkins ou encore The Fabulous Thunderbirds. Eclectique, sensuel, puissant et soigné, les sensations exultent.

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Contemporary Blues Delta Blues

The Kerry Kearney Band : psychedelta touch

Multi-récompensé et incroyable ‘slideman’ devant l’éternel, KERRY KEARNEY revient avec son BAND pour un disque entraînant et chaleureux où il s’est entouré d’un groupe redoutable. En véritable bluesman, il partage ici encore sa musique, celle d’autres aussi, dans une harmonie musicale renversante. Le chant, l’harmonica, les claviers et ses guitares prennent un relief incroyable à travers un Blues contemporain, souvent Rock et toujours sensible à vous donner la chair de poule. « The Kerry Kearney Band » est un moment de bonheur partagé.

THE KERRY KEARNEY BAND

« The Kerry Kearney Band »

(Paradise Records)

Incontournable maître de la slide basé à Long Island, KERRY KEARNEY est tombé très tôt dans la marmite du Blues et n’a pas tardé ensuite à partager la scène avec les plus grands, dans des styles d’ailleurs souvent différents, allant du groupe de Marty Balin, l’ancien chanteur du Jefferson Airplane au Allman Brothers Band, ou Dickey Betts et les Blues Brothers. Autant dire qu’il est à l’aise dans tous les registres et que rien ne lui résiste. Et sur ce nouvel opus, l’éventail est une fois encore large et toujours d’une classe resplendissante.

Entouré d’un groupe de haut vol, constitué de Jack Licitra (claviers), Gerry Sorrentino (basse), Mario Staiano (batterie) et Nydia Mata (congas, percussions), le KERRY KEARNEY BAND a franchement belle allure, d’autant que l’Américain accueille des invités de choix : Mark Mancini (claviers), Bill Lifford (harmonica), Camryn Quinlan (chant) et Jeff Namoli (percussions). De son côté, il dirige l’ensemble à la guitare électrique, acoustique et slide, à la mandoline et au chant de sa voix rugueuse. De quoi fondre sur place…

Pour cet album éponyme, il se présente avec sept compositions originales et trois reprises de Bobby Rush, Warren Zevon et même Bob Dylan avec « Meet Me In The Morning ». Et si « The Kerry Kearney Band » se montre d’un éclectisme volcanique, la ligne directrice est claire : prendre et donner du plaisir ! On se délecte de « Harder To Breathe » et « Santa’s Got A Brand –New Bag » chantés par Camryn Quinlan, décidemment somptueuse. Et que dire du virevoltant jeu de KERRY KEARNEY, qui enflamme cette belle réalisation ? Irrésistible !

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Hard Blues

The Dead Daisies : reloaded Blues

Chaleureux, frais et spontané, « Lookin’ For Trouble » vient s’inscrire dans les très bons albums de Hard Blues. Pourtant, le quintet américano-australien livre un disque de reprises un peu éloigné de ce qu’il propose habituellement. Seul l’actuel line-up de THE DEAD DAISIES était en mesure de produire un tel album et il l’a fait avec la forme et sans dénaturer le fond. La sensation organique qui s’en dégage est tout simplement radieuse. Un entremet qui fait un bien fou et qui remet pas mal de choses à leur place.

THE DEAD DAISIES

« Lookin’ For Trouble »

(Malaco Records)

THE DEAD DAISIES a de la suite dans les idées, ou plutôt son producteur, Marti Frederiksen. Il y a quelques mois, le groupe avait investi le mythique Fame Studio de Muscle Shoals en Alabama pour y enregistrer « Light ‘Em Up », paru en septembre dernier. Et avec ce genre de musiciens, les surprises ne manquent jamais. Alors le soir, pour se détendre, ils jouaient de vieux standards de Blues (l’endroit s’y prête tellement !), et l’idée de capter ses sessions n’a pas été longue à germer. Nous voici donc avec « Lookin’ For Trouble » entre les mains. 

Une formation de ce calibre possède évidemment la culture nécessaire et, même si la majorité des morceaux fait partie du patrimoine du genre et a été reprise par beaucoup d’autres, c’est mal connaître la créativité de nos protagonistes. THE DEAD DAISIES s’est littéralement réapproprié les chansons en les réarrangeant de bien belle manière. Sans être issu de son propre répertoire, on retrouve ici une identité et une patte immédiatement identifiable. Quant au plaisir, on le perçoit à chaque note et sur chaque accord.

Alors quand Muddy Waters, Freddie King, Robert Johnson, BB King, Howlin’ Wolf ou Albert King passent au filtre de David Lowy (guitare), John Corabi (chant), Doug Aldrich (guitare), Michael Devin (basse) et Sarah Tomek (batterie), on atteint des sommets de classe et d’élégance. THE DEAD DAISIES prend de la hauteur et la cover de « Black Betty » par Ram Jam, par exemple, devient franchement risible en comparaison de celle-ci. Le Blues est plus éternel que jamais et « Lookin’ For Trouble » témoigne d’une incroyable vitalité. Une leçon !

Retrouvez les précédentes chroniques des albums de THE DEAD DAISIES :

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Blues Blues Rock Boogie Blues Contemporary Blues Soul Southern Blues

Carolyn Wonderland : une grande dame

L’intensité, qui se retrouve dans le mordant de son approche tant vocale que guitaristique, semble être une seconde nature chez CAROLYN WONDERLAND. La musicienne, qui avait véritablement pris son envol en solo il y a quatre ans avec le génial et audacieux « Tempting Fate » sur lequel elle jonglait avec sa Gibson et sa lap-steel, monte encore en émotion et en virtuosité dans un équilibre musical, qui doit beaucoup à une confiance acquise au fil du temps. « Truth Is » est une sorte d’apothéose, tant au niveau de l’écriture que de cette voix, où la puissance n’a d’égal que sa douceur. Monumental.

CAROLYN WONDERLAND

« Truth Is »

(Alligator Records)

CAROLYN WONDERLAND est une fine gâchette, cela n’aura échappé à personne, et sur ce deuxième effort chez l’institution Alligator Records, on prend pleinement conscience de ses talents de chanteuse et de compositrice. Une reconnaissance qui arrive peut-être un peu tard, mais qui est aujourd’hui incontestable. Elle qui a joué avec presque toutes les légendes Blues du Texas et qui a aussi effectué un beau et assez long passage au sein des Bluesbreakers de John Mayall, semble littéralement épanouie sur ce « Truth Is », marqué de son empreinte. Car la musicienne est loin de manquer de personnalité, bien au contraire.   

D’une rare polyvalence, elle fait un beau tour d’horizon des courants dans lesquels elle se retrouve… et il y en a ! Forcément très sudiste dans le jeu, on retrouve chez la Texane des notes de Soul, de Gospel, de Jazz, de Country et de Roots Rock, qui font de son Blues un refuge éclectique pour des saveurs chaleureuses et sincères. CAROLYN WONDERLAND a de nouveau confié la production de « Truth Is » à Dave Alvin, lequel sublime des compositions entraînantes, mais aussi très touchantes et toujours authentiques. On passe de sa ville natale de Houston à la Nouvelle Orleans, avec un crochet par Memphis, en un clin d’œil.   

Avec son inimitable picking, elle signe l’essentiel de cette nouvelle réalisation, tout en coécrivant quelques titres avec son producteur et Shelley King, et en s’offrant la liberté de reprendre « Wishful Thinking » (Greg Wood/Eddie Hawkins) et « Orange Juice Blues » (Richard Manuel pour The Band). Mais le plus beau et surtout le plus réjouissant vient de ses propres compositions et elles sont franchement renversantes (« Sooner Or Later », « It Should Take », « I Ain’t Going Back » avec Ruthie Foster et Marcia Ball, l’ensoleillé « Deepest Ocean Blue », le bouleversant « Blues For Gene » et la somptueuse chanson-titre. Incontournable.   

Photo : Mary Bruton

Retrouvez la chronique de « Tempting Fate » :

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Americana Blues Soul

Janiva Magness : in search of truth

Pour son 17ème album, celle qui compte sept Blues Music Awards dont le fameux BB King remis par la légende elle-même, nous plonge à la découverte de quelques trésors qu’elle a le don de régénérer en intériorisant les chansons pour les faire siennes. JANIVA MAGNESS est une interprète hors-norme et cette facilité à les personnaliser confère à ses reprises une authenticité toute flamboyante. Et si l’on ajoute le fait que « Back For Me » ait été enregistré en condition live, on constate que la blueswoman s’est à nouveau surpassée.   

JANIVA MAGNESS

« Back For Me »

(Blue Élan Records)

Originaire de Detroit, Michigan, JANIVA MAGNESS est ce que l’on pourrait qualifier de diva (au bon sens du terme !), tant elle parvient à chaque nouvel album à fusionner le Blues, la Soul et l’Americana avec une grâce que l’on n’entend que très rarement. Avec sa voix rauque et puissante, elle reste toujours incroyablement captivante et, en un peu plus de 30 ans de carrière, ne déçoit jamais. Pourtant, l’Américaine est également une grande spécialiste des reprises qui, à chaque fois, sortent brillamment de l’ordinaire par leur choix.

Non que JANIVA MAGNESS ne soit pas une très bonne songwriter, bien au contraire, mais elle excelle dans l’art de magnifier les morceaux des autres en les transformant au point d’en faire de véritables déclarations personnelles. Et c’est encore le cas sur « Back For Me », où elle se montre à même de se les approprier avec un charisme incroyable pour leur offrir une nouvelle vie. Et comme cela ne paraît pas suffire, elle a même convié Joe Bonamassa (encore lui !), Sue Foley et l’électrique Jesse Dayton à la fête.

Une autre des multiples particularités de la chanteuse est aussi de dénicher des pépites méconnues d’artistes aux horizons divers. Et cette fois, c’est chez Bill Withers, Ray LaMontagne, Allen Toussaint, Doyle Bramhall II, Tracy Nelson et Irma Thomas que JANIVA MAGNESS a trouvé l’inspiration. Toujours produit par son ami Dave Darling, « Back For Me » balaie un large éventail de sonorités et de terroirs Blues et Soul, qui vibrent à l’unisson sur une dynamique brûlante entre émotions fortes et rythmes effrénés. Sompteux !

Photo : Kimberly Fongheiser

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Blues

Popa Chubby : New-York cannonball [Interview]

POPA CHUBBY a une telle culture du Blues, et même de tous les Blues, qu’il paraît presqu’étonnant qu’il n’y soit pas allé plus tôt de son hommage au grand Freddie King. Mais c’est dorénavant chose faite… et très bien faite ! Et la fête n’en est que plus belle, puisqu’en plus d’un groupe exceptionnel, il a fait appel à quelques amis. Et quand ils s’appellent Joe Bonamassa, Albert Castiglia, Christone ‘Kingfish’ Ingram, Mike Zito, Eric Gales ou Arthur Nielson, l’ensemble prend forcément une toute autre dimension. Tous l’ont clamé haut et fort et « I Love Freddie King » résonne comme l’une des plus belles marques de respect adressée au légendaire ‘Texas Cannonball’. Entretien avec le guitariste et chanteur new-yorkais, qui reprend des forces et livre l’un de ses plus beaux disques.

– Avant de parler de ce bel hommage que tu rends à Freddie King, j’aimerais tout d’abord prendre de tes nouvelles. Tu as été touché par une maladie rare de la colonne vertébrale, dont tu te remets depuis quelques mois. Comment vas-tu aujourd’hui ? C’est définitivement derrière toi, ou pas encore ?

Eh bien, ce n’est pas une réponse facile. Merci de t’en inquiéter. La convalescence après mon opération prendra au moins deux ans, car j’ai subi une grave lésion au bras et à la colonne vertébrale. Mais je marche, je joue de la guitare et je fais de nouveau des concerts, donc tout va bien. Je pratique actuellement le vaudou et je fais des cérémonies, mais je suis à court de cellules souches. Ces deux techniques sont légales aux Etats-Unis. Et puis, j’ai hâte aussi de rentrer en France pour retrouver mes frères et sœurs africains, algériens et marocains.

– Tu es resté immobilisé un certain temps, alors que tu avais déjà commencé l’enregistrement de l’album. Est-ce que, d’une manière ou d’une autre, tu dois à Freddie King et à son Blues une partie de ta guérison ?

Absolument, le pouvoir de cette musique m’a aidée à guérir et continue de le faire. Quant à l’aide directe que Freddie King a pu apporter à ma santé, il est mort à la quarantaine (à 42 ans en 1976 des suites d’un ulcère de l’estomac – NDR), faute d’avoir soigné la sienne. Il n’est donc peut-être pas le meilleur modèle à suivre. Mais musicalement, en tant que musicien qui travaille depuis aussi longtemps comme moi, j’ai arrêté de le suivre et je me concentre sur une approche plus équilibrée.

– On te sait d’un naturel très combatif et surtout un grand amoureux de musique. Comment est-ce qu’un musicien comme toi qui ne cesse de jouer, d’enregistrer et de tourner a-t-il vécu cette période ? L’objectif a été de reprendre ta guitare le plus vite possible ?

Ça a été extrêmement difficile. Mais je suis resté motivé et j’ai constamment progressé. Au début, je ne pouvais même pas jouer de la guitare, mais maintenant, je retrouve de la motivation. Franchement, chaque jour est un combat. Alors qu’avant, je réussissais facilement à faire les choses, je dois maintenant y réfléchir en faisant beaucoup d’efforts, mais ce n’est pas grave. Je ne m’apitoie pas sur mon sort. Je continue d’avancer. Et rien ne m’arrêtera.

– Parlons maintenant de ce bel album. Tu l’as enregistré à Long Island au G. Bluey’s Juke Joint avec des musiciens que tu as toi-même choisi. Quels étaient tes critères, outre une connaissance assidue de Freddie King ? C’est votre complicité qui a primé ?

Les critères étaient de couvrir plusieurs aspects de la carrière du bluesman et d’intégrer quelques uns des meilleurs musiciens du genre, et qui sont tous mes amis. Concernant le studio, l’un de mes meilleurs amis, un de mes anciens élèves, a ouvert un incroyable studio à New-York et m’a autorisé à y enregistrer. C’est vraiment époustouflant, avec une vue imprenable sur les gratte-ciels de New-York. L’enregistrement a été réalisé en deux jours pour les morceaux de base, comme ce qui était prévu. Les musiciens étaient préparés et le matériel était excellent, donc c’était assez facile. J’ai donc pu l’enregistrer correctement.

– Et puis, il y a le choix des morceaux, qui sont pour l’essentiel des classiques de Freddie King. Tu aurais pu aussi choisir des chansons moins connues. Comment as-tu procédé, et y avait-t-il aussi le désir de livrer ta propre version, sachant que beaucoup de chansons ont déjà été reprises ?

Il y a eu trois périodes distinctes dans la carrière de Freddie : les premiers morceaux instrumentaux à la guitare, les morceaux funky avec Mike Vernon sur l’album « Burglar » en 1974 et ceux avec Leon Russell. Il était important de tous les couvrir. Il y a tellement de gens dans la carrière de Freddie, qui ont joué un rôle sur son côté instrumental. Cela va du producteur Mike Vernon, qui a produit l’album « Burglar », et aussi John May Bino avec Eric Clapton jusqu’à Leon Russell, Don Nix et Duck Dunn avec des chansons comme « Going Down », qui est vraiment axée sur le piano.

– Freddie King utilisait des onglets à la main droite, en plastique pour le pouce et en métal pour l’index, et il portait sa bandoulière de manière inhabituelle pour un droitier, à savoir sur l’épaule droite. Est-ce que, même pour t’amuser, tu t’es déjà essayé à cette drôle de position ?  

Tu sais, on réalise tout de suite qu’on ne pourra jamais reproduire le style de Freddie, alors on essaie d’en reprendre et de retrouver l’ambiance et l’énergie, comme je l’ai fait avec des gens comme Hendrix aussi. On essaie simplement de capter cette énergie, c’est le plus important. Et puis, c’est vraiment un truc texan et des gens comme Gatemouth, Brown, Anson Funderburgh et Omar Dykes, ainsi que Jimmie Vaughan, en sont tous des adeptes.

– Reprendre un maître du Blues comme Freddie King peut aussi déclencher beaucoup de questions : est-ce qu’il faut toucher l’œuvre originale le moins possible et la respecter au mieux, ou alors se l’approprier complètement et en donner sa propre vision. Même si j’ai ma petite idée, dans quelle posture t’es-tu mise ? Et est-ce que cela a été plutôt une délivrance, ou une petite crispation avec une légère appréhension ?

Tout en restant fidèles aux arrangements originaux, qui sont tous géniaux, nous avons essayé d’y apporter notre approche et notre propre sensibilité. Certains morceaux sont vraiment exceptionnels. Il y avait de nombreux sommets sur cet album qui devaient être atteints, notamment « Hideaway Another Being », qui l’une des chansons les plus marquantes et enthousiasmantes du genre. Ensuite, c’était une évidence d’avoir Joe Bonamassa sur le projet. Et je tenais absolument à jouer « Hideaway » avec Arthur Neilson.

– Sur l’album, il y a trois chansons datant de 1961 et les autres datent de 1971 à 1974. Ce qui est fascinant en écoutant le disque, c’est qu’elles auraient toutes aussi pu être composées de nos jours. Est-ce que cette intemporalité te séduit encore aujourd’hui chez Freddie King au-delà de son jeu ?  

J’ai toujours dit que Freddie King était le chaînon manquant. On ne lui a jamais attribué le mérite qui lui était dû vu sa virtuosité musicale, tous les genres abordés et les différentes époques dans sa discographie. Alors, nous avons fait de notre mieux pour en couvrir l’essentiel et j’espère vraiment que nous avons contribué à lui rendre hommage.

– Comme tu le clames : tu aimes Freddie King. Et tu n’es pas le seul, puisque Mike Zito a aussi été partie prenante dans cette belle aventure. Quel a été son rôle en tant que producteur exécutif ?

Mike Zito a joué un rôle déterminant dans la réalisation de cet album. Il n’aurait pas pu voir le jour sans lui et je lui en suis très reconnaissant. C’est un type bien. Toute l’équipe de Gulf Coast Records m’a apporté un soutien incroyable. Je lui en suis très reconnaissant.

– D’ailleurs, j’aimerais savoir si des artistes comme Joe Bonamassa, Albert Castiglia, Christone ‘Kingfish’ Ingram et les autres ont pu choisi leur morceau, ou est-ce toi qui le leur as imposé ? Parce qu’il peut y avoir aussi une petite question de goût ou d’ego…   

Il n’y a eu aucune question d’ego, vraiment. Tout le monde a apporté sa contribution et m’a aidé. Je suis tellement fier de tous mes amis, parmi les meilleurs guitaristes du genre et probablement du monde entier. Ma gratitude est éternelle. Mais j’avais aussi des idées précises sur qui jouerait quel morceau, et notamment Joe Bonamassa sur « I’m Going Down ».

– La technologie permet aujourd’hui beaucoup de choses, notamment de faire des albums à distance. Avez-vous tous pu vous rencontrer, car l’ensemble sonne terriblement live ? On vous imagine facilement tous dans la même pièce…

Seulement un ou deux morceaux ont été réalisés en présence de tous les musiciens. Les autres ont été envoyés par Internet. C’est comme ça que ça se passe maintenant, tu sais, avec nos agendas chargés et les tournées de chacun.

– Une dernière question plus personnelle et moins musicale pour conclure. Trump a été réélu pour une seconde fois. On te sait farouche opposant à sa politique et les choses prennent même une tournure assez dangereuse. Au-delà de ses idées que tu as toujours combattues, est-ce que tu penses que, tôt ou tard, le monde de la musique pourrait en être affecté aux Etats-Unis ?

Je pense que le monde entier est touché et la musique aussi forcément, mais il existe une résistance à la tyrannie et au fascisme et j’ai l’intention d’être à l’avant-garde, aux premiers postes. Je continuerai à résister grâce à des chansons de protestation et à utiliser mon influence pour prêcher le bien et uniquement le bien. Nous ne pouvons pas laisser le fascisme prendre le contrôle du monde.

L’album POPA CHUBBY & FRIENDS, « I Love Freddie King », sera disponible chez Gulf Coast Records le 28 mars.

Photos : Nelson D’Onfrio (4) et Photo Phillip Ducap (3, 6)

Retrouvez l’interview de Popa Chubby à l’occasion de la sortie de « Tinfoil Hat », sorti en pleine pandémie :

… Et les chroniques de ses derniers albums :

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Classic Hard Rock Rock

Simon McBride : so british

Pas totalement personnel, « Recordings : 2020-2025 » offre un beau panel des goûts et surtout du talent de SIMON McBRIDE et permettra à qui ne le connaîtrait pas vraiment de mieux comprendre pourquoi il a été le choix de Deep Purple pour remplacer Steve Morse. Entre Rock, Classic Rock et Hard Rock, le guitariste a enregistré quelques inédits, en une seule prise et au studio Chameleon à Hambourg en Allemagne, en complément de reprises réinventées, qui ne laissent pas de doute sur ses influences et encore moins sur sa virtuosité.  

SIMON McBRIDE

« Recordings : 2020-2025 »

(earMUSIC)

En 2023, la carrière du musicien originaire de Belfast a pris un sacré tournant avec son intronisation au sein de Deep Purple et une implication conséquente sur « =1 », dernier et très bon opus en date de la légendaire formation. Cela dit, le parcours de SIMON McBRIDE est aussi assez éloquent. Compositeur, musicien et producteur, il signe ici son sixième album studio après avoir évolué au sein de Sweet Savage, Snakecharmer et aux côtés de Don Airey. Une carte de visite plus que conséquente et de haut vol.

Cette fois, l’Irlandais revient avec un disque un peu spécial, qui regroupe des enregistrements datant des cinq dernières années et même finalisés juste avant son arrivée chez Deep Purple. Composé de titres originaux et de reprises, « Recordings : 2020-2025 » résume plutôt bien la vision du Rock de SIMON McBRIDE et permet aussi de constater sa facilité à s’approprier à peu près tous les genres avec beaucoup de facilité. Pour autant, pas complètement caméléon, c’est essentiellement sa touche qu’on retrouve ici.

Après « The Fighter » en 2022, c’est donc un panorama plus Rock qu’il propose sur 15 titres, qui montrent une belle homogénéité. La production est assez sobre, mais le toucher est toujours aussi singulier. Nette et avec des accroches souvent Hard Rock, la fluidité de SIMON McBRIDE est un modèle du genre que ce soit sur les riffs ou les solos. Par ailleurs, c’est assez bluffant aussi de constater qu’il s’inscrive à ce point dans des sonorités ‘so british’, dans ses compositions comme dans le choix des reprises. Un bon moment !

Photo : Jim Rakete

Retrouvez la chronique de « The Fighter », celle du dernier album de Deep Purple et du coffret de Snakecharmer :

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Blues Blues Rock Chicago Blues Delta Blues

ZZ Ward : all the Blues

Artiste accomplie au parcourt assez étonnant, ZZ WARD sort un quatrième opus plein de surprises en suivant ses choix et ses envies. Sur « Liberation », chaque titre est concis et direct et traverse les courants du Blues avec passion et beaucoup de facilité.  A la fois Roots, Blues Rock, Southern, aux sonorités du Delta comme sur un groove Honky-Tonk, la frontwoman se fait brûlante, poignante, délicate et forte. Vibrante et intense, l’Américaine est exaltante et conquérante. Une belle démonstration de feeling et de maîtrise.

ZZ WARD

« Liberation »

(Dirty Shine/Sun Records)

Chaque nouvelle sortie de ZZ WARD est dorénavant scrutée de très près et quelques mois après son arrivée sur le mythique label Sun Records qui avait été marqué par l’EP « Mother », elle nous livre « Liberation ». Et la songwriter de Roseburg, Oregon, se présente avec un quatrième opus étonnant à bien des égards. En effet, le successeur de « Dirty Shine », sorti il y a deux ans, est composé de quatre des six morceaux de son récent format court paru en octobre dernier, ainsi que de quelques classiques revisités et, bien sûr, de chansons originales.

Celles et ceux qui auraient manqué « Mother » ont donc le droit à une petite séance de rattrapage. La multi-instrumentiste a renouvelé sa confiance au producteur Ryan Spraker, ayant lui-même plusieurs cordes à son arc, et « Liberation » est un album qui n’aura jamais aussi bien porté son nom. Au fil des morceaux, on découvre ZZ WARD déclamant son amour du Blues, sans filtre et sans fard, que ce soit sur ses propres titres ou sur les reprises qu’elle a savamment choisi et qu’elle s’est approprié avec brio…. Une expression de la liberté plus flamboyante que jamais.

Libre et libérée, la chanteuse fait ce qu’elle veut et elle sait tout faire. A travers les 14 chansons de « Liberation », elle démontre sa polyvalence tout comme sa connaissance d’un répertoire Blues très large. Parmi les covers de Big John Hamilton, Son House, Robert Johnson ou Fats Domino, ZZ WARD fait plus qu’explorer l’Histoire du genre, elle la réinvente et lui offre une toute nouvelle couleur. Et en marge, on se délecte de ses compositions très personnelles et intimes (« Love Alive », « Liberation », « Lioness », « Clairvoyant », « Next To You »). Brillante ! 

Retrouvez les chroniques précédentes :

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Heavy Blues Stoner Rock

The Devils : ultimate pact

Brut de décoffrage, le registre rocailleux des transalpins prend ici une toute autre direction musicale, même si leur touche reste intacte et leur esprit rebelle plus que vivace. Provocateur et irrévérencieux à souhait, THE DEVILS s’offre une virée dans les marécages avec un opus Stoner fait de Blues et de Soul, qui prend les traits d’un Heavy Blues sauvage au son primal et direct, façonné par un Alain Johannes des grands jours. « Devil’s Got It » traquent les décibels dans une séduisante et chaotique mixité. Magistral !

THE DEVILS

« Devil’s Got It »

(Go Down Records)

Survolté et électrisant, l’explosif duo napolitain fête ses dix ans d’existence avec un sixième album, dont le contenu paraît surprenant, mais dont le résultat colle terriblement à son image. Rock’n’Roll jusqu’au bout des doigts, Erika Switchblade (batterie, chant) et Gianni Blacula (guitare, chant) ont toujours mené leur carrière sans concession œuvrant dans un style hyper-roots entre Stoner et Garage. Epais et organique, THE DEVILS est d’une féroce authenticité et elle en est même devenue sa marque de fabrique. Une chaleur qui se répand délicieusement.

Dès le début de l’aventure, les complicités ont été aussi évidentes que redoutables. Sur les deux premiers efforts, c’est Jim Diamond (The White Stripes, The Sonics) qui s’est chargé de la production, avant que le grand Alain Johannes (QOTSA, Chris Cornell, …) ne prenne le relais. Solidement forgé par deux personnalités aussi singulières, le son de THE DEVILS a pris corps et s’est pleinement affirmé entre de si bonnes mains. Et alors que l’on pouvait s’attendre à un déferlement sonore dans les règles, c’est le Blues et la Soul qui sont ici à l’honneur.

Avec l’ardent désir de rendre hommage à une scène qui les inspire depuis toujours, les Italiens sont allés puiser dans les moindres recoins, souvent reculés mais toujours très pertinents, de ce style d’une magique intemporalité. Après un traitement de choc en bonne et due forme, les morceaux de Reverend Charlie Jackson, Freddie Scott, Robert Wilkins, Muddy Waters, Magic Slam, Z.Z. Hill ou encore William Bell reprennent vie comme s’ils avaient vu le diable en personne. Une jouissive frénésie que THE DEVILS distille sans retenue. Encore !

Photo : Nathalie Rei

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Blues

Tommy Castro & The Painkillers : exaltant

Le titre de cette nouvelle production de TOMMY CASTRO & THE PAINKILLERS résume à lui seul l’intention du maestro : revenir à l’essence-même du Blues, en parcourant ses différents courants et en s’y collant au plus près. Pari amplement remporté, ce qui n’est pas vraiment une surprise lorsque l’on connaît le sens de la musique qui l’habite. En ne proposant que trois petits inédits, c’est surtout vers des morceaux qui le font vibrer que le musicien s’est penché et « Closer To The Bone » côtoie les sommets.

TOMMY CASTRO & THE PAINKILLERS

« Closer To The Bone »

(Alligator Records)

En un peu plus de trois décennies, TOMMY CASTRO avoisine la vingtaine d’albums, une dizaine de Blues Music Awards et surtout un feeling qui va grandissant. Avec ses PAINKILLERS, c’est un disque un peu spécial que le natif de San José en Californie propose, puisque celui-ci ne comprend que trois chansons originales (« Can’t Catch A Break », « Crazy Woman Blues » et « Ain’t Worth The Heartache »), auxquelles il faut ajouter tout de même onze reprises, et pas n’importe lesquelles. Lui qui a exploré à peu près tous les registres, passant du R’n B à la Soul ou au Rock, s’offre le loisir de se faire plaisir… et nous avec !

TOMMY CASTRO & THE PAINKILLERS n’élude ici aucun d’entre-eux, sachant se faire tendre, délicat ou explosif et pétillant le morceau suivant. « Closer To The Bone » fait un peu le tour des goûts et des préférences du guitariste-chanteur et il faut bien avouer qu’on ne voit pas le temps passer. L’idée est donc de le réécouter dans la foulée avec la même délectation. Avec comme noyau dur Mike Emerson aux claviers, Randy McDonald à la basse et au chant et Bowen Brown à la batterie, l’ensemble sonne comme une ode au Blues sous toutes ses belles coutures et le talent de chacun fait naître une osmose savoureuse.

Car ce qui surprend aussi sur « Closer To The Bone », c’est l’harmonie qui règne au sein de THE PAINKILLERS, qui n’a jamais aussi bien porté son nom, avec aussi un humour omniprésent. Petite cerise sur le gâteau, TOMMY CASTRO a invité quelques amis et non des moindres. On y croise au fil des titres Chris Cain, Rick Estrin, Christoffer ‘Kid’ Andersen et l’incroyable saxophoniste et chanteuse Deana Bogart sur «  Some Moves Me » et « Bloodshot Eyes » pour un duo. Electrique et jouant sur une proximité naturelle, l’Américain livre un opus radieux, optimiste et tout simplement irrésistible. Une vraie gourmandise !