Catégories
Blues International

Joanna Connor : au nom du groove [Interview]

Une signature sur le label de Joe Bonamassa, qui produit et joue sur l’album, un groupe de classe mondiale et un jeu tout en feeling, il n’en fallait pas plus à la chanteuse et guitariste JOANNA CONNOR pour se retrouver en tête des Charts Blues américains. « 4801 South Indiana Avenue » vient grandir le Blues de Chicago, grâce à une prestation hors-norme, une slide sauvage et groovy et une empreinte vocale saisissante. Rencontre avec cette artiste qui vit un rêve éveillé…

Photo : Margaret Speed

– Avant de parler de ce très bon nouvel album, j’aimerais que tu retraces ton parcours. Tu es née à New-York, a grandi dans le Massachusetts et musicalement tes influences se situent du côté de Chicago. Comment es-tu venue à la musique, au chant et à la guitare ?

Ma mère était une mélomane passionnée. Elle m’a initié au Jazz, au Blues, à la Funk, au Rock, au Gospel, à l’Afro-Pop et au Reggae toute mon enfance. Je continue cependant de croire que la muse m’a choisi. J’ai été fasciné par la musique toute ma vie. Je chantais constamment à la radio ou sur ma chaîne Hi-fi et je m’imaginais sur une scène. Ma mère m’a offert une guitare à 7 ans, j’ai chanté dans les chœurs d’école à partir de 4 ans et ensuite j’ai joué du saxophone de 12 à 20 ans. J’étais fasciné par le Blues de Chicago. Je voulais désespérément étudier tous les grands maîtres et faire partie de cette culture. J’ai donc finalement déménagé là-bas à 22 ans.

– Peu de temps après ton arrivée à Chicago, tu as joué avec les plus grands avant de fonder ton propre groupe. C’est une vraie bénédiction d’être ainsi intronisée, non ?

Ce fut une véritable bénédiction, la meilleure et la plus fructueuse façon de faire. J’ai été extrêmement privilégié d’avoir reçu une éducation musicale et un enseignement aussi riches. Cela n’a cependant pas été facile tout le temps. Mais en regardant en arrière, ce sont certains de mes mentors qui ont été les plus durs. Ils m’ont appris le plus musicalement et m’ont endurci. Toute cette expérience a fait de moi la musicienne que je suis aujourd’hui. Je pense que c’était un grand avantage, car cela m’apporté plus de caractère que je n’aurais pu en avoir si je n’avais pas déménagé à Chicago. Cela m’a également donné une connaissance approfondie de la façon dont se joue le Blues de l’après-guerre.

– Dès le départ, tu as mené de front le chant et la guitare. C’est indissociable selon toi ?

Il y a des chanteurs qui vous épateront juste en chantant. Et il y a des instrumentistes qui ont du génie. Mais faire les deux est absolument merveilleux. J’ai commencé comme chanteuse qui jouait de la guitare rythmique. Et sans me vanter, j’étais une sacrée guitariste rythmique et cela m’a donné une excellente base. Mais je me sentais incomplète. Je voulais avoir un jeu plus expressif.

Photo : Allison Morgan

– Parlons de ce nouvel album et tout d’abord de son titre « 4801 South Indiana Avenue », qui est lourd de sens. Tu nous expliques un peu ?

C’est l’adresse d’un des clubs les plus importants de l’histoire du Blues : le Theresa’s Lounge, au sud de Chicago. Les plus grands y ont joué : Howling Wolf, Muddy Waters, Buddy Guy, JR Wells. Je m’y suis produite trois fois avant sa fermeture. C’était un endroit sympa et un peu difficile même. Mais il y avait une grande énergie, une atmosphère et une mémoire musicale dans ces murs.

– L’album sort sur le label de Joe Bonamassa, KTBA Records. Il l’a produit avec le grand Josh Smith. Un beau duo qui offre un son très organique et presqu’analogique. Comment l’enregistrement s’est-il passé ? J’imagine que ce doit être un vrai plaisir de travailler avec des gens si exigeants ?

Travailler avec deux musiciens d’une telle compétence était un rêve. J’étais nerveuse au début… très nerveuse même ! Mais la musique jouée par ces musiciens fantastiques était si puissante, si expressive et avec tellement de groove que j’ai juste lâché prise, puis joué et chanté avec mon cœur. Toute la session a vraiment spéciale d’un bout à l’autre. Quelque chose en moi savait que nous faisions tous quelque chose qui allait avoir un impact.

– Tu as dit que Joe Bonamassa avait fait ressortir le meilleur de toi, qu’il t’avait demandé de repousser tes limites. De quelle manière cela s’est-il concrétisé ?

Il savait ce qu’il voulait et il a été très direct. Joe a également utilisé un humour assez sec pour faire valoir ses arguments et j’ai apprécié cela. J’avais, et j’ai toujours, énormément de respect pour lui en tant qu’artiste et maintenant aussi en tant que producteur, donc cela m’a inspiré. Joe m’indiquait quel type d’attaque ou quel feeling il voulait que je fasse passer sur les solos de guitare. Il a choisi l’ampli et les guitares sur lesquels jouer. Il m’a peint des scénarios fictifs, lorsque je chantais pour me faire comprendre la chanson et son émotion. Il a également chanté pour moi, montrant comment il voulait que j’utilise ma voix sur chaque morceau. J’ai tellement appris et je pense que nous avons réalisé ensemble ce dont chaque titre avait besoin.

Photo : Maryam Wilcher

– Sur l’album, tu es aussi accompagnée d’un groupe de classe mondiale. Peux-tu nous le présenter ? Il y a un feeling incroyable entre vous…

Le groupe était tellement incroyable. Les musiciens ont été si sensibles les uns les autres et aussi très polyvalents, fougueux, syncopés et sensuels. Tout ce que nous avons joué a été un pur délice. J’ai particulièrement été époustouflé par Reece Wynans. C’est un dieu du clavier ! Quel honneur de jouer avec lui et quelle histoire il a eu notamment avec Stevie Ray Vaughan! C’est un rêve devenu réalité que de jouer avec lui. Avoir aussi Joe Bonamassa et Josh Smith aux arrangements des chansons et jouant de la guitare tout au long de l’album a été vraiment fantastique ! C’était le paradis de la guitare. J’ai aussi beaucoup aimé le bassiste Calvin Turner et le batteur Lemar Carter, qui jouent avec les meilleurs bluesmen. Ils ont jeté une base brûlante à la musique qui m’a également donné l’impression d’être à Chicago avec mon groupe.

– Enfin j’aimerais que tu parles de ton jeu de guitare, et notamment de la façon dont tu joues de la slide. C’est une pure folie ! Il en dégage tellement de force et d’émotion…

Si vous ne jouez pas avec passion et intensité sans cherchez à communiquer ce qu’il y a en vous, alors pourquoi vous jouer ? Quand je prends une guitare, elle fait partie de moi. Nous sommes connectées. Je ressens également des sentiments très intenses, de l’agressivité et de la passion qui sortent de moi à travers l’instrument. Par ailleurs, en tant que guitariste femme, je sens que je dois prouver quelque chose et jouer aussi dur et ardemment qu’un homme. Certaines musiciennes sont trop passives. Je ne veux pas juste « être bonne pour une fille » comme on dit… vraiment pas.

– Encore bravo pour ce très bel album, Joanna. Il est d’ailleurs actuellement et logiquement numéro 1 des Charts américains de Blues et j’espère vite l’entendre en live… !

To all my fans in France, je t’aime.

Et pour se procurer ce petit bijou :

https://jbonamassa.com/albums/2021/joannaconnor/4801/

Retrouvez aussi la chronique de l’album :

https://rocknforce.com/joanna-connor-wild-slide-woman/

Catégories
Stoner/Desert

Thunder Horse : indomptables Texans

Le Stoner affiché par THUNDER HORSE a presque du mal à trouver sa place dans le déluge Doom et Heavy Metal de « Chosen One ». Deuxième album pour le quatuor texan qui, d’une voix lointaine et profonde sur des riffs massifs et une rythmique de cogneurs, présente un nouvel opus tout en nuances et en puissance.  

THUNDER HORSE

« Chosen One »

(Ripple Music)

Le Texan est rugueux de nature et dans le cas de THUNDER HORSE, c’est presqu’un euphémisme. Mené par son frontman, Stephen Bishop, guitariste-chanteur et pilier de la scène Metal Indus locale, le quatuor développe sur ce deuxième album un Heavy Stoner costaud aux saveurs Doom et à l’atmosphère lourde. Les Américains ne sont pas là pour rigoler et « Chosen One » surgit comme un gros coup de massue.  

Dave Crow (basse) et Jason West (batterie) gèrent avec ardeur une rythmique solide et imperturbable. Bishop assurant les parties très Doom des guitares avec une épaisseur quasi-opaque, c’est T.C. Connaly qui distille de très inspirés solos aériens, racés et épiques dans un style Heavy Metal très 70/80’s. THUNDER HORSE est de plein de surprises et elles sont carrément bonnes (« Let Them Bleed », « Rise Of The Heathens »).

Non sans rappeler les riffs tendus de Tommy Iommi et les virtuoses envolées de Michael Schenker, Bishop et Connaly se complètent et œuvrent de concert sur ce « Chosen One », dont la production est aussi authentique que ne l’est le quatuor (« Texas » et le magnifique « Song For The Ferryman »). Les quelques notes bluesy qui s’échappent des nouveaux morceaux de THUNDER HORSE apportent ce supplément d’âme à un album qui n’en manque pourtant pas.

Bandcamp : https://ripplemusic.bandcamp.com/album/chosen-one

Catégories
Heavy metal Rock

Rob Zombie : comédie pas très horrifique

Très éclectique et cinématographique, ce nouvel album de l’extraterrestre du Massachusetts surgit au cœur d’une pandémie : le propre du zombie ! Divertissant et un peu dispersé, ROB ZOMBIE semble avoir tout misé sur une production chiadée et des arrangements très soignés au détriment de morceaux vraiment convaincants.

ROB ZOMBIE

« The Lunar Injection Kool Aid Eclipse Conspiracy »

(Nuclear Blast)

Après près de cinq ans d’absence, ROB ZOMBIE réapparait avec un septième album au nom interminable : « The Lunar Injection Kool Aid Eclipse Conspiracy ». Façon bande originale de film dont l’Américain est fin connaisseur, ce nouvel opus est une sorte de périple musical inclassable et iconoclaste, assez étonnant et toujours très bien produit…. Et parfois même un peu lisse. L’Américain s’est transformé en monsieur propre, et rien ne dépasse de cette réalisation où le sample est devenu roi.

Que tout le monde se rassure, ROB ZOMBIE fait toujours du ROB ZOMBIE ! Seulement, on peut être en droit d’attendre un peu de nouveauté et d’impertinence de la part d’un tel artiste. Si l’album s’écoute tout seul, il peine cependant à surprendre malgré des titres accrocheurs. Les 17 plages s’étalent sur un peu plus de 40 minutes, mangées par des bidouillages en tous genres, mais quelques titres parviennent à émerger dans ce qu’il reste de l’album.

Entre Metal, Electro, Indus et quelques gros riffs Stoner, le chanteur reste le touche-à-tout que l’on connait. Parmi de nombreuses expérimentations à base de samples se glissent tout de même quelques titres vraiment taillés pour la scène… mais assez peu nombreux (« The Triumph Of King Freak », « 18th Century Cannibals, Excitable Morlocks & A One-Way Ticket On The Ghost Train», « Shake Your Ass-Smoke Your Grass», « Get Loose »). ROB ZOMBIE se fait plaisir et, au final, cet hédonisme est très solitaire.

Catégories
International Stoner/Desert

Jakethehawk : les faucons des Appalaches [Interview]

Fort d’un album exceptionnel sorti il y a quelques semaines, JAKETHEHAWK a délivré une bouffé d’oxygène et d’énergie incroyable. Avec « Hinterlands », le groupe américain franchit un cap à travers un Stoner Psych addictif aux influences Desert Rock : un véritable appel à la nature aux sonorités envoûtantes et très organiques. John Huxley, chanteur et guitariste, revient sur la démarche du quatuor et sa conception de la musique du groupe.

– En moins de cinq ans, vous avez sorti un EP et deux albums et pourtant vous dégagez déjà une énergie et une maîtrise incroyable. C’est sur scène que vous avez solidifiez votre style ?

Dans une certaine mesure, plus nous jouions ensemble, plus nous nous sentons à l’aise dans nos pompes et plus nous devenons confiants pour avancer artistiquement. Le développement de l’alchimie en tant que groupe se fait à la fois sur scène et au moment de l’écriture. C’est un ensemble.

– A l’instar des pionniers du Desert Rock, vous avez baptisé votre style l’« Appalachian Rock ». Simple question de géographie, ou comptez-vous faire des émules ?

C’est plus ironique qu’autre chose, mais une grande partie de mon éducation musicale s’est faite à travers de la musique acoustique et Folk… Et il y a une riche tradition dans la région des Appalaches. C’est donc plutôt un clin d’œil à ces racines. C’est notre façon de dire que nous donnons notre propre tournure et notre touche personnelle au son Stoner/Psych/Desert.

– L’an dernier, vous avez accueilli Josh Emery à la guitare et au chant et dans la foulée, vous avez signé chez Ripple Music. C’est ce sentiment d’être au complet qui a créé une sorte de déclic ?

Avoir Josh dans le groupe est génial, car nous pouvons explorer beaucoup plus d’espace sonore en live. Son jeu de guitare n’apparaît que sur le morceau « June » sur le dernier album, mais il a eu un impact positif majeur sur cette piste. Au fur et à mesure que nous avançons, écrire avec lui est très naturel. Il est le Yin musical du Yang de John, pour ainsi dire, donc les idées ne manquent jamais. Cela combiné à la signature chez Ripple Music est merveilleux, parce que nous ne nous sommes jamais autant sentis si créatifs et capables d’écrire la musique que nous imaginons. Et nous avons maintenant ce label incroyable pour apporter cette musique aux oreilles des gens.

– JAKETHEHAWK possède un son très organique avec des influences qui vont du Stoner au Doom, du Progressif au Shoegaze en passant par des moments Folk et même Southern. Vous faites vraiment le grand écart. Et le liant reste le Psych, c’est bien ça ?

Je ne sais pas si on peu parler de liant… C’est plutôt quelque chose qui donne probablement le sens de la musique, qui existe dans nos subconscients. Mais pour ne pas tourner autour du pot, je dirai… oui. John et Josh ont toujours aimé les murs sonores luxuriants, mélodiques et tourbillonnants. Nous pensons donc que nous aurons toujours tendance à le faire d’une manière ou d’une autre, avec le groove que Jordan et Justin apportent à l’ensemble.

– Malgré les nombreux changements de rythmes et d’atmosphères sur « Hinterlands », il reste une chose immuable chez vous : le groove. L’impression qui domine est que le couple basse/batterie vous donne une liberté totale au niveau des guitares notamment, et qu’il porte même vos gigantesques riffs…

Jordan et Justin forment une unité très solide et c’est vrai que leur ampleur sonore nous donne définitivement à Josh et moi beaucoup d’espace pour se déplacer sur un terrain plus texturé. Justin couvre beaucoup d’espace avec sa basse, afin que nous ne soyons pas dépendants du fait que des guitares rythmiques claquent sur des accords de puissance tout le temps, et pour garder une cohérence sur les morceaux.

– Votre son donne très souvent le sentiment de se retrouver en pleine nature, face à un vaste horizon ou au cœur d’une forêt comme dans votre clip. Est-ce que vos textes vont aussi dans ce sens avec un message écologique ?

Dans une certaine mesure, mais c’est plutôt une métaphore. Les paroles de « Hinterlands » traitent beaucoup de la croissance, du changement et de l’idée de ‘passer à autre chose’. Les références à la nature représentent ce sentiment… Voyager dans l’arrière-pays de votre propre vie. De plus, nous aimons les images luxuriantes, colorées et généreuses, parce que nous voulons que notre musique le soit également. Nous ne pouvions pas imaginer une vidéo ou une pochette d’album de JAKETHEHAWK, qui serait Metal ou gothique. Mais qui sait ? Peut-être que ce sera le cas sur le prochain disque.

– Il y a un fort aspect proto-Metal mêlé à un son très 90’s chez JAKETHEHAWK. Même en évoluant avec son temps, on revient toujours aux bases, non ? De quelle manière pensez-vous pouvoir encore faire grandir ce style ?

Je ne sais pas si nous le pourrons… Je pense que la seule chose que nous pouvons faire est de laisser cela de côté et d’être simplement fidèles à nous-mêmes et à ce que nous désirons vraiment faire.

– Une dernière et irrésistible petite question pour le fun et pour conclure : pourquoi JAKETHEHAWK et pas THE4FLYINGJ (pour John, Jordan, Justin et Josh) ?

En fait, « The Flying J » est une chaîne de stations-service et relais-routiers ici aux États-Unis. Nous avons essayé de les contacter pour voir s’il serait possible de mettre mis en place notre nom sur un hotdog, mais jusqu’à présent, ils n’ont pas répondu. Blague à part, nous avons en fait nommé le groupe d’après le nom d’un faucon à queue rousse qui vit dans un arbre à côté de la maison de mon père. Il l’a appelé Jake quand il était jeune, et Jake the Hawk y vit toujours aujourd’hui.

Bandcamp :

https://ripplemusic.bandcamp.com/album/hinterlands

Retrouvez la chronique de l’album :

https://rocknforce.com/jakethehawk-profond-et-organique/

Catégories
Heavy metal Progressif Rock

Chevelle : de la Terre au cosmos

Sorte d’OVNI musical oscillant entre un Metal Alternatif US très accessible et des parties progressives plus complexes, les Frères Loeffler, qui ne sont d’ailleurs plus que deux, ont bâti en 27 ans de carrière un style inimitable et particulièrement créatif. Pour son neuvième album, CHEVELLE nous invite à quitter la planète Terre pour l’espace à travers des morceaux saisissants et fascinants. 

CHEVELLE

« Niratias »

(Epic/Sony Music)

Aujourd’hui composé de deux des frères Loeffler, Pete (guitare et chant) et  Sam (batterie), CHEVELLE donne un successeur au très bon « The North Corridor » sorti il y a presque cinq ans. Le duo de l’Illinois nous propose cette fois un voyage dans le cosmos avec  « Niratias (Nothing Is Real And This Is A Simulation) » aussi planant qu’incisif, avec toujours ce mélange de Metal Alternatif US et de Progressif.

D’entrée de jeu, l’instrumental « Verruckt » donne le ton de cette nouvelle réalisation, qui s’annonce aussi musclé que mélodique et sur lequel on retrouve la technicité chirurgicale de CHEVELLE. Sur des arrangements très soignés, « Niratias » se rapproche d’un album-concept, puisque tous les morceaux sont axés sur l’espace et la place de l’homme dans l’univers (« So Long, Mother Earth », « Mars Simula »).

Agressifs, intriguants et terriblement puissants, ce neuvième enregistrement plonge le duo dans des ambiances très variées et parfaitement mises en valeur par la belle production de Joe Barresi (Kyuss, QOTSA, Tool). CHEVELLE a composé ces treize nouveaux titres en 2019 et 2020, leur donnant un recul qui leur a permis de les rendre encore plus pertinents et directs (« Self Destructor », « Peach », « Ghost And Razor »). 

La voix de Pete fait des merveilles en passant d’un registre tout en émotion (« Endlessly ») à des morceaux plus puissants appuyés par de gros riffs et une rythmique massive (« Self Destructor »). CHEVELLE effectue un retour fracassant dans un registre toujours aussi bien structuré et dans lequel on ne se perd jamais. Inspiré par la science-fiction des années 70 et avec des morceaux originaux et très différents, le duo fascine (« Lost In Digital Woods »).

Catégories
Heavy metal

Attika : la fougue retrouvée

Après un album éponyme en 1988 et un second trois ans plus tard, ATTIKA a complètement disparu de la circulation, la faute à un Heavy Metal américain qui ne séduisait plus autant les foules. Trois décennies plus tard, motivés et remontés à bloc, les Américains de Floride font leur retour… et il est fracassant.

ATTIKA

« Metal Lands »

(Pure Steel Records)

Fondé à la fin des années 80, ATTIKA a connu une belle ascension jusqu’à son deuxième album en 1991 (« When Heroes Fall »), avant de retomber dans l’oubli ne réussissant pas à passer le cap des années 90/2000, fatal à pas mal de groupe. Le quatuor de Melbourne aux Etats-Unis s’est donc éteint par la force des choses et 30 ans plus tard, les revoici avec « Metal Lands ».

Robert Van War (chant) et Jeff Patelski (batterie) se sont depuis adjoints les services de Glenn Anthony (basse) et du très bon Bill Krajewski (guitare) pour un nouvel opus qu’on espère être celui du renouveau. En tout cas, le frontman du groupe semble avoir retrouvé la fougue de sa jeunesse et livre une prestation solide et franchement enthousiaste. ATTIKA est reparti pour un tour, et c’est plutôt réjouissant.

Dès le morceau-titre qui ouvre l’album, le quatuor fait preuve d’une vigueur exceptionnelle et les réflexes sont intacts (« Like a Bullet », « The Price »). De belles envolées lyriques aux solos millimétrés en passant par des riffs tranchants et racés, les Américains renouent avec leur Heavy Metal estampillés US, qui a forgé la marque de fabrique d’ATTIKA (« Run with the Horseman », « Sincerely Violent »). 

Catégories
Blues

Skylar Rogers : made in Chicago

SKYLAR ROGERS puise son Blues dans son cheminement personnel pour livrer un premier album très Rock et Soul. Authentique, la chanteuse américaine joue autant de la puissance de sa voix que de la sincérité et de la profondeur qu’elle lui accorde. Sans coller aux standards de Chicago, sa ville, la chanteuse propose un Blues Rock authentique, généreux et saisissant.

SKYLAR ROGERS

« Firebreather »

(Independant)

Etant née et ayant grandi dans les quartiers difficiles de Chicago, SKYLAR ROGERS vit le Blues comme qu’elle le chante… avec force ! Après un premier EP en 2019 (« Insecurities »), elle sort enfin son premier album dans cette période malheureusement difficile et qui lui a valu d’arrêter une grande tournée américaine bien lancée. La chanteuse a d’ailleurs co-écrit « Firebreather », qui est aussi sensible que punchy.

Toujours accompagné de son groupe, l’excellent The Blue Diamonds, la frontwoman n’est pas là pour faire de la figuration et distille un Blues Rock teinté de Soul avec quelques touches rappelant même la Motown. Multipliant les morceaux assez mid-tempos (« Hard Headed Woman », « Back To Memphis »), SKYLAR ROGERS n’en oublie pas pour autant le côté mordant que lui permet ses capacités vocales (« Failure », « Moving On »).

Très varié dans son ensemble, « Firebreather » ne ressemble pas aux albums enregistrés à Chicago, malgré bien sûr quelques piqûres de rappel (« Thankful »). En marge des dynamiques morceau-titre et « Like Father Like Daughter », SKYLAR ROGERS sait aussi se faire plus émotive et touchante comme sur le délicat et poignant « Drowning ». Avec un premier album aussi abouti, l’Américaine fait son entrée par la grande porte.

Catégories
Blues

Joanna Connor : wild slide woman

Produite par Joe Bonamassa, qui joue également sur deux titres de ce nouveau petit bijou, la chanteuse et guitariste JOANNA CONNOR déverse un Blues plein d’émotion et d’une énergie incroyable. Accompagnée par un groupe de classe mondiale, l’Américaine irradie de son talent les dix morceaux de « 4801 South Indiana Avenue », qui est d’une élégance totale. Un must !

JOANNA CONNOR

« 4801 South Indiana Avenue »

(KTBA Records)

Présente depuis les années 80 sur la scène Blues de Chicago, on ne présente plus JOANNA CONNOR, l’une des reines incontestables du Blues Rock et surtout une virtuose de la slide. Toujours très bien entourée, l’Américaine s’est adjoint les services d’un groupe hors-norme pour son 14ème album, le premier sorti sur le label indépendant de Joe Bonamassa, qui produit avec Josh Smith ce magnifique « 4801 South Indiana Avenue ».

Tirant son titre d’un haut lieu du Blues et Funky de Chicago, l’atmosphère qui se dégage de ce nouvel album de la songwriter est juste exceptionnelle. Soutenue par le claviériste Reese Wynans (SRV), du bassiste Cavin Turner, du batteur Lemar Carter et d’une session cuivre renversante, JOANNA CONNOR explose et tire des sons incroyables de sa Gibson. Toute aussi puissante vocalement, elle rayonne sur les dix morceaux.

Dominant les débats sur « Destination », « For The Love Of A Man » ou « I Feel So Good », la guitariste livre une prestation à la hauteur de sa réputation : fougueuse, dynamique et intense. Honky-Tonk sur « Come Back Home », pleine d’émotion sur « Bad News » en hommage à Luther Allison et presque psychédélique sur « It’s My Time », JOANNA CONNOR livre un vrai chef- d’œuvre, qui s’annonce comme un futur classique du genre. 

Catégories
Blues

Selwyn Birchwood : éclatant de vérité

Remarqué dès ses débuts pour sa technicité et surtout son feeling, le guitariste et chanteur américain SELWYN BIRCHWOOD brille une fois encore sur ce troisième album, « Living In A Burning House », au groove et à l’originalité imparable. Accrocheur et sensible, le bluesman se veut très contemporain, tout en respectant l’héritage de ses aînés, et affiche une touche très personnelle.

SELWYN BIRCHWOOD

« Living In A Burning House »

(Alligator Records)

Après avoir été le guitariste de Sonny Rhodes, SELWYN BIRCHWOOD s’est lancé en solo en 2014 avec « Don’t Call No Ambulance », puis «  Pick Your Poison » deux ans plus tard. C’est sur le prestigieux label Alligator Records que le Floridien livre son troisième album, gage de la qualité et du talent du musicien. Et produit par Tom Hambridge (Buddy Guy, Susan Tedeschi), « Living In A Burning House » est une fois encore très relevé.

Brillamment accompagné par le saxophoniste baryton Regi Oliver, l’expérimenté batteur Philip Walter, le bassiste Donald Wright et Walter May aux claviers, SELWYN BIRCHWOOD fait parler le groove et son feeling à travers un Blues teinté de Rock et de Soul. Joueur de lap steel, on retrouve ce son si particulier au fil de l’album, apportant beaucoup de fraîcheur à des morceaux d’une énergie folle et d’une grande authenticité.

Influencé par Buddy Guy, Muddy Waters et Jimi Hendrix, l’Américain a parfaitement réussi à se créer une réelle identité, très identifiable grâce notamment à sa voix grave, son jeu virevoltant et un humour très présent. Sur une belle dynamique, SELWYN BIRCHWOOD distille ses morceaux avec une envie communicative et contagieuse (« Freaks Come Out At Night », « Can’t Steal My Shine », « I Got Drunk Laid And Stoned », le morceau-titre et « Mama Knows Best », un duo endiablé avec Diunna Greenleaf). Réjouissant !

Catégories
Heavy metal Progressif

Witherfall : chauffé à blanc

Lorsque quatre virtuoses décident de se défouler et de n’en faire qu’à leur tête, ça peut vite tourner au cauchemar… ou au mal de crâne. Avec WITHERFALL, c’est plutôt une explosion de mélodies mêlées à une technique et un groove hors-norme qui prend le dessus. Animés par une rage très virulente, les Californiens sont venus pour en découdre et « Curse Of Autumn » fait ressortir toute la classe de cet incroyable quatuor.   

WITHERFALL

« Curse Of Autumn »

(Century Media)

En seulement deux EP et ce troisième album, WITHERFALL s’est fait une place de choix dans le paysage Metal. Terriblement Heavy, un brin vintage, hyper-technique et très mélodique, le quatuor américain s’est créé un univers autour d’un style unique et original. Il faut dire qu’avec un line-up et une équipe pareille, le quatuor est à même d’en laisser plus d’un sur le carreau. Et pourtant, les Californiens sont en colère et « Curse Of Autumn » a été conçu dans l’optique de régler certains comptes et d’exorciser leur exaspération.

Avec pour ambition d’enterrer littéralement tous ceux qui ont entravé leur parcours, la formation menée par le chanteur et claviériste Joseph Michael et l’incroyable guitariste Jake Dreyer se fait franchement plaisir. Accompagné par Marco Minnemann (Demons & Wizards) derrière les fûts et Anthony Crawford et son groove légendaire à la basse fretless, le duo prend le taureau par les cornes et s’abat comme la vérole sur le bas-clergé… WITHERFALL n’en fait qu’à sa tête en brouillant sans cesse les pistes.

Faisant sans trembler le grand écart entre un Heavy Metal musclé, un Metal Progressif très structuré et un Technical Thrash totalement débridé, les Californiens en rajoutent et ne se perdent jamais. Breaks et ponts à perte de vue, solos à faire pâlir un Malmsteen (« The Last Scar ») et longs titres épiques (« And They All Blew Away », « Tempest »), WITHERFALL met tout le monde à terre entre demonstrations hallucinantes et mélodies radieuses (« As I Lie Awake », « Curse Of Autumn », « The Other Side of Fear »). Juste éblouissant !