Guitariste complet au toucher inimitable et producteur-arrangeur aguerri, PHIL MANCA a multiplié les expériences dans une vie d’artiste bien remplie. Depuis quelques années, c’est en solo qu’il donne librement court à son inspiration, et il s’échappe ici un temps du Blues Rock pour voguer cette fois sous des cieux Hard et Metal avec ce très bon « Layers Of Pain ».
PHIL MANCA
« Layers of Pain »
(Tremolo Prod/Kuroneko)
Après avoir sévi chez TNT, Sortilège, Era et réalisé plusieurs bandes originales de films, le guitariste rentre du Canada où il était parti enregistrer les neufs morceaux de son nouvel album, « Layers Of Pain ». Après « Signs » (2019) et « Dancing Spirits » (2021) qui étaient plutôt dans une veine Blues Rock musclé, PHIL MANCA durcit encore un peu plus le ton et livre un disque de Hard Rock aux tonalités très Heavy.
Entouré d’Eric Lafont à la batterie, de Chris Danetz à la basse et également à la co-production et de Josselin Jobard qui offre une superbe prestation au chant, le musicien, qui assure aussi les claviers et qui a co-produit et arrangé l’ensemble, montre beaucoup de polyvalence. Que ce soit à travers des titres où il passe de riffs bruts en passages assez shred, PHIL MANCA affiche un panel très large.
Si « Layers Of Pain » est costaud, il reste bien sûr quelques lueurs bluesy, dont on se délecte toujours. Grâce à un frontman qui s’adapte très facilement aux multiples ambiances en offrant une vraie couleur au disque, on passe avec fluidité d’un Hard Rock assez classique à un autre plus mélodique et accessible avant de revenir à des compos nettement plus Heavy (« The Race Is On », « Flat Brains », « Night Stalker », « High And Short »). Efficace.
Si sur le papier, il est réduit à deux, « Ticking Twelve » vient démontrer haut la main et point par point que THE WEALTHY HOBOS n’a rien perdu de son mordant. Qu’il soit Hard, Dirty, Heavy ou Rock, le Blues des Parisiens est à la fois tranchant, incisif et palpitant. Une nouvelle ère commence pour les ‘rockin’ bluesmen’ et elle démarre sur les chapeaux de roue.
THE WEALTHY HOBOS
« Ticking Twelve »
(Independant)
Du quatuor de ses débuts, il ne reste chez THE WEALTHY HOBOS que son chanteur et guitariste Sacha Burtin, fermement soutenu par Antoine Gomila, cogneur en chef du power duo. Et s’il a réduit la voilure, le tandem n’a pas pour autant lever le pied et il affiche un Hard Blues très Boogie intense et percutant. Mais pas seulement. Car en s’engouffrant dans un registre façon The Black Crowes ou des ambiances à la Santana, l’éventail proposé est large, et toujours créatif, enjoué et dynamique.
Après un premier album en 2014 (« Everybody Needs Some Change ») et un EP trois ans plus tard (« Piece Of Chic »), THE WEALTHY HOBOS a donc pris la décision d’évoluer à deux, s’ouvrant ainsi un nouveau départ. Et c’est plutôt une bonne chose compte tenu de la qualité de « Ticking Twelve », tant au niveau de l’interprétation, de la diversité des ambiances et de la production, qui est aussi roots dans l’approche que soignée dans les arrangements et qui manquent donc pas de couleur.
En alternant guitare et cigar box, THE WEALTHY HOBOS apporte un aspect rugueux et presque Stoner à son jeu et ce n’est pas sa seule particularité. Il a en effet eu la bonne idée d’inviter quelques amis, dont la contribution offre beaucoup de relief et de chaleur aux morceaux. La basse, les cuivres, l’orgue, les chœurs, le saxophone et la flûte (« Mantra Dystopia ») enrobent magnifiquement les titres (« Do I Look Like I Give A Funk », « Turn It (All Around) », « Stuck Behind Open Doors », « Misery Song », « Burn Baby Burn »). Savoureux.
Si les duos fleurissent un peu partout dans l’hexagone, il faut reconnaître qu’ils s’en sortent plutôt bien, tant les styles abordés révèlent une approche créative et efficace. Les Normands de LADY’STEALER s’inscrivent précisément dans cette vague de groupes à la fois complet et tout en maîtrise. On peut sentir toute l’expérience acquise sur scène par le duo, qui livre un bouillonnant « Like It Hot ! » sur un plateau… dans lequel on se ressert à l’envie !
LADY’STEALER
« Like it Hot »
(Independant)
Des saveurs du Bayou émanent de ce premier opus de LADY’STEALER. C’est pourtant depuis leur Normandie que Thomas Dorange (chant, batterie) et Julien Tellier (guitare, harmonica) se sont lancés dans cette belle aventure devenue, après avoir écumé de nombreuses scènes, aujourd’hui très concrète avec la sortie de « Like It Hot ! », entièrement autoproduit et né de la contribution participative de leurs fans. Un gage de fidélité, s’il en est.
Entre Blues et Metal, Stoner et Rock, LADY’STEALER se montre captivant dès les premières notes de « Liar And Slave » et ne lâche plus le morceau une seule seconde jusqu’à « Chuckholes Blues ». Gras et épais, les riffs transpirent les effluves très Southern du duo et les refrains entêtants distillés par la voix éraillée de son chanteur viennent apporter autant de puissance que de mélodie à cet explosif « Like It Hot ! ». Le rythme est soutenu et percute !
De l’obsédant « The Witch Of Yazoo City » à « Midnight Ride » en passant par le Boogie Blues « Dead Man Boogie », LADY’STEALER nous emporte dans une belle frénésie sur une cadence infernale. Et même si la batterie est loin de se faire discrète, c’est pourtant ce Blues musclé aux accents sudistes et à l’énergie folle, ponctué de quelques slides, qui tient la baraque et qui offre cette chaleur à l’album (« Demons Inside Me », « Chasing Men »). Caliente !
Né à Madrid de parents argentins, Javier Vargas a monté le VARGAS BLUES BAND en 1991 et a multiplié les distinctions et les disques de platine. Homme de scène, ses albums sont d’une authenticité qui rend un hommage constant aux racines du Blues, tout y incluant des sonorités très Rock, Classic Rock et parfois même Hard Rock. Egalement très prolifique, l’Espagnol vient de sortir « Stoner Night » dans une version classique, en même temps qu’une ‘Edition Deluxe’. Entretien avec un guitariste inspiré.
– Si j’ai bien compté, « Stoner Night » et son Edition Deluxe, sont tes 26 et 27ème albums depuis « Del Sur », sorti il y a trois ans. Depuis plus de trois décennies, tu tiens un rythme très soutenu et pourtant, on sent toujours cette même décontraction dans ton jeu. Comment l’expliques-tu ? C’est juste le plaisir de jouer ?
Avec ma guitare, j’aime me laisser emporter par le ressenti et aussi respirer chaque note que je joue. J’ai toujours fui les artifices. Je cherche avant tout à servir le morceau et je créé les ambiances grâce aux riffs et aux accords. C’est vrai que j’aime jouer détendu, mais en restant concentré et sans oublier la mélodie. Pour transmettre une émotion, il suffit parfois d’une seule note.
– Sur tes précédents albums, tu faisais beaucoup de morceaux instrumentaux et il y en a d’ailleurs toujours sur ceux-ci. Cette fois, tu as ressenti le besoin que l’on pose plus de textes sur ta musique ?
J’aime toujours la musique instrumentale et beaucoup de mes plus grands succès ont été des morceaux instrumentaux. Mais pour ce nouveau projet, j’ai eu besoin de jouer avec du texte et dans une formule en power trio avec un chanteur très old school et Merrick (Wells, chanteur – NDR) m’a aussi aidé sur les paroles. Cela a vraiment été comme un processus de guérison dans lequel nous avons exprimé ce que nous ressentons après ces années sombres, qui sont aujourd’hui derrière nous.
– L’album sort donc dans une version simple et classique, mais aussi en Edition Deluxe. Comment est née l’idée de sortir deux disques distincts et non pas directement l’édition augmentée ?
Vingt chansons avaient été enregistrées et j’ai pensé alors offrir aux fans autre chose qu’un simple album à écouter en conduisant, ou en se relaxant chez soi. Il y a un bon mélange de Blues, de Rock, d’instrumentaux et certains morceaux, qui sortiront dans un futur ‘Volume 2’ en streaming, sont vraiment expérimentaux. J’y ai joué tous les instruments, y compris la basse et les claviers.
– Par ailleurs, « Stoner Night » se présente aussi avec deux pochettes différentes avec une identité que l’on retrouve sur les deux disques. Qui a travaillé sur le graphisme et avais-tu déjà une idée précise de ce que tu voulais ?
Le logo a été créé par le légendaire Bob Masse, qui a créé les affiches de ‘Fillmore West’ (légendaire salle de concert de San Francisco – NDR). Je l’avais rencontré à Calgary. Il m’avait donné une affiche avec ce logo lors d’un concert et je l’utilise depuis. Récemment quand nous avons commencé à concevoir les pochettes et les illustrations de « Stoner Night », j’ai rencontré une illustratrice et dessinatrice de bande dessinée, qui s’appelle Sonja Brocal. Elle a fait un travail extraordinaire sur les deux albums avec des illustrations inspirées des 70’s pour chaque chanson.
– Il y a aussi des tracklists différentes sur les deux albums. Et puis, tu reprends aussi Muddy Waters, Chester Burnett et Chuck Berry. Comment s’est porté ton choix sur ces morceaux ? Tu les joues peut-être déjà régulièrement sur scène ?
J’ai toujours aimé jouer les classiques du Blues et mes préférés sont sur cet album. Mais je n’exclue pas un jour de rendre hommage à tous ces merveilleux bluesmen et d’en faire une compilation. En décembre prochain, j’enregistrerai d’ailleurs un album live, où je jouerai plus de classiques, avec ma signature bien sûr, et également avec un invité spécial de Chicago.
– L’énergie et l’intensité sont toujours très présentes sur tes albums. Tu produis d’ailleurs « Stoner Night » qui sonne très live. Dans quelles conditions as-tu procédé pour ses nouveaux enregistrements ? J’imagine que tu as suivi chaque étape de la production…
Hormis les morceaux plus expérimentaux du ‘Volume 2’, nous avons enregistré tous ensemble en studio dans une grande salle en nous laissant porter par la musicalité du lieu. J’aime ne pas perdre de temps en studio, car les premières prises sont souvent les meilleures.
– On le sait, les bluesmen en particulier sont très attachés à leur instrument et notamment les guitaristes. Tu jours sur une emblématique Stratocaster. Est-ce que tu as toujours préféré les Fender, ou est-ce que tu t’es déjà essayé à d’autres marques et types de guitares auparavant ?
J’ai toujours joué sur des Stratocaster et des Telecaster. Mais dans le passé, j’ai aussi utilisé des Les Paul et des Les Paul Junior. Et l’une de mes préférées est la Yamaha Mike Stern, qui a un son incroyable.
– Enfin, on sait que tu tournes beaucoup. Quels sont les prochains grands rendez-vous que tu attends avec le plus d’impatience et est-ce que tu feras un passage par la France aussi ?
Ces deux prochaines années, nous allons jouer en Europe et en Amérique. Nous serions ravis de revenir en France où nous savons que nous avons beaucoup de fans. D’ailleurs, je garde de très bons souvenirs des concerts que nous avons donnés dans votre pays. Alors, à bientôt sur la route !