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Death Mélodique Funeral Doom Metal

Angmodnes : les abysses de l’âme

Devenu trio pour cette nouvelle réalisation, les Hollandais continuent l’exploration de leur Doom aux ramifications Funeral, Death et post-Black Metal avec « The Rot Of The Soul ». Très bien produit, ce nouvel album se lance dans une immersion mélancolique au cœur de sentiments qui viennent se heurter sans ménagement. ANGMODNES en fait pourtant découler une certaine élégance, pourtant meurtrie par un sujet difficile à aborder. Techniquement irréprochables, il nous entraîne dans un tourbillon de sensations.

ANGMODNES

« Rot Of The Soul »

(Meuse Music Records/Tragedy Productions)

Pourtant formé en 2013, à Utrecht aux Pays-Bas, il aura fallu attendre neuf longues années avant que ne sorte « The Weight Of Eternity », un EP sur lequel ANGMODNES a bâti les fondations de son Funeral Doom Metal. Composé de M.V. (batterie) et d’Y.S. (guitare, basse, chant), le duo s’est extrait de son groupe Apotelesma pour ce nouveau projet. Cette fois aussi, les Hollandais officialisent l’arrivée de F.S. au chant, qui était d’ailleurs déjà apparue sur le premier effort il y a deux ans. Une présence féminine qui apporte un brin de légèreté avec des choeurs captivants et lumineux dans cet océan de ténèbres.

Car sur « Rot Of The Soul », le propos est forcément sombre et parler de mélancolie est même un doux euphémisme. ANGMODNES, qui tient d’ailleurs son nom de l’anglais ancien signifiant ‘angoisse’ ou ‘chagrin’, nous plonge dans les obscures pensées d’un protagoniste en proie à une profonde dépression. Et au fil de l’écoute et de ses interrogations, c’est assez saisissant de voir de quelle manière le trio aborde le sujet en multipliant les atmosphères, comme les sonorités, se faisant peu à peu envoûtant, tant on passe d’émotion en émotion avec une fluidité et une progression incroyables.

L’utilisation, avec parcimonie, du piano sur certaines intros notamment accentue encore la dramaturgie des morceaux dépassant pour l’essentiel largement les dix minutes, et instaure un climat qui s’assombrit et se durcit méthodiquement. Entre growl et chant clair, passages presque Lo-Fi et fulgurances Black Metal, ANGMODNES se livre à l’envie dans un Death/Doom mélodique, dont les structures témoignent de la mise en place d’une atmosphère très personnelle. Difficile d’en extraire un titre plus qu’un autre, tant « The Rot Of The Soul » se montre inspiré. Un travail d’orfèvre.

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Black Metal Death Mélodique

AcoD : prose ténébreuse

Devenu incontournable au sein de la scène extrême hexagonale depuis une petite vingtaine d’années bientôt, le duo marseillais enchaîne les excellents disques (quatre au total, dont les très bons « Divine Triumph » et « Fourth Reign Over Opacities And Beyond »), deux EPs et des prestations scéniques marquantes. L’annonce de la sortie de « Versets Noirs » chez les Néerlandais de Hammerheart peut aussi surprendre, car la formation ne fait plus partie des ‘Acteurs de l’Ombre’ et vise dorénavant l’international avec l’Europe en ligne de mire.

ACOD

« Versets Noirs »

(Hammerheart Records)

ACOD semble vouloir prendre un nouveau départ avec« Versets Noirs » et cela commence avec une pochette très différente des précédentes. On découvre ici un gros plan sur un visage en noir et blanc avec un œil sortant d’une bouche alors que, précédemment, la palette utilisée jouait sur les tons chauds et les monstruosités lovecraftiennes. De même, le premier morceau, « Habentis Malefica », s’étend sur une vingtaine de minutes, alors qu’auparavant ils excédaient rarement les cinq. Une longueur cependant réjouissante et même obsédante. On en vient même à perdre toute notion temporelle.

D’entrée, « Habentis Maleficia » place la barre très haute. Les passages alternent dans un Metal extrême entre des moments calmes et aériens, un sens du riff soutenu par une production très propre (sans devenir lisse et insipide) et un jeu de batterie qui offre une base solide et entraînante. Pour ouvrir « Versets Noirs », ACOD a osé le pari et il est beau ! Les trois titres originaux qui suivent sont dans la même veine. Efficaces, ils laissent toutefois une place à quelques chœurs, des moments plus apaisés et apporte même un bel équilibre à ce nouvel opus dont le concept vient entretenir l’histoire développée par le tandem.

A noter la reprise du classique des Suisses de Samael « Black Trip » (figurant sur « Ceremony of Opposites », sorti en 1994) en conclusion de l’album. Si celle-ci est intéressante et se fond bien dans l’ensemble, force est de constater que « Habentis Malefica » est LE morceau à retenir. Peut-être trop bon (avec un riff incroyable à 16’30 !), il fait de l’ombre aux autres, pourtant d’excellente facture. En tout cas, ACOD est en pleine forme et découvrir cette nouvelle réalisation sur scène devrait sans nul doute être mémorable ! Entre Black Metal et Death Mélodique, les Phocéens ont trouvé la formule gagnante.

Emilien Nohaïc

Photo : Cana Prod
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Concerts Dungeon Synth

Dark Dungeon Festival II : le saint du Synth

Les 12 et 13 avril derniers se tenait au château d’Avouerie à Anthisnes, près de Liège en Belgique, la deuxième édition du DARK DUNGEON FESTIVAL. Entièrement dédié au Dungeon Synth, l’évènement a rapidement affiché complet dans ce lieu aussi énigmatique que les artistes qui s’y sont produits. Je l’avoue humblement, j’ai avancé un peu dans l’inconnu, mais non sans enthousiasme et mon habituelle soif de découverte. D’ailleurs, comme pour me rassurer, un membre de l’organisation me confiait que nous étions ici ‘dans la niche des niches’ ! Alors, plutôt qu’un banal ‘live report’, je vais plutôt vous livrer quelques explications, ainsi que mes sensations sur ce style assez atypique et cette ambiance très attachante également. 

Azgirath The Metal Statue

Les puristes ne m’en voudront certainement pas, mais comme nous sommes plusieurs à ne pas, ou très peu, connaître le Dungeon Synth, quelques précisions s’imposent d’autant qu’elles ont été recueillies auprès de spécialistes et de fans, qui se sont d’ailleurs faits une joie de m’initier. Et le plus troublant est que toutes les versions se recoupent dans les moindres détails. Apparu donc au début des années 90 et surtout par le biais d’artistes issus du Black Metal, le style est essentiellement électronique, même s’il dégage des atmosphères étonnamment organiques. Inspiré de la littérature Fantasy et de la tradition païenne avec des thématiques souvent folkloriques et ésotériques, le Dungeon Synth trouve aussi racine dans l’univers de Tolkien comme dans celui de ‘Donjons & Dragons’, avec une touche de médiéval.

Inutile de préciser que le château d’Avouerie était le lieu tout indiqué pour ce deuxième épisode du DARK DUNGEON FESTIVAL, certes très dark, mais toujours très bienveillant. Sourire de mise donc, et tenues noires exigées. Mais qu’en est-il musicalement ? Du Black Metal ? Non, pas vraiment. Nous sommes plutôt dans un mood assez soft et parfois presque contemplatif, sauf pour les Allemands de Gothmog, qui ont franchement secoué l’assemblée. Il faut imaginer que le Dungeon Synth est né de l’inspiration des musiciens qui créent les intros, les outros et les interludes d’albums de Black Metal notamment. Et on y retrouve aussi des ambiances propres à l’Ambient, au Synthwave, à la New-Wave et en cherchant bien quelques effluves New-Age se dégagent aussi. Pourtant, loin d’être franchement planant, c’est au contraire très envoûtant, voire hypnotique.

Le château d’Avouerie

Et quid de l’affiche de cette édition 2024 ? Selon le public, on a atteint des sommets, tant dans la variété que dans la qualité des artistes présents, qui s’inscrivent dans le haut du panier du genre. Alors, pour n’oublier et ne froisser personne, étaient présents : Mortiis (Norvège), Bataille (France), Depressive Silence (Allemagne), Dim (Etats-Unis), Gothmog (Allemagne), Henbane (Danemark), Hyver (France), Malfet (Etats-Unis), Mørke Og Lys (Grèce), Sombre Arcane (Etats-Unis), Weress (France), Wydraddear (France) et Örnatorpet (Suède). Un beau panel pour les adeptes de Dungeon Synth, comme pour les néophytes comme moi et l’occasion surtout de parcourir un grand nombre des tendances à l’œuvre dans ce registre si particulier. Car chaque formation se distingue et apporte sa pierre à ce bel et original édifice.

Voilà, vous l’aurez compris, je suis rentré enchanté de ces deux jours au DARK DUNGEON FESTIVAL II, avec des images et des sonorités, auxquelles je ne suis pas forcément habitué, plein la tête ! Et ce fut aussi un vrai plaisir de pouvoir échanger tranquillement avec de nombreux artistes, qui ont eu la patience de contribuer à parfaire ma connaissance et mon apprentissage au Dungeon Synth… sans compter les gens, toujours prompts à s’épancher sur cette musique qui leur tient vraiment à coeur ! On ne voit pas ce genre d’attitude dans beaucoup de festivals, croyez-moi, et c’est là où cette deuxième édition est également une réussite totale. Sans a priori, sans préjugé et sans jugement, ce fut une belle réunion de passionnés à l’état d’esprit ouvert et particulièrement chaleureux. Que cette ‘famille’ est belle !

Je souhaite aussi terminer cette petite ‘carte postale’ de mon escapade belge depuis l’extrémité de ma belle Bretagne en remerciant Denis Halleux, Estéban Lebron-Ruiz et toute l’équipe d’AZ Live pour leur accueil, leur gentillesse et cette organisation parfaite. Un grand clin d’œil aussi à mes amis grecs de Mørke Og Lys, ainsi qu’à Wydraddear et l’ami Emilien des Editions Des Flammes Noires qui m’a permis de me joindre aux Danois, aux Allemands, aux Hollandais, aux Suédois, aux Belges, à l’Américaine, aux Français, aux Bretons même et tous les autres avec qui j’ai pu partager de très agréables moments. Merci à toutes et à tous… et à l’année prochaine ! 

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Death Metal International

Deicide : la bénédiction du bannissement [Interview]

Pierre angulaire du groupe au côté du frontman Glenn Benton, Steve Asheim est le co-fondateur, le batteur et le principal compositeur de DEICIDE. Quelques décennies après la formation de l’emblématique combo Death Metal de Floride, le quatuor s’apprête à sortir « Banished By Sin », un nouvel album qui s’inscrit dans la lignée tracée par les Américains. Un brin Old School, une imagerie toujours sataniste, les ingrédients n’ont pas changé, mais la recette est efficace et semble plaire au légendaire cogneur américain. Entretien avec un musicien au regard très lucide.

Photo : Gene Smirnov

– Avant de parler de ce nouvel album, j’aimerais que tu nous dises un mot sur l’évolution de la scène Death Metal, puisque DEICIDE fait partie des précurseurs du genre depuis plus de 35 ans maintenant ? Vous sentez quelque part un peu garant et responsable de cet héritage ?

A l’époque où le groupe a débuté, le Thrash était à son apogée. Metallica, Slayer, Dark Angel et Destruction faisaient partie de mes groupes préférés. Le Death Metal n’en était qu’à ses balbutiements. Il y avait un, peut-être deux groupes, Death et Possessed, ce qui est d’ailleurs discutable, parce qu’ils étaient considérés comme du Thrash par la plupart. Et les groupes locaux étaient les seuls que je connaissais. Ils n’étaient pas tous signés à l’époque, donc personne en dehors de la scène locale n’en avait vraiment entendu parler. En ce sens, je suppose que nous étions tous des précurseurs de cette scène, comme tu dis. Et c’est bien de faire partie des fondations de quelque chose, comme on dit, cela cimente vraiment votre position dans une certaine lignée au fil des années, et quoi qu’on en dise.

– DEICIDE vient de ce que l’on appelait autre fois la ‘Mecque du Death Metal’ ou le ‘Temple du Death Metal’, un joyeux paradoxe d’ailleurs, à savoir Tampa en Floride. Est-ce que ce son si spécifique existe toujours, selon toi, en dehors de vous bien sûr ? Qu’en reste-t-il aujourd’hui, elle qui fut si prédominante dans les années 80/90 ?

Juste à cette époque ? Pour autant que je sache, c’est toujours le cas. D’ailleurs, pourquoi cela ne le serait-il plus ? (rires) Je pense que ce son peut être attribué aux studios Morrisound et aux techniques et aux équipements qu’ils ont utilisés. Il y avait des groupes aux sonorités très différentes, stylistiquement parlant, mais le véritable son, la qualité de la production, ainsi que la cohérence, ouais… On peut l’attribuer aux studios Morrisound et aux gens qui y travaillaient, à savoir les frères Morris, Jim et Tom, et bien sûr Scott Burns.

Photo : Gene Smirnov

– « Banished by Sin » est votre treizième album et ce qu’il y a de fascinant chez DEICIDE, c’est que vous n’avez jamais renié votre musique, votre approche et votre son. C’est un cap que vous tenez absolument à maintenir, ou situez-vous justement le groupe au-dessus des modes et des courants ?

Eh bien, une fois que nous avons atteint notre marque de production, notre style était assez unique et c’était vraiment le nôtre. Et c’est quelque chose à laquelle nous voulions nous accrocher. Cela a bien fonctionné pour nous et c’est toujours le cas. Je ne pense pas que nous ayons jamais suivi d’autres tendances que la nôtre, et ça marche très bien. Donc, si ce n’est pas cassé, ne le réparez pas, comme on dit ! (Sourires)

– D’ailleurs, « Banished By Sin » conserve ce petit côté Old School rageur et ravageur. On se retrouve presque plonger dans le temps quelque part entre « Legion » et The Stench Of Redemption », deux périodes pourtant très distinctes. Vous aviez une volonté de faire le lien entre ces deux époques majeures pour vous ?

Ce n’est pas quelque chose que nous avons essayé de réaliser intentionnellement, c’est plutôt arrivé très naturellement.  Mais je vois ce que tu veux dire par là. C’est notre style, tu sais. La manière dont il a évolué est en quelque sorte une progression naturelle. Ce n’est pas quelque chose sur laquelle nous avons dû travailler. Tout a simplement suivi un chemin, qui est devenu son propre truc.

– Un mot tout de même sur un chiffre pas si anodin pour vous. « Banished By Sin » est votre treizième album, ce qui doit aussi vous réjouir. Y voyez-vous un signe ? Et y avez-vous porté plus de travail en amont pour faire en sorte qu’il reste dans les annales du Death Metal ?

Oui, 13 est un grand nombre, tu sais. Comme le 13 malchanceux, ou 1313, l’allée des oiseaux moqueurs où vivent les monstres (Rires)… Sa signification ne nous échappe pas, c’est donc plutôt une étape amusante à franchir. Et puis, 13 représente beaucoup d’albums pour un groupe, donc c’est un sacré exploit en soi. Mais j’espère que 13 sera un chiffre porte-bonheur pour nous et que ce disque pourra perdurer et réaliser de grandes choses pour nous. Comme tu dis, rester dans les annales du Death Metal, ce serait bien.

Steve Asheim

– Il y a une chose qui est inamovible chez DEICIDE depuis vos débuts, c’est la brutalité de votre style. Certains groupes le sont peut-être encore plus, mais chez vous, c’est méthodique. Est-ce la première chose sur laquelle vous vous penchez avant même le contenu ? La façon de faire ?

Le style n’est que la progression naturelle des musiciens qui le jouent. C’est donc ce qui le rend unique. C’est si personnel pour nous, tout comme le son de notre Death Metal. DEICIDE est un groupe vraiment unique, parce que notre son l’est. Et c’est une bonne chose. Cela aide aussi à se démarquer des autres, ça confirme notre propre identité et la rend reconnaissable.

– Sur « Banished By Sin », on sent aussi un certain enthousiasme dans cette frénésie sonore et musicale. On a le sentiment que vous avez retrouvé une énergie, qui s’était peut-être un peu atténuée sur les derniers albums. C’est le cas ?

J’ai trouvé les derniers disques plutôt bons, mais « Banished By Sin » semble bénéficier d’une progression assez naturelle par rapport aux autres. Et ils ont une énergie similaire dans ce sens. Mais oui, je suis d’accord avec toi, cet album a quelque chose de spécial.

– On ne va pas revenir sur les polémiques, les provocations et les multiples controverses qui ont jalonné l’histoire de DEICIDE, mais sortir « Banished By Sin » le ‘mercredi des Cendres’, jour d’observance religieuse chrétienne, s’il en est, n’est pas anodin. Les vieux combats sont toujours d’actualité ?

Ouais, tu connais les maisons de disques. Elles adorent ce genre de coups marketing et celui-là est leur idée. Et ça conserve et entretient aussi un petit côté malsain, je suppose. Et quitte à le sortir un jour précis, autant rendre la chose intéressante, mémorable et amusante !

Photo : Gene Smirnov

– Restons un moment sur la religion. DEICIDE a toujours affirmé être un groupe sataniste opposé au christianisme. Quel regard portes-tu sur la situation géopolitique mondiale avec la montée de l’intégrisme religieux un peu partout et le brutal conflit au Proche-Orient en Palestine ? Est-ce que ce sont aussi des sujets qui pourraient vous parler et vous inspirer ?

Les conflits mondiaux, je m’en fous complètement. Le monde a toujours été en conflit pour une raison ou une autre et le sera toujours. C’est une chose sur laquelle tu peux être sûr. Et si ce n’est pas pour la religion, ce sera pour une question de territoire, d’économie ou pour toute autre raison. S’il y a une chose sur laquelle vous pouvez compter par rapport aux gens et aux nations, c’est bien le conflit.

– Par ailleurs, en raison du style de votre Death Metal, ainsi que votre démarche, on ne peut s’empêcher de penser au Black Metal auquel vous avez toujours été opposés. Il n’y a toujours, selon toi, aucune relation directe entre votre musique et certaines revendications ou convictions ?

Je ne sais pas pourquoi tu dis que nous sommes opposés au Black Metal. Nous connaissons énormément de groupes depuis des années et nous avons tourné avec beaucoup d’entre eux. C’est pratiquement la même musique dans un sens, en tout cas pour un observateur occasionnel. Peut-être que le Death Metal a un côté plus écrasant dans l’élaboration des riffs. Mais en général, ils sont assez similaires, en particulier dans les paroles. Ils sont certainement à la fois lourds comme l’enfer, malades et brutaux, et ce sont tous de grands dénominateurs communs.

Photo : Gene Smirnov

– En tant que vétéran et fondateur d’un registre auquel DEICIDE est indissociable, que penses-tu de l’actuelle scène Death Metal ? Y a-t-il quelques groupes que tu pourrais considérer comme le renouveau du genre, ou du moins la continuité de ce que vous avez amorcé en 1990 avec votre premier album éponyme ?

Pas vraiment. Encore une fois, certains sous-genres existent juste à travers une certaine définition de ce qu’ils font et qu’ils se sont eux-mêmes donnés. Mais encore une fois, pour un observateur extérieur, tout est assez similaire. Cela dit, avec les jeunes groupes surtout, c’est agréable de les entendre garder cet esprit vivant et le faire avancer et évoluer dans la forme.

– DEICIDE conserve ce son très Old School, et on a d’ailleurs du mal à imaginer les choses autrement. Mais est-ce que vous avez déjà été tenté par des expériences musicales, qui vous en feraient peut-être dévier ?

Bien sûr, de nouvelles influences s’insinuent de temps en temps dans notre son et cela peut aider le groupe à évoluer, je pense. Mais nous sommes ce que nous sommes et il est difficile de s’en écarter de trop.

– Enfin pour bien faire les choses, il fallait bien une treizième question ! Vous allez reprendre le chemin des concerts très bientôt avec même un détour par la France cet été. Vous comptez mettre l’accent sur ce nouvel album, ou avec une discographie désormais conséquente, vous jouerez également vos classiques ?

Nous jouerons toujours les classiques que les gens veulent entendre, ça c’est une certitude. Quant aux nouveaux morceaux, nous verrons quelles chansons résonnent le plus auprès du public et nous jouerons sûrement certaines d’entre elles pour tout le monde. Nous voulons essayer de garder nos fans heureux, car cela nous rend heureux !

Le nouvel et treizième album de DEICIDE, « Banished By Sin » sortira le 26 avril chez Reigning Phoenix Music (RPM)

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Groove Metal Hard-Core Thrash Metal

Swarm : un groove exponentiel

La scène Metal française ne s’est jamais aussi bien portée et SWARM en est le parfait exemple. Malgré une exposition bien trop discrète, la formation d’Antibes enchaîne les concerts et les albums depuis une bonne décennie maintenant. Le groove brutal et mélodique à l’œuvre sur « Omerta » devrait sans mal conquérir les fans de Thrash Hard-Core aux riffs tranchants et aux solos survoltés. Cette belle offrande décibélique ne doit rien au hasard, tant le groupe monte en puissance à chaque disque.  

SWARM

« Omerta »

(Independant)

Il y a cinq ans déjà, SWARM m’avait déjà fait forte impression avec « Anathema », son deuxième album. Le successeur de « Division & Disharmony » (2017) sortait d’ailleurs en indépendant ce qui, vu sa qualité, tenait de l’hérésie en comparaison d’autres productions supportées par un label. Ensuite, le combo nous a fait patienter avec « Mad In France », un EP paru l’an dernier, doté de six titres explosifs, où il a encore peaufiné un style basé sur un Groove Metal teinté de Thrash et de Hard-Core à la redoutable efficacité. Son registre semble être cette fois arrivé à maturité, car la force déployée est monumentale.  

D’ailleurs à l’époque de la parution du format court, beaucoup se sont interrogés, car le troisième opus était a priori déjà en boîte. Cela dit, ça valait vraiment la peine d’attendre, car « Omerta » montre et démontre que SWARM fait bel et bien partie du haut du panier de la scène hexagonale. Toujours enregistré et mixé au studio Artmusic dans le Var par Sebastien Camhi, le mastering a été confié au grand Jacob Hansen et le moins que l’on puisse dire est que ce nouvel effort a du coffre, du relief et dégage une folle et dévastatrice énergie. Tous les ingrédients sont réunis et les feux sont au vert.

« Omerta » ouvre avec « Alsamt », une belle intro instrumentale, acoustique et solaire. Mais SWARM, c’est d’abord deux guitares qui claquent, une rythmique qui bastonne et un chant accrocheur et varié. Musclée et massive, cette nouvelle réalisation présente un bel équilibre et balance bombe sur bombe (« Step By Step », « Suicidal Dreams », « Make Your Move », « My Inner »). Le quintet s’offre aussi une brève accalmie (« DeAD Inside »), quelques phrasés en français (« Clink And Come End ») avant de clore magistralement les débats avec l’excellent « First Class », l’ultime et brillant joyau d’« Omerta ». Bien joué !

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Power metal Speed Metal Thrash Metal

Rage : un Metal généreux

Depuis quatre décennies, Peavy Wagner est l’indétrônable fondateur, bassiste et frontman de RAGE, véritable institution outre-Rhin et bien au-delà. Avec près de 25 albums au compteur, sa passion et sa vigueur le guident et donnent ce même élan dévastateur qui constitue son ADN. Fort d’un Power Metal traditionnel très varié, ils sont maintenant trois à nous mener dans cette nouvelle réalisation, « Afterlifelines », très ambitieuse, surprenante et où ils ont vu double !

RAGE

« Afterlifelines »

(Steamhammer/SPV)

Pour fêter dignement ses 40 ans d’existence, RAGE a fait les choses en grand et offre en cadeau à ses fans, « Afterlifelines », un double-album de plus de 90 minutes. Une belle somme de travail que l’on doit à l’inoxydable Peter ‘Peavy’ Wagner aux manettes depuis 1984, à Jean Bormann (guitare) et à Vassilios ‘Lucky’ Maniatopoulos (batterie). Le quatuor est donc désormais trio depuis le départ du guitariste Stefan Weber après la sortie de « Resurrection Day » il y a trois ans. En tout cas, l’envie et la férocité sont intactes.

Produit par ses soins et enregistré dans son propre studio de Leverkusen, « Afterlifelines » combine de multiples courants, sans autant que RAGE ne perde le fil malgré une petite vingtaine de nouveaux morceaux. Les Allemands promettent l’apocalypse et ils s’y tiennent. Sur le premier CD intitulé « Afterlife », on retrouve le combo dans sa formule ‘classique’, basée sur un Power Metal à l’ancienne entre Speed et Thrash. Toujours garant de cette touche très teutonne, Peavy et ses hommes martèlent leur Metal avec conviction.

Le second CD, « Lifelines », est quant à lui très différent musicalement, même si l’identité du groupe est toujours aussi identifiable. La raison principale est la présence du claviériste Marco Grasshoff (AngelInc, PowerWorld), qui est venu orchestrer cette deuxième partie. Sans véritablement tomber dans le Symphonique pur jus, RAGE se déploie sur des arrangements de cordes, de piano et de synthés propres à un Heavy plus souple et mélodique. « Afterlifelines » montre un visage nouveau et très moderne, sans oublier de bien cogner !

Photo : Oliver Bob

Retrouvez la chronique de « Resurrection Day » :

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Black Metal Post-Black Metal

Ecr.Linf : l’infâme écrasé

Groupe de Black Metal moderne, ECR.LINF sort un premier album fracassant : « Belluaires ». Quatuor parisien actif sur la scène extrême depuis plusieurs années, ce nouveau projet promet d’en surprendre plus grâce à un son dense et une dynamique plutôt rare dans le genre. Issu de longues discussions et de réflexions sur la nature humaine, cet opus très voltairien ne va pas laisser pas grand-monde indifférent et risque même d’en bousculer plus d’un… et pourquoi pas de conquérir de nouveaux adeptes !

ECR.LINF

« Belluaires »

(My Kingdom Music/Source Atone Records)

Concevoir un disque n’a jamais été aussi simple, parvenir à se démarquer et à sortir du lot n’a jamais été aussi difficile. Si « Belluaires » est la première réalisation d’ECR.LINF (‘Ecrasons l’Infâme– NDR), ce n’est pas une première pour la sauvage équipe à l’œuvre. En effet, Krys (chant), Dorian (guitare), Rémi (batterie) et Jiu (basse) jouent, ou ont joué, dans différents groupes qui ont marqué les esprits ces dernières années : Demande A La Poussière, Hyrgal, Igorrr, Svart Crown, Jarell… Il s’agit donc d’une nouvelle étape dans leur histoire musicale. Les musiciens ont une belle maîtrise des codes du genre, ici le Black Metal, et savent jouer avec pour proposer une production moderne, à laquelle on ne s’attendait pas. Et la surprise n’en est que plus belle !

Dans un format classique de huit titres d’une durée presque égale (sauf les deux derniers), il ne s’agit pas là d’un blast-beat sans âme et de tremolo picking baveux sur un cri mal maîtrisé. Les morceaux d’ECR.LINF sont bien équilibrés, avec des passages plus posés et apaisés, mettant en lumière la violence et l’acharnement des moments extrêmes. De même, l’accordéon, les chœurs, les moments parlés ou chuchotés, les guitares sèches s’invitent intelligemment et apportent une belle nuance à un ensemble célébrant la crasse humaine. Saluons aussi la qualité du chant qui reste compréhensible. La progression est cohérente et ce n’est pas une surprise si le dernier titre, « Valetaille », résonne longuement entre les tympans, grâce à un refrain particulièrement efficace. « Feu Pâle » est l’outro, et la porte de sortie qui permet de relancer le CD.

C’est vraiment rafraîchissant de voir ECR.LINF marcher dans les pas de références qui ont réussi à casser les codes et moderniser cette musique. Regarde les Hommes Tomber, Blut Aus Nord, Great Old Ones viennent à l’esprit assez rapidement, et pour un premier effort, ça en jette ! Il n’est pas nécessaire d’être un inconditionnel du genre pour l’apprécier. Passé le mur du son, c’est vraiment un ensemble solide et subtil qui se laisse facilement écouter. Bref, il sera difficile de se lasser. Quant à savoir si on pourra les voir bientôt sur scène, la réponse de Dorian est sans appel : « nous préparons doucement le live, nous ne voulons pas nous précipiter afin de rendre hommage à cet album et proposer des performances mémorables ».

Emilien Nohaïc

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Post-HardCore

Junon : viscéral

Sorte de mariage forcé entre souffrance et colère et entre mélodies et brutalité, « Dragging Bodies To The Fall » se lit comme une plaie que la formation de Béthune ne cherche d’ailleurs pas forcément à refermer ou à panser, mais plutôt à extraire. Les morceaux sont combatifs, jamais résignés, ils prennent aussi de la hauteur dans des sphères plus élevées laissant passer un halo de lumière dans cette noirceur, parfois abyssale. Tout en contrôle, JUNON met la pression, impose son style et son jeu avec autant de force que de précision.  Un véritable modèle du genre !  

JUNON

« Dragging Bodies To The Fall»

(Source Atone Records)

La tension est loin d’être retombée chez JUNON. Il y a deux ans, les Nordistes nous avaient livré avec l’EP « The Shadow Lenghten » (2021) un avant-goût de son Post-HardCore à travers quatre morceaux, qui avaient déjà fait l’effet d’une bombe à fragmentation. Aussi changeants qu’insaisissables, ils se présentent cette fois sur la longueur avec « Dragging Bodies To The Fall », un premier album où ils se déploient dans une certaine fureur. Avec Francis Castre du Studio Sainte-Marthe aux commandes, les ex-General Lee ont mis toutes les chances de leur côté et l’ensemble bénéficie d’une production massive et équilibrée.

Parce que sans un son irréprochable, impossible de saisir toutes les subtilités à l’œuvre ici. JUNON dispose toujours de ce mur de guitare, formé par ses trois six-cordistes, qui trouvent vraiment l’harmonie dans ce dédale de riffs. Mais on est loin du chaos. Personne ne joue sa partition dans son coin, et chacun œuvre à une même dynamique. Là aussi, toute la pertinence du jeu du sextet se trouve dans les détails… et ils sont nombreux. Le sextet articule ses compos sur des rythmes à géométrie variables, tantôt fulgurants ou plus aériens. La rythmique basse/batterie s’avère redoutable et donne le cap de manière magistrale.

L’univers de JUNON est obscur, parfois terrifiant et oppressant à l’instar du chant d’Arnaud Palmowski, rugueux et tenace. En ouvrant avec « Segue 1 – The Final Voyage », sorte de capsule, dont on retrouve une seconde partie un peu plus tard (« Segue 2 –Dragbody »), le groupe fait dans la nuance et scinde ce nouvel opus en deux parties distinctes. Les émotions se bousculent, s’entrechoquent et se percutent sans jamais perdre le fil. Les déchirures sont nombreuses, mais la solidité et le refus d’abdiquer aussi. Il y a dans ce « Dragging Bodies To The Fall » beaucoup plus de résistance que de résilience, et ça : c’est bien ! Bravo !

Photo : Emmanuel Poteau

Retrouvez la chronique du premier EP, « The Shadows Lenghten » :

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Thrash Metal

Anthares : d’attaque !

Au terme ‘Old School’, je préfère nettement celui d’originel car, à l’écoute de la nouvelle réalisation d’ANTHARES, la production soignée et moderne vient fracasser cette image ‘vintage’ qu’on trouvait, c’est vrai, sur celles des années 80 et 90. Et si le Thrash Metal des Français va chercher sa source chez les pères fondateurs du style, nous sommes bel et bien au XXIème siècle et cela s’entend sur cet « After The War » à la fois technique, sauvage et qui alterne habillement les moments percutants et les titres mid-tempos. Un disque qui fait du bien à la scène hexagonale ! 

ANTHARES

« After The War »

(M&O Music)

Le temps s’écoule paisiblement sous le viaduc de la cite finistérienne de Morlaix et même au rythme de trois albums en près de 30 ans pour ANTHARES. Pour autant, la virulence et la puissance affichées sur « After The War » ne laissent pas vraiment penser que la vie soit un long fleuve tranquille pour lui. Loin de là ! Cela dit, le temps a aussi fait son œuvre, puisque la formation reste ancrée dans un Thrash Metal des origines du registre, celles qui forgèrent un style finalement hors-mode et intemporel… et c’est tant mieux ! On y retrouve autant de sonorités propres à Slayer, Exodus, Kreator et même Annihilator. L’éventail est donc large ! 

Si le troisième opus des Bretons ne sort qu’aujourd’hui, n’allez pas croire qu’ils se la coulent douce. Non, comme quelques autres, ANTHARES a connu des départs, un split et a sorti une démo et « Pro Memoria » dans sa première vie, entre 1996 et 2001. C’est depuis 2013 que le quintet a entamé sa marche en avant avec un EP, « 2 My Last Breath », puis « Addicted To Chaos », un second effort qui est venu confirmer sa vitalité. Des débuts, seul son emblématique frontman François ‘Fanfan’ Voisin reste solidement accroché à l’entité et la bonne dynamique de son groupe. Et le résultat est plus que palpable sur « After The War ».

Bien aidé par une expérience acquise au fil des années, nos thrashers affichent un son massif et tranchant, parfaitement mis en valeur par une production compacte, musclée et pleine de relief. Ici, les riffs sont racés et aiguisés au mieux pour servir des compos véloces et rageuses (« Invaders From The Outer Space », « Burning Light », « Lost », Trance Thrash », « Pain »). Jamais ANTHRARES ne donne dans la demi-mesure, le combo est sûr de sa force et est parvenu à moderniser son jeu en offrant des compos variées, alternant aussi les tempos au gré du chant de son fondateur, véritable pierre angulaire du groupe. Bien joué !   

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Ambient Progressif Soft Rock

North Sea Echoes : la puissance du calme

L’avantage de se connaître depuis de longues années permet de se trouver les yeux fermés. Forts d’une expérience commune conséquente, le très prolifique guitariste Jim Matheos et le génial frontman Ray Alder se sont une fois encore réunis autour d’un projet parallèle, né de la très féconde créativité du multi-instrumentiste et de sa fascination pour les musiques progressives évidemment, mais aussi Ambient. NORTH SEA ECHOES se dévoile avec « Really Good Terrible Things » dans univers pas si tranquille qu’il n’y parait.

NORTH SEA ECHOES

« Really Good Terrible Things »

(Century Media Records)

Piliers indissociables de Fates Warning depuis des décennies, le chanteur Ray Alder et le guitariste, compositeur et producteur Jim Matheos ne se quittent plus. Au départ destiné à Tuesday The Sky, son projet très instrumental et Ambient, ce dernier a eu la certitude que ses morceaux auraient un tout autre relief avec une voix. Le duo s’est donc remis à l’ouvrage pour un album aussi étonnant que parfaitement réalisé. Avec NORTH SEA ECHOES, les deux hommes sortent de leur zone de confort avec brio.

Au risque que leurs fans ne les suivent pas dans cette nouvelle aventure, où le Metal est totalement absent, Alder et Matheos mènent ce projet de main de maître et cela mérite vraiment d’être souligné. Dans des atmosphères plus douces et feutrées, NORTH SEA ECHOES conservent un petit côté progressif dans un esprit Soft Rock apaisant, mais non sans émotions, bien au contraire. Brillamment composé, « Really Good Terrible Things » séduit aussi par la qualité des textes du songwriter. Et Alder sait y faire.  

Dès « Open Book » en ouverture, le ton est donné sur un rythme contemplatif, assez dépouillé, mais qui capte d’entrée l’attention. Assez sombres, les morceaux de « Really Good Terrible Things » n’en restent pas moins positifs, grâce aux paroles d’Alder. Avec le raffinement comme leitmotiv, les deux artistes nous embarquent dans un voyage souvent intime, parfois secret, et l’on se perd avec plaisir dans les méandres de ce Rock aux saveurs Ambient (« Flowers In Decay », « Empty », « Unmoved », « Where I’m From » « No Maps »).

Photo : Jeremy Saffer