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Rock Progressif

The Pineapple Thief : un œil sur le monde

THE PINEAPPLE THIEF fait dans le beau et c’est même sa marque de fabrique. Captivante et délicate, puissante et explosive, la formation d’outre-Manche aime jouer sur les contrastes et les opposer avec toute l’élégance et la technicité qu’on lui connait. Sur « It Leads To This », son Rock Progressif endosse encore le costume d’Art Rock avec une évidence de plus en plus fragrante. Lumineux !

THE PINEAPPLE THIEF

« It Leads To This »

(Kscope)

Avec 15 albums en l’espace de 25 ans d’existence, le rythme mené par les Britanniques est plutôt soutenu. Cependant, cette fois, Bruce Soord et ses compagnons de route ont mis un peu plus de temps pour concevoir « It Leads To This ». Cela dit, étant donné le pédigrée des membres de THE PINEAPPLE THIEF, ça ne semble pas être une question de créativité ou d’inspiration, mais plutôt de recherche de perfection, allant jusque dans le moindre détail pour atteindre ce degré d’exigence inhérent au groupe.

Pour « It Leads To This », Gavin Harrison, également batteur de Porcupine Tree, le bassiste Jon Sykes, le claviériste Steve Kitch et bien sûr Bruce Soord, à la guitare et au chant, semblent s’être focalisés sur l’efficacité des morceaux, ce qui explique qu’aucun d’entre-eux ne s’étalent en longueur. Pour autant, THE PINEAPPLE THIEF reste fidèle à ce qu’il sait faire de mieux : un Rock Progressif léché, subtil et aérien tout en montrant les muscles au moment opportun. En ce sens, les Anglais n’ont rien changé à leurs habitudes.   

Plus concis que ses prédécesseurs, l’album joue pourtant toujours aussi habillement sur les atmosphères, ce qui peut d’ailleurs le rendre plus accessible pour qui découvrirait le quatuor. Car en termes de pépites, THE PINEAPPLE THIEF en livre encore quelques unes, qui devraient faire le plus bel effet en concert (« Rubicon », « The Frost », « All That’s Left », « Now It’s Yours », « Every Trace Of Us »). Sans jouer la carte de la surprise, le combo joue celle de la finesse et de la précision avec une classe de chaque instant.

Photo : Tina Korhonen
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Metal Progressif

Caligula’s Horse : au sommet

Quand la délicatesse guide la robustesse du Metal avec autant de savoir-faire et d’inspiration, il est très difficile d’y résister. S’affirmant au fil de ses réalisations avec une créativité qui conjugue des moments éthérés avec d’autres résolument fracassants, CALIGULA’S HORSE n’a plus à chercher ou courir après une identité musicale, qui est devenue tellement évidente. « Charcoal Grace » élève encore le niveau dans des sphères où le Metal Progressif proposé n’a que très peu d’égal actuellement dans le monde.   

CALIGULA’S HORSE

« Charcoal Grace »

(InsideOut Music)

Les Australiens peuvent maudire la période du Covid. Un cinquième album, « Rise Radiant », aussi lumineux que puissant presque passé à la trappe, puis le départ du guitariste Adrian Goleby dans la foulée, ont réduit à néant les efforts dans ce (long) moment. Pas, puis très peu de scènes, CALIGULA’S HORSE s’est donc remis à l’ouvrage et même si le contenu de l’album traite du sujet qui a occupé et pollué l’esprit du quatuor, « Charcoal Grace » est de loin la production la plus ambitieuse et audacieuse du groupe depuis ses débuts. En prenant des risques, il se hisse avec force au sommet du Metal Progressif actuel… avec Soen !

Ni le changement de line-up, ni la frustration engendrée par des mois incertains n’ont remis en cause ou en question cette faculté incroyable à composer une musique dont la technique et la technicité se mettent au service de l’émotion. On reconnaît CALIGULA’S HORSE dès l’entame de « Charcoal Grace » et il ne cherche pas à révolutionner le genre, ce qui serait peine perdue. Cependant, s’il est presqu’impossible de réinventer un style déjà très riche, certains parviennent pourtant à renouveler la seule chose qui puisse l’être encore : sa beauté. Et ce sixième opus vient le démontrer avec brio sur une heure intense.

« Charcoal Grace » est un disque assez particulier puisqu’il s’articule autour de sa pièce maîtresse : le morceau-titre courant sur 24 minutes et scindé en quatre parties. Sans pour autant livrer un album-concept, CALIGULA’S HORSE impose un lien entre les morceaux, qui naviguent entre instants suspendus, charges Heavy et massives et une poésie qui croise le fer avec une énergie souvent colossale (le torturé « Golem », le rêveur « Sails », l’accrocheur « The Stormchaser », ou « Mute » et sa flûte enchanteresse). Malgré la longueur des titres, on ne s’y perd jamais, tant l’originalité du combo est unique en son genre.  

Photo : Andrew Basso
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Alternative Metal Dark Metal Metal Progressif Post-Metal

Final Coil : l’obscurité du monde

C’est du côté de Leicester en Angleterre que FINAL COIL élabore une trilogie depuis sept ans maintenant. Et c’est de main de maître qu’il a mené son projet à bien. Entre Metal, Prog et des climats très subtils, captivants et assez Cold, le spectre musical du trio touche à son apogée sur « The World We Inherited », dont la réalisation et le travail sur les arrangements sont remarquables. Avec sa vision très panoramique, l’ensemble est très technique et superbement structuré.

FINAL COIL

« The World We Inherited »

(Sliptrick Records)

Entamée avec « Persistence Of Memory » en 2017, suivi lʼannée suivante par « The World We Left Behind », FINAL COIL clot sa trilogie magistralement avec « The World We Inherited ». Toujours aussi immersif, le style des Anglais s’affine encore un peu plus, devient aussi plus personnel, tout en restant dans ce post-Metal Progressif et souvent alternatif, qui le caractérise. Très bien réalisé, ce nouvel opus joue autant sur les atmosphères que sur des mélodies accrocheuses extraites d’un univers très Dark.

Si les Britanniques donnent une vision du monde pour le moins sombre et pessimiste, « The World We Inherited » propose des compositions très abouties, parfois complexes et qui viennent se nicher dans un registre où Tool, Alice In Chains, Katatonia et Killing Joke se seraient rencontrés. Autant dire que le challenge est osé, mais FINAL COIL est très loin de manquer d’originalité. Au contraire, son univers est assez unique et reste très organique, malgré la présence d’éléments électroniques.

Composé de Phil Stiles (chant, guitare, claviers et programmation), Richard Awdry (guitare, programmation), Jola Stiles et ses lumineuses lignes de basse, accompagné sur le disque par Barry French derrière les fûts, le groupe brille aussi par une créativité intense. Soigneusement mis en valeur par la production de Russ Russell (Amorphis, Napalm Death), les morceaux concoctés par FINAL COIL vont ravir les curieux, grâce à un voyage musical saisissant (« Wires », « By Starlight », « Purify », « Humanity »). Déjà incontournable.

Photo : Ester Segarra
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Grunge Power Rock Rock

BikiniMood : Rockalissimo

Parce qu’ils sont italiens et que leur langue est intimement liée à l’art, les membres de BIKINIMOOD ont naturellement opté pour leur mode d’expression maternel et l’entreprise est plus que réussie, puisqu’on est embraqué dans ce Rock savoureux où les couleurs sont nombreuses et s’entrechoquent avec une spontané attractive. Ce cocktail à l’œuvre sur « Ti Fidi Di Me? » se déguste sans modération au gré des accélérations, des instants plus doux et d’un feeling permanent. Une très belle entrée en matière.

BIKINIMOOD

« Ti Fidi Di Me? »

(Independant)

Ils sont quatre amis, tous originaires de Turin, et c’est en février 2022 qu’ils décident de se lancer dans l’aventure BIKINIMOOD. Ayant pris un peu de bouteille, l’idée est de créer un Rock rassemblant leurs goûts musicaux, regroupés et puisés pour l’essentiel dans les années 90, une décennie tellement vaste artistiquement et d’une richesse qu’on peine à retrouver aujourd’hui. Direct et efficace, le style du groupe est un bon condensé de tous ces styles, où l’on retrouve des saveurs Grunge, Alternative à la Deftones avec même quelques touches Stoner plus appuyées.  

Sans prétention, mais avec beaucoup sérieux, le quatuor a fait naître en studio un premier album entièrement autoproduit en mai dernier. Et le résultat est plus que convaincant. Solide et mélodique, « Ti Fidi Di Me? » ne manque pas de consistance, bien au contraire, et c’est sur un chant en italien que BIKINIMOOD livre des compositions très équilibrées avec une liberté directement liée à la poésie et à l’aspect romantique de la langue de Dante. En tout cas, le pari est réussi et les textes se fondent avec beaucoup d’élégance dans un Rock souvent rugueux, mais toujours agréable.   

Davide Bruno (chant), Stefano Sungia (basse), Roberto Spiga (batterie) et Dry (guitare) savent très bien où ils vont et ce qu’ils présentent montre d’abord une passion commune, mais aussi et surtout une belle énergie. Bien enregistrés, les morceaux libèrent beaucoup de fluidité, ce qui offre à BIKINIMOOD une grande latitude dans les tempos et les ambiances abordées. Très varié, « Ti Fidi Di Me? » montre l’envie des Transalpins de vraiment se faire plaisir et d’embarquer avec eux les fans de Rock authentique et costaud interprété dans cette langue si musicale et séduisante.   

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Heavy Stoner Rock

Dune Pilot : une alchimie très magnétique

Ce troisième opus de DUNE PILOT porte vraiment bien son nom. Accrocheuse, solide et véloce, la saveur très brute des titres de « Magnetic » brille par les multiples nuances à l’œuvre. Accélérations, changements de tempos, passages planants et breaks bien sentis, tout est réuni pour une invitation à un voyage musical intense et captivant. Entre Heavy Stoner et Hard Rock, le combo se fraye un chemin fascinant.

DUNE PILOT

« Magnetic »

(Argonauta Records)

Cela va faire dix ans que les Munichois peaufinent les réglages de leur Stoner Rock. Partagé entre le respect des classiques, on pense ici à Kyuss, Fu Manchu et Monster Magnet, et des envies plus libérées et sauvages façon Black Stone Cherry et Damn Junkees, DUNE PILOT a façonné un style où la puissance du fuzz se mêle au groove du Hard Rock. Et grâce à la voix rugueuse et imposante de son frontman et fondateur, Andris Friedrich, on est littéralement propulsé, et sans ménage, dans un univers hyper-Rock.

On doit très probablement ce sentiment d’urgence et d’immédiateté au fait que le quatuor enregistre ses albums en conditions live, comme il l’a fait pour « Wetlands » et « Lucy », ses premières réalisations. « Magnetic » ne manque donc pas de fraîcheur, malgré un aspect massif et dévastateur assez jubilatoire. Et si la rythmique se fond pour parfois se perdre dans un dédale aussi soutenu que brumeux de riffs incendiaires, DUNE PILOT lâche les chevaux et devient franchement indomptable.

Les Allemands ouvrent ce nouvel opus avec le morceau-titre, finalement très représentatif du contenu qui suit. Groovy et chaleureux, les morceaux s’enchaînent et même s’ils ont tendance à assommer avec ce côté très frontal, les mélodies prennent le dessus avec force (« Take Your Lies », « Next To The Liquor Store », « Vile », « Let You Down »). Tout en maîtrise et très inspiré, DUNE PILOT distille un Stoner Heavy à souhait et inspiré par un Hard Rock assez positif, qui lui donne un semblant de légèreté… un semblant seulement !  

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post-Rock

Autómata : des images musicales

Souvent expérimental et donnant l’impression de se laisser flotter, le style d’AUTÓMATA se précise pourtant sur ce deuxième opus très progressif et dont on suit le cours, baladé par la douceur des notes entrecoupées d’instants qui brisent des rythmes qu’on imagine évidents. C’est justement là que « Heart Murmur »  s’inscrit parfaitement dans l’idée qu’on se fait du post-Rock… inaccessible, délicat et captivant.

AUTÓMATA

« Heart Murmur »

(Atypeek Music/Araki Records)

Après un premier effort éponyme il y a deux ans, AUTÓMATA fait son retour avec un deuxième album plus mature, très bien produit et surtout le quatuor expérimente beaucoup plus. Mieux défini et très impliqué, le groupe nous en dit plus sur son univers post-Rock où chacun de nos quatre protagonistes a apporté une forte contribution. Plus totalement instrumental, et même si aucun d’entre eux n’a pris le micro, « Heart Murmur » voit surgit des samples utilisés judicieusement, qui livrent un fil narratif permettant de colorer des morceaux plein de relief à l’instar « Killing Spiders » avec ses scratchs.

Comme sur le premier album, on se laisse guider par une musique qui veut finalement assez contemplative, toujours très aérienne et dont l’atmosphère est souvent cinématographique. On est d’ailleurs totalement immergé et les images se bousculent dès « On A Wire », un morceau très attirant où la voix de James Cairns de Therapy? nous invite à prendre soin de nous dans le souffle un sample parlé. Et c’est sur « Mad Motor » qu’AUTÓMATA nous fait réellement participer à une projection privée assez glaçante avec le son de la voix d’Edith Scob, extrait du film très noir « Les Yeux Sans Visage », sorti en 1960.

Organique et riche des nombreux instruments à l’œuvre sur les sept plages, « Heart Murmur » est aussi marqué par ses changements d’ambiances, qui sont autant de portes ouvertes sur des climats surprenants (« Sad Guru », « Dead Fields »). Une certaine légèreté plane sur l’ensemble et les musiciens ont soigneusement évité de bouffer l’espace sonore, offrant une véritable respiration musicale jusqu’au dernier titre « Processions », qu’il convient d’écouter en entier… La confiance et la sérénité qui animent les Parisiens débouchent sur une créativité démultipliée, d’où l’empreinte d’AUTÓMATA se détache enfin. 

L’album est disponible sur le Bandcamp du groupe :

https://weareautomata.bandcamp.com/album/heart-murmur

Retrouvez la chronique du premier album :

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Funk Rock

FFF : FFFou FFFurieux !

Pierre angulaire de la scène Rock dont il a marqué les années 90 au fer rouge, FFF fait un furieux et gourmand come-back. Aussi inattendu qu’inespéré, « I Scream » renoue avec l’essence-même de cette Fédération Française de Fonck survitaminée et finalement inoxydable. Ce nouvel opus promet de prochaines prestations scéniques enflammées, et pour en avoir vécu quelques unes dans une autre vie, surveillez bien les dates qui arrivent dès le printemps … Ça va être chaud et explosif !

FFF

« I Scream »

(Verycords)

Est-ce qu’après deux décennies d’absence, un groupe qui a laissé une telle empreinte à travers un style, dont il a été le principal artisan en France, peut encore renouer avec un enthousiasme qui l’a tellement caractérisé ? 23 ans après un album, « Vierge », qui n’a pas franchement marqué les esprits, Marco Prince, Yarol Poupaud, Nicolas Baby et Krishoo Monthieux ont-ils retrouvé la fougue de leurs premiers émois discographiques ? Comme l’ont laissé entrevoir les premiers singles, le doute n’est plus de mise : FFF a retrouvé la foi et déborde d’énergie.

S’ils ont juré par tous leurs dieux ne s’être jamais séparés, les Parisiens font un retour qui ressemble presque à une résurrection. A priori, ils attendaient le bon moment pour se mettre à l’ouvrage d’un cinquième album, dont ils savaient mieux que personne qu’il serait très attendu par une communauté de fans impatiente et pas encore rassasiée, mais également scruté et décortiqué par la presse, ce qui est importe finalement assez peu. Ce qui compte, et qui entretient aussi un peu le mystère, c’est ce qu’il a bien pu se passer dans cette campagne niortaise, où FFF a refait parler la poudre.

« I Scream » contient tout l’ADN du fulgurant quatuor. L’instinct, la fraîcheur et le groove sont intacts. Le flow de Marco fait des merveilles (« Les Magazines »), tout comme son trombone, les riffs de Yarol sont incandescents (« Won’t You ») et la bouillonnante rythmique gouvernée par Nicolas et Krishoo oxygène l’ensemble (« On Devient FFFou », « Death On The Dance FFFloor », « Smile »). Moderne dans le son comme dans le propos, FFF livre avec classe l’album qu’on attendait et avec cette luminosité qui a fait sa réputation. « I Scream » est positif et concentre décidemment tous les parfums. Bravo, FFFallait le FFFaire !

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Crossover France Hard-Core Thrash Metal

Eight Sins : smilin’ mosh [Interview]

Direction la planète Namek, celle des Dragon Balls évidemment, avec le joyeux et turbulent quatuor Thrash/HxC grenoblois qui sort son quatrième album, « Straight To Namek », et qui s’apprête à reprendre le chemin des concerts avec un enthousiasme débordant. Aux confluents de la scène Thrash californienne de la Bay Area et du Hard-Core musclé et sans concession de New-York, EIGHT SINS aborde son Crossover avec joie, auto-dérision et surtout une sérieuse envie d’en découdre… avec le sourire aux lèvres ! Entretien avec Julien Alves, batteur du combo.

– Cinq ans après l’EP « It’s A Trap », vous faites votre retour avec un quatrième album, « Straight To Namek », haut en couleur et toujours aussi féroce. Vous avez pris votre temps et cette fois, vous avez confié vos morceaux au groupe Landmvrks, notamment à Florent Salfati. Vous aviez besoin de changement, afin d’explorer d’autres sonorités ?

C’est vrai qu’on a pris plus de temps, car le Covid a aussi freiné nos ardeurs. Nous sommes tous les quatre pères de famille, d’ailleurs Loïc (Pouillon, chanteur – NDR) et moi avons eu des enfants pendant cette période, ce qui a aussi un peu repoussé l’enregistrement de l’album. Ensuite, il a fallu du temps pour se retrouver et composer de nouveau. Dans la foulée, on a pris l’initiative de faire l’album avec les gars de Landmvrks à Marseille. On ne connaissait personne de notre entourage qui avait bossé avec eux, mais vu le résultat de la production, on est vraiment super content. Ils ont archi-bien bossé !

– Malgré une grosse quinzaine d’années d’existence, vous avez lancé une campagne de financement participatif pour « Straight To Namek ». C’est une démarche de plus en plus fréquente… 

Nous sommes complètement indépendants et nous faisons tout par nos propres moyens. Même si nous avions un peu de fonds évidemment, il nous a fallu un petit coup de pouce. L’argent est le nerf de la guerre et on a sollicité un peu nos fans. Et nous avons été agréablement surpris, puisque nous avons atteint l’objectif de notre cagnotte à hauteur de 190%. On est très fier de ça, parce qu’en fait, il y a beaucoup plus de gens que ce que l’on pensait qui nous soutiennent et ça fait super chaud au cœur ! Maintenant, on espère bien le leur rendre !

– EIGHT SINS a la réputation de livrer des prestations scéniques intenses et explosives, ce qui vous a d’ailleurs permis de jouer avec de grands noms. On a l’impression que vous avez appliqué la même formule à ce nouvel album : 10 titres pour 24 minutes, c’est sacrément expédié ! « Straight To Namek » a le format d’un EP, c’était le but ?

Nous sommes un groupe de Crossover et les chansons sont plutôt courtes, c’est vrai, et elles vont droit au but ! Si tu prends certains groupes comme Terror (Punk-HxC de Los Angeles – NDR), par exemple, leurs albums dépassent rarement la demi-heure. On a souhaité garder ce format-là. De toute façon, je ne connais personne qui te met 50mn de Hard-Core dans la tronche comme ça ! Et puis, tous les titres restent bien en tête et cela donne aussi une vision globale de ce qui se trouve sur l’album. Les chansons sont vraiment taillées pour le live et on a pris soin à ce qu’il y ait de bonnes bagarres pour déclencher un bon bordel dans la fosse, tout en ayant toujours le sourire aux lèvres. Notre leitmotiv est vraiment que tout le monde vienne pour prendre du plaisir, se défouler et surtout qu’ils sortent de là avec la banane jusqu’aux oreilles !

– Vous tirez vos influences des Etats-Unis et même de ses deux côtes. La côte ouest pour ce qui est de l’aspect Thrash et New-York pour votre côté Hard-Core. La scène européenne, notamment allemande, n’a pas eu le même impact sur vous, malgré un panel tout aussi large ?

C’est vrai que c’est la même musique jouée de manière différente. Je suis assez d’accord avec toi sur le fait que nous sommes plus influencés par les Américains. Néanmoins, pour être allé dans divers festivals, j’apprécie autant des groupes comme Kreator, Sodom, Tankard et Destruction, par exemple, qui forment le ‘Big Four allemand’. Mais nous avions choisi ce format plus américain, c’est vrai.

Illustration : Chris Regnault

– D’ailleurs, pour rester sur le côté Hard-Core de votre musique, on le sent nettement moins sur « straight To Namek », sauf parfois dans le chant. Le Thrash offre plus de possibilités dans la composition, ou cela s’est-il fait sans calcul ?

En fait, on avait déjà commencé à prendre cette direction sur le EP précédent (« It’s A Trap » – NDR) en 2018, qui est plus Crossover. Nos premiers albums traitaient plutôt de sujets sérieux. Puis, de fil en aiguille, on s’est aperçu que ce que nous aimons, c’est la musique qui va vite. On aime se marrer, partir en tournée, sortir des conneries, faire l’apéro, etc… Ça peut paraître léger comme ça, mais finalement c’est ce qu’on a voulu retranscrire dans notre musique et c’est vraiment le créneau où on se sent le mieux ! Un bon mélange de Thrash et de Hard-Core ! Cela dit, il y a peut-être plus de pointes ‘thrashouilles’, car je pense que dans le Thrash, il y a plus de place pour la blagounette !

– On retrouve cette touche festive et déconnante tout au long de l’album avec des samples, essentiellement en français d’ailleurs, en intro ou en fin de morceau. Il y a un petit côté Municipal Waste et même un peu Crisix chez EIGHT SINS. On a l’impression de vous mettez un point d’honneur à ne pas vous prendre au sérieux…

Tu as entièrement raison ! En fait, on s’est aperçu que les sujets sérieux parlent toujours de drames, parce qu’on vit dans un monde qui est de moins en moins drôle. Nous, la musique est notre plaisir et notre passion, on est là pour se marrer. L’essentiel, pour les gens qui viennent nous voir, est qu’ils prennent du bon temps. S’ils se marrent et se défoulent, notre mission est accomplie. Bien sûr que Crisix et Municipal Waste, dans ce sens-là, sont des influences majeures. On a eu la chance d’ouvrir pour Municipal Waste à plusieurs reprises et à chaque fois, et même si c’est ultra-violent, on est ressorti avec la banane. C’est vrai qu’on aime prendre les choses à contre-pied.

– J’aimerais aussi qu’on dise un mot sur la pochette de « Straight To Namek », signée Christophe Regnault avec qui vous travaillez depuis un moment. Comment cela se passe-t-il ? Vous lui indiquez ce que vous souhaitez, ou a-t-il aujourd’hui tellement bien assimilé votre univers que ce n’est plus la peine, vous lui laissez carte blanche ?

En fait, il a fait ses études d’Art avec notre chanteur et c’est dont via Loïc qu’on a commencé à bosser avec lui. En fait, on lui donne une trame de base et ensuite, libre à lui de se faire plaisir. Là, l’idée était la bagarre des gentils vs les méchants. On lui a donné les personnages qu’on souhaitait voir figurer sur la pochette, et après il s’est régalé. Il a eu une demi-carte blanche, voilà !

– On a parlé des interludes en français sur l’album, mais sur « Street Trash », vous évoquez aussi votre ville, Grenoble. Que signifie ce clin d’œil et est-ce que Grenoble est véritablement la ‘Trash City’ qui vous inspire ? A moins que ce ne soit juste pour la déconne, encore ?

(Silence)… C’est mi-figue, mi-Konos comme on dit ! Il y a un fond de déconne, bien sûr. Après Grenoble, si tu veux, n’est pas réputée pour être l’endroit le plus propre de France. On s’est un peu lâché, mais c’est chez nous et on en est fier. Quelque part, c’est une sorte d’hommage aussi, d’être fier de là d’où l’on vient ! Généralement, on vient chez nous pour aller faire du ski, pas pour visiter la ville ! Mais on existe quand même !

– Enfin, on connait votre préférence pour la scène. J’imagine que ce nouvel album va vous amené sur les routes de France et peut-être même de Navarre. Est-ce qu’une tournée est déjà prévue et êtes-vous aussi confrontés aux mêmes problèmes que de nombreux groupes sur le coût que cela engendre aujourd’hui ?

C’est vrai que pour des indépendants comme nous, ce n’est pas une mince affaire de partir sur la route. Cependant, on a pas mal de concerts qui arrivent. Pour la tournée, on y travaille en ce moment. Il y a des trucs dont je ne peux pas te parler, mais il se passe des choses ! L’idée est de défendre notre album quoiqu’il arrive et bec et ongle. Avec ou sans argent, on viendra ! (Rires)

L’album d’EIGHT SINS, « Straight To Namek », et toute la discographie du groupe sont disponibles sur son Bandcamp : https://eightsins.bandcamp.com/album/straight-to-namek-3

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Rock Progressif

Fish On Friday : une pêche miraculeuse

Brillant cette fois encore, le quatuor belgo-anglo-américain continue son aventure musicale entre un Rock Progressif fin et un Art-Rock très élaboré. Avec « 8mm », FISH ON FRIDAY avance dans une sorte de spleen très positif (si, si !) où les claviers se mêlent à la guitare, guidés par un chant à trois voix particulièrement bien mixé. Atmosphérique et aux multiples reliefs, cette nouvelle réalisation surprend et détend autant qu’elle envoûte.

FISH ON FRIDAY

« 8mm »

(Cherry Red Records)

Après le très bon « Black Rain » sorti il y a trois ans, la multinationale progressive livre « 8mm », un album d’une élégance renouvelée à laquelle elle nous a habitués depuis ses débuts. Toujours emprunt d’une certaine nostalgie dans ses textes et sa musique, FISH ON FRIDAY fait cette fois un clin d’œil aux vieux films amateurs à travers son titre bien sûr, et aussi dans son contenu qui met en valeur les mélodies, les harmonies, la créativité des musiciens et livre quelques surprises.

Fondé il y a un peu plus de 15 ans à Anvers en Belgique par le claviériste, chanteur et producteur Frank Van Bogaert (avec Williams Beckers parti depuis) et aujourd’hui accompagné du guitariste californien Marty Townsend, du bassiste anglais Nick Beggs et du Belge Marcus Weymaere à la batterie, FISH ON FRIDAY dévoile son univers si singulier sur des réalisations toujours aussi raffinées. « 8mm » ne déroge pas à la règle et le voyage est beau, tant l’envolée est constante.

Coproduit par Beggs et Van Bogaert, qui se partagent subtilement le chant, ce sixième opus accueille aussi la chanteuse Lula Beggs sur plusieurs titres, ainsi que Theo Travis (flûte et saxo). Délicate et aérienne, la légèreté apparente fait presqu’oublier la virtuosité du groupe et la grande qualité des arrangements. FISH ON FRIDAY se fend même d’une superbe reprise des Britanniques Metro (« Flames » sorti en 1977) et enchaine quelques merveilles (« 8mm », « Jump This Wall », « Silently Raging »).

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Classic Hard Rock Rock Hard

Rival Sons : coup double

Ils sont rares les artistes qui parviennent à faire la quasi-unanimité chez les fans de Rock, de Hard et même de Metal. Pourtant, depuis quelques années, RIVAL SONS est sur le point de réussir ce tour de force. Au début de l’été, « Darkfighter » a provoqué un séisme avec cette approche nuancée et vibratoire si particulière. « Lightbringer » est exactement dans la même veine et prolonge le plaisir avec beaucoup d’intensité et d’émotion.

RIVAL SONS

« Lightbringer »

(Low Country Sound/Atlantic Records)

Présenter deux albums d’un même groupe à quelques mois d’intervalle est plutôt inhabituel. Et lorsque les trois sont bons, le groupe et les albums, c’est un vrai plaisir… devenu tellement rare. En juin dernier, en sortant « Darkfighter », RIVAL SONS avait déjà annoncé qu’un second opus arriverait en complément du premier. Si la surprise n’en est donc pas une, le résultat, en revanche, va bien au-delà des espérances. « Lightbringer » fait plus que tenir ses promesses, il vient couronner une inspiration hors-norme.

Pour rappel, l’écriture des morceaux avait commencé avant la pandémie et en reprenant là où ils en étaient, les Américains se sont aperçus que deux types d’atmosphères se détachaient. Avec suffisamment de matériel pour en livrer deux parties, RIVAL SONS vous a régalé avec « Darkfighter » et voici la belle cerise sur le gâteau : « Lightbringer ». Si « Feral Root » (2019) avait déjà secoué le monde du Rock et fait prendre une nouvelle dimension au quatuor, ce coup double les place au firmament.

La splendide production de Dave Cobb, grand artisan du son des gars de Long Beach, est toujours d’une authenticité brute et lumineuse. En ouvrant judicieusement avec le dantesque « Darkfighter » et ses neuf minutes, RIVAL SONS présente la parfaite transition entre les deux disques. Porté par un Jay Buchanan magnétique au chant, un Scott Holiday étincelant à la guitare et guidé par une rythmique lourde, « Lightbringer » est envoûtant de bout en bout, notamment sur l’incroyable « Before The Fire » et « Mosaic ». Abyssal !

Retrouvez la chronique de « Darkfighter »…