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Classic Rock Heavy Blues International

Tapeworm Electric : une profondeur intemporelle [Interview]

Très instinctif, malgré un ancrage profond dans un Classic Rock très anglais, TAPEWORM ELECTRIC sort son épingle du jeu et frappe fort avec un premier album très réussi. Le quintet hellène semble même avoir trouvé son allure de croisière et livre un Heavy Blues percutant, basculant à l’envie vers un Hard Rock brûlant. Grâce à une chanteuse dont la voix est aussi puissante qu’envoûtante, la formation athénienne sonne très live et la spontané dont elle fait preuve la rend encore plus accrocheuse. Le groupe revient sur la sortie, toute récente, de son premier opus « Moonshine ».

– A la sortie de votre premier EP, « Fire » en 2019, vous aviez déjà fait forte impression et les quatre singles sortis en 2021 et 2022 avaient confirmé votre potentiel. Vous sortez votre premier album après huit ans d’existence. L’attente est finalement assez longue. Aviez-vous besoin de certitudes sur vos morceaux et votre jeu ?

La principale raison de ce retard vient de la stabilité du line-up. Lorsque nous nous sommes sentis en confiance en tant que groupe, nous avons commencé à travailler sur la création de cet album. Pet parmi les autres raisons, on peut citer la baisse d’activité pendant la période du Covid et des difficultés personnelles que nous avons aussi pu rencontrer individuellement.

– Vous avez aussi récemment signé chez Pitch Black Records. Cela faisait-il également partie des conditions pour sortir « Moonshine », d’avoir le support d’un label ?

Oui, le soutien et les conseils d’un label, qui se soucie réellement de la musique et du groupe, ont grandement facilité la sortie de l’album. Pitch Black Records s’est chargé de toute la distribution, du pressage des CD, de la promotion, etc… Nous avons ainsi pu nous concentrer pleinement sur la création des morceaux.

– « Moonshine » est particulièrement abouti pour un premier album, grâce à des morceaux très accrocheurs et aussi une production très soignée. On a vraiment l’impression que TAPEWORM ELECTRIC est passé à la vitesse supérieure. Comment s’est passé l’enregistrement et quelles ont été vos priorités afin d’obtenir ce son si organique, chaleureux et authentique ?

C’est un grand compliment pour nous, merci beaucoup. En effet, nous avons pris le temps de présenter nos idées et nous avons gardé celles qui nous semblaient justes. Nous sommes ensuite passés à la préproduction : nous avons enregistré les morceaux, les avons écoutés et apporté quelques modifications, avant d’entrer en studio pour finaliser l’album. On privilégie toujours l’expressivité des chansons, sans en faire trop. Nous nous concentrons sur les mélodies, des performances solides et l’énergie live du groupe. Au niveau de la production audio, on a surtout cherché à conserver un son aussi naturel que possible. Sur le disque, vous entendez de la vraie batterie, de vraies guitares et il n’y a aucun traitement par IA sur les voix.

– Passé « Interlude », l’intro basée sur une slide très épurée, on pourrait s’attendre à ce que « Moonshine » tende plutôt vers le Blues et pourtant, c’est le côté Heavy Rock qui prend le dessus. Votre Classic Rock est très intemporel, même s’il sonne actuel. Est-ce que votre intention est de perpétuer cet héritage Rock et comment cela se traduit-il dans votre écriture ?

Le blues n’est-elle pas la mère de toute la musique contemporaine ? Par ailleurs, c’est vrai qu’on adore le son du Heavy Blues britannique et ensuite son évolution vers le Hard Rock. On a grandi en écoutant Led Zeppelin, Deep Purple et Uriah Heep. Ces héros nous inspirent beaucoup, mais notre écriture est spontanée. On essaie de composer pour exprimer ce qu’on ressent et créer une musique qui nous parle.

– Cela dit, il y a toujours un fond bluesy chez TAPEWORM ELECTRIC, comme s’il était un peu la base de votre musique. Le percevez-vous comme le socle de votre style, celui qui vient propulser ensuite une dimension clairement Rock et très 70’s aussi ?

Cette influence bluesy est innée, elle coule vraiment dans nos veines. Notre style repose avant tout sur nos influences, et notamment sur tous ces grands groupes de Rock des années 70 inspirés par le Blues donc, mais aussi par des formations qui vont de Fleetwood Mac à Black Sabbath.

– Pour celles et ceux qui vous suivent depuis vos débuts, il y a une grande similitude entre le morceau qui ouvrait « Fire », c’est-à-dire « Worms », et « Moonshine », qui figure sur l’album. S’en est même bluffant, c’est une sorte de signature ?

Le seul point commun entre « Worms » et « Moonshine », c’est leur intro très Blues. « Worms » est un morceau Hard Rock Shuffle qui parle de la société actuelle, tandis que « Moonshine » est une chanson d’amour aux guitares saturées. Les tempos et les structures d’accords sont également différents. Pourtant, c’est vrai qu’il existe une formule que nous avons tendance à utiliser régulièrement dans notre approche des riffs et l’architecture des morceaux. Si c’est notre signature, alors il est difficile de s’en défaire.

– L’une des choses qui frappe à l’écoute de votre musique, c’est bien sûr la puissance et la luminosité de ta voix, Argyro. D’ailleurs, c’est l’un des atouts majeurs de TAPEWORM ELECTRIC. De quelle manière qualifieriez-vous cette évolution assez incroyable entre « Fire » et « Moonshine » sur ces six dernières années ? C’est un travail constant et une plus grande confiance en soi ?

Argyro est une chanteuse et une professeure de chant exceptionnelle. A nos débuts, elle était, et elle l’est toujours, passionnée par la Soul. Elle n’avait pas l’habitude de chanter des morceaux plus Rock, mais elle avait déjà cette énergie en elle. C’est vrai qu’elle a travaillé dur sur ses performances et elle a aussi commencé à écouter aussi des musiques plus Rock. Cela dit, elle évolue constamment et elle se dépasse sans cesse et cela s’entend clairement sur l’album.

– George Kasapidis, votre bassiste, prend aussi le lead vocal sur deux morceaux : « Right Reasons » et « Turn Into Black ». Est-ce que chacun chante ses propres textes, ou il s’agit plus simplement pour apporter de la diversité ?

Tous les membres du groupe ne chantent pas leurs propres textes, mais si l’un d’entre-eux ressent le besoin de prendre le micro et de s’exprimer, il en a la possibilité. « Right Reasons » et « Turn Into Black » sont des chansons très personnelles et il semblait tout simplement naturel que ce soit George qui les interprète.

– Enfin, j’aimerais que vous me disiez un mot de « Hold On », long de sept minutes et qui possède un réel esprit jam. C’est un titre très varié avec une atmosphère qui passe de sonorités à la Black Sabbath à un chant qui rappelle Heart, et qui peut même donner quelques frissons. Vous l’avez voulu comme une sortie d’hommage, ou un instant de plaisir simple et de partage ?

« Hold On » est une chanson qui est restée dans un tiroir pendant plus de 15 ans. Elle parle de rédemption, de l’exorcisme de nos démons intérieurs et de la paix avec soi-même. En fait, il en existait déjà une très courte démo. Alors, lorsque George l’a présentée au groupe, l’idée de la retravailler nous a paru évidente. On y trouve un petit hommage aux groupes qu’on adore à travers l’intro à la batterie, les twin-guitares, les passages psychédéliques… Il y a des références directes, c’est vrai. Par ailleurs, on n’a jamais caché notre amour pour tous ces groupes, mais nous avons surtout essayé de les réinterpréter à la sauce TAPEWORM ELECTRIC.

« Moonshine », le premier album de TAPEWORM ELECTRIC, est disponible chez Pitch Black Records.

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Folk Metal Heavy metal

Passengers In Panic : from the roots to Metal

Avec beaucoup de fraîcheur, d’humilité et de professionnalisme, PASSENGERS IN PANIC surgit avec un nouvel album, où il semble vraiment avoir trouvé ses marques. L’expérience acquise ces dernières années permet aujourd’hui à la formation hellène de pleinement s’épanouir dans un mix savamment dosé entre son héritage culturel et un Heavy Metal tranchant. Pour autant, « « Amnesia » n’élude pas d’autres pistes et présente une trame narrative profonde et bien sentie.

PASSENGERS IN PANIC

« Amnesia »

(Sleaszy Rider Records)

PASSENGERS IN PANIC joue deux fois sur deux tableaux, ce qui est assez rare. Le premier est celui de la parité, avec une rythmique masculine, et surtout un style qui présente une égalité entre un Heavy Metal assez classique hérité de Maiden notamment, et des éléments musicaux traditionnels grecs essentiellement. Et si le mélange peut paraître étonnant, il est très réussi à l’instar de Skyclad dans une veine celtique. Cinq ans après un premier effort éponyme, le quatuor revient plus fort en s’appuyant sur des certitudes.

Ces dernières années, il a pu s’aguerrir sur scène, surtout à l’Est en République Tchèque et en Roumanie, et cela s’entend. Si le côté progressif se fait moins sentir, c’est que PASSENGERS IN PANIC se montre plus direct et efficace. Il faut dire que le groupe a été très bien accompagné sur « Amnesia ». Aux arrangements, on retrouve Yiannis Manopoulos de Thelemite, tandis que la production est signée Psychon, guitariste de Septicflesh, qui l’a élaboré dans son propre studio et avec beaucoup de soin.

Ce deuxième opus est donc très bien équilibré. Le gainda de Macédoine, le kaval, le laouto, le violon et le daouli font presque jeu égal avec les riffs acérés de Leila Argyri et le chant accrocheur d’Ionna Galani. Le duo basse/Batterie est irréprochable et PASSENGERS IN PANIC a aussi reçu le soutien de Christos Antoniou (Septicflesh) pour les arrangements de « How To Breath », ainsi que celui de l’acteur Yiánnis Tsortékis au chant et à la narration sur « Kaisis » (un morceau traditionnel) et l’excellent « Erase Me ». Un disque riche, consistant et explosif.

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Heavy Stoner Rock Stoner Rock

Planet Of Zeus : force brute

Avec « Afterlife », les Athéniens donnent l’impression de rendre hommage aux années 90, celles qui les ont musicalement nourris et aussi profondément impactés. Et c’est probablement pour ça que cette nouvelle réalisation semble si familière, tant dans les références perceptibles que dans le style très reconnaissable de PLANET OF ZEUS. Cela dit, les gros riffs sont légions, la rythmique lourde et compacte et le frontman toujours aussi percutant.

PLANET OF ZEUS

« Afterlife »

(Ihavedrum Records)

Fer de lance de la scène Stoner grecque aux côtés de 1000Mods, Nightstalker et plus récemment d’Acid Mammoth pour la partie la plus Doom, PLANET OF ZEUS s’est forgé une solide réputation bien au-delà de ses frontières et en tournant avec les plus grands. Explosif en concert, en plus de deux décennies, le quatuor s’est hissé au rang des incontournables du genre, grâce à un style massif et puissant, et surtout très identifiable. Pourtant, avec « Afterlife », il déjoue tous les pronostics avec un album surprenant.

En effet, Babis Papanikolaou (chant, guitare), Stelios Provis (guitare, chant), Giannis Vrazos (basse) et Serafeim Giannakopoulos (batterie) prennent un virage assez différent, marqué par des mélodies entêtantes omniprésentes et surtout une variété musicale étonnante. Preuve d’un éclectisme créatif très maîtrisé. C’est vrai que dans son domaine, PLANET OF ZEUS sait à peu près tout faire… et « Afterlife » confirme ses qualités et nous offre un plongeon dans un Stoner Rock assez 90’s dans son approche, et bien rentre-dedans.

Ce sixième album traverse à peu près tous les courants et parcourt des atmosphères diverses. Classique dans la lignée de QOTSA (« State Of Non-Existence »), Grunge façon Foo Fighters (« The Song You Misunderstand »), plus Heavy aux accents Fu Manchu (« Step On, Skin Off »), PLANET OF ZEUS reste pourtant lui-même et laisse exploser sa force (« No Ordinary Life », « Let’s Call It Even », « Letter To A Newborn »). « Afterlife » n’est peut-être pas le plus passionnant opus du quatuor, mais il réveille les sensibilités.

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Dark Metal International Occult Rock

Saturday Night Satan : dark feelings [Interview]

Façonné autour de la chanteuse Kate Soulthorn et du multi-instrumentiste et compositeur Jim Kotsis, SATURDAY NIGHT SATAN est apparu il y a peu sur la scène athénienne et entend bien s’étendre au-delà. Entre Rock et Metal et dans une thématique occulte pleine d’ésotérisme, le duo joue sur le contraste entre des ambiances volontairement vintage et des compos très actuelles. Et en ce sens, « All Things Black » est un premier album aussi surprenant que très réussi. Entrainant et mélodique, l’équilibre est trouvé, ce qui a récemment poussé les Grecs à investir la scène. Entretien avec le guitariste et bassiste Jim Kotsis.

Photo : Petros Poulopoulos

– Votre premier album, « All Things Black », est sorti récemment. Il est le fait de ta collaboration avec Kate Soulthorn, la chanteuse. De quand date le début du projet et quel a été le déclencheur pour vous deux ?

Par une charmante nuit de printemps, au milieu de la quarantaine pandémique du Covid-19, j’ai commencé à réfléchir à un projet de Rock Occult. Le nom et l’idée du groupe me hantaient déjà, mais je n’avais jamais réussi à le concrétiser. Et malgré quelques tentatives infructueuses, je n’avais pas abandonné. Kate avait mentionné à plusieurs reprises vouloir faire de la musique ensemble et ce soir-là, j’ai finalement eu le déclic. Il fallait le faire tous les deux. Elle est devenue ma muse et moi, son mentor. Ensemble, nous avons combiné nos efforts et nos âmes et ainsi, SATURDAY NIGHT SATAN est né !

– Au départ, SATURDAY NIGHT SATAN devait rester un projet studio, a priori sans concert, ce qui aurait d’ailleurs été dommage. Qu’est-ce qui vous a poussé à aller de l’avant, à changer vos objectifs et à en faire un groupe à part entière ?

Eh bien, il y a un dicton qui dit quelque chose comme ‘l’appétit vient en mangeant’. Riff après riff, chanson après chanson et avec Kate poussant dans la même direction, j’ai commencé à y réfléchir sérieusement. Et puis, j’ai eu l’occasion de faire écouter le disque avant sa sortie à quelques personnes clés de la scène locale. Ainsi, juste après la sortie des deux premiers singles, les premières offres de concerts ont commencé à arriver. Cela nous a semblé être l’occasion idéale de partager notre musique. Alors, nous avons pris notre courage à deux mains pour contacter des amis et des musiciens talentueux pour former le groupe. Le reste appartient à l’histoire.

Photo : Petros Poulopoulos

– D’ailleurs, parlons de « All Things Black », qui est très bien produit et qui bénéficie aussi d’un son très organique. Dans quelles conditions a-t-il été réalisé, car les arrangements notamment sont très soignés ?

Nous avons composé les chansons et écrit les paroles avec tout notre cœur. Kate a contribué aux mélodies vocales, parfois avant, parfois après la mise en place des riffs de guitare et des structures des chansons. Ensuite, je me suis occupé des arrangements et des structures. A ce moment-là, j’ai pris ce qui s’est avéré être la meilleure décision : confier à mon ami de longue date et membre du groupe ‘Black Soul Horde’, John Tsiakopoulos, les tâches de production, de prises de son et de mixage de l’album. Après quelques discussions et quelques expérimentations, nous avons obtenu le son souhaité sur tous les instruments. Le processus d’enregistrement a ensuite suivi un cheminement classique. Une fois que John a eu fini de mixer (et il a fait un excellent travail), nous avons confié l’album au plus haut niveau c’est-à-dire à Brian Lucey, qui a également masterisé « Meliora » de Ghost, entre autres. Son travail terminé, nous savions que nous avions réussi à donner vie à notre vision de départ. Pour moi, c’est une réussite à 100% et j’espère que d’autres l’apprécieront aussi.

– Musicalement, SATURDAY NIGHT SATAN penche un peu plus sur le Metal, en conservant un côté très Rock et il traverse plusieurs décennies dans les influences comme dans les sonorités. Ce sont autant de mouvances qui ont forgé votre identité artistique, puisqu’on y perçoit des choses très 70’s et d’autres plus actuelles ?

Je crois que cela résume bien l’essence de notre son. Tu peux y trouver des influences vintage, mais tout est filtré à travers un prisme moderne, lui donnant une ambiance fraîche et pertinente. Personnellement, et je pense pouvoir parler au nom de Kate à ce sujet, j’apprécie la musique de toutes les décennies et de tous les genres. Bien que je sois un fan de Heavy Metal, j’aime également Blue Öyster Cult, Megadeth, Rush, Darkthrone et John Carpenter. Après tout, que serait la vie sans diversité ?

Photo : Petros Poulopoulos

– Justement, on assiste depuis quelques temps déjà à une vague vintage avec des groupes comme Lucifer notamment, qui partage aussi votre univers. Vous vous reconnaissez dans ce mouvement, et comment expliquez-vous ce regard musical vers les groupes pionniers ?

Je peux bien sûr identifier notre esthétique au sein de ce mouvement. Il est évident que des groupes comme Lucifer, Jess And the Ancient Ones, The Devil’s Blood, In Solitude et des pionniers plus anciens comme Arthur Brown, Coven et Black Widow ont grandement influencé la création de SATURDAY NIGHT SATAN. Cependant, je nous considère bien plus qu’un simple groupe de Rock/Metal occulte. Alors que les gens sont attirés par les groupes de cette scène spécifique en raison de leur esthétique et de leur appréciation croissante pour les vibrations vintage, je pense que le groupe va devoir évoluer. Nous devons explorer de nouvelles directions, permettre à des influences plus diverses de façonner notre son et nous forger notre propre identité. Je ne pense pas que le monde ait besoin d’un autre clone de Black Sabbath. Je veux que nous transcendions cela pour devenir quelque chose de plus fort dans le futur.

– Vous évoluez dans un univers occulte, qu’il soit Metal ou Rock, on l’a dit. D’où tirez-vous vos inspirations ? Plutôt dans ce qu’il y a de plus moderne comme le cinéma ou la littérature ? Car on sait aussi que la Grèce est une terre de légendes, qui peut apporter beaucoup d’influences dans le domaine…  

Lorsque tu arrives sur des sites comme Delphes, l’Achéron, l’ancienne Épidaure ou même le Parthénon, c’est évident que la Grèce était autrefois une terre de grandeur et d’ésotérisme profond. Ces lieux dégagent une énorme quantité d’énergie, qui inspire notre esthétique et notre façon de penser depuis des années. Naturellement, nous sommes fans de littérature occulte et aficionados de cinéma d’horreur. La fusion de ces influences, combinée à des années d’écoute des pionniers du proto-Metal, a façonné ce que nous sommes. Si on plonge dans notre passé, il n’est pas surprenant que nous ayons finalement créé SATURDAY NIGHT SATAN.

Photo : Petros Poulopoulos

– Revenons à l’album, où ce sont vraiment le chant et les guitares qui prédominent. Il y a d’ailleurs un énorme travail sur ces dernières. C’est ce qui a servi de base pour les morceaux, car le nombre de riffs est incroyable et les solos ne sont pas en reste, non plus ?

Je crois fermement en une musique axée sur les riffs plutôt que sur le chant, mais dans ce projet, nous visions à mélanger les deux éléments. Et je pense que nous avons atteint cet objectif. Ce qui est intéressant aussi, c’est que je joue habituellement de la basse, mais pour cet album, j’ai assumé pour la première fois des fonctions de guitariste pour m’assurer que le son correspondait à ma vision. En ce qui concerne les solos, je ne me sentais pas à la hauteur de la tâche, alors j’ai demandé l’aide de mon ami et talentueux musicien et producteur, Akis Pastras (connu pour son travail avec Dexter Ward, Nightfall et en tant qu’ancien membre de On Thorns I Lay, entre autres). Et sa contribution est phénoménale ! Je suis vraiment satisfait du travail et du son de la guitare, même si je reconnais que je n’ai jamais été, ne suis pas et ne serai jamais un grand guitariste, car cela exige un ensemble de compétences spécifiques qui me manque.

– Un mot aussi sur le chant de Kate, qui est réellement envoûtant et parfaitement mis en avant. Si on reconnait aisément certaines références, il est pourtant très personnel. Est-ce que les parties musicales ont été adaptées à ses lignes vocales, ou c’est plutôt l’inverse qui s’est produit en l’incitant à s’adapter à des mélodies préexistantes ?

Kate s’est souvent plainte que certaines chansons ne convenaient pas à sa voix. Alors, à plusieurs occasions, je lui ai permis de commencer avec la mélodie qu’elle souhaitait, puis j’ai construit la chanson autour. Certaines comme « All Things Black » et « Of Love And The Void », ont été créées de cette façon. Je pense que Kate a vraiment amélioré son chant sur cet album et cela l’a aidée à trouver son propre style. Elle a été beaucoup influencée par la musique des années 90, ce qui est logique puisqu’elle a grandi à cette époque. On pourrait peut-être penser que cela aurait été difficile pour elle de s’intégrer, mais en réalité, cela fonctionne très bien. J’en suis heureux et surtout qu’elle ne soit pas simplement une autre ‘voix féminine rock’ de plus. Elle a vraiment quelque chose de spécial.

Photo : Petros Poulopoulos

– A l’écoute de « All Things Black », il n’est pas compliqué de deviner que vous êtes tous les deux des musiciens chevronnés, d’ailleurs issus de l’underground d’Athènes. Jim, tu joues avec le groupe Black Soul Horde, et qu’en est-il de Kate ? Et est-ce que SATURDAY NIGHT SATAN est pour vous deux l’occasion de faire vraiment ce que vous aimez, sans peut-être les contraintes d’un collectif plus important ?

C’est exactement ça et je suis ravi que tu l’aies perçu ! Ce groupe nous donne à tous les deux une grande liberté de création. Nous faisons ce que nous voulons, quand nous voulons. C’est quelque chose qu’on ne peut pas toujours réaliser dans un groupe de quatre ou cinq musiciens. Cependant, nous ne sommes pas de grands fans du concept ‘musicien de session’ pour autant. Nous voulons que toutes les personnes y voient une forme d’expression. Après toutes ces années, nous commençons enfin à trouver un équilibre dans ce processus. Kate a travaillé avec des groupes de reprises toute sa vie et a récemment dirigé un groupe de d’Alternative Rock. Personnellement, je suis actif sur la scène underground locale depuis environ 20 ans. Cela n’a pas toujours été facile, mais cela m’a donné l’expérience dont j’avais besoin pour faire partie d’un projet musical mature comme SATURDAY NIGHT SATAN. Pour l’instant, je suis vraiment content de là où nous en sommes et j’espère que cela continuera ainsi à l’avenir.

– Enfin, j’aimerais que l’on parle de la scène, puisque vous avez franchi le pas. Finalement, SATURDAY NIGHT SATAN doit prendre toute sur ampleur en concert, non ? L’idée d’un simple projet studio doit vous paraître bien lointaine aujourd’hui ? Et qui vous accompagne en live et constitue le reste du groupe ?

Eh bien, il y a beaucoup de gens qui nous disent que nous sonnons mieux sur scène que sur disque. Mais pour moi, le plus difficile est d’essayer de ressembler à l’album. Si beaucoup de personnes qui viennent à nos concerts ont écouté l’album, il faut qu’on réponde à leurs attentes, non ? Je ne dirais pas que le concept de projet de studio semble lointain. Je crois que c’est une situation qui change constamment, et à mesure que les conditions changent, notre opinion à ce sujet peut également changer. Mais pour l’instant, je souhaite que nous fassions beaucoup de concerts et que nous diffusions notre musique le plus possible. C’est notre objectif aujourd’hui ! Actuellement, notre groupe live comprend le batteur Marios Ioannou (qui joue également de la batterie sur l’album), le guitariste Fotis Karaoglanis (qui a participé à certains projets avec moi par le passé), le guitariste Spyros Georgantas (également dans l’incroyable groupe The Vulcan Itch) et le claviériste Theo Foinidis, qui est toujours occupé avec de nombreux projets, mais qui est aussi la personne la plus calme du groupe. Nous sommes plus qu’heureux d’avoir ces gens extraordinaires à nos côtés !

L’album de SATURDAY NIGHT SATAN, « All Things Black », est disponible chez Made of Stone Recordings.

Retrouvez aussi la chronique du disque :

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Dark Metal Occult Rock

Saturday Night Satan : occult fever

Entre mystère, sorcellerie et ésotérisme, « All Things Black » ouvre les voies à SATURDAY NIGHT SATAN dans une atmosphère, qui n’est pourtant pas aussi sinistre qu’il n’y paraît. Mené par une frontwoman qui joue sur les contrastes avec une belle assurance et beaucoup de talent, cette nouvelle formation hellène est à la fois un brin vintage dans l’esprit et très actuel dans l’écriture. Metal et Rock, aérien et lourd, le disque des deux architectes à l’œuvre propose une obsédante fusion mélodique, subtile et solide.  

SATURDAY NIGHT SATAN

« All Things Black »

(Made of Stone Recordings)

Issu de l’underground athénien, SATURDAY NIGHT SATAN est la rencontre et le fruit du travail d’un duo, qui vient montrer avec « All Things Black » que le Dark Metal de son pays ne manque toujours pas d’imagination et qu’il est bel et bien vivace. Kate Soulthorn (chant) et Jim Kotsis (guitare, basse, chœurs) livrent un premier effort très abouti, bien produit et surtout d’une richesse assez étonnante. Outre les différentes époques passées en revue, les courants Metal, Rock et Hard Rock se fondent brillamment dans un même et seul élan créatif et homogène.

Le duo, qui est complété par un groupe en live, s’était au départ lancé dans ce qui devait rester un projet studio, mais il faut croire que l’avancée de la composition les a fait changer d’avis. Et c’est une très bonne chose ! Le multi-instrumentiste (également membre du groupe de Heavy Metal ‘Black Soul Horde’) et sa chanteuse s’inscrivent dans une mouvance Rock Occult en s’appropriant les codes du cinéma d’horreur et de sa sombre imagerie. Frissons de plaisir garantis avec SATURDAY NIGHT SATAN, dont le spectre musical s’étend aussi à travers le temps dans ses références.

S’appuyant sur les décennies allant des 70’s aux 90’s pour l’essentiel, les Grecques n’en sont pas moins modernes dans leur approche. Certes, la voix féminine n’est pas sans rappeler Lucifer, mais le groupe possède bien d’autres atouts. Nourri de quelques claviers, de sonorités psychédéliques, de thérémine (« Witch’s Dance ») et même de flûte sur l’excellent « Of Love And The Void » qui clôt l’album, SATURDAY NIGHT SATAN provoque la fièvre par des incantations dynamiques et accrocheuses (« 5AM », « Devil In Disguise », « Lurking In The Shadows » « Crown Of Arrogance » et le morceau-titre). Belle première !  

Photo : Petros Poulopoulos
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post-Rock Progressif

Glen : une grisante stimulation

Derrière ce titre énigmatique, cette nouvelle réalisation reprend les choses, musicalement, là où le très créatif duo nous avait laissé avec « Pull ! ». Même si le ‘propos’ est différent dans l’intention, il est le même dans la forme. Dynamique, parfois épique et cinématique, le post-Rock Progressif de GLEN joue sur des concepts très modernes et assez visionnaires avec une technique et une élégance toujours aussi délicates. « I Can See No Evil » est envoûtant à plus d’un titre.

GLEN

« I Can See No Evil »

(Sound Effect Records)

Avec « Pull ! », son précédent album sorti il y a deux ans, la formation basée entre Berlin et Athènes, nous propulsait dans un post-Rock Progressif étonnant. Toujours emmené par le multi-instrumentiste allemand Wilhelm Stegmeier et la guitariste et pianiste Eleni Ampelakioutou, GLEN réédite l’exploit de faire aussi bien en plus de se renouveler. D’ailleurs, sur « I Can See No Evil », il accueille les batteurs Lucia Martinez et Achim Faeber, ainsi que Roland Feinaeugle à la basse. Et l’unité demeure.

Ce qui rend si spéciale la musique du groupe, c’est alors qu’elle est entièrement instrumentale, elle nous raconte plein de choses. Chaque album donne lieu à des morceaux directement liés aux réflexions du binôme et notamment de son compositeur. GLEN possède un sens de l’expressivité musicale, qui se dilue dans un groove obsédant, lui-même guidé par un style narratif qui se passe facilement de mots. Et ce troisième opus est toujours aussi polymorphe, inspiré et véloce.

Comme sur « Pull ! », on retrouve le légendaire producteur allemand Reinhold Mack au mix, qui offre cette fois encore un relief saisissant à des morceaux d’une grande finesse, mis en lumière par des arrangements très soignés (« Paradigma », « Neos Kosmos » et sa trompette aérienne, « In The Midday Sun » et le nerveux « Strike »). GLEN n’a pas son pareil pour nous inviter au voyage, grâce à des envolées lumineuses, des instants suspendus et un art du crescendo inouï. « I Can See No Evil » est exaltant, séduisant et explosif. Un grand moment.

Photo : Benjamin Talsik

Retrouvez l’interview du groupe parue à la sortie de « Pull ! »…

… et la chronique de l’album :

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Heavy Stoner Rock Sludge

Rusty Bonez : inoxydable

Relativement épurés, mais compacts et avec suffisamment d’épaisseur dans les guitares, les morceaux de cette deuxième réalisation de RUSTY BONEZ révèlent une belle inspiration de la part des Grecs. D’ailleurs, « Brainworm » repose sur une rythmique libérée par un souffle Stoner terriblement Heavy, qui flirte parfois avec des sonorités Sludge enthousiasmantes. Solide et entraînant !

RUSTY BONEZ

« Brainworm »

(Vinyl Store Gr.)

RUSTY BONEZ fait partie des très bonnes formations Stoner dont la Grèce a le secret. En un peu moins de dix ans, le quatuor s’est forgé une solide petite réputation, résultat d’un travail acharné depuis son premier album « Wrath », sorti en 2017. Après la parution de celui-ci, le groupe a enchainé les concerts ce qui lui permet aujourd’hui d’afficher des compositions radieuses sur ce nouveau « Brainworm ».

Freiné dans son élan par la pandémie, RUSTY BONEZ a du se résoudre à renouveler la moitié de son line-up, et c’est donc plein de fraîcheur et d’envie qu’il réapparait sur ce deuxième opus. Avec « Brainworm », les Hellènes nous baladent dans un univers très Stoner donc, avec de multiples influences Heavy Rock et même parfois Grunge (en nettement plus musclé). En résumé, on navigue entre Clutch et Black Label Society.

Grâce à son frontman à la voix puissante et accrocheuse, RUSTY BONEZ dégage une énergie très communicative et les mélodies accentuent l’impact des riffs, le tout sur un groove enivrant (« Nowhere », « If », « Pile Of Stones », « Brainworm », « Shadow Of Faith »). La grande variété de l’album est également très bien mise en valeur par le mastering de George Nerantziz (Pain Of Salvation, Gus G). Bref, une bonne grosse claque !

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Stoner/Desert

Acid Mammoth : c’est là que les Athéniens anéantirent !

Révélation du Doom grec avec « Under Acid Hoof », ACID MAMMOTH continue de creuser son épais sillon. Le quatuor a profité de l’atmosphère sombre et étrange du confinement pour s’enfoncer dans des profondeurs métalliques pour concevoir « Caravan », un nouveau périple où les rythmiques pachydermiques côtoient des solos étourdissants.

ACID MAMMOTH

« Caravan »

(Heavy Psych Sounds Records)

Depuis 2015, ACID MAMMOTH a entamé sa lourde marche à travers un Stoner Doom massif et assommant. Troisième étape pour le quatuor grec qui a conservé l’esprit et les codes de son précédent album dans le design de la pochette de « Caravan ». Et cette descente en rouge et noir dans les abysses musicaux semble vraiment inscrite dans les gènes du combo, qui présente son album le plus complet et abouti à ce jour. 

L’an dernier, « Under Acid Hoof » avait déjà révélé les qualités des Hellènes, confirmées sur le volume 2 des « Doom Sessions » de leur label aux côtés de 1782 un peu plus tard. Avec ce nouvel opus, les Babalis père et fils (guitares et chant), Dimosthenis Varikos (basse) et Marios Louvaris (batterie) imposent leur style avec force et conviction. ACID MAMMOTH fait rimer Metal hypnotique et Fuzz frénétique.

Si l’album démarre par un petit rire démoniaque et un morceau clairement Stoner Rock et mélodique (« Berserker »), le groupe retournent très vite dans un Doom caverneux sur des morceaux aussi massifs qu’épais (« Psychedelic Wasteland », « Ivory Towers »). Et ACID MAMMOTH continue son imposante mainmise sur le morceau-titre long de 11 minutes avant de porter le coup de grâce sur le diabolique « Black Dust ». On en redemande !

Bandcamp : http://acidmammoth.bandcamp.com/

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Progressif Rock Stoner/Desert

Holy Monitor : progression hypnotique

C’est sous le soleil et dans le chaud climat de leur Grèce natale que HOLY MONITOR a confectionné son Psych Rock emprunt de sonorités progressives et fuzz. Les mélodies captivantes et envoûtantes de « Southern Lights », le troisième album du groupe, appellent autant à la bienveillance qu’à la transe dans une atmosphère spatiale et moderne. 

HOLY MONITOR

« Southern Lights »

(Blackspin Records / Primitive Music)

Fondé en 2015 à Athènes en Grèce, HOLY MONITOR ne perd pas de temps. Après deux albums et deux EP, revoici déjà le quintet avec un troisième opus, « Southern Lights », qui vient confirmer le beau chemin parcouru par le groupe en si peu de temps. Et le Rock Psychédélique des Hellènes prend une dimension très inspirée et vagabonde auparavant entr’aperçue sur « This Desert Land ».

Comme son nom l’indique, « Southern Light » est solaire et lumineux et l’enregistrement réalisé en condition live apporte une énergie et une profondeur incroyable aux huit morceaux. Très mélodiques et chaleureuses, ces nouvelles compostions évoluent entre ambiances plantes et progressives et des guitares fuzz également marquées par un Space Rock dans lequel HOLY MONITOR s’épanouit. 

Sur un groove imparable (« The Sky Is Falling Down ») ou dans une frénésie presque chamanique (« Naked In The Rain »), le combo est aussi palpitant qu’hypnotique et la diversité affichée présente un album tout en variation (« River », « Blue Whale »). Très expérimental et progressif, le Psych Rock de HOLY MONITOR multiplie les rythmiques minimalistes et trépidantes pour un « Southern Light » savoureux.

Bandcamp : http://holymonitor.bandcamp.com/

Catégories
Stoner/Desert

Supermoon : un envoûtant voyage mystique

Pour les Grecs de SUPERMOON, s’immerger dans la mythologie tient presque du réflexe. Et c’est à travers un Desert Rock à mi-chemin entre le Psych et le Space-Rock que le quatuor a composé cette première autoproduction éponyme très aboutie et planante. Un voyage musical très énergique aux belles envolées.

SUPERMOON

« Supermoon »

(Independant)

Sorti en tout fin  d’année, ce premier album éponyme de SUPERMOON est une belle surprise. Originaire d’Athènes, le quatuor livre une autoproduction entre Desert et Psych avec des rythmiques parfois Doom et le plus souvent atmosphériques. Les Hellènes nous plongent dans un univers très spirituel où il est question de nature et de mythologie notamment.   

SUPERMOON propose de longues plages instrumentales bardées de guitares hypnotiques et aux riffs faisant la part belle aux mélodies. Sans forcer le trait, le groupe se veut avant tout hypnotiques et part facilement dans des envolées musicales apaisantes (« Mantra », « Mandala »). On y trouve quelques pointes de Stoner, qui apportent une belle énergie malgré l’omniprésence de morceaux mid-tempos (« Serpent Spirit »).

Dans une sorte de transe collective, SUPERMOON se fait parfois même très chamanique (« The Dome »), grâce à des voix lointaines et très posées. Vasilis Tsigkris, maître d’œuvre et tête pensante du combo, et ses trois complices livrent un album captivant et varié où le fuzz a sa place aux côtés de riffs plus soutenus, le tout avec élégance. Entre Space-Rock et Desert Rock, les Grecs se montrent très mystiques.

https://supermoongr.bandcamp.com/