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Fuzz Rock Psych Rock 70's

Howard : frénésie intemporelle

Malgré des débuts perturbés, HOWARD devrait enfin prendre son envol, grâce à ce deuxième album percutant et haut en couleurs. « Event Horizon », en plus d’être très bien réalisé, dévoile huit morceaux au groove constant, aux envolées Fuzz bien senties et avec un feeling qui puise dans un Psych Rock ensorceleur.

HOWARD

« Event Horizon »

(Ditto Music/Season Of Mist/Delta Fuzz Electronics)

Si 2020 a été une année noire pour beaucoup, elle a aussi coupé HOWARD dans son élan, alors que le trio sortait tout juste le très bon « Obstacle » (le bien-nommé), un premier album qui aurait du lancer le groupe de la plus belle des manières. Qu’à cela ne tienne, les Parisiens se sont remis au travail et à l’écriture de « Event Horizon », un deuxième opus qui vient confirmer leur bouillonnante créativité.

Si le Stoner Rock entrevu sur leurs précédentes réalisations (le groupe a aussi sorti un EP en 2018) laisse place à un Psych Rock très 70’s, HOWARD garde et peaufine son style en l’articulant sur des sonorités électroniques vintage boostées par un orgue Hammond sans limite. Pour autant, le combo fait fuzzer les guitares offrant à « Event Horizon » une vélocité et un impact très actuels qui tranchent avec l’esprit du disque.

Tout en restant d’une efficacité redoutable sur les mélodies, HOWARD a également apporté un soin tout particulier aux arrangements qui sont d’une grande finesse et que l’on découvre au fil des écoutes (« I Hear A Sound », « Need Want Get », « The Way » et le très bon morceau-titre). HOWARD est inventif, créatif et prouve que revival et modernité font plus que bon ménage. Précis et captivant.

A noter le HOWARD fera sa ‘release party’ avec le groupe Djiin samedi 3 décembre au Backstage By The Mill à Paris. Les tickets sont en prévente ici :

https://www.helloasso.com/associations/below-the-sun/evenements/howard-djiin-backstage-paris

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France Progressif Stoner Doom

Oaks : une puissance organique sculpturale [Interview]

Fort d’un premier album très réussi, OAKS propose une aventure musicale singulière en évoluant dans des atmosphères progressives et Metal, dominé par un Stoner Doom lourd et épais. Le trio parisien se déploie dans un registre entièrement instrumental avec un travail sur le son très pertinent. Pleine de relief, la musique du groupe se fait aussi envoûtante que percutante, et c’est son guitariste, Thibault, qui nous en dit un peu plus sur cette première réalisation qui en appelle déjà d’autres.

– On vous a entendu pour la première fois en février dernier avec votre premier single « The Void », suivi de « The Chasm » en juillet. Avant de parler de l’album, pouvez-vous revenir sur votre parcours respectif et la création d’OAKS ?

Nous nous connaissons avec Julien (basse) depuis 20 ans. Nous sommes tous les deux de Strasbourg et nous avons joué dans de nombreux groupes avec des potes communs, mais finalement jamais ensemble. Naturellement, quand nous nous sommes retrouvés tous les deux à Paris, on a voulu créer un groupe. Nous voulions qu’il ne soit pas stigmatisé par un style particulier, mais le reflet de tout ce qu’on a pu écouter et digérer musicalement. On a également la chance d’avoir trouvé très rapidement notre propre studio de répétition et d’enregistrement, ce qui nous permet de stocker notre montagne de matos et d’avoir la liberté de répéter autant qu’on le souhaite. OAKS est né de notre envie de jouer ensemble sans se mettre de limite.

– Pourquoi avez-vous laissé passer huit mois entre le premier single et l’album ? De l’accueil de « The Void » dépendait la sortie de « Genesis Of The Abstract » ou est-ce que, plus simplement, tout n’était pas encore prêt ?

Le plan initial était de sortir l’album en autoproduction début 2022. A ce moment-là, nous avons eu un deal avec Argonauta Records et il nous a fallu revoir notre stratégie. Au début, l’album devait sortir en mai, mais notre batteur de l’époque nous a quitté juste après la sortie de « The Void » et l’annonce de la signature avec Argonauta. Nous avons heureusement rapidement trouvé Nathan, mais nous avions quand même besoin de temps pour être prêts pour de la sortie. Nous avons donc décidé de repousser la sortie à septembre.

Photo : Bill Castle

– Vous vous décrivez comme un ‘trio conceptuel’, qu’entendez-vous par là ? C’est une définition globale du groupe, ou cela ne s’applique qu’à ce premier album ?

En tant que groupe instrumental, il est très intéressant de réussir à raconter quelque chose sans mot. Lors de la création du projet, le désir était d’avoir un ensemble cohérent autant musicalement que visuellement. Nous travaillons donc nos titres dans une globalité, comme un projet complet. Nous avons créé un show vidéo pour nos concert afin de renforcer ce côté synesthésique du projet. D’ailleurs en live, nous jouons l’album dans son intégralité comme si c’était un seul long titre.

– Alors que vous évoluez en instrumental, seule une voix féminine se fait entendre en début et en fin d’album. Est-ce que vous pouvez en parler, pour ceux qui ne connaissent pas encore le disque, et en détailler son contenu ?

J’ai écrit un texte qui résume le concept de cet album. Nous voulions une intro et une outro et j’ai toujours eu en tête une voix grave et monocorde de femme pour réciter ce texte très imagé, voire carrément lyrique ! La voix de Fanny Fourquez, que je connais très bien, était parfaite pour ça.

– Musicalement, OAKS déploie un Stoner Doom teinté de Metal et de Prog, qui crée un univers très sombre malgré quelques passages plus lumineux. C’est pour accentuer un peu plus cette atmosphère assez obscure que vous avez opté pour une guitare baryton ?

Nous aimons particulièrement cet accordage, car nous voulions un son lourd. Je joue principalement sur Les Paul, et le diapason court des Gibson donne ce côté bourdonnant et organique à l’ensemble. Et Julien et moi adorons acheter du matos, essayer des nouveaux sons et amasser des amplis et des pédales.

– « Genesis Of The Abstract » présente une production massive et très organique. Il s’en dégage un aspect très live et spontané. Malgré une lourdeur apparente, l’album reste aussi très vif et véloce. Est-ce que c’est cette formule en trio qui vous permet d’obtenir ce son si particulier ?

Nous avons enregistré l’album dans notre propre notre studio avec Julien Tota aux manettes. Nous voulions ce côté live et organique que tu décris. Nous ne cherchions pas un son trop moderne, ni surproduit. C’est d’ailleurs exactement notre son en live. Julien et moi avons vraiment travaillé pour être complémentaires. Etant un trio, et instrumental de surcroit, chacun doit couvrir un large spectre de fréquence pour éviter que la sauce ne retombe. Les lignes de basse sont régulièrement assimilables à des lignes mélodiques, alors que je martèle la rythmique. C’est très intéressant de sortir des carcans classiques du basse/batterie/guitare/chant, tout en essayant de garder la même dynamique à l’écoute.

– OAKS ayant opté pour un registre instrumental, la question du chant ne se pose donc pas. Mais si vous deviez poser des textes sur votre musique, quelle en serait la teneur ?

Honnêtement, je ne sais pas quoi te répondre. Sur cet album, j’ai écrit un texte qui résume les différentes parties du voyage sonore et conceptuel que nous avons créé. Nous commençons à travailler sur le prochain album et un thème se dégage déjà. J’aime l’idée qu’il y ait un fil rouge dans chacune de nos créations. Sur « Genesis Of The Abstract », c’était celle d’une longue et unique plage musicale. Pour le suivant, j’aimerais intégrer plus de samples, qui seront justement le lien entre chaque titre. On ne se fixe aucune limite, alors peut-être que nous aurons des titres chantés à l’avenir.

– Outre la musique, vous travaillez aussi beaucoup sur le visuel du groupe en collaboration avec des artistes d’autres disciplines. Pouvez-vous en dire un peu plus, car vous abordez OAKS comme une entité aux multiples facettes finalement ?

Nous aimons effectivement intégrer différents aspects artistiques à notre projet. Nous avons, par exemple, la chance de collaborer avec Clément Sautet, qui est réalisateur de film et photographe. Nous travaillons avec lui sur l’aspect visuel du projet ce qui, comme je le disais, est primordial dans notre démarche artistique. J’ai également approché certains artistes visuels pour la création des loops du show vidéo live. Notre envie est de proposer un projet global de l’album au live, en passant par le contenu de nos réseaux et des clips que nous tournons.

L’album d’OAKS, « Genesis Of The Abstract », est disponible depuis le 30 septembre chez Argonauta Records.

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France Metal Progressif

Spheres : un regard vers le futur [Interview]

En cinq ans d’existence, les Parisiens de SPHERES ont développé un Metal Progressif, où les textures et les atmosphères renvoient à de multiples reliefs pour un voyage musical saisissant. Après un premier album, « Iono » (2019), le quatuor est de retour avec « Helios » à travers lequel il nous entraîne dans un périple qui va à l’encontre de l’idée-même d’utopie. Très contrasté et spirituel, ce deuxième opus pousse le groupe dans des contrées musicales plus dark encore. Entretien avec Jonathan Lino (chant et guitare), principal compositeur et producteur, qui revient sur la conception de cette nouvelle réalisation.

– Le line-up de SPHERES a un peu évolué sur ce nouvel album. Outre deux guests sur quelques morceaux, on note la présence sur l’ensemble de « Helios » du claviériste Marco Walczak. Est-il devenu un membre à part entière du groupe ?

Il risque de le devenir, c’est vrai. Auparavant, pour des raisons essentiellement financières, on tournait à quatre et il se pourrait que l’on commence à tourner à cinq. A terme, ce serait vraiment intéressant de l’avoir avec nous sur scène, car il apporte beaucoup au niveau du design sonore. On voulait donner une ambiance un peu Dark Synth à « Helios » et lorsque j’ai écouté son travail, je lui ai confié sans hésiter les arrangements des claviers sur l’album.

– Jonathan, tu as écrit, composé et produit l’ensemble de l’album sur lequel tu chantes, joue les guitares et les claviers. On pourrait presque penser à un projet solo. Quel est la part d’investissement et d’apport créatifs des autres musiciens ?

En fait, je suis ingé-son et j’ai donc tout le matos à la maison. Par ailleurs, j’ai toujours besoin d’un squelette pour synthétiser mes idées. Ensuite, j’envoie les démos aux autres et chacun travaille sur les arrangements. On discute beaucoup sur nos idées respectives et tout le monde y participe. J’ai juste besoin de mettre un premier coup de pinceau sur la toile, mais tout le travail de production et d’arrangement se fait à quatre. Et puis, chacun est très compétent dans son propre domaine instrumental, mieux que je ne peux l’être sur certaines choses, bien sûr, comme par exemple la batterie ou les parties de basse, qui guident d’ailleurs souvent les morceaux. Je suis juste plus à l’aise en travaillant seul sur les premières maquettes et les idées, mais c’est vraiment en groupe que nous faisons évoluer l’ensemble.

– Ce qui est assez surprenant sur « Helios », c’est qu’il y a un côté très science-fiction dans le son, notamment dans les claviers et certaines atmosphères, et pourtant l’album a quelque chose de très concret aussi. C’est un contraste sur lequel tu as voulu jouer ?

En tout cas, on peut parler d’album-concept. Chaque titre a son propre sujet, mais ils traitent tous d’un seul et même thème, qui est la dystopie. Il y a un aspect concret, bien sûr, mais aussi très onirique et spirituel. Cela dit, il y a aussi une volonté d’alerte en abordant ce genre de matière. Plutôt que de décrire un monde post-apocalyptique, on essaie de donner une sorte d’optimisme et d’ouvrir les esprits.

– Justement, « Helios » a des ambitions très spirituelles sur la vision d’un monde dystopique. J’imagine que dans ce cas-là, ce sont les textes qui amènent à la musique au niveau de l’écriture, ou le schéma est-il inverse ?

J’ai souvent des idées de sujets en tête, mais je ne me jette pas immédiatement dans l’écriture. Je laisse plutôt la place à mon imagination pour avoir une base. C’est à partir du moment où j’ai une histoire musicale que j’écris les textes. Le sujet vient en premier, la musique en deuxième, et ensuite l’écriture des paroles.

– J’aimerais qu’on s’arrête sur un morceau de l’album, qui se trouve aussi être le plus long, c’est « Pandemia ». Il est assez surprenant dans sa structure et son approche, car il présente des éléments progressifs évidents, ainsi que des passages post-Metal et des variations vocales étonnantes. On a presque le sentiment qu’il est la clef de voute de l’album. C’est le cas ?

C’est vrai que c’est le morceau le plus long et aussi le plus Prog. Il tire vraiment son inspiration d’un groupe comme Opeth avec une succession de chapitres. Je n’ai pourtant pas la volonté de n’écrire que des morceaux comme celui-ci. Mais dès le départ, j’ai voulu raconter une histoire, un peu comme on lit un livre.  

– SPHERES propose tellement d’atmosphères et de changements de tons qu’on pourrait vous qualifier de groupe de Metal extrême. Est-ce une chose dans laquelle tu te retrouves aussi ?

Oui, complètement. J’ai beaucoup écouté de musiques extrêmes et progressives qui s’en rapprochent. Cela dit, lorsque j’ai commencé la musique, j’ai beaucoup été influencé par le Rock Prog 70’s comme Magma, King Crimson, Genesis et Pink Floyd… et ça transpire encore ! Mais rapidement, j’ai écouté pas mal de MetalCore, du Sepultura aussi et pas mal d’autres choses extrêmes. Ma culture est un mélange de tout ça.  

– Est-ce qu’il y a un concept, un fil conducteur dans ce nouvel album ? Est-ce que « Helios » a été composé comme un tout, ou au contraire, est-ce que l’ordre des morceaux importe peu ?

L’ordre importe assez peu, car les morceaux ne suivent pas une histoire, même s’ils traitent tous d’un même thème. C’est vrai que l’album est très homogène dans le son, le mix et la production et avec aussi beaucoup de relief.

– En dehors des arrangements qui sont très soignés, j’aimerais que tu évoques le travail sur les voix, quelles soient collectives d’ailleurs et aussi ton propre chant. Il peut être clair et mélodique, assez martial et guttural parfois, tout comme extrême avec du growl et un peu de scream. La palette est très large. Il y a presque un petit côté schizophrénique dans tout ça, non ?

Oui, c’est vrai. J’adore utiliser différents registres de voix. C’est un peu comme une caisse à outils, qui te permet d’exprimer différentes émotions. J’essaie aussi beaucoup de choses, beaucoup de styles. La pluralité des reliefs dans la musique, j’aime la retrouver de la même manière que dans le chant.

L’album, « Helios », de SPHERES est disponible depuis le 23 septembre chez M&O Music.

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Desert Rock Heavy Psych Rock Stoner Punk

Red Sun Atacama : une coulée de lave

Avec « Darwin », leur deuxième album, les Parisiens de RED SUN ATACAMA semblent avoir réduit la capitale en une terre volcanique devenue désertique. Intrépide et massif, le trio sait aussi habillement s’échapper dans des atmosphères Psych, autant que livrer quelques fulgurances Punk savamment dosées.

RED SUN ATACAMA

« Darwin »

(Mrs Red Sound)

A la croisée entre le Stoner Psych et le Desert Punk, RED SUN ATACAMA vient asséner un sacré coup de bambou avec ce deuxième album, qui vient confirmer le style très personnel du trio parisien. Depuis son premier EP (« Part 1 » – 2015), puis avec un premier album convaincant (« Licancabur » – 2018), le groupe ne cesse de grimper dans les tours et gagne en efficacité.

A la fois sauvage et très maîtrisé, « Darwin » se présente sur cinq titres saisissants (et une intro) à travers lesquels RED SUN ATACAMA joue avec les textures sonores, tout en frappant fort et brutalement à la première occasion. Très ambitieux dans la structure des morceaux, le combo fait parler la poudre pour, l’instant suivant, nous projeter au beau milieu d’un désert aride.

Si le chant du bassiste vient souvent sonner la charge, ce nouvel opus est pourtant doté de longues plages instrumentales souvent acides, très magnétiques et d’un hypnotisme constant (« Furies », « Antares », « Ribbons »). Et lorsque RED SUN ATACAMA décide d’aller à l’essentiel, c’est pour mieux libérer une puissance dévastatrice (« Echoes », « Revvelator »). Explosif et rugueux.

Photo : Nicolas Rabo
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Blues Rythm'n' Blues Soul / Funk

Elise & The Sugarsweets : un feeling ouvert au monde

Porté par une belle énergie, le quintet parisien continue sa route dans une ambiance Blues, Soul, Funk et Rythm’n Blues qui ne manque ni de couleurs, ni de fraîcheur et encore moins d’humanisme. Avec « Horosho », son deuxième album, ELISE & THE SUGARSWEETS libère un héritage musical hors du temps et, par conséquent, très actuel.

ELISE & THE SUGARSWEETS

« Horosho »

(Adora Blues/Absilone)

« Horosho » est déjà la troisième réalisation du groupe en six ans. Après un EP (« When The Whistle Blows ») et un premier album (« It Can’t Go Wrong »), tous deux très réussis, ELISE & THE SUGARSWEETS fait son retour avec un changement de taille. Au chant, c’est dorénavant Yulia Gubenko qui officie en lieu et place d’Elisa Heyte, ce qui n’a d’ailleurs pas empêché le quintet de conserver son nom.

Toujours aussi intemporelle, la musique des Français s’inscrit dans la veine des productions de Stax, Atlantic et de la Motown avec tellement de talent que la comparaison s’impose d’elle-même. Entre Blues, Soul et Rythm’n’ n Blues, ELISE & THE SUGARSWEETS nous entraîne dans un groove et un swing irrésistibles dans lesquels quelques pulsations Funk trouvent aussi un peu de place.

En montrant une belle diversité à travers de nombreuses teintes Blues et Soul, les Parisiens affichent aussi une identité musicale très personnelle. Grâce à une incroyable technique et une dextérité de haut vol, ELISE & THE SUGARSWEETS nous font passer par tous les états et le voyage est enchanteur (« In The Shadow Of Your Wings », « Galaxy », « Birthrights », « Not Allowed To Sing The Blues », « Stolen Sun »). Superbe.    

Photo : Philippe Poitevin
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Doom

[Going Faster] : Fátima / Monasterium

Parce qu’il y a beaucoup, beaucoup de disques qui sortent et qu’il serait dommage de passer à côté de certains d’entre eux : [Going Faster] se propose d’en mettre plusieurs en lumière… d’un seul coup ! C’est bref et rapide, juste le temps qu’il faut pour se pencher sur ces albums, s’en faire une idée, tout en restant toujours curieux. C’est parti !

FATIMA – «  Fossil » – MusikÖ Eye

Depuis sa première démo en 2015, le trio parisien a fait du chemin et se présente aujourd’hui avec « Fossil », un nouvel album où son style se précise de plus en plus. Grâce à une production claire et solide, ce troisième opus réalise une très bonne synthèse entre le Doom pour le genre, le Grunge pour la voix et des sonorités orientales pour les atmosphères. Fort de cette triangulation très réussie, FATIMA est difficile à saisir, mais très facile à adopter. A la fois mélodique, épuré et pourtant très riche en arrangements, « Fossil » invite à l’évasion avec son rythme lancinant, ses voix écorchées et ses riffs terriblement fuzz. Après « Turkish Delights » et le très bon split avec Seum et son Doom’n Bass percutant, les Parisiens s’affirment avec beaucoup de personnalité. A suivre de très près…

MONASTERIUM – « Cold Are The Graves » – Nine Records

Cela fait huit ans maintenant que MONASTERIUM marche dans les pas de ses glorieux aînés Candlemass et Manilla Road pour bâtir un Heavy Doom consistant et compact. En l’espace de trois albums, « Cold Are The Graves » compris, le quatuor polonais a réussi à développer un style très personnel. Une atmosphère très 80’s se dégage de ce nouvel opus à travers lequel on sent une réelle communion. Sur une production assez classique, MONASTERIUM dévoile un son clair variant entre envolées épiques sur un Metal traditionnel, ponctué par des passages plus calmes. Le combo montre une écriture intéressante et soignée en évitant bien de tomber dans des clichés Doom trop prévisibles. Les Polonais se montrent habiles et inspirés, et « Cold Are The Graves » un très bon album.  

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France Post-HardCore Progressif

Point Mort : post-format [Interview]

Clair, pertinent, audacieux et ascensionnel sont quelques adjectifs que l’on peut facilement attribuer à ce premier album de POINT MORT, « Pointless… ». Les Parisiens se livrent sur près d’une heure dans un post-HardCore percutent et aux reliefs étonnants, passant d’’ambiances progressives à des fulgurances Metal sans concession. Entretien avec Sam, chanteuse polymorphe s’il en est, et Simon, batteur métronomique et virevoltant du quintet.

– Le groupe existe depuis déjà sept ans et vous avez deux EP à votre actif. Et trois ans après le dernier, « R(h)ope », vous sortez votre premier album « Pointless… ». Il vous fallait être fin prêts afin de proposer un long format qui a dû demander beaucoup de travail, vu le résultat ?

Sam : Je pense que c’était le moment, que les planètes étaient alignées. (Sourires)
« Pointless… » nous a demandé du temps, en effet. Comme beaucoup de musiciens, on a bénéficié du confinement, de l’arrêt des concerts pour travailler dessus. Le groupe est plus solide aussi, humainement et musicalement. Un contexte plus favorable en tous points.

– Justement « Pointless… » est parfaitement réalisé, tant au niveau des compositions que de sa production. Vous aviez le sentiment que votre jeu n’était peut-être pas suffisamment mature jusqu’ici et qu’il vous fallait être encore patients pour pouvoir vous exprimer pleinement, surtout dans un registre aussi travaillé ?

Sam : Pas vraiment. Nous n’avons jamais vraiment réfléchi au format. Nous avons enregistré nos deux premiers EP en fonction du temps qui nous était disponible à ce moment-là. Pour « Pointless… », on avait plus de temps et on a décidé de s’en donner plus en studio aussi. C’est ce qui a permis d’enregistrer ces huit morceaux qui, pour nous, fonctionnaient comme un ensemble.

– Le Post-HardCore de POINT MORT se démarque également de la scène nationale de par, notamment, la complexité de vos morceaux. De quelle manière procédez-vous pour les composer, compte tenu de leurs structures et des innombrables détails, qui sortent franchement de l’ordinaire ?

Simon : J’espère ne pas avoir l’air trop prétentieux, mais je crois que c’est quelque chose qui nous vient assez naturellement, en fait. En tout cas, ce n’est pas prémédité, on ne recherche pas la complexité pour la complexité. C’est surtout un aspect très présent dans la musique qui nous influence, donc ça nous paraît évident de ne pas aller vers des structures trop linéaires quand on écrit.

Il est également bien plus simple, à mon avis, de se repérer dans un morceau dans lequel tous les passages sont différents que dans une structure classique, où tous les couplets et refrains sont les mêmes ! Les cassures et les changements d’ambiance font que nous restons alertes et engagés dans le morceau en le jouant. On a tendance à s’ennuyer assez vite sinon !

– POINT MORT présente des arrangements très pointus, qui forment un édifice solide. Y pensez-vous dès le départ, ou c’est plutôt un travail de studio, qui se fait en aval ?

Simon : A l’échelle à laquelle nous travaillons, nous n’avons accès au studio qu’au moment d’enregistrer les morceaux. Tout le travail, de la composition, à l’arrangement puis à l’apprentissage des titres, doit avoir été fait avant d’arriver au studio, sans quoi, on est certain de perdre un temps précieux.

Pour autant, on ne peut pas dire que tout soit réfléchi ‘dès le départ’. Certaines idées d’arrangement n’arrivent qu’en fin de composition, mais il n’y a pas vraiment de règle préétablie…

– Pour revenir à votre album, il présente des atmosphères très variées qui pourtant débouchent sur un ensemble très cohérent. C’est difficile de vous suivre parfois, malgré un style très personnel qui devient d’ailleurs vite identifiable. Vous vous fixez un fil rouge, une ligne directrice ?

Simon : On cherche toujours à atteindre le fragile équilibre entre un morceau qui est intéressant à jouer pour nous les musiciens, mais qui reste cohérent pour les auditeurs. On écrit avant tout de la musique pour nous-mêmes, donc c’est important qu’on ne s’ennuie pas en jouant les morceaux. Mais si on ne suit que cette directive-là, on peut très vite se retrouver avec un morceau qui ne ressemble pas à grand chose. Parfois, il faut faire des compromis !

– Parlons de l’aspect vocal de POINT MORT avec ses passages clairs et d’autres growlés. J’imagine que ce sont les textes qui guident l’intensité et la puissance à employer à tel ou tel moment, non ?

Sam : Je compose de manière instinctive. C’est plutôt l’intensité qui dicte les mots en fait. Quand je commence à poser les lignes mélodiques, les morceaux sont généralement bien avancés. Je me jette un peu à l’eau et je lance les idées comme elles viennent. A partir de là, si les bases mélodiques nous plaisent, je commence à écrire. Les sonorités m’inspirent des mots, des thèmes. Je fonctionne plutôt dans ce sens-là. La mélodie est vraiment ce qui prime à mon sens.

– L’autre particularité du chant est de passer de l’anglais au français. Dans quels cas utilisez-vous l’un ou l’autre ? Pour faire passer certains messages ? Pour insister sur l’aspect poétique de certains textes ?

Sam : Ce sont les mélodies qui me dictent la langue. J’entends même parfois des langues que je ne maîtrise pas, à mon grand regret… D’ailleurs, on n’était tous pas très fan du français au départ. Mais c’est comme pour le reste : si on trouve tous que ça colle, on garde.

– Enfin, j’aimerais que l’on dise un mot sur le côté engagé et presque militant parfois de certains titres. L’inscrivez-vous pleinement dans votre démarche, au même titre que la musique en elle-même ?

Sam : Ah, je vois que tu as bien lu les textes. Parce qu’on nous en parle peu en fait. Pour la simple et bonne raison que j’aime utiliser une prose assez imagée quand j’écris. Mais oui, les thèmes sont engagés, car j’écris toujours sur des sujets qui me tiennent à cœur, me chamboulent, me révoltent… Mais comme ce n’est pas une écriture commune avec le reste des membres, et que je suis ‘la voix’ de ce groupe, on ne souhaite pas verser dans le  militantisme, non. Le groupe n’a pas à porter mes convictions intimes. Même si on est d’accord, la plupart du temps… et heureusement d’ailleurs. Disons que nous contestons,  mais que nous ne sommes pas là pour mobiliser l’opinion publique.

L’album de POINT MORT, « Pointless… », est disponible depuis le 29 avril chez Almost Famous.

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Hard-Core Post-HardCore

Anna Sage : sans sommation

Le magma dans lequel nous propulse ANNA SAGE sonne la révolte et donne l’assaut dans un Metal HxC brutal et sombre, qui n’en oublie pas pour autant de poser des ambiances savamment dissonantes et franches. Dans une veine post-HardCore sauvage, le quatuor parisien joue sur différents tableaux avec une redoutable efficacité. Rageur et captivant à la fois.

ANNA SAGE

« Anna Sage »

(Klonosphere)

A quelques mois près, ANNA SAGE fêtait ses dix ans d’existence. Un dixième anniversaire qui aurait pu être célébré de main de maître par ce premier album éponyme franchement digne de ce nom. Mais bon… Blague à part, avec « Anna Sage », les Parisiens entrent avec fracas dans la cour des grands, toujours armés du post-HardCore aussi ténébreux qu’incendiaire. Et le quatuor n’a rien laissé au hasard en appuyant là où il faut.

Après deux EP (en 2014, puis en 2018), ANNA SAGE n’a pas réduit la voilure et encore moins l’intensité de son jeu. Quatre ans plus tard, il renouvelle sa confiance à Francis Caste, celui-là même à qui l’on doit la superbe production du dernier album de Hangman’s Chair. Et bien leur en a pris, car on est d’emblée saisi par l’atmosphère de « Anna Sage » et  par la finesse des arrangements et du mix.

Moderne, technique et percutant, ANNA SAGE se veut à l’image du célèbre hors-la-loi, John Dillinger, coincé par le FBI grâce à une prostituée qui a donc donné son nom au groupe. Sans concession, parfois chaotique et toujours très frontal (« The Holy Mice », « Hostile Cage », « Sinner Ablaze »), les titres sont très compacts et cette première réalisation ‘long format’ offre des sonorités impactantes phénoménales (« Wall Of Hate », « Loveless »). Pleine face ! 

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Melodic Rock

Godo & : libre et solaire

Intemporel, sensible et tout en émotion, « On Time » propose un voyage transatlantique, des côtes anglaises à la Californie, à travers un Rock parfois Pop ensoleillé et relevé. Derrière GODO & se cache, à peine, le compositeur, guitariste, claviériste et chanteur Claude Gaudefroy, connu comme le loup blanc dans le milieu pour ses multiples casquettes. Et ce premier album est une réussite à tous les niveaux !

GODO &

« On Time »

(Bernerie Hills production/ Inouïe Distribution)

Voilà un album qui fait du bien ! Tour à tour journaliste, consultant, patrons de magasins d’instruments ou encore choriste, il fallait bien qu’un jour ou l’autre Claude Gaudefroy livre sa propre vision et son feeling personnel du monde musical qu’il a toujours côtoyé. Et c’est donc avec « On Time » et sous le pseudo de GODO & qu’il prend son envol. Et avec la manière ! Chaque détail est minutieusement soigné grâce à de fins arrangements.

Entièrement écrit, composé et produit par ses soins et avec Michel Taitinger aux manettes, « On Time » réussit le tour de force d’apporter à des compositions très bien ciselées un son et un mix à la hauteur. Car GODO & se présente avec des titres dont la qualité de la réalisation ne souffrirait pas la médiocrité sonore, d’autant que la pléiade d’invités laisse franchement rêveur. C’est un casting très haut de gamme qui accompagne le musicien.

Sans les citer tous, Craig Blundell (Steven Wilson), Adam Holzman (Miles Davis), Stu Hamm (Joe Satriani) ou encore Simon Phillips (Toto) sont de la partie et offrent tous une couleur incroyable et un relief saisissant aux morceaux de GODO &. Entre Rock légèrement Pop où se mêlent des sonorités british un peu prog, jazzy ou bluesy dans les guitares, « On Time » embrasse le plus souvent des airs de Rock californien avec une élégance rare.

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Heavy Psych Rock

Decasia : un féroce engagement

Sur des rythmiques décomplexées et des ambiances surprenantes, ce premier album des Français est original et très mature. Grâce à des morceaux très bien structurés qui sont restés sauvages et explosifs, DECASIA livre une réalisation aboutie et impressionnante de maîtrise. Avec « An Endless Feast For Hyenas », le trio sort définitivement de l’ombre sur un Heavy Psych Rock et Stoner bien bâti.

DECASIA

« An Endless Feast For Hyenas »

(Heavy Psych Sounds Records)

Il aura suffit de deux EP, un premier album éponyme en 2004 et « The Lord Is Gone » en 2017, à DECASIA pour taper dans l’œil du label italien Heavy Psych Sounds Records et signer son premier album. Le trio nantais, désormais exilé à Paris, n’en a pourtant pas perdu son esprit live et électrique et « An Endless Feast For Hyenas » apparaît comme une première étape franchie.

Toujours dans cette volonté d’indépendance qui l’anime, c’est dans une grange transformée en studio que DECASIA a enregistré son premier album et le son très organique et profond qui s’en dégage révèle d’une authenticité sans faille. Le Rock musclé et très Psych du combo emprunte au Stoner jusqu’au Space Rock dans une déferlante de décibels enveloppantes. « An Endless Feast For Hyenas » est tout ça à la fois.

Si DECISIA aime jouer sur les atmosphères, son jeu et ses nouveaux morceaux restent explosifs, grâce à des riffs épais et massifs (« Iliod », « Cloud Sultan », « Override »). Un brin épique dans son approche (« Sunrise », « Hyenas On The Gate »), le trio monte en régime au fil de l’album et se montre très solide en plus d’être particulièrement original et d’une belle fraîcheur.