Après avoir quitté la Californie pour Seattle, SERPENT RIDER a vu son line-up presque totalement remanié. Mais ce premier effort vient confirmer que sa volonté n’a pas changé et que c’est toujours dans un Heavy Metal vintage et épique chevillé au corps qu’il évolue avec de plus en plus d’assurance. Grâce à une chanteuse qui sort des habituelles prestations féminines du genre, le quintet ne vient pas révolutionner le style, mais y apporte tout de même une touche d’originalité tout en perpétuant un héritage bien assimilé.
SERPENT RIDER
« The Ichor Of Chimaera »
(No Remorse Records)
Tout d’abord sous la bannière de Skyway Corsair en 2015, la formation américaine a du se réinventer au fil des années et surtout suite à un déménagement de son fondateur de Los Angeles pour Seattle il y a quatre ans. Dès lors, le leader et guitariste rythmique Brandon Corsair s’est mis en quête de nouveaux musiciens qu’il n’a d’ailleurs pas mis très longtemps à trouver. Cette nouvelle mouture de SERPENT RIDER (petit hommage à Manilla Road) sort aujourd’hui dans un registre entre un Heavy Metal assez épique et un Doom langoureux.
Désormais complété par R. Villar au chant, Brian Verderber à la basse, Drake Graves derrière les fûts et le dernier arrivé Paul Gelbach à la lead guitare, le groupe est au complet et « The Ichor Of Chimaera » est un premier album solide, gorgé de références multiples, bien mené et délivrant une saveur Old School directement inspirée des années 80. Cela dit, ce bond dans le temps n’empêche nullement SERPENT RIDER de se montrer original et d’avoir le mérite d’avoir son propre univers, bien aidé en cela par sa frontwoman.
Car elle est justement l’une des forces du quintet, grâce à une prestation vocale surprenante. Pas franchement Metal, mais plutôt Rock et très aérienne, elle parvient à nous guider dans les méandres de cet opus, où sa voix se fait même fantomatique sur certains titres. Une belle polyvalence qui permet à SERPENT RIDER de se mouvoir dans des ambiances variées. Outre un morceau-titre audacieux, on retiendra « Steel Is The Answer », « Matri Deorum », « Tyrant’s March » et le très sinueux « In Spring ». Une belle première !
Après deux formats courts, les Transalpins passent enfin à la vitesse supérieure et après des années de travail durant lesquelles ils ont investi les Marsala Studios de leur ville de Gênes, voici « Shaping The Chaos ». Mêlant Heavy Stoner Psych et post-Rock progressif, IKITAN se fait très original et paraît avoir minutieusement assemblé ses nouvelles compos en prenant soin de chaque détail. Sur une production parfois rugueuse, mais lumineuse et organique, l’ensemble est fluide et très dynamique.
IKITAN
« Shaping The Chaos »
(Taxi Driver Records)
Découvert il y a cinq ans à l’occasion d’un EP audacieux, « Twenty-Twenty », constitué d’un seul titre de 20 minutes et 20 secondes, IKITAN avait ensuite récidivé l’année suivante avec « Darvaza y Brinicle », sorti en cassette à une poignée d’exemplaires. On retrouve d’ailleurs ces deux titres sur ce premier album que les Italiens travaillent depuis 2021. Ils y ont peaufiné leur Heavy Stoner Psych aux teintes post-Rock et progressives, et comme « Shaping The Chaos » est entièrement instrumental, il est franchement hypnotique.
Cette fois, le power trio propose près d’une heure de voyage sonore, où il nous offre sa vision d’évènements naturels ayant secoués la planète à des endroits bien spécifiques, neuf au total. Ainsi, ce concept commence avec « Chicxulud », qui fait office d’intro et livre le ressenti puissant et massif d’IKITAN sur le cratère de l’impact qui a tué les dinosaures. Deux minutes qui imposent « Shaping The Chaos » de belle manière. Et la suite nous mène dans la Vallée de la Mort, au Kenya, en Antarctique et même aux côté d’une baleine…
Toujours aussi progressif, variant les tempos et avec à un beau travail sur les tessitures, le groupe se montre particulièrement accrocheur. IKITAN monte en puissance au fil des morceaux, multipliant les riffs solides, les lignes de basse hyper-groovy et avec un batteur très aérien et parfois aussi assez Metal. D’atmosphères planantes en grondements sauvages, le combo fait preuve de beaucoup de créativité comme sur « Natron », pièce maîtresse du disque où s’invitent percussions et violon, ou encore le génial « 52Hz Whale ». Exaltant !
Retrouvez l’interview du groupe à la sortie de sa première production :
Rarement un si jeune groupe aura paru aussi insaisissable. Si les premiers titres de ce premier opus peuvent laisser présager de la suite, le combo prend tout le monde à contre-pied avec une dextérité et une fluidité très réfléchies. Sans intellectualiser son style et son jeu, TORPEDO TORPEDO déploie beaucoup de sensibilité et de feeling. Le groupe sait déjà parfaitement où il va, et les émotions sur lesquelles il se meut font écho à un nombre impressionnant de courants musicaux. « Arrows Of Time » développe des allures cosmiques et accrocheuses avec une justesse puissante et très personnelle.
TORPEDO TORPEDO
« Arrows Of Time »
(Electric Fire Records)
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la scène Stoner autrichienne est d’une grande discrétion, pour ne pas dire d’une confidentialité presqu’absolue. Cela dit, les choses pourraient changer, car les Viennois font une entrée assez fracassante et surtout très convaincante avec leur premier album, « Arrows Of Time ». Après avoir sorti un premier EP de quatre titres en 2022 (« The Kuiper Belt Mantras »), TORPEDO TORPEDO se présente cette fois sur la longueur, ce qui permet de constater et de savourer toute la richesse et l’originalité de son Heavy Stoner Psych extrêmement varié.
Car, dans une ambiance assez cinématique, le power trio multiplie les embardées et se montre d’un éclectisme parfois surprenant. Empruntant au Space Rock, au post-Rock, au Doom essentiellement, mais aussi en glissant quelques touches bluesy dans les guitares, on y décèle même des réminiscences Grunge dans la voix. Autant dire que les membres de TORPEDO TORPEDO ont parfaitement assimilé un nombre important de styles et, même en opposition, ils parviennent à leur donner vie dans une unité bluffante et singulière. Une belle preuve d’intelligence et de maîtrise.
Résumer « Arrows Of Time » en quelques mots est peine perdue, puisque chacun des huit morceaux sont très différents dans leur approche. Pourtant, on s’y retrouve ! TORPEDO TORPEDO prend le soin de ne pas nous perdre en route, malgré des envolées aériennes qui viennent côtoyer des déflagrations chaotiques volcaniques dans un Doom Metal lourd. Ecrasant, mais terriblement groovy, ce premier effort joue sur une technique, plus qu’une technicité, dans des atmosphères qui peuvent être intrigantes, légères, progressives, enivrantes ou carrément épiques. Spectaculaire !
A l’écoute de ce premier album de DAMAGE DONE, c’est tout d’abord cette ambiance très familière qui séduit, tant elle captive et peut même rappeler quelques souvenirs. La deuxième surprise vient du fait que le quatuor évolue entièrement en acoustique, soutenu par une rythmique légère et aérienne et quelques discrets claviers. Une approche qui nous renvoie forcément aux légendaires concerts d’une certaine chaîne musicale américaine dans les années 90. Cependant, pas l’ombre d’une quelconque nostalgie sur « Stranger Skies », qui nous transporte dans un univers très immersif avec une rare proximité. Les Français s’aventurent avec talent dans des chemins tracés par Pearl Jam ou Alice In Chains. Rencontre avec le chanteur Romaric Lamare et le guitariste Florian Saulnier.
– Cinq ans après un premier deux-titres, « The Fire », DAMAGE DONE livre enfin son premier album. « Stranger Skies » s’inscrit d’ailleurs dans la continuité de l’EP. Est-ce que vous avez été ralenti dans votre élan par la pandémie, ou vous a-t-il fallu plus de temps pour l’écrire et le composer ?
Florian Saulnier (guitare lead, voix) : En 2020, on ne pensait clairement pas sortir l’album cinq ans plus tard. Le contexte de la pandémie nous a beaucoup ralentis et le groupe n’était pas encore au complet. En voyant que l’on allait devoir repousser le projet de l’album, même si peut-être la moitié des morceaux étaient déjà là, on tenait quand même à offrir un aperçu de ce qu’allait être cet album. « The Fire » a été enregistré chacun chez soi et n’a pas bénéficié d’une production optimale, mais il a tout de même permis de montrer une première facette de notre univers et c’était vraiment l’objectif de ce premier EP. Par la suite, on a pu compléter le groupe et finaliser les morceaux sur les aspects rythmiques et les arrangements. Ça a pris plus de temps que prévu initialement et par la suite, l’enregistrement de l’album a dû être réalisé sur six mois environ. Finalement, « Stranger Skies » arrive plus tard que ce que l’on aurait aimé, mais il sort avec les directions sonores et les choix artistiques qui correspondent pleinement à notre vision.
Romaric Lamare (chant, guitare) : Ce qui est intéressant, c’est que c’est à peu près à cette période qu’on a commencé à trouver notre rythme de composition. Et c’est à la sortie de la pandémie qu’on a commencé à vouloir affiner l’évolution de notre musique.
– En tout cas, l’évolution musicale du groupe est très nette. J’ai le sentiment que « Stranger Skies » vous apporte aussi cette identité claire qui vous manquait peut-être avec, notamment, un son plus personnel. Sans parler forcément de maturité, avez-vous pu cette fois aller jusqu’au bout de vos idées ?
Florian : « Stranger Skies » a été composé sur la durée et je pense pouvoir dire qu’on a évolué dans notre style, et donc dans notre son, pendant la composition de ces morceaux. On s’est pas mal attardé sur la direction vers laquelle on voulait emmener notre musique. Finalement, on a développé ce côté ‘Rock/Grunge’ en quelque chose d’un peu plus aérien et beaucoup plus arrangé que ce qu’étaient les morceaux du groupe à la base. C’est ce qui marque la différence entre « The Fire » et « Stranger Skies ». On a pu donner plus de profondeur à nos morceaux, tout en explorant des textures sonores que l’on n’avait pas imaginées à la base. Quelque part, on a mieux défini le style du groupe, tout en restant fidèles à nos premières inspirations.
– Etonnamment, on retrouve les deux chansons de « The Fire », c’est-à-dire le morceau-titre et « Dead End Run » dans des versions plus dynamiques et avec un relief nouveau. Vous teniez absolument à ce qu’elles soient présentes sur « Stranger Skies » ? Pour quelles raisons ? Et l’idée était-elle aussi de leur donner un nouvel éclat ?
Florian : Complètement car, à nos yeux, les morceaux n’avaient pas pu profiter d’une production optimale. Et même si effectivement, l’album sort cinq ans après cet EP, ces chansons faisaient partie intégrante de l’album au début du projet. On a donc pu, plus ou moins, les développer et les réarranger dans le sens du reste des compositions.
Romaric : Ça nous tenait à cœur que ces morceaux soient sur l’album et qu’ils bénéficient du même traitement que les autres, que ce soit en termes de production, comme le dit Flo, mais aussi en termes d’exposition et de diffusion.
– Ce premier album est également très bien produit et il met en valeur des arrangements qu’on ne trouvait pas sur l’EP, qui était plus brut dans l’approche. Est-ce que lorsqu’on propose une musique acoustique, ou semi-acoustique, c’est un travail plus important dans le sens où vous vous mettez peut-être plus à nu ?
Romaric : Tout dépend de l’approche qu’on recherche. On aurait pu faire le choix de rester sur quelque chose de plus dépouillé et brut, mais ça ne cadrait pas avec notre vision. L’idée est vraiment de faire le lien entre le côté intimiste de l’acoustique et le côté plus immersif et moderne avec des arrangements discrets, mais qui permettent d’emporter encore plus l’auditeur avec nous.
– On l’a dit, DAMAGE DONE est apparu en 2020, une période où l’acoustique n’était pas un style très répandu, pour ne parler que du monde du Rock. Comment prend-on la décision de s’aventurer dans un tel registre, qui est devenu depuis la fin des 90’s très confidentiel ?
Florian : Je ne pense pas que l’on puisse vraiment parler de prise de décision. C’est surtout une question d’envie et de ce qui nous touche depuis pas mal de temps déjà. Au début du projet, on s’est retrouvé avec la même passion pour des morceaux que l’on chantait avec notre guitare chacun de notre côté. Après avoir passé pas mal de temps sur des reprises d’Alice In Chains, Pearl Jam ou d’autres artistes plus ‘Folk’ comme Ray LaMontagne ou même Neil Young, nos premières compositions étaient largement orientées. On a parlé précédemment des changements dans notre style qui sont venus un peu après, pendant le travail sur les morceaux, mais à la base que ce soient nos compositions ou notre style en lui-même, tout est vraiment venu naturellement.
– Justement, restons un peu sur ces fameuses années 90, et les légendaires ‘MTV Unplugged’, dont vous ne cachez d’ailleurs pas l’influence qu’elle a eu sur le groupe. Est-ce qu’il y a aujourd’hui un manque de ce côté-là, celui d’un Rock plus léger et aérien, qui ne se cache pas derrière un mur de guitare et qui laisse apparaître une authenticité réelle et palpable ?
Romaric : C’est encore une question de parti-pris. Mais si on s’y intéresse, il y en a pour tous les goûts. L’idée de l’acoustique, c’est en effet de rester au plus près des émotions, avec une sorte de fragilité et de simplicité, car on est plus à nu. Il y a tout de même pas mal d’artistes qui explorent cette voie acoustique, que ce soit le temps d’un album, ou bien de façon plus permanente. Il y a même des groupes qui, tout en restant électriques, arrivent à garder cette légèreté et ce côté aérien. Donc, je ne pense pas qu’on puisse dire qu’il y a un manque, simplement différentes approches. Pour nous, l’acoustique s’est imposée naturellement, parce que c’est ainsi qu’on se sent le plus à l’aise pour s’exprimer et transmettre ce qu’on a envie de partager.
– D’ailleurs, même si DAMAGE DONE se présente en acoustique, on retrouve cette même touche dans d’autres registres comme la Folk, l’Americana ou le Blues. Et cela revient même en force. Même si vous restez dans un style très Rock et légèrement progressif, sentez-vous une certaine proximité avec ces autres genres, essentiellement américains d’ailleurs ?
Romaric : Oui, il y a forcément une sorte de proximité, et comme l’a dit Flo, on a pas mal écouté des artistes comme Brother Dege, Neil Young, Ray LaMontagne et d’autres, qui sont issus de ces genres… Aujourd’hui je pense qu’on s’en éloigne un peu avec quelque chose d’un peu plus progressif, mais on garde toujours cette connexion avec la Folk et ce côté plus Rock, ou Grunge pour faire court. Ça restera quelque chose qui est dans l’ADN du groupe et le mien notamment dans ma façon de chanter. Ce sont aussi les styles où je me sens le plus à l’aise pour exprimer ce que j’ai à sortir.
– Revenons à « Stranger Skies », où l’on retrouve une douce mélancolie, qui colle souvent au style, c’est vrai. La prestation vocale est d’ailleurs incroyable, tant elle dégage une vérité dans l’engagement comme dans les textes. On a presque l’impression que la voix porte l’ensemble ou, en tout cas, est là pour captiver immédiatement l’auditeur avec des intros assez courtes. C’est le style qui nécessite une telle approche, selon vous ?
Romaric : C’est certain que ce style se prête bien à cette mélancolie. Il a un côté plus organique et l’idée de départ était justement de mêler cette chaleur acoustique avec une voix qui renforce cette intimité, tout en ajoutant les harmonies de Flo pour apporter plus de profondeur et d’ambiances à l’ensemble. Le fait que nous ayons commencé à composer à deux sur une bonne moitié de l’album n’y est pas étranger non plus, car l’intention était vraiment de placer les guitares et les voix au cœur de la démarche.
– Si votre musique peut paraître très épurée de prime abord, on est finalement assez loin du compte, puisque quelques claviers et samples viennent en complément des deux guitares et d’une rythmique électro-acoustique. L’objectif était-il aussi d’apporter une richesse sonore supplémentaire à « Stranger Skies » ?
Romaric : Exactement ! L’arrivée d’Antoine à la batterie et de Victor à la basse nous a vraiment poussés dans cette direction. Victor est un touche-à-tout passionné de synthétiseurs et de samples, et nous avons pris le temps de travailler chaque morceau pour enrichir les ambiances et la palette sonore. De son côté, Antoine a apporté son toucher et sa précision rythmique, donnant à l’album un juste équilibre entre intimité et une dynamique subtile.
– Enfin, on a l’impression qu’un style comme le vôtre se prête aussi à des endroits plus petits et des ambiances peut-être plus cosy et feutrées. Est-ce que c’est quelque chose que vous recherchez : une grande proximité avec votre public, plutôt que des lieux trop grands et peut-être mal adaptés ?
Florian : Alors, c’est ce que l’on recherche, mais peut-être pas entièrement. Et c’est clair aussi que l’on adore ces concerts donnés dans des endroits plus ‘petits’, car on va pouvoir aisément créer cette atmosphère intimiste qu’on affectionne beaucoup.
Romaric : Oui, ce qui compte vraiment pour nous, c’est l’atmosphère du concert. Peu importe la taille du lieu, tant que l’on arrive à créer cette bulle où la musique prend toute sa place. La proximité avec le public, c’est quelque chose de fort, mais on a aussi besoin que les conditions soient bonnes : un bon son, une belle écoute… C’est ça qui permet de transmettre pleinement l’émotion et de faire vivre les morceaux comme ils ont été pensés.
L’album de DAMAGE DONE, « Stranger Skies », sera disponible le 28 mars chez Klonosphere.
Basés à Las Vegas, les membres de ce tout nouveau combo du Nevada n’en sont pas à leur coup d’essai et leur leader, Dario Lorina, présente même un CV conséquent. Rien d’étonnant donc à ce que DARK CHAPEL sonne comme un groupe de vieux briscards. L’expérimenté six-cordiste et chanteur a façonné cette première réalisation pierre par pierre et le résultat est plus que convaincant. Derrière une impression ténébreuse, « Spirit In The Glass » est éclatant sur bien des points. Entre moments calmes et explosions spontanées, il est particulièrement rassembleur.
DARK CHAPEL
« Spirit In The Glass »
(MNRK Heavy)
Actif au sein de Black Label Society depuis plus dix ans, de nombreuses collaborations et deux albums solos instrumentaux à son actif, ça devait sûrement démanger Dario Lorina de créer une nouvelle entité plus personnelle. Celui qui a aussi œuvré chez Lizzy Borden pendant quatre années a donc fait appel à Brody DeRozie (guitare), Mike Gunn (basse) et Luiz Silva (batterie) pour donner vie à BLACK CHAPEL, nouveau projet Hard Rock teinté de nuances bluesy, un rien grungy et surtout aux sonorités sombres et au groove magnétique.
Moins rentre-dedans que la formation guidée par Zakk Wylde, le quatuor renoue avec l’esprit 90’s du genre, mais très modernisé dans le son comme dans la forme. DARK CHAPEL n’a absolument rien de passéiste ou de nostalgique, c’est même tout le contraire. Incisif et bardé de belles guitares, « Spirit In The Glass » passe en revue de nombreuses références, joue très habillement sur les mélodies et s’aventure aussi dans des ambiances unplugged plus légères (« All That Remains »). Les Américains maîtrisent et n’éludent rien.
La voix chaude et rauque de Lorina colle parfaitement au style que le guitariste a voulu déployer. Le travail sur les riffs et les solos est remarquable, tant il en émane de la sérénité et un aspect vraiment spontané (« Afterglow », « Hollow Smile », « Gravestoned Humanity », « Bullet In Our Chamber »). DARK CHAPEL réussit un coup de maître avec « Spirit In The Glass », souhaitons maintenant qu’il ne s’agisse pas d’une simple récréation, car ce premier opus a quelque chose de rafraîchissant, tant il est terriblement bien pensé.
Vintage ou Old School, le Heavy Metal des années 80 est, qu’on le veuille ou non, éternel et malgré les décennies qui passent, le style est tout sauf ridé. Au contraire, il retrouve un nouveau souffle depuis quelques temps déjà, près de 50 ans après son éclosion. Les Basques de SINNER RAGE s’inscrivent dans cette énergie-là et, surtout, ne présentent pas la moindre trace de nostalgie. C’est plutôt d’allant et fougue dont il est question sur « Powerstrike », qui vient ouvrir une discographie qu’on espère longue, tant elle est ardente.
SINNER RAGE
« Powerstrike »
(Dying Victims Productions)
Au coeur du Pays Basque espagnol, SINNER RAGE fait résonner son Heavy Metal depuis à peine deux ans et se présente aujourd’hui avec un premier album, « Powerstrike ». Affichant beaucoup de personnalité et un style qui va puiser autant dans le Metal européen qu’américain, il avait déjà offert un single deux titres début 2024, histoire probablement de signaler sa venue. Une arrivée cette fois avec les formes et un opus qui va réjouir les fans de la NWOBHM comme les nostalgiques de Dokken et de Stryper, voire de Queensrÿche, Accept et Crimson Glory. Un mix savamment dosé et surtout très bien équilibré et solide.
Rangés derrière leur leader et chanteur Aritz Martinez, les musiciens de SINNER RAGE surfent sur une vague 80’s, très en vogue depuis quelques temps et lorsque l’inspiration et le savoir-faire font cause commune, l’ensemble est savoureux et d’une belle fraîcheur. Car il n’est pas question pour la formation ibérique de donner dans le réchauffé et, même si elle s’inscrit dans les pas de leurs glorieux aînés, elle se montre originale, fougueuse et détentrice d’un répertoire personnel où l’on retrouve sa patte au fil des morceaux. « Powerstrike » est très homogène, sauvage et aussi entraînant que mélodique. Et ça cogne comme il faut !
Bien produit, ce premier effort montre de belles combinaisons dans les rythmiques comme sur les solos où le duo mixte composé de Jara Solis et Aritz Yarza prend le soin de ne pas se disperser. Vocalement aussi, si son frontman s’inspire d’un Rob Halford ou d’un Geoff Tate des belles années, l’accent est aussi mis sur les chœurs, rendant les refrains très fédérateurs. SINNER RAGE prête donc allégeance à un style intemporel, qu’il régénère habillement, avec des chorus bien sentis et une belle dynamique (« Highway Nights », « Chained By Night », « Angel Of Combustion », « Dangerous Attraction » et le morceau-titre). Raffiné et costaud !
Dire que les musiciens de LADYKILLER sont valeureux est un doux euphémisme, tant ils ont su montrer de la force pour relever les nombreux défis qui se sont dressés sur leur route. Et si l’on en croit l’énergie omniprésente sur « Big Bang Attack », ils sont parvenus à insuffler leur amour dévoué à un Heavy Metal traditionnel avec beaucoup de conviction et un savoir-faire accumulé au fil des ans. Le combo de Toscane est aujourd’hui solide, volontaire et surtout présente des titres enflammés, véloces et très bien ciselés.
LADYKILLER
« Big Bang Attack »
(Wanikiya Record/Promotion)
Bien que l’histoire de LADYKILLER ait commencé il y a une vingtaine d’années du côté de Pise en Italie, ce n’est vraiment qu’en 2018 que les choses ont pris un tournant sérieux et surtout stable. En effet, le groupe a essuyé des changements incessants de line-up, avec toujours aux commandes Max Morelli au chant. Si l’aventure a vu passer ses membres dans de nombreuses formations, notamment son leader avec Signum Draconis et Hyperion, leur premier album est enfin là et, avec « Big Band Attack », l’attente est enfin récompensée… avec la manière.
Cela dit, ces dernières années leur ont permis de continuer à écrire et également à retravailler d’anciens morceaux remis au goût du jour avec une approche plus moderne. Pour autant, le Heavy Metal de LADYKILLER a cette touche intemporelle ancrée dans les années 80/90, qui le rend finalement difficile à dater. Preuve, s’il en est, de sa qualité intrinsèque. Car c’est un registre pêchu, aux mélodies ardentes et aux compositions très efficaces et musclées dont il est question sur ce « Big Bang Attack » explosif et franchement accrocheur d’un bout à l’autre.
Techniquement irréprochable et doté d’une belle production, ce premier opus de LADYKILLER s’inscrit dans une tradition Heavy portée par la NWOBHM, notamment Maiden et Priest, grâce à un chant puissant et des guitares à l’unisson, capables d’évoluer en twin comme sur des rythmiques bien structurées et des solos tout en percussion. Les Transalpins maîtrisent leur sujet, c’est indéniable et c’est d’autant plus agréable qu’il en ressort des morceaux plus qu’entêtants (« Break Your Chains », « Television Spot », « Holy Mountain », « Whores & Shadows »). Une belle ténacité !
Avec un telle entrée en matière, le combo nordique ne risque pas de passer inaperçu. Composé de musiciens chevronnés, GINGER EVIL s’aventure dans un Rock qui se fait de plus en plus rare et qui reprend les codes d’un registre efficace et mélodique. Avec « The Way It Burns », c’est une sorte de retour aux fondamentaux qu’il propose et la belle surprise vient aussi de sa chanteuse, Ella Tepponen, qui s’impose grâce à une technique irréprochable et une grande capacité à varier les intonations vocales. Très mature, ce premier album va réconcilier les fans de Rock au sens large.
GINGER EVIL
« The Way It Burns »
(Frontiers Music)
Voici la nouvelle sensation Rock finlandaise et c’est peu de le dire ! Les membres de GINGER EVIL n’en sont pas à leur coup d’essai, puisqu’on retrouve ici le guitariste Tomi Julkunen et Veli Palevaara qui faisaient tous deux partie de The Milestones. Rejoints par le batteur Toni Mustonen, le combo a enfin affiché complet avec l’arrivée d’Ella Tepponen au chant, laquelle offre au groupe sa véritable identité musicale et, entre Power et Heavy, son Rock est musclé, accrocheur et surtout parfaitement interprété.
En confiant la production de « The Way It Burns » à Teemu Aalto (Insomnium) et le mastering à Svante Forsbäck (Rammstein, Volbeat, Apocalyptica), GINGER EVIL a mis tous les atouts de son côté et ce premier opus est de ceux qui font franchement du bien. Cela dit, il ne faut pas s’attendre à une grande révolution, mais le Rock des Scandinaves a cet aspect très frais et fédérateur, qui peut faire d’eux une valeur sûre. Et puis, ce savoureux mix de Rock US, d’Alternative Rock et de Classic Rock séduit sans mal.
Très moderne dans son approche comme dans le son, GINGER EVIL ne met pas bien longtemps à tout emporter. Dès « Rainmaker », la vivacité des riffs et la puissance vocale de la frontwoman prennent le dessus et la suite s’annonce solide. Très américain dans le style, le quatuor multiplie les ambiances avec des clins aux 70’s comme à la scène californienne des 90’s (« Dead On Arrival », « Shame On », « Hands Move To Midnight », « Better Get In Line », « Not Your Fool »). Actuel et intemporel : une réussite.
Ancien chanteur de Frontline, Evidence One, State Of Rock, Sanction X et quelques autres, Robby Boebel avait entrepris l’écriture de titres originaux pour un nouveau projet avant qu’un cancer des poumons ne l’emporte en juillet 2022 à l’âge de 60 ans. Après un temps de réflexion, ses partenaires et amis ont relancé l’aventure et RAY OF LIGHT brille aujourd’hui sur un premier effort, « Salute », qui porte aussi un peu de son empreinte. Nerveux et solaire, le style de la formation germanique déploie un Hard Rock accrocheur et enthousiaste.
RAY OF LIGHT
« Salute »
(Baysis Media)
Après huit albums sous la bannière de Frontline, le bassiste Thomas Bauer, le batteur Stephan Bayerlein et le guitariste Robby Boebel ont fondé RAY OF LIGHT et avaient même commencé à travailler sur un premier opus. Seulement, le décès soudain du six-cordiste et compositeur en 2022 a naturellement mis un coup d’arrêt au projet. C’est l’année suivante que Jörg ‘Warthy’ Wartmann a pris la relève tout d’abord comme producteur, avant de remplacer son ami disparu et d’intégrer définitivement le quatuor.
Avec l’arrivée du talentueux Gregg Cromack au chant, RAY OF LIGHT s’est retrouvé au complet et plus motivé que jamais à l’idée de terminer des morceaux, qui sont autant d’hommages au regretté Robby Boebel. « Salute » représente à la fois un ultime adieu, mais aussi la promesse d’un bel avenir, car les Allemands et leur frontman anglais se présentent avec le line-up parfait, mêlant expérience et créativité, bien soutenu par une technique exemplaire dédiée à un Hard Rock intemporel.
Très mélodiques, oscillant entre Hard FM et AOR, les compositions de RAY OF LIGHT sont d’une incroyable fraîcheur, d’un mordant implacable et surtout animées d’un incroyable esprit positif. Le Britannique se montre impérial au chant, les riffs comme les solos sont percutants et racés, tandis que le duo basse/batterie propulse l’ensemble avec vigueur (« Falling In Pieces », « Ray Of Light », « Alive », « Best Of Me », « Frontline »). Lumineux et entraînant, « Salute » célèbre la mémoire de Boebel avec classe.
Elle a cherché la guérison et le renouveau et c’est à travers sa musique qu’elle y est parvenue… et de très belle manière. Forcément très intime, la chanteuse américaine se fait conteuse sur un premier opus qui en dit long sur son talent. S’il s’en dégage une certaine froideur malgré le registre, OLIVIA WOLF montre beaucoup de force dans sa musique comme à travers ses mots. « Silver Rounds » possède un aspect conceptuel dû au sujet global, et pourtant chaque chanson garde un côté unique et surtout attachant.
OLIVIA WOLF
« Silver Rounds »
(Independant)
Cataloguée parmi les artistes de Country Music, OLIVIA WOLF s’en détache pourtant grâce à un style assez singulier, qui se distingue de la scène actuelle américaine. Et ce premier album qu’elle sort en indépendant est d’une étonnante profondeur. Dans son propos tout d’abord, car la chanteuse a vécu une tragédie qui la guide tout au long de « Silver Rounds ». Elle a, en effet, lutté en son for intérieur pour faire face à la perte de son fiancé deux semaines seulement avant leur mariage. Un deuil qu’elle fait ici en musique avec beaucoup d’élégance et une grande pudeur face à cette épreuve de la vie.
Elle qui a grandi dans le nord de la Californie au son du Bluegrass , également nourrie de la richesse musicale des Appalaches, s’est créée un monde très personnel et ce sont les circonstances de ce destin qui se traduisent dans cette Americana sombre, langoureuse et à fleur de peau. Dépeinte comme une version féminine de Sturgill Simpson, OLIVIA WOLF mélange les styles et les ambiances avec une délicatesse de chaque instant. Très spirituels, ses textes traversent de sombres pensées, s’ouvrent à l’univers tout entier, questionnent sur l’inquiétude, l’acceptation et l’abandon avec un esprit rebelle chevillé au corps.
Pourtant, « Silver Rounds » évite la tristesse et la lamentation avec finesse. Entre la lumière et l’obscurité, OLIVIA WOLF a trouvé la faille et s’y engouffre avec beaucoup d’émotion. Produit par Sean McConnell avec qui elle a co-écrit plusieurs morceaux, l’ensemble offre un relief saisissant, où elle passe d’une Americana très Bluegrass à des moments de Rock appuyés ou une Country-Rock captivante (« Cosmic Appalachian radio », « Lucky One », « Weed King », « Good Smoke Too », « Meet You At The Cross », « The Wild » ou « High Life » en duo avec Taylor McCall). L’imagerie est ici puissante et radieuse aussi.