Le festival organisé par le label italien Heavy Psych Sounds Records dans le désert de Mojave en Californie se poursuit avec un troisième groupe pour le moment moins connu que ceux des autres volumes, mais dont on va entendre parler tant son style et ses morceaux sont saisissants. SPIRIT MOTHER prend un relief surprenant dans ce décor incroyable, grâce notamment à un violon captivant.
« Live In The Mojave Desert Vol.3 »
SPIRIT MOTHER
(Heavy Psych Sounds Records)
L’immersion au cœur du désert de Mojave en Californie se poursuit avec SPIRIT MOTHER, qui s’approprie aussi ce lieu chargé d’énergie et d’ondes mystiques. Le groupe de Long Beach joue autant sur le côté progressif et Psych du Stoner pour en faire un style envoûtant, porté par un line-up original que l’on rencontre assez peu dans ce registre. Il n’en fallait pas plus pour que cette ambiance très spéciale apporte au groupe une nouvelle dimension.
Composé d’Armand Lance (basse, chant), SJ (violon, chant), Sean McCormick (guitare) et de Landon Cisneros (batterie), SPIRIT MOTHER a sorti son premier album, « Cadets », en mars 2020 et celui-ci n’a pas manqué de taper dans l’œil des fans du Stoner Psych et du Fuzz Prog du quatuor californien. Cette série de concerts orchestrée par HPS est donc le moment rêvé pour le combo de confirmer par une prestation hypnotique son grand talent.
Dans ce cadre incroyable, le violon de SJ, présent sur tous les titres, prend une dimension incroyable, porté par l’environnement et sa réverbération naturelle. SPIRIT MOTHER hypnotise avec des morceaux progressifs, aériens et entraînants (« Ether », « Go Better », « Premonitions », « Dead Cells », « Black Sheep » ou encore « Space Cadets » et « Heathens »). Aussi habité que sa musique, le quatuor californien nous prend par la main pour un voyage musical transcendant.
Musiciens plus qu’aguerris de la scène Metal italienne, Fabio La Manna et Davide Cardella se retrouvent sur un nouveau projet, où le duo explore avec quelques invités un Metal Progressif sombre et efficace et ce premier album autoproduit devrait ouvrir à GEOMETRY OF CHAOS bien des portes tant la qualité des compositions et la virtuosité du combo font mouche.
GEOMETRY OF CHAOS
« Soldiers Of the New World Order »
(Independant)
Né sur les cendres de leur précédent groupe Alchemy Room, Fabio La Manna (compositeur, guitariste et basse) et son complice le batteur Davide Cardella se sont retrouvés pour monter GEOMETRY OF CHAOS, toujours axé sur un Metal Progressif très Heavy et puissant, jouant sur les ambiances avec des morceaux sauvages, dynamiques et atmosphériques. Une belle variété qui met en exergue la dextérité des deux Italiens.
Entièrement autoproduit, « Soldiers Of The New World Order » n’a vraiment à rougir face aux réalisations du même registre. Le son est massif, clair et laisse transparaitre toute la fluidité du duo, qui s’est se faire aussi flamboyant que musclé. GEOMETRY OF CHAOS réussit à nous captiver du début à la fin de ce premier album d’une heure complète. Créatives et percutantes, ces nouvelles compos n’abusent pas non plus d’une technicité souvent fatigante.
La belle diversité de ce premier album vient aussi du fait que les Transalpins ont fait appel à Marcello Vieira, Ethan Cronin et Elena Lippe au chant, qui malgré leurs différences vocales, restent parfaitement dans l’esprit de GEOMETRY OF CHAOS. Ne reniant pas des influences allant de Savatage à Dream Theater ou encore Uriah Heep et Rush, le duo livre de très bons titres (« Joker’s Dance », « Premonition », « Spiral Staircase », « Saturated », « Garage Evil »).
Avec une cohérence sonore et musicale de chaque instant, THE TREATMENT continue son chemin en restant fidèle à un Hard Rock gravé dans la pierre et qui traverse le temps en se bonifiant. « Waiting For Good Luck » est le cinquième album du quintet britannique, et le second avec un frontman plus performant que jamais. Solide et efficace, le combo régale.
THE TREATMENT
« Waiting For Good Luck »
(Frontiers Music)
Originaire de Cambridge, THE TREATMENT déploie son Hard Rock depuis maintenant 2008 et parvient à se renouveler tout en restant fidèle dans une ligne tracée par Aerosmith et Def Leppard avec un côté très britannique. Sur de gros riffs et une batterie qui tiennent une place prépondérante dans le jeu du quintet, « Waiting For GoodLuck » est le cinquième album du groupe, et le deuxième avec son très bon chanteur Tom Rampton.
Produit par Laurie Mansworth (Airrace) et surtout mixé par le grand Kevin Shirley (Iron Maiden, Led Zeppelin, Black Country Communion), THE TREATMENT a mis toutes les chances de son côté pour livrer 12 morceaux aussi rentre-dedans que mélodiques. Très Hard Rock dans l’esprit et dans le jeu, les Anglais ont conservé ce petit aspect gras et Sleaze qui fait le charme de son style percutant et accrocheur.
L’ADN des Britanniques est basé autour de solides guitares, d’une rythmique massive (ce son de caisse claire !) et d’un chanteur à la fibre très Rock’n Roll. Du coup, l’album montre un enthousiasme et une positivité à toute épreuve. Dès « Rat Race », on est pris dans le tourbillon infernal de THE TREATMENT, qui enchaine les compos intenses (« Take It Or Leave It », « Devil In The Detail », « Wrong Way », Tough Kid »), avec des passages plus bluesy (« Eyes On You », « Barman »). Well done !
Depuis sa création en 2014, HOUND écoute ses émotions, ses envies et les libère dans un Hard Rock très 70’s sauvage et aux mélodies imparables. Toujours privés de leur terrain de jeu favori qu’est la scène, les Allemands viennent de sortir un deuxième album farouche et indomptable dans un style unique qui marie une approche très moderne et des atmosphères résolument vintage. La chaleur du son du quatuor n’a d’égal que sa fougue. Entretien avec Wanja Neite, un chanteur à la voix étonnante…
Photo : Birk Brennt
– Avant de parler de votre premier album, « Settle Your Scores », qui vous a fait connaître, j’aimerais que tu reviennes sur vos débuts en 2014 et vos deux EP… Dès le départ, vous avez opté pour ce Hard Rock Old School et vintage, ou avez-vous mis un peu de temps avant de trouver votre style actuel ?
Oui, ça s’est fait dès le début, car nous sommes tous accros à ce son depuis notre plus jeune âge. Nous avions un endroit très isolé et presque insalubre, où nous rencontrions d’autres musiciens pour jouer toutes sortes de musique Rock pendant des années. Et finalement, nous avons formé HOUND. Le premier EP a été fait très artisanalement dans un grenier. Et je pense que cette tendance à négliger un peu les arrangements avec un jeu brut est née à ce moment-là. Nous aimons et nous jouons beaucoup de musiques différentes, mais c’est vraiment le son qui émerge lorsque nous sommes ensemble. J’adore ce style Rock Old School, sa chaleur et sa vibration.
– Vous avez rapidement acquis une solide réputation de groupe de scène grâce à des prestations très fortes. Est-ce qu’on construit un répertoire en pensant à ce qu’il va provoquer sur scène ?
Oui, c’est vrai et c’est quelque chose à laquelle nous pensons souvent. Nous développons une chanson sur une longue période et on en enregistre différentes versions avant le rendu final. Ça nous arrive d’ailleurs de jouer une toute autre version en concert, car c’est plus spontané contrairement à un disque. Sur le nouvel album, nous nous sommes souvent laissé aller sur la production en incluant de nombreuses improvisations et des idées très impulsives.
– Après vos deux EP, vous avez signé chez Metalville. Qu’est-ce qui a changé pour vous à ce moment-là ? Une meilleure visibilité ? Des tournées aussi plus faciles à mettre en place ?
Pour être honnête, artistiquement : rien. Nous avons juste continué à faire notre truc. Les gens de Metalville ont non seulement un réseau splendide, mais surtout ils sont très engagés dans ce style de musique. Nous travaillons en étroite collaboration avec eux, ce qui nous permet de nous concentrer beaucoup plus sur l’artistique et faire notre musique.
Photo : Birk Brennt
– J’aimerais qu’on revienne sur ce style si particulier qui vous caractérise et vous démarque des groupes du même registre. On y trouve une solide base Hard Rock 70’s avec de nombreux éléments comme la Funk, le Blues et des aspects Punk et Psych. HOUND ne se ferme aucune porte tout en réactualisant un style qui a fait ses preuves…
J’aime me dire que nous plongeons dans un immense bassin plein de diversités pour n’en faire ressortir que ce qui nous plait. Je ne comprends pas ceux qui veulent ajouter des choses à un style déjà existant. Lorsque nous jouons du Rock, des trucs plus funky ou bluesy, ce n’est pas comme si nous étions attachés à un genre ou à un code. Je m’en fiche vraiment, en fait. J’espère toujours que les auditeurs ressentiront le profond dévouement et la dévotion au Classic Rock qui traverse chaque mesure de nos albums. J’avoue que j’adore profondément le Rock des années 60, 70 et 80. Enfant, on me disait : « Ecoute Tommy (de The Who) avec une bougie allumée et tu verras ton avenir ! ». J’adore cet album, tout comme beaucoup de trucs récents que ce soit du Rock, de la Pop, de la Folk, du Hip-Hop, du Dub, de l’Indus… Peu importe.
– Sur votre premier album, la présence très forte de bouillantes parties d’orgue ressort de belle manière et donne une couleur incroyable à l’album. Pourquoi est-il moins présent sur « I Know My Enemies » ?
L’année dernière, Jonas, qui jouait les claviers depuis le tout début, a quitté le groupe. Alors, nous avons continué tous les quatre. Comme on ne pouvait pas le remplacer sur scène et dans la composition, nous avons dû avoir beaucoup d’autres idées. Yannick (basse) et Nando (guitare) sont des musiciens très créatifs et ludiques, et leurs idées se répandent partout dans les morceaux. John (batterie) est du même genre, et aussi capable de garder le groupe dans les clous. Et puis, nous avons eu le grand plaisir d’accueillir Anders Becker de Liquid Orbit comme invité, qui a joué de l’orgue sur quelques morceaux avec beaucoup de talent.
– D’ailleurs et même si l’on retrouve cette même énergie communicative, on sent ce nouvel album plus sombre, avec des riffs plus costauds et Heavy et des textes souvent assez mélancoliques. Comment l’expliques-tu ?
Depuis l’année dernière, je suis heureux en dehors de cette pandémie, bien sûr. Je trouve de la joie dans beaucoup de choses et surtout dans la musique. Mais à côté, il y a beaucoup de choses qui me font peur, qu’elles soient collectives ou individuelles, et qui ont un impact sur moi. Tout cela, bien sûr, s’infiltre dans la musique et c’est aussi très stimulant. Vous laissez aller la frustration, le désir, l’oppression et les peurs intériorisées et BOOM ! Il en ressort un riff qui te détend et qui transforme le tout en joie. Donc, même si l’album jette parfois un coup d’œil dans l’abîme, j’espère que la musique émet toujours ce sentiment de joie profonde. En ce qui concerne les paroles, les mots doivent avant tout bien sonner. Mon couplet préféré de l’album vient de la dernière chanson « The Downfall », qui fait : « Ouais, ouais, ouais, ouais ! ». (Rires)
Photo : Birk Brennt
– J’aimerais justement que l’on parle de ta voix qui est si particulière et d’une incroyable polyvalence. Elle est incontestablement une force pour HOUND. Il y a même un petit côté androgyne saisissant. J’imagine qu’elle est le point de départ de vos compositions pour les mélodies, non ?
Dans la plupart des cas, les parties instrumentales existent déjà. J’essaie différentes choses et j’improvise encore et encore jusqu’à ce que je rassemble des idées qui me plaisent. Et puis, il y a des mélodies et des idées qui me viennent en tête dès que j’entends un riff pour la première fois. Et il m’arrive aussi de tout changer à nouveau. Nous parvenons rarement à calibrer une chanson et une version définitive instantanément. Et généralement, on change aussi les arrangements de nos morceaux environ tous les deux ans.
– On peut qualifier le style de HOUND de Hard Rock vintage et Old School. Pourtant, je le trouve au contraire très novateur, actuel et vivifiant même avec des bases très 70’s. Est-ce que tu partages ce sentiment et surtout cette vision de votre jeu ?
Oui, c’est bien analysé. La musique que nous jouons nous sort des tripes, donc nous ne pouvons pas vraiment dire d’où nous viennent les idées. On ne cherche jamais à reproduire ce que nous avons aimé, mais plutôt à créer quelque chose de neuf. Et puis, nous avons tous des périodes où nous écoutions telle ou telle musique. J’adore profondément le Rock des années 60 et 70 comme tout le monde dans le groupe. Mais je ne ressens pas le besoin d’y ajouter quelque chose. Je ne me lasserai jamais d’écouter l’original de « Fireball » de Deep Purple. Il y a quelque chose de très spécial à jouer ce genre de musique et cela provient de la chaleur qu’elle dégage. Pour moi, jouer de la musique dépasse le fait d’innover ou de reproduire ce qui a déjà été fait. Et tu vois depuis que Nando (guitare) a commencé à chanter un peu plus, notre musique a gagné en légèreté avec son petit côté enfantin ! (Rires)
– Pour conclure, avec cet album très mature et intemporel, et malgré la situation sanitaire, quels sont vos projets à courts et moyens termes ? Vous devez être très impatients de remonter sur scène, car vous n’y avez pas encore joué votre album ?
Nous sommes réellement un groupe de scène dans l’âme. Et la situation actuelle est pourrie. Ça craint ! Avec le temps, on devient méfiant et on cherche tous la lumière au bout du tunnel. Ne pas pouvoir jouer ces chansons devant des gens m’est insupportable et je sens que je vais éclater. Mais je dis cela d’un point de vue de privilégié quand même. A la fin, j’espère juste que tout ira bien. En ce moment, je suis fier de ce que nous avons fait avec le nouvel album et j’aime franchement écouter ces nouveaux titres. Et je commence déjà à avoir de nouveau faim !
Le deuxième album de HOUND, « I Know My Enemies », est disponible depuis le 26 mars chez Metalville Records
Bewitcher a vendu son âme au Rock’n’Roll et au Heavy Metal sans sourciller… et cela s’entend sur ce très bon deuxième album du trio américain. Brut et rugueux, le son de « Cursed Be Thy Kingdom » vibre des émanations sataniques et infernales des riffs torturés et de la rythmique sauvage et massive du combo. BEWITCHER promet l’enfer et le livre sur un plateau !
BEWITCHER
« Cursed Be Thy Kingdom »
(Century Media)
Ce nouvel album de BEWITCHER remonte tout droit des entrailles de l’enfer. « Cursed Be Thy Kingdom » sent le souffre blasphématoire et obsédant de l’underground américain. Originaire de Portland, Oregon, le ténébreux trio vient de rejoindre Century Media et offre un deuxième opus à la croisée des chemins d’un Rock’n’Roll rugueux et d’un Heavy Metal pur et dur, voire légèrement Speed et Thrash.
Après une première démo produite par Joel Grind (Toxic Holocaust) et un album qui leur a ouvert bien des portes, BEWITCHER est parti du côté de Los Angeles enregistrer son troisième méfait. Mixé par Cameron Webb (Megadeth, Motörhead), « Cursed Be Thy Kingdom » dispose d’un son puissant et très compact, qui retranscrit parfaitement l’esprit des morceaux dont les riffs cognent sans relâche (« Satanic Magick Attack », « Electric Phantoms »).
Lancinant et gras à souhait sur « Mystifier (White Night City) » et « Valley Of The Ravens » à l’esprit presque Doom, BEWITCHER avance sur une solide rythmique sombre d’où jaillit un peu de clarté à travers quelques solos de guitares bien sentis (« Death Returns… », « Metal Burner », « The Widow’s Blade »). Satanique par conviction, le trio américain semble plus s’en amuser et exprimer ses nombreux péchés dans une ambiance de messe noire.
Formé en 2017 à Patras en Grèce, le quatuor MATHER n’a eu d’autre choix que de sortir son premier album, « This Is The Underground », au début du premier confinement général l’an dernier. Une malédiction que le groupe a décidé de conjurer et vu la qualité de ce très bon opus, c’est presque même une évidence. Entre Heavy Psych et Rock Progressif très Stoner, les Hellènes livrent une superbe prestation.
MATHER
« This Is The Underground »
(Independant/Violence In The Veins)
Sorti il y a tout juste un an, autant dire à la pire période, ce premier album de MATHER était un peu (beaucoup) passé à travers le feu des projecteurs et c’est très intelligemment que le label indépendant Violence In The Veins le ressort en CD et en vinyle avec une attention toute particulière pour ce dernier pressage. Première production des Grecs, « This Is The Underground » montre une maturité et une production très matures et irréprochables.
Evoluant dans un registre Rock Progressif aux contours Heavy Psych et même Desert Rock, MATHER sait se faire très aérien et planant, tout en martelant de gros riffs Heavy très appuyés. La clarté du chant et la grande qualité de sa rythmique basse/batterie donnent aux grecs une originalité accentuée par des harmonies aussi démoniaques qu’envoûtantes. Ponctué par de courts interludes (« On », « Give In »), l’album propose surtout de longs morceaux.
Au fil de l’album, le jeu du quatuor s’épaissit pour des dimensions où le groove se mêle aux passages atmosphériques, presque Space Rock, porté par un son au relief saisissant. Elargissant son spectre au Stoner et au Desert Rock, tout en restant très Progressif, MATHER s’étale en longue sur des morceaux de plus en plus envoûtants (« A Night To Remember, aday to Forget », « Sympathy For The Gods », « Co-Lapse », « Engine »). Créatif et solide !
Solidement ancré dans un Heavy Rock nerveux, MOTORJESUS reste toujours aussi virevoltant et déploie une belle énergie communicative à travers ce nouvel album, qui laisse apparaître des influences très américaines au niveau des mélodies et des riffs très acérés sur ce « Hellbreaker », qui s’écoute avec plaisir et qui donne une pêche d’enfer.
MOTORJESUS
« Hellbreaker »
(AFM Records)
Près de trois décennies au service d’un Heavy Rock très punchy et un septième album qui va peut-être enfin faire parler plus largement des Allemands de MOTORJESUS au-delà de leurs frontières, c’est ce qu’on peut souhaiter à l’écoute de « Hellbreaker ». Toujours aussi rentre-dedans, le quintet ne s’est pas embarrassé de ballades, ni même de morceaux mid-tempos et va à l’essentiel.
L’arrivée à la lead-guitare de Patrick Wassenberg donne même un sérieux coup de frais aux nouvelles compos du combo teuton. MOTORJESUS va droit au but et on ne s’en plaindra pas. Toujours aussi bien produit par Dan Swanö (Opeth, Insomnium), « Hellbreaker » reste très Hard Rock dans son ensemble et on notera des sonorités franchement américaines, propres à l’Alternative Metal et ses mélodies imparables.
Si le style des Allemands peut paraître simple à la première écoute, MOTORJESUS joue vite et juste et toute la puissance dégagée n’efface pas la multitude de détails qui vient solidifier l’album. Costaud et massif, le groupe enchaine les morceaux avec rage et fougue (« Drive Through Fire », « Battlezone », « Dead Rising », « Car Wars », « Back To The Bullet »). Ce nouvel album fait du bien, et vient confirmer la force du quintet et son inspiration.
YAWNING SONS est une entité transatlantique née de la rencontre entre les Anglais de Sons Of Alpha Centauri (SOAC) et les Américains de Yawning Man. Dans un Desert Rock progressif devenu mythique, le groupe est une évasion musicale sans pareil entre longs jams et fulgurances Rock très instrumentales. Pour la sortie du très attendu deuxième album (après 12 ans !), c’est le britannique Nick Hannon, bassiste de SOAC et pilier du groupe, qui nous en dit un peu plus sur le génial « Sky Island ». Rencontre…
– J’aimerais tout d’abord que tu reviennes sur la création de YAWNING SONS. Comment vous êtes-vous rencontrés et qu’est-ce qui vous avait poussé à enregistrer « Ceremony To The Sunset » à l’époque ?
Avec SOAC, nous travaillions sur notre deuxième album et Gary (Arce de Yawning Man) venait de sortir l’album « Dark Tooth Encounter », ou du moins les démos, et j’ai été complètement époustouflé. Nous l’avons contacté pour lui demander s’il serait intéressé pour s’impliquer sur le deuxième album de SOAC à l’époque. Il est venu en Angleterre et tout est devenu évident à son arrivée, tant l’alchimie musicale était phénoménale et complètement organique. YAWNING SONS était né.
– 12 ans séparent les deux albums. Pourquoi avez-vous attendu si longtemps avant d’enregistrer « Sky Island » ? Ce sont vos emplois du temps respectifs qui ont compliqué les choses ?
Oui, Gary a été très occupé avec Yawning Man. Ils tournent autant qu’ils le peuvent et lorsque nous avons travaillé ensemble pour la première fois, seuls « Rock Formations » et le EP « Pot Head » étaient sortis. Depuis, ils ont sorti quatre albums, plusieurs live et entrepris de nombreuses tournées. De notre côté, nous avons travaillé sur de nombreuses versions en collaboration avec Karma to Burn, et ensuite un deuxième album, puis un album-concept avec Justin Broadrick. Alors oui, nous étions très occupés chacun de notre côté.
– Maintenant qu’on a un point de comparaison entre les deux albums, je trouve que « Sky Island » sonne très américain, alors que « Ceremony To The Sunset » avait une sonorité très anglaise…
Je suis heureux qu’il y ait cette perception de contraste. Après ce grand laps de temps, il n’aurait pas été judicieux, ni utile de livrer un second « Ceremony To The Sunset ». Chaque album doit avoir sa propre identité et le groupe ne pourrait pas survivre s’il était purement enraciné sur un seul album après tant d’années. C’est bien qu’il y ait ce contraste pour créer un certain équilibre.
– « Sky Island » est aussi moins instrumental que le précédent. C’était une envie commune d’avoir plus de chant et donc aussi du texte ? D’ailleurs, par qui sont-ils écrits ?
Avec deux groupes entièrement instrumentaux, pouvoir travailler avec des chanteurs est passionnant ! Les paroles sont écrites par eux-mêmes, et elles captent toujours des vibrations vraiment cool dans les morceaux, ce qui les rend tout à fait uniques.
– Est-ce qu’avec YAWNING SONS, tu t’autorises des choses que tu ne fais pas avec SOAC ?
Absolument. Nous avons tendance à explorer davantage de thèmes précis dans YAWNING SONS et à les poursuivre jusqu’à ce qu’ils soient suffisamment organiques pour serpenter doucement d’une ambiance à une autre. C’est un processus progressif très naturel. La façon dont les deux guitares et la basse se lient est tout à fait unique et nous pousse à des performances différentes que nous ne ferions pas autrement dans nos groupes respectifs, je pense.
– Vous avez enregistré « Sky Island » à Joshua Tree et il en ressort d’ailleurs une atmosphère très particulière. Dans quelles conditions cela s’est-il passé et quels souvenirs gardez-vous de la conception de ce nouvel album ?
Ce fût un moment très agréable. Nous avions prévu que Bill Stinson soit à la batterie pour l’album, mais nous étions si loin dans le désert qu’il s’est perdu ! Du coup, nous avons demandé à Clive (notre producteur) s’il connaissait quelqu’un de la région qui savait exactement où nous étions et qui pouvait aussi jouer de la batterie. Et c’est Kyle (Hanson) qui s’y est collé et qui a rendu vraiment rendu l’album spécial. Gary (Arce) venait de rentrer de tournée et avait de très bonnes idées. Sur laligne de basse de ce qui est devenu « Shadows and Echoes », tout s’est parfaitement imbriqué. C’est ça aussi YAWNING SONS.
– Sur ce nouvel album, il ressort une couleur sonore étonnante, une ambiance musicale profonde et pleine de relief. C’est le son que vous souhaitiez donner à YAWNING SONS dès le début ?
La profondeur du son et l’ambiance sont plus définies sur ce deuxième album. Tant que cela reste organique et planant, alors c’est cool. Les retours et les critiques ont été incroyables, et nous avons travaillé dur pour capturer cette atmosphère rare, mais constante, en sachant que l’ambiance est la chose la plus importante.
– Est-ce que vous suivez vos carrières respectives, et quel regard portez-vous sur vos derniers albums à savoir « Continuum » pour SOAC et « Macedonian Lines » pour Yawning Man ?
Eh bien, je ne peux parler que pour SOAC, même si bien sûr je suis un grand fan de mes frères de Yawning Man. Pour moi, « Continuum » a été un grand pas en avant pour SOAC. Nous avons réuni un Rock Ambiant et Progressif dans un voyage instrumental. Nous avons vraiment apprécié de pouvoir faire les choses vraiment librement et sans contrainte. Il est imprévisible, enfin j’espère ! Je ne pense vraiment pas que nous ayons un style immédiatement identifiable.
– Pour conclure, une question s’impose : considérez-vous toujours, et tous, YAWNING SONS comme un side-project ou un groupe à part entière ?
Ce deuxième album contribue certainement à élargir l’horizon de ce qu’est YAWNING SONS. Ce n’est plus seulement une simple idée ou un projet : c’est un groupe. Cependant, c’est un concept rare et précieux et j’espère que les astres s’aligneront à nouveau un jour …
L’excellent « Sky Island » est disponible depuis le 26 mars chez Ripple Music.
A la fois très costaud et sensible, on sent que VOODOO RAMBLE a dû barouder pour en arriver à un Blues Rock aussi efficace. Tout en puissance et en feeling, les Croates menés par un Boris Zamba impérial à la guitare et au chant, livre un nouvel album remarquablement bien produit et au contenu qui balaie le style de ses racines américaines jusqu’en l’Europe de belle manière. « That’s Why » est aussi accrocheur que profond et fait vraiment du bien.
VOODOO RAMBLE
« That’s Why »
(Thoroughbred Music)
Fondé il y a un peu plus de 10 ans en Croatie par Boris Zamba, leader de la formation, VOODOO RAMBLE a longtemps écumé les bars, les festivals, les rassemblements de bikers et autres clubs pour bâtir sa réputation aujourd’hui irréprochable et étendue jusqu’en Italie et à Memphis. Guitariste, chanteur et songwriter, le musicien a eu tout le loisir de peaufiner un Blues, qui sonne très Rock et même Rythm’n Blues.
Pour son premier album sur le label indépendant Thoroughbred Music, le groupe n’a pas fait les choses à moitié. Sur une superbe production signée Drago Smokrovic Smokva, alias ‘The Fig’, VOODOO RAMBLE propose 12 titres très aboutis aux saveurs variées, passant d’une ambiance très cuivrée à la Blues Brothers à un style plus profond et rude et des sonorités à dominante européenne.
On retrouve pourtant chez les Croates une interprétation très américaine et Soul sur une énergie débordante. Très groove et tout en feeling, Boris Zamba mène ses hommes dans un registre plein de fraîcheur (« Raise Your Hand », « Yellow River », « The Man »). Avec ce très bon « That’s Why », VOODOO RAMBLE se hisse tranquillement au rang des meilleures formations Blues Rock actuelle sans trembler (« Midnight Train », « Sally »).
En 2019, le groupe FM sillonnait les îles britanniques et fêtait dignement les 30 ans de « Tough It Out », l’album qui a véritablement lancé le quintet et lui offert une reconnaissance mondiale. Sorti à l’époque chez Epic, le deuxième opus des Anglais avait rencontré un succès mérité grâce à une tracklist redoutable qu’on retrouve cette fois avec la chaleur du public et sans une ride.
FM
« Tough It Out Live »
(Frontiers Music)
Depuis 1985, les Britanniques n’ont pas dévié de leur trajectoire : FM fait du Hard FM et il le fait très bien. Rangé dans de drôles de catégories comme l’AOR ou le Melodic Rock, le quintet reste l’un des meilleurs représentants de ce style qui a connu son heure de gloire dans les années 80/90, où gros riffs et belles mélodies étaient encore monnaie courante. Aujourd’hui un peu ringardisé, le Hard FM a pourtant vu de très bons albums passer, dont « Tough It Out » en 1989.
Avec une douzaine d’albums studio, plusieurs live et compilations, FM a marqué de son empreinte un registre qui semble revenir tout doucement sur le devant de la scène. Et de scène justement, il en est question avec « Tough It Out Live », dont les 22 morceaux ont été enregistrés durant le ‘Big 3-0 Tour’ en 2019. Le groupe y a bien sûr joué l’intégralité de son mythique album, son plus grand succès et aujourd’hui considéré comme un classique sur lequel le grand Desmond Child (Aerosmith, Bon Jovi) avait même signé quelques morceaux.
Le double-album des Anglais contient aussi les classiques du groupe, ainsi que des morceaux rarement joués en concert. De quoi se remémorer de bon souvenirs pour la génération qui a grandi avec FM (« Blood And Gasoline », « Tough It Out », « Wildside », « Hard Day In Hell », « Obsession », « Breathe Fire », « The Dream That Died », « I Heard It Through The Grapevine », …). L’autre particularité est cette production ‘à l’ancienne’, c’est-à-dire très propre et claire avec un son très soigné. Un beau Best Of qui a ravit le public présent.