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Blues France

Louis Mezzasoma : une inspiration très actuelle [Interview]

Elevé dans le chaudron, LOUIS MEZZASOMA fait partie de cette nouvelle génération, qui a parfaitement digéré la culture et l’Histoire du Blues pour être à même d’en proposer sa propre version. Créatif et audacieux, le Stéphanois a livré il y a quelques mois un troisième album, « Mercenary », aussi surprenant qu’envoûtant. Rencontre avec ce musicien pluri-cordistes très inspiré et à l’approche très personnelle du Blues.

Photo : Nanou

– Tout d’abord, comment en arrive-t-on à incarner et ressentir autant le Blues lorsqu’on a à peine 30 ans et que l’on vient de Saint-Etienne, qui n’est pas vraiment le berceau du genre ?

A vrai dire, je ne me pose pas la question, je le fais ! Cette musique, c’est moi, c’est qui je suis. Il se trouve que cette musique s’appelle le Blues. Pour moi, c’est très important d’être soi-même, certains se sont trouvés en adéquation avec eux-mêmes en faisant de la poterie, du fromage de chèvre ou je-ne-sais-quoi. Pour moi, c’est sortir ce que j’ai au fond de mes tripes, au fond de moi-même. C’est ça, le blues. Je crois que je suis une espèce d’énergumène qui a tendance à foncer, à ne rien lâcher. C’est comme ça que j’ai fait ma place et que je continue de le faire.

Pour parler un petit peu de ma ville, oui, Saint-Etienne n’est pas vraiment le berceau du Blues, mais j’ai eu la chance de voir passer pas mal de monde dans le coin. Aussi bien des locaux que des artistes internationaux. Il faut reconnaître qu’on a quelques lieux encore bien friands de bon Blues.

– Ce troisième album marque un cap dans le son et aussi dans tes compositions. On a presque l’impression qu’il y a eu un déclic, une sorte de maturité atteinte. C’est aussi ton sentiment ?

Pour moi, ce nouvel album est vraiment un beau sommet atteint. J’écris mes chansons quand l’inspiration vient et non sur commande. Au fur et à mesure, on a arrangé et structuré le “guitare/voix” initial. Cet album n’est pas issu d’un déclic, mais bien d’une progression, d’une évolution et d’une affirmation de ma part, qui s’est faite au fil des années, à jouer, à écouter de la musique, à faire des concerts et à voir d’autres artistes en live… et petit à petit trouver ma place. Il s’agit vraiment d’un album produit pour lequel on a eu une vraie préparation, qui nous a permis d’être prêts pour le studio et d’aller chercher le son dans les détails. Je suis vraiment très fier de cet album « Mercenary ».

– Les textes de « Mercenary » sont très personnels et plein d’émotion. Très souvent, les bluesmen s’inspirent de leur vie pour chanter le Blues. C’est ce que l’on ressent chez toi : une authenticité et une sincérité évidente. Qu’est-ce qui t’inspire ? Ton vécu ou est-ce que tout est fictif ?

Toutes les chansons sont inspirées d’histoires vécues. Je me permets, pour l’écriture, de narrer et de romancer, mais sans donner tous les détails de ce qui m’est arrivé. Ainsi, l’auditeur peut se faire sa propre interprétation de la chanson et éventuellement s’y projeter et voyager.

L’inspiration vient de mes rencontres, de voyages, des concerts que j’ai pu faire, mais aussi de ce que je peux ressentir à un moment donné. Certaines chansons viennent d’une expression, d’une phrase que j’ai entendue et qui m’a parlé, inspiré.

Pour faire le lien avec l’actualité, car l’album a été enregistré en Juillet 2020 en pleine pandémie. L’enfermement n’est, dans mon cas, vraiment pas propice à l’inspiration. C’est bien l’ouverture vers le monde, les autres et les différentes cultures qui sont sources de création.

D’autre part, je me rends compte (pour le côté stylistique), petit à petit, que j’aime beaucoup la musique de film (et notamment de western), et en effet mes chansons ont toujours eu tendance à nous plonger dans une atmosphère et un climat, que l’on peut retrouver dans le cinéma.

Photo : Cédric Masle

– Même s’il y a du monde sur ce nouvel album, tu as longtemps joué seul dans une configuration d’homme-orchestre. Qu’est-ce qui est le plus plaisant et le plus satisfaisant au final : être seul à la manœuvre ou jouer en groupe, ce qui grossit également le son ?

Ce qui est génial, c’est d’être seul à la manœuvre et de jouer en groupe. En effet, quand j’ai démarré en one-man-band, j’avais l’avantage de pouvoir amener mes chansons dans la direction que je souhaitais, et de me laisser porter par les émotions, le feeling du moment, notamment en fonction de la réaction avec le public. Nous avons fait quelques dizaines de concerts sous la nouvelle formule guitare/batterie, qui reste une formule réduite et dans laquelle je reste maître des changements harmoniques. La batterie me suit dans mes idées et surtout donne de l’épaisseur et de l’impact au son. Pour moi, cette idée de manœuvre est surtout valable pour la partie live, pour suivre les différentes improvisations et changement de structure s’il y en a. Pour un album, on se doit de fixer les choses et de les planifier, que ce soit seul ou en groupe.

– Justement sur « Mercenary », tu es accompagné du batteur et percussionniste Gaël Bernaud qui apporte de la puissance aux morceaux, ainsi que de l’harmoniciste Jean-Marc Henaux et des cuivres de Sylvère Décot et d’Anthony Tournier qui offrent tous beaucoup de chaleur et de diversité. C’est un large panorama dans lequel on voyage énormément. De quelle école ou famille du Blues te sens-tu le plus proche ou l’héritier ?

L’arrivée de Gaël Bernaud au sein du groupe devient vraiment officielle avec ce nouvel album. Faire un album, c’est pour moi l’occasion de présenter des nouveaux titres, mais aussi de proposer quelque chose que l’on ne trouvera pas dans le live, ou du moins pas de la même manière. C’est le moment de faire une recherche approfondie dans le son, et aussi de faire appel à d’autres musiciens. C’est pourquoi nous avons invité aux trompettes, Sylvère Décot et Anthony Tournier sur le titre « RustyMan », et Jean-Marc Henaux sur quatre autres chansons. Diversifier les instruments permet de la variété et surtout d’éviter la monotonie. J’ai toujours présenté des titres assez différents entre ballades et chansons bien énervées. Pour répondre enfin à la question, je pense venir de plusieurs familles de Blues assez différentes, mais avec une grosse influence par le Country-Blues notamment par mon jeux de fingerpicking. On va dire que mes techniques de jeu sont issues d’un Blues rural, plutôt originaire du sud des Etats-Unis. Cependant, mes manières d’amplifier les guitares font aussi le lien avec le Rock.

– On retrouve aussi cette diversité dans tes instruments que ce soit la guitare, le banjo, le dobro ou la cigar-box. Est-ce que tu les vois comme des vecteurs d’ambiances très distincts et avec lequel es-tu le plus familier et le plus inspiré ?

Les changements d’instruments à cordes et leurs différents accordages sont vraiment une source d’inspiration pour la composition de mes chansons. Et en effet ils apportent des ambiances très différentes, même si il y a un univers bien ciblé. Ma cigar-box est vraiment jouée sur des morceaux Rock, alors que ma guitare folk va plus être utilisée sur des ballades Country-Blues. Je réalise que mon dobro, joué en open D et au bottleneck, est peut être le plus polyvalent et me permet une amplitude de style entre ballade lancinante, Blues primitif ou Rock. C’est aussi l’instrument que j’ai le plus utilisé sur tous mes albums. Pour tout te dire, sur « Mercenary », j’ai utilisé sept guitares (ou instrument à cordes) différentes : folk, dobro, demi-caisse, électrique, 12 cordes, cigar-box et banjo

Photo : Nanou

– Ton Blues s’inspire beaucoup des pionniers du genre, or il n’est jamais nostalgique ou passéiste, notamment dans le son. Comment alimentes-tu ton jeu à travers des influences si anciennes, même si elles sont intemporelles ?

Malgré le genre qui ne date pas de la veille, j’écoute beaucoup d’artistes de Blues et de styles proches (Folk, Country, Rock…) d’aujourd’hui, dont certains que j’ai vu en live. Le Blues, c’est notre histoire personnelle. Peut être que si je chantais le Blues des autres, ou un Blues à l’honneur des pères du genre, je serais nostalgique ou passéiste. Mais je joue mon Blues, donc les histoires sont d’actualité, du moins de mon actualité.

Je vais me faire engueuler en disant ça mais perso, les vieux albums comme Robert Johnson, c’est génial pour le collectage, pour l’Histoire, pour les chansons, pour le jeu de guitare, mais c’est très dur à écouter, le son n’est vraiment pas fou. Le parti-pris pour notre album était de garder l’authenticité de la musique et des instruments, mais de traiter le son de façon moderne. On a utilisé des bons vieux micros vintage à l’ancienne avec les bons préamplis. On a fait des vraies prises de sons de batterie en s’acharnant sur le choix et les réglages de la caisse claire en fonction de chaque morceau. J’ai chanté dans un micro fait dans un obus de la seconde guerre mondial, les guitares étaient branchées dans des amplis à lampes bien crades que l’on a poussé à fond. Jusque-là, ça aurait pu marcher pour un groupe de Blues traditionnel, mais le traitement du son, lui par contre, a fait la différence. On a joué sur les effets, tordu les sons. Je pense aussi que certains arrangements comme des guitares additionnelles, des banjos et les chœurs ont eu eux aussi leur importance pour donner ce côté moderne.

– Enfin, le Blues est une musique de communion et de partage. Comment vis-tu la situation actuelle et comment envisages-tu ton retour sur scène ?

Mal… Jouer, faire des concerts c’est ma raison de vivre, c’est ma passion, mais aussi mon gagne-pain et on est en train de nous enlever tout ça. Le statut est assez précaire, mais c’est un choix pour faire ce que l’on aime. On doit faire de nombreux sacrifices pour y arriver… C’est assez dur de devoir rester en stand-by en attendant mois après mois de pouvoir reprendre. Pour vivre de la musique live, ça implique de faire des dizaines de concerts par an et chaque concert est dur à programmer, c’est un travail de longue haleine qui se fait entre six mois et un an et demi à l’avance. Depuis plus d’un an, on reporte, annule et reporte des événements déjà reportés, et c’est sans parler des lieux, des salles de spectacle et des festivals qui ferment. Je ne parle pas des Zénith ou des artistes qui passent à la TV régulièrement. Je parle des scènes alternatives trop souvent oubliées par les médias, des petits et moyens festivals, qui survivent grâce aux organisateurs et aux nombreux bénévoles qui se battaient, et se battent toujours, pour offrir de la culture, de la joie, de la convivialité et du bonheur.

Et oui, le Blues est une musique de partage, une échappatoire à la dureté de la vie pour faire place à de l’expression et de la joie. J’espère que nous sommes dans la dernière ligne droite et que nous allons pouvoir présenter ce nouvel album, « Mercenary », sur les planches très rapidement…

« Mercenary » est disponible depuis le 5 mars chez Le Cri Du Charbon.

Retrouvez la chronique de l’album :

https://rocknforce.com/louis-mezzasoma-des-emotions-essentielles/

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Alternative Rock Rock

Myles Kennedy : explosif, sensible et positif

Le guitariste et chanteur MYLES KENNEDY ne tient pas en place, alors plutôt que de rester sans rien faire durant le confinement, il en a profité pour composer et mettre la touche finale à « The Ides Of March ». Revenu à un Rock US qui lui va si bien, l’Américain livre un deuxième album, qui fait beaucoup de bien.  

MYLES KENNEDY

« The Ides of March »

(Napalm Records)

Contraint de rester chez lui en raison de la pandémie, le très prolifique MYLES KENNEDY a profité de l’annulation de ses tournées pour se pencher sur son deuxième album solo. Et après le très bon « Year Of The Tiger » en 2018, le frontman d’Alter Bridge et du projet solo de Slash livre « The Ides Of March », un opus plus électrique et moins intimiste, mais avec toujours autant de créativité et de sincérité.

Pour ce nouvel album, MYLES KENNEDY a électrifié et électrisé son jeu et distille un Rock US comme il en a l’habitude, et dont il reste un modèle du genre. Grâce à une voix puissante et idéale pour ses très accrocheuses mélodies, le chanteur n’en demeure pas moins l’excellent guitariste que l’on connait et, entre riffs entêtants et solos millimétrés bourrés de feeling, mène sa barque avec classe.

Accompagné de Tim Tournier (basse) et de Zia Uddin (batterie), MYLES KENNEDY a confié la production de « The Ides Of March » au producteur Michael Baskette, collaborateur de longue date. Entraînant sur « In Stride » et « Get Along », ou plus touchant sur « Tell It Like It Is » et « Worried Mind », l’Américain brille et excelle carrément sur le morceau-titre long de près de huit minutes. Une grande bouffée d’air positive et très Rock.

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Blues International

Archie Lee Hooker : entre héritage et transmission [Interview]

Etre le neveu d’un géant comme John Lee Hooker pourrait être un fardeau bien trop lourd à porter pour beaucoup. Et pourtant, c’est l’esprit de famille gravé dans le cœur et un amour immense du Blues qui poussent ARCHIE LEE HOOKER dans cette voie qu’il aurait, de toute façon, eu du mal à éviter. Vivre le Blues et le chanter est bien plus qu’une passion pour l’Américain, installé en France depuis une dizaine d’année. C’est une nécessité et presqu’un devoir. Entretien avec l’un des derniers grands musiciens et détenteur de l’âme première du Blues…   

– Né dans le Mississippi, c’est pourtant en arrivant à Memphis, Tennessee, que tu t’es réellement investit dans la musique et notamment dans un groupe de Gospel où tu chantais. Qui avait-il de différent là-bas ? Le Mississippi est une terre très musicale pourtant aussi ?

Au Mississippi, la musique était une activité de week-end, parce que tout le monde travaillait dans les plantations pendant la semaine. La musique gospel était jouée dans les offices religieux, donc c’était surtout le week-end, et parfois le mercredi. Mais le dimanche était le jour le plus important pour les églises. Cela commencerait à 9 heures pour les enfants de l’école catholique, puis il y avait de la musique jusqu’à 13 heures et aussi à 15 heures généralement au deuxième office, où des personnes extérieures à l’église pouvaient venir. C’était une fête.

– Le Blues est finalement entré assez tard dans ta vie, en 1989. A cette époque, tu vis chez ton oncle, le grand John Lee Hooker, The Boogieman. Te souviens-tu de tes premiers sentiments à l’écoute de ses notes de Blues et dans quelles circonstances cela a-t-il eu lieu ?

Pour moi, écouter son blues revenait à écouter sa vie, son parcours et de la raison pour laquelle il était tel qu’il était. Sa musique racontait vraiment sa vie. Et écouter ses paroles se reflétait sur ma propre vie. Nous avions eu tous les deux une enfance similaire, car nous étions tous deux issus des plantations. Ecouter sa musique m’a aidé à faire des choix dans ma propre vie.

– Tous les bluesmen rêvent d’une telle initiation, ainsi que de pouvoir rencontrer les grands musiciens que tu as pu côtoyer à l’époque. Etais-tu conscient de la chance que tu avais et du privilège de pouvoir écouter et jouer avec de tels musiciens ?

J’étais reconnaissant de pouvoir les écouter tous. Non seulement d’écouter leur musique, mais aussi d’écouter les histoires qu’ils racontaient. J’ai eu beaucoup de chance de rencontrer autant de musiciens de Blues qui comptent parmi les plus grands.

– Est-ce que c’est à ce moment-là que tu as vraiment trouvé ton chemin et surtout le ton, les sonorités et le style que tu voulais donner à ton jeu ?

Oui, quand j’ai rencontré tous ces différents musiciens, ils ont tous projeté leur art d’une manière différente. Et c’est là que j’ai décidé de trouver ma propre voie, de ne pas les copier, mais de trouver mon truc. Etre naturel et concret. Quand vous touchez et approchez ces musiciens, vous vous rendez compte de qui ils sont, et qu’ils sont bien réels au sens de qui ils sont véritablement. Et c’est ce que je voulais faire moi-même !

– Est-ce que, dès le départ, ton intention a été de te démarquer de cet immense héritage familial, ou au contraire d’apporter une pierre supplémentaire à l’édifice ?

C’est ce que j’essaie de faire, c’est-à-dire de garder vivant ce que faisait John et d’y ajouter quelque chose de personnel au lieu de prendre quelque chose qu’il aurait déjà fait. Je ne veux pas le copier. Quelque part dans notre lignée, un autre membre de la famille prendra le flambeau et le portera encore plus loin, du moins c’est ce que j’espère !

– Il y a 10 ans, tu as décidé de venir t’installer en France. C’est assez surprenant de quitter la patrie du Blues. Pourquoi la France a-t-elle été ta destination privilégiée ? Tu as eu un feeling particulier, ou est-ce juste par exotisme musical ?

C’était une suggestion de John. Si je voulais faire du blues, je devais voyager en Europe ! Je lui ai demandé où et il a dit qu’il ne pouvait pas me le dire, mais que je le saurais une fois que j’y serai. Et c’est arrivé en France et c’est ici que la roue a commencé à tourner en ma faveur. Cela aurait pu être n’importe où, mais pour moi c’était la France. Ce n’était pas quelque chose de prévu, c’est simplement arrivé naturellement ! Et j’aime ça !

– C’est après une tournée européenne avec Carl Wyatt & The Delta Voodoo que tu as décidé de monter ton propre groupe. Que cherchais-tu que tu ne trouvais pas à ce moment-là musicalement ?

Je cherchais à me trouver véritablement, ce qu’il y avait au fond de moi. Je cherchais des musiciens qui pourraient projeter le son que j’avais en moi dans un groupe. Carl est mon frère et nous sommes encore de très bons amis. Il a son style et je l’adore, mais pour mon groupe, je cherchais un son différent. Je voulais jouer mon propre style. La musique que je fais aujourd’hui est celle que j’entendais quand j’étais jeune. C’est pourquoi j’ai décidé de créer le Coast To Coast Blues Band. Juste pour jouer ce que j’ai dans le cœur et dans la tête…

– Justement aujourd’hui ton groupe, le Coast To Coast Blues Band, est constitué de musiciens brésiliens, français et luxembourgeois, le tout mené par un Américain. Comment as-tu monté ce casting éclectique et tellement complémentaire ? Le Blues n’a donc pas de frontières ?

Non, le Blues n’a pas de frontière. C’est pour ça que je n’ai pas choisi les musiciens d’après leur pays d’origine, mais juste pour leur talent. Et comme ils venaient tous de régions côtières différentes, le nom du groupe est venu naturellement. Tout le monde vient d’une partie du monde différente, tout le monde a eu une enfance différente et écouté de la musique différente. Tout cela s’infiltre dans le son d’un océan à l’autre. Nous avons réussi à réaliser ce que nous voulions vraiment. Nous avons tous un rêve et se retrouver pour jouer cette musique est magnifique.

– Après « Chilling » en 2018, « Living In A Memory » vient de sortir et il respire le Blues, la Soul avec toujours ce petit côté Gospel. Comment composes-tu et qu’est-ce qui t’a guidé cette fois dans tes compositions ?

La vie ! C’est elle qui m’a guidé. Je la revis, car je regarde en arrière pour voir ce que j’ai vécu, les routes que j’ai parcouru et emprunté pour me souvenir de tous ces jours et les mettre en mots. Beaucoup de gens dans ce monde pourraient vivre la même chose que moi et s’ils peuvent apprendre de mes erreurs, alors j’aurais fait la meilleure chose qu’on puisse faire sur cette planète : j’aurais aidé quelqu’un d’autre. Si quelqu’un passe par la même chose que moi, il peut apprendre de mes erreurs et ne pas avoir à en faire l’expérience lui-même.

– Cet album sonne très américain, même après 10 ans passés en France. Le son européen n’a pas eu d’influence sur ton jeu ou même tes envies de création ?

Le son européen est différent, c’est vrai. Je dirais que notre son est américain, mais surtout américano-européen ! (Rires) Le son du groupe vient de ce que les musiciens ont entendu dans la musique américaine et de la manière dont ils l’ont traduit dans leur façon de jouer. Et c’est vraiment ce qui la rend très excitante pour moi.

– Est-ce que tu suis un peu la scène Blues française, et quel regard y portes-tu ? Il y a des groupes que tu apprécies tout particulièrement ?

Oui, j’écoute la scène française. Les musiciens prennent la musique américaine et se l’approprient, ce qui est génial. Je prendrais comme exemple Fred Chapellier, Bâton Bleu, Charlie Fabert ou Dom Ferrer pour n’en citer que quelques uns.

– Enfin, j’imagine que tu gardes aussi un œil sur la scène américaine. Quels sont les talents émergents qui ont attiré ton regard dernièrement ?

La jeune génération, celle qui est dans la trentaine, a grandi avec le Blues traditionnel et elle retourne à ses racines. Phillip Michael Scales, Christine Kingfish Ingram de Clarksdale sont très jeunes, mais ils jouent tous un Blues traditionnel. Le simple fait de les voir se l’approprier et ne pas le laisser mourir me rend heureux. Le Blues, c’est l’histoire de l’Amérique. C’est ce qui a permis au pays de rester uni, car c’était la musique qui les avait réunis. Ce sont nos racines.

« Living In A Memory » est disponible depuis le 16 avril chez Dixiefrog/PIAS.

Retrouvez la chronique de l’album : https://rocknforce.com/archie-lee-hooker-the-coast-to-coast-blues-band-un-prenom-qui-en-impose/

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Hard Rock

Robin McAuley : sans réel éclat

Malgré un très bon retour avec Black Swan et son line-up de stars l’an dernier, c’est surtout avec Michael Schenker que le chanteur irlandais a acquis ses lettres de noblesse. Après avoir évolué dans de nombreux groupes, c’est en solo qu’il fait son retour avec un projet quasi-imposé par son label et qui peine donc à rendre à ROBIN MCAULEY sa superbe.

ROBIN MCAULEY

« Standing On The Edge »

(Frontiers Music)

Avec un CV long comme le bras, ROBIN MCAULEY a fait les beaux jours du Hard Rock des années 80/90 avec Grand Prix, Far Corporation, GMT et surtout MSG aux côtés du grand guitariste Michael Schenker, ainsi qu’avec M.S. Fest et plus récemment Black Swan. Le chanteur irlandais a su conquérir les fans du monde entier et continue l’aventure en solo avec un deuxième album.

Depuis son arrivée chez Frontiers Music, ROBIN MCAULEY travaille avec des musiciens italiens, et c’est encore le cas pour ce « Standing On The Edge ». Si le Dublinois est bien entouré, il parait presque méconnaissable dans ce registre moins percutant, moins musclé et presque qu’AOR, que sur le reste de sa discographie. Sans être totalement dénué d’intérêt, cette nouvelle production est trop prévisible. 

Dégageant toujours une belle puissance, ROBIN MCAULEY aurait sûrement été maintenu à son niveau grâce à des compos plus mordantes et plus Heavy. Malgré de bons riffs et quelques envolées vocales bien senties, « Standing On The Edge » se noie trop souvent dans des nappes de synthés omniprésentes et superficielles. Dommage pour un chanteur de ce calibre et de cette trempe.

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Hard Rock International Rock

The Damn Truth : highway to Rock [Interview]

THE DAMN TRUTH, c’est avant tout une musique chargée d’ondes positives, de vibrations intenses d’où émane un aspect solaire et créatif incroyable. Après moins de dix ans d’existence, le quatuor de Montréal vient tout juste de sortir « Now Or Nowhere », son troisième album, et celui-ci se présente comme celui de l’éclosion véritable des Canadiens. Entretien avec un groupe qui ne devrait pas mettre bien longtemps à faire beaucoup parler de lui et à déferler sur les scènes du monde entier.

Photo : Mikael Theimer

– Avant d’entrer dans le détail, quels sont les sentiments qui vous animent quelques jours après la sortie de « Now Or Nowhere », un album aussi époustouflant qu’ébouriffant ?

On est très excité de pouvoir enfin partager « Now Or Nowhere » avec nos fans et avec beaucoup d’autres aussi, on l’espère ! Et puis, on a tellement travaillé dur sur l’album et tout ce qui l’entoure.


– THE DAMN TRUTH existe depuis maintenant neuf ans et est l’un des fers de lance de la scène Rock underground de Montréal. Est-ce que toutes ces années et les deux premiers albums sortis en indépendant étaient nécessaires et indispensables pour forger votre identité musicale et aller au bout de votre expérience en autoproduction ?


Oui, certainement. Notre groupe et notre musique sont un amalgame de toutes nos histoires et nos expériences de vie. Chaque concert et chaque album nous ont guidé vers ce que nous sommes aujourd’hui. Chaque jour est une leçon et on a beaucoup appris durant toutes ces années, qui ont été très formatrices.


– Même si vous avez tourné en Europe et aux Etats-Unis voisins aux côtés de grands noms, quel a été le déclic pour ce nouvel album, car on ressent une réelle évolution et même un nouveau cap de franchi ?


Pour cet album, on a pris la décision très consciemment d’écrire des chansons plus positives et remplies d’amour. Pendant ces quatre dernières années de tournées intenses, on a eu la chance de rencontrer des milliers de personnes. On a vraiment pu avoir une vue à la fois très large, mais aussi très intime de notre société. Nous avons partagé des histoires et beaucoup de moments intenses avec énormément de monde. Et le lien commun entre tous, c’est le désir d’amitié, d’amour et de vibrations positives. Alors cette fois-ci, on a voulu apporter avec nous tous ces éléments en studio pour les retranscrire dans les arrangements de nos chansons.


– Comment a eu lieu cette connexion avec le grand producteur Bob Rock ? Qui a contacté l’autre ? J’imagine que si malheureusement l’album n’a pas été jusqu’à son terme, ce doit être une expérience très enrichissante ?


On a eu la chance que notre manageur, Ralph Alfonso, ait travaillé avec The Payolas, qui était le groupe de Bob Rock dans les années 80. Quand on est rentré de notre tournée européenne à Montréal, on voulait vraiment envoyer nos chansons à Bob. Ralph nous a dit : « Avec Bob, on a une seule chance, alors on a besoin de bonnes chansons ! » On pensait vraiment les avoir, alors Tom (Shemer, guitariste – NDR) a appelé Ralph à tous les jours jusqu’au moment où il a envoyé les chansons ! (Rires) En moins de 24 heures, Bob nous a invité à venir enregistrer l’album à Vancouver au Warehouse.


– Justement, a-t-il changé et fait évoluer votre son, ou tout du moins votre approche musicale, lors de l’enregistrement dans le studio de Bryan Adams à Vancouver ?


Oui, vraiment. Il nous a beaucoup appris et il nous a projeté dans un monde hyper-créatif dès notre arrivée à Vancouver. Avant d’y aller, on avait travaillé les chansons pendant cinq mois et 6 jours par semaine. On voulait vraiment essayer tout ce qu’on pouvait en termes d’arrangements pour être prêts pour n’importe quelle configuration en studio. On était sûrement un petit peu nerveux aussi ! (Rires) Mais en arrivant, Bob nous a mis à l’aise en quelques secondes.

Bob Rock a une façon tellement sensible de faire ressortir ce qu’il veut entendre, presque sans dire un mot ! Il est extrêmement doué en musique et il a une culture encyclopédique ! Nous nous sommes tous profondément investis et il était vraiment exciter de travailler sur un album de Rock’n’Roll. Il nous a dit : «  Je vais faire des suggestions, on essaie tout et on garde juste ce que l’on aime ». Du coup, on avait énormément de liberté pour tenter beaucoup de nouvelles choses. Il y a vraiment eu une belle alchimie. On a appris tellement de choses durant cette expérience avec Bob. Et ça nous a aussi aidé au moment de produire les trois dernières chansons à Montréal dans nos studios Freqshop et Grandma’s house.

Photo : Martin Brisson


– Vous avez terminé l’album avec Jean Massicotte, Vance Powell, Nick Didia et Mike Plotnikoff, qui sont autant de grands noms. Leur avez-vous demandé, ou ont-ils décidé, de travailler dans la même logique et la continuité de ce qu’avait déjà effectué Bob Rock, afin de ne pas perdre l’unité de l’album ?


En fait, on a fini l’album nous-mêmes à Montréal. Ensuite, Vance, Nick, Mike et Jean ont travaillé sur le mix de certaines chansons. C’était durant la période de confinement, alors on a fait des sessions de mixage à distance. C’était vraiment cool d’entendre Vance travailler depuis Nashville pendant qu’on l’écoutait en live au Freqshop, qui est le studio de Dave ici à Montréal. Un grand merci à la technologie !


– Pour « Now Or Nowhere », vous avez mis toutes les chances de votre côté en allant dans un grand studio avec de grands producteurs et le résultat est très franchement à la hauteur. C’est aussi ce que vous aviez en tête dès le début ? Les morceaux devaient sonner comme cela dans votre esprit, ou est-ce que de nouvelles idées et de nouvelles envies sont apparues au fur et à mesure ?


On voulait vraiment garder notre esprit et notre cœur ouverts. On avait déjà des démos de très bonne qualité. Après des mois de répétitions, nous sommes partis à l’aventure en studio à Vancouver sans vraiment savoir à quoi s’attendre. On avait déjà trouvé beaucoup de sons, alors on a amené beaucoup d’équipement pour pouvoir les reproduire. On savait aussi qu’on avait seulement quatre jours pour enregistrer six chansons, c’est-à-dire assez peu de temps. Quand on est arrivé, la batterie était déjà prête pour les sessions d’enregistrement. C’était celle d’Abe Laboriel Jr., le batteur de Paul McCartney. Le set-up était vraiment nouveau pour nous et avec les hauts plafonds le son était franchement massif et impressionnant ! Pendant les sessions, Bob a sorti plein de guitares de rêves ! Tom a utilisé la Stratocaster de Richie Sambora sur le solo de « This is Who We Are Now » et PY a utilisé la basse de Bryan Adams sur « Look Innocent ». Lee-La a même eu la chance de chanter dans le micro de Frank Sinatra. On avait l’impression que tout cet équipement très vintage et chargé de tant d’histoires a fait ressortir quelque chose en nous de très spécial. Avant les sessions, Bob nous avait dit : « Attendez d’entrer dans le studio A, c’est là que la magie va se faire ». Et il avait raison !


– Vos compos sont toutes très abouties et matures et dégagent une énergie incroyable. Il y a un côté très live et on a même l’impression que vous les avez enregistrées en prise directe. C’est cette sensation très brute que vous recherchiez ?


Oui, c’était très important pour nous que la plupart des morceaux soit enregistrée en prise directe. On croit vraiment en notre musicalité et en l’énergie d’une performance. Dans beaucoup de musique actuelle, tout est coupé, copié et collé et ce n’est vraiment pas notre son. On voulait livrer quelque chose d’authentique et d’organique. Bob était vraiment concentré sur le côté ‘vibe’ des performances tout au long des sessions. Je crois qu’on a vraiment pu capter ces moments-là durant l’enregistrement.


– En plus d’être très dynamique et mélodique, il y a un côté très solaire et positif qui se ressent à travers l’ensemble de l’album. On vous sent aussi libérés qu’appliqués d’autant qu’il en émane une force et une grande puissance. C’est quelque chose que vous gardez toujours à l’esprit en composant ?


Sous une étiquette Rock, on peut prendre beaucoup de directions. Les fans de Rock ont un esprit ouvert et on a l’avantage de composer une musique très vaste. D’ailleurs, nos grandes influences comme Led Zeppelin, les Beatles ou Jefferson Airplane avaient tous cette grande diversité. Et on adore ça.

Cela se ressent énormément sur « Now Or Nowhere », je pense. Nos deux premiers albums étaient beaucoup plus sombres avec des textes assez revendicatifs. Après nos expériences diverses à travers le monde, on a ressenti que nos fans et nous-mêmes avions besoin de plus de positivité et d’optimisme.

C’est un message qui a toujours été présent dans notre musique, mais on l’a poussé plus en avant cette fois. Surtout qu’aujourd’hui, nous avons tous besoin de sentir de l’amour et de ressentir des vibrations et des influences positives autour de nous. On a vraiment hâte que tout le monde puisse enfin se serrer dans les bras, et plus fort que jamais.


– Musicalement, votre Rock sonne très américain avec d’évidentes vibrations 70’s et assez vintage. Tout en étant très actuel, votre style semble intemporel. C’est une façon de libérer les musiques qui vous ont influencé tout en leur donnant un sacré coup de boost ?


On est quatre musiciens avec des influences très diverses. On aime le Classic Rock, le Psychédélique, la Folk, le Rock Progressif, le Hard Rock, le Metal et même la Pop et beaucoup d’autres choses encore… N’oublions pas que nous avons tous grandi pendant les années Grunge. Alors nos influences viennent vraiment de partout, puis on passe tout ça à la moulinette THE DAMN TRUTH !


– De cette puissance affichée se dégage une chaleur et une générosité sur chaque note et à travers chaque parole. Quel est le processus de création au sein de THE DAMN TRUTH ? C’est un travail en commun, ou est-ce que chacun apporte ses idées, ses textes ?


Les idées sont partagées pendant les jams et chaque morceau évolue dans cet espace-là. On peut commencer avec un ou deux riffs, ou bien un couplet-refrain, et on travaille dessus tous ensemble. Dès le moment où nous jouons ensemble, ça évolue et ça sonne assez rapidement et instinctivement THE DAMN TRUTH. Le processus est très démocratique, il y a des moments chargés d’émotions, et nous connaissons très bien nos forces aussi. On essaie à ce moment-là de toujours les utiliser à notre avantage.


– Avec un album aussi réussi, vous vous doutez bien que votre exposition et votre notoriété vont exploser. C’est quelque chose que vous attendez depuis longtemps et à laquelle vous êtes préparés ou, au contraire, qui ne changera rien à votre quotidien ?


On fait de la musique pour le frisson de voyager et d’être créatif ensemble. Partir à l’aventure et vivre une vie unique. C’est ça notre but et si on peut continuer à faire ça, alors on aura réussi.


– Un dernière question : si « Now Or Nowhere » s’adresse bien sûr aux amateurs de Rock, voire même de Hard Rock, il y a une telle diversité et un son qui le rendent aussi très accessible. Votre démarche est aussi de vous adresser au plus grand nombre ?


On écrit d’abord la musique pour nous-mêmes et également pour faire des albums qu’on voudrait sans cesse écouter. Alors si en plus les gens aiment ça, c’est du bonus. Comme nous allons jouer ces morceaux des milliers fois, il faut d’abord les aimer comme nos propres enfants. C’est notre point de départ et si, en plus, le succès vient s’y ajouter, ce ne sera que mieux !

« Now Or Nowhere » de THE DAMN TRUTH est disponible chez Spectra Musique/Sony Music.

Retrouvez la chronique de l’album : https://rocknforce.com/the-damn-truth-lexplosive-revelation-quebecoise/

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Metal Rock

False Memories : une plongée dark et gothique

Aux frontières du gothique dans un style évidemment assez dark, FALSE MEMORIES propose un nouvel album très maîtrisé, dynamique et que la nouvelle chanteuse, Rosella Moscatello, met parfaitement en valeur. Avec « The Last Night Of All », et en plus de sa frontwoman, les Italiens présentent de solides morceaux portés par une très bonne production.

FALSE MEMORIES

« The Last Night Of All »

(Frontiers Music)

Nouvelle signature chez Frontiers Music avec ses compatriotes de FALSE MEMORIES, qui compte déjà un album autoproduit dans lequel était d’ailleurs inclus son tout premier EP. Il faut donc penser que « Chimerical » avait conquis le label italien qui mise sur le quintet avec ce nouveau « The Last Night Of All », énergique et bien produit. Rock et Metal à la fois, le groupe livre une bonne copie.

Présente dans le combo depuis octobre 2018 la chanteuse Rosella Moscatello, qui a co-composé l’essentiel du disque avec le guitariste Francesco Savino, se montre très en valeur grâce à une large palette vocale, où la Transalpine est à son aise dans des registres très variées. Assez haut perché ou plus percutant, le chant de la frontwoman offre de belles couleurs à FALSE MEMORIES.

Estampillé gothique et Doom Metal, c’est surtout dans un Metal mélodique moderne et assez symphonique que le groupe évolue. Entre Rock et riffs plus Metal, les Italiens proposent un album solide et très accessible. Armé de deux bons guitaristes et d’une rythmique ferme, FALSE MEMORIES mène sa barque avec assurance et vigueur. Avec « The Last Night Of All », le quintet fait une belle entrée en matière.

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Doom Metal

Candlemass : pionniers et maîtres incontestés

C’est dans l’intimité de leur Q.G. de Stockhölm, Covid oblige, que les pionniers de  CANDLEMASS ont tenu à enregistrer en live cette parenthèse Doom mémorable. On y retrouve avec un immense plaisir Leif Edling à la basse, ainsi que Johan Längquist au chant, le frontman aussi discret que légendaire du combo suédois. « Green Valley Live » va vite devenir indispensable !

CANDLEMASS

« Green Valley Live »

(Peaceville Records)

Plus de 35 ans après sa formation, CANDLEMASS n’a toujours pas rendu les armes et c’est une très bonne nouvelle ! Confinés comme tout à chacun l’an dernier, les Suédois ont tenu à marquer d’une belle empreinte discographique cette maudite année 2020. C’est donc le 3 juillet dernier à Stockhölm que le groupe a immortalisé une prestation privée, « Green Valley Live », pour le plus grand plaisir des fans, et pas seulement.

La première bonne nouvelle est que CANDLEMASS enregistre le retour de son emblématique fondateur Leif Edling, qui ne tournait plus depuis des années pour des raisons de santé. Et ça change tout ! On retrouve l’âme et le groove profond des maîtres scandinaves du Heavy Doom. Les pionniers, à l’écoute de « Green Valley Live », ne sont pas prêts d’être détrônés et cette excellente tracklist vient le confirmer.  

Les Suédois remettent les choses en place en rappelant, grâce à ces classiques de leur répertoire, que leur registre reste inégalable (« The Well Of Souls », « Dark Reflections », « Anciens Dreams »). CANDLEMASS enfonce le clou avec « Bewitched », « Under The Oak » ou encore « Solitude » et « Demon’s Gate ». Très organique et massive, la production met en valeur toute la classe des maîtres européens du Doom Metal.

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Hard Rock Rock

Tommy’s Rocktrip : la route du Rock

Excellent batteur ayant joué avec les plus grands, l’Américain retrouve cette fois les baguettes pour un projet solo, qui nous plonge dans un Hard Rock musclé, simple et très rentre-dedans. TOMMY’S ROCKTRIP respire le Rock’n’Roll et cela s’entend sur chaque note. Un bon et joyeux moment, qui combat aussi toute nostalgie !

TOMMY’S ROCKTRIP

« Beat Up By Rock’N Roll »

(Frontiers Music)

Qu’est-ce qui a poussé un batteur comme Tommy Clufetos à se lancer dans une aventure solo en marge de ses prestigieuses collaborations ? Le plaisir, pardi ! Et c’est sous le nom de TOMMY’S ROCKTRIP que le cogneur vient nous présenter « Beat Up By Rock’N Roll », véritable concentré de tout ce qui l’a influencé depuis les débuts de sa déjà longue carrière. Et à travers onze titres, le musicien de Detroit se régale et nous régale par la même.

Avec un CV comme le sien, on peu aisément comprendre que des envies d’ailleurs et d’une certaine liberté se fassent sentir. Batteur pour Ted Nugent, Rob Zombie, John 5 et surtout Alice Cooper, Ozzy Osbourne et Black Sabbath, TOMMY’S ROCKTRIP peut être perçu comme un retour aux sources pour cet éclectique et très talentueux rockeur du Michigan. Et les soupçons se dissipent rapidement au fil des titres.

L’Américain s’est offert un casting efficace en confiant le chant à Eric Dover (Slash’s Snakepit, Alice Cooper), même s’il pousse lui-même la chansonnette sur « Make Me Smile », le morceau-titre et « The Power Of Three ». Aux guitares, Hank Schneekluth et Nao Nakashima se partagent la tache bien aidés par Eliot Lorengo à la basse et Doug Orguan à l’Hammond. Impulsif, dynamique et enjoué, ce premier album de TOMMY’S ROCKTRIP libère de belles ondes.

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Hard Rock International Progressif Rock

The Vintage Caravan : résolument moderne ! [Interview]

C’est en 2006 sur leur île, l’Islande, qu’ont résonné les premiers riffs, les premières rythmiques et les premiers refrains de THE VINTAGE CARAVAN. Cinq albums plus tard, c’est un trio plus qu’aguerri, sûr de lui et terriblement inspiré qui arpentent les scènes du monde entier. Avant de les retrouver pour quatre dates françaises l’an prochain, entretien avec le très bon et très sympathique bassiste du trio, Alexander Örn Númason, qui revient sur cette belle épopée et une aventure faite de persévérance et de travail.

– Vous avez créé THE VINTAGE CARAVAN alors que vous étiez très jeunes et avec un premier deal d’album il y a presque 10 ans. J’imagine que cette déjà longue expérience vous a permis d’éviter certains écueils professionnellement ?

Oui, c’est vrai que le groupe existe depuis un certain temps maintenant. Je pense que nous avons eu la chance d’avoir beaucoup d’opportunités dans notre carrière, mais nous avons aussi commis beaucoup d’erreurs. C’est inévitable, mais cela vous oblige à faire de meilleurs choix par la suite. Ça a été financièrement difficile de faire fonctionner le groupe, mais cela s’améliore avec l’expérience que nous avons maintenant !

– Après votre premier album éponyme, « Voyage », « Arrival » et « Gateway » ont assis votre réputation qui a été confortée par de très bonnes prestations live. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cette dernière décennie, alors que sort votre cinquième album « Monuments » ?

Eh bien, je pense que les choses se sont toujours déroulées assez lentement mais toujours régulièrement pour THE VINTAGE CARAVAN. Rien n’a vraiment été jamais tout noir ou tout  blanc. Nous travaillons très dur à la fois sur scène et en dehors, et finalement on récolte ce que l’on sème. Nous sommes toujours aussi impatients et nous cherchons à être meilleurs dans ce que nous faisons. Alors, on attend avec impatience ce que la nouvelle décennie nous réserve !

– Avant de parler du nouvel album, pourquoi avoir quitté Nuclear Blast pour Napalm Records ? Votre collaboration ne répondait plus à vos attentes ?

Nuclear Blast a récemment été rachetée par un grand conglomérat de médias et ils ont procédé à un changement complet de personnel dans tous les départements. Nous avions la possibilité d’aller chez Napalm Records et nous avons pensé que c’était le moment idéal. Nous espérons beaucoup des nombreuses années à venir chez Napalm. Ce sont vraiment des gens formidables !

– Il y a quelques années, en 2014, vous avez aussi quitté votre Islande natale pour le Danemark. C’était devenu compliqué pour vous de tout gérer depuis votre île ?

C’est tout simplement impossible sur le plan logistique, notamment pour les tournées, car il faillait toujours s’envoler vers et depuis l’Islande. Nous avons eu la chance de pouvoir déménager au Danemark et de vivre juste à côté de la frontière allemande. Alors, c’est ce que nous avons fait. Nous y sommes restés deux ans et nous avons fait en moyenne 80 à 90 concerts par an, ce qui n’aurait jamais été possible depuis l’Islande. Nous voulions juste jouer tous les spectacles qui présentaient, peu importe d’ailleurs le tarif ou le nombre de spectateurs. Maintenant, c’est un peu différent, nous sommes plus établis et que nous pouvons choisir avec une plus grande liberté.

– THE VINTAGE CARAVAN présente aussi un line-up stable depuis le départ de votre premier batteur. Le côté solaire et positif de votre musique vient-il aussi de cette sérénité acquise dans la durée ? Vous vous connaissez très bien tous les trois…

Nous avons le même line-up maintenant depuis environ 6 ans, ce qui est vraiment agréable. Le changement de batteur a été une situation très stressante, il a donc fallu un certain temps pour s’adapter. Mais maintenant, nous nous sommes posés et avec ce deuxième album avec ce même line-up, nous savons comment travailler ensemble plus simplement, tout en restant très concentrés pour obtenir le meilleur résultat.

– L’ADN du groupe réside dans ce groove incroyable guidé par des influences très 70’s, Psych et progressive. Vous qui n’avez pas connu cette époque très créative, comment êtes-vous tombés amoureux de ce style et que lui trouvez-vous de si pertinent ?

La musique qui vient de cette époque est tout simplement incroyable et aussi très diversifiée. Il y a une grande liberté qui s’entend sur les albums Prog qui sont sortis comme King Crimson, Yes, Rush et beaucoup d’autres. C’est juste quelque chose qui a toujours résonné en nous. Mais il y a aussi beaucoup d’influences modernes et, honnêtement, je pense qu’il n’y a pas de groupe de Rock qui ne soit pas, au moins un peu, influencés par les groupes des années 70, à savoir Led Zeppelin, Black Sabbath, Jimi Hendrix, etc.

– Sur ce nouvel album, on sent qu’un cap a été franchi dans les compostions comme dans les arrangements, qui sont beaucoup plus riches que sur « Gateway » notamment. C’est aussi votre sentiment ?

Bien sûr, nous nous efforçons toujours d’être meilleurs dans ce que nous faisons et cela implique bien sûr les compositions, mais aussi les arrangements. Personnellement, cela fait longtemps que je ne me concentre plus sur le simple fait de devenir un meilleur bassiste. Maintenant, il s’agit plus concrètement de comprendre l’espace et la profondeur qui accompagnent les morceaux et les enregistrements, ainsi que d’essayer de créer des chansons qui n’ont pas de points faibles en termes de flux. C’est le processus actuel et j’espère qu’avec le prochain album, nous serons encore meilleurs !

– Sur « Monuments », on retrouve les ingrédients de THE VINTAGE CARAVAN avec des envolées très Hard Rock, parfois Metal, et cette fois il y a aussi un côté Stoner plus prononcé. Et c’est vrai que votre style s’y prête bien. C’est un registre que vous vouliez explorer depuis longtemps ?

Je pense que nous avons atteint le sommet dans notre côté Stoner Rock avec « Arrival ». Il y a énormément d’influences sur ce nouvel album avec notamment du Rock, du Metal et du Stoner, mais aussi beaucoup de Funk, de Jazz, voire de Hip-Hop. Nous avons tous des goûts musicaux assez variés, donc cela finit par être un joli melting-pot. C’est parfois difficile de déterminer d’où tout cela provient, mais c’est une bonne chose car je pense que cela signifie que nous nous ressemblons de plus en plus, et que notre style est de plus en plus personnel.

– Un mot aussi sur la production de « Monuments » qui est dense et massive. Dans quelles conditions avez-vous enregistré l’album, et aviez-vous des exigences particulières quant à sa couleur sonore ?

Oui, il s’est passé beaucoup de choses, et nous avons eu beaucoup de chance de retravailler avec Ian Davenport (Band of Skulls, Gaz Coombes, Philip Selway, etc …), qui a fait un excellent travail de production et de mixage. L’album a été enregistré dans les fameux studios de Hljóðriti en Islande, qui a un caractère sonore très spécial et un matériel à peine croyable. Alors, nous avons passé de longs moments à expérimenter pendant les 22 jours que nous avons passés là-bas.

– Justement, vous venez d’annoncer les dates de votre prochaine tournée en 2022, avec d’ailleurs quatre passages par la France. Vous qui êtes véritablement un groupe de scène, vous devez être plus qu’impatients, non ?

Bien sûr, nous avons hâte de remonter sur scène. Nous attendions juste le bon moment. C’est une situation difficile, car les concerts ont été reportés si souvent qu’il était presque difficile de croire que les tournées allaient reprendre un jour !

« Monuments » est disponible depuis le 16 avril chez Napalm Records.

Retrouvez la chronique de l’album : https://rocknforce.com/the-vintage-caravan-une-eruption-irresistible/

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Doom Stoner/Desert

Moon Coven : cerné par une brume épaisse

Sur un groove dark et des fulgurances Fuzz démonstratives et massives, MOON COVEN surgit avec un Stoner très Doom et Psych, dont la précision et l’efficacité viennent souligner l’expérience acquisse par les Suédois en seulement trois albums. « Slumber Wood » est d’une rare noirceur, dont on a bien du mal à se défaire.

MOON COVEN

« Slumber Wood »

(Ripple Music)

Après cinq ans d’absence, MOON COVEN est de retour sur le devant de la scène avec un troisième album, qui montre encore une belle évolution dans le style des Suédois. Suite à « Amanita Kingdom » puis à un second album éponyme, le quatuor semble désormais délaisser quelque peu son Stoner pour un Doom plus marqué. Plus Metal dans l’approche, les Scandinaves sont plus ombres encore (« Eye Of The Night », « Potbelly Hill »).

Plongé dans une épaisse brume, MOON COVEN promet et garantit un voyage au cœur du Doom le plus profond grâce à un son lourd et très Psych. Guidés par leur guitariste et chanteur David Leban, les Suédois sont de plus en plus mystiques et leur registre se pare même de sonorités orientales sur certains titres, tout en présentant un travail remarquable sur les guitares (« Further », « Bahgsu Nag »).

Très Fuzz, le quatuor n’a pas pour autant délaissé ses racines Stoner aux riffs aiguisés et aux ambiances aériennes (« My Melting Mind », « Ceremony », « Seagull »). Le chant toujours aussi lointain et écorché donne une dimension très 70’s à ce nouvel album qui révèle autant de surprises à chaque écoute. MOON COVEN livre un très bon troisième album et travaille déjà sur le suivant. Les Suédois sont en forme !