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International Technical Thrash

Coroner : creative theory [Interview]

32 ans ! Que l’attente fut longue, mais que l’offrande du power trio suisse est belle ! Officiellement reformé en 2010, il n’a pourtant pas été question de nouvelles compositions avant un interminable moment, juste de quelques apparitions scéniques. Ce sixième album vient donc sceller le retour du groupe également en studio, et on se sentirait presque au lendemain de la sortie de « Grin ». Le style de CORONER est décidemment indémodable, inégalable et paré d’une production actuelle, il fait toujours office de mètre étalon. « Dissonance Theory » est véloce, massif et puissant et le Technical Thrash des Helvètes parvient encore à s’élever, ce dont une majorité de groupes rêverait. Grand architecte du combo depuis ses débuts, le guitariste Tommy Vetterli revient sur les décennies écoulées et livre sa vision de ce nouvel opus, comme de son registre atypique et si personnel.

– La première question que j’ai envie de te poser est de savoir de quelle manière la pression de cette attente s’est traduite pour vous ? A-t-elle été une source de motivation, voire d’inspiration ?

Tu sais, en fait, on s’est réuni une première fois en 2011 et on voulait juste faire quelques concerts. Ensuite, il y a 14/15 ans, Mark (Edelmann aka ‘Marquis Marky’, batterie – NDR) a décidé d’arrêter. Mais Ron (Broder, chant et basse – NDR) et moi avions vraiment envie de continuer, car on y prenait beaucoup de plaisir. Alors bien sûr, nous étions un peu obligés d’écrire de nouveaux morceaux à ce moment-là. Evidemment, il y a eu un peu de pression avant de s’y mettre. On s’est demandé comment cet album devrait être, ce genre de questions. Mais je me suis assez rapidement rendu compte que cela n’avait aucun sens de regarder dans le passé. Je n’avais pas envie de réécrire un nouveau « R.I.P. » (sorti en 1987 – NDR). Nous sommes 40 ans plus tard, et je suis aussi une personne différente. Tu sais, on a toujours écrit pour nous, et non pour le public. C’est aussi pour ça que notre musique a toujours été un peu bizarre. (Sourires) On a juste pris notre temps et patienter un peu…

– En 30 ans, vos vies ne se sont pas arrêtées et chacun d’entre-vous a développé divers projets et activités. Que s’est-il passé après « Grin » ? Y a-t-il eu une forme de lassitude chez CORONER ?

Oui, nous nous sommes arrêtés en 1996. Après notre dernier concert, le manageur de Kreator m’a contacté et m’a demandé si je voulais rejoindre le groupe. J’ai donc joué dans Kreator pendant quatre ans. Ensuite, j’ai joué avec Stephan Eicher durant quelques années aussi. Finalement, j’ai toujours été très occupé ! Après, au début des années 2000, j’ai arrêté la guitare pour me concentrer sur la production. J’ai travaillé dans un grand studio, qui est d’ailleurs celui où je suis aujourd’hui. Par la suite, j’ai rencontré le groupe 69 Chambers, qui était celui de mon ex-femme. J’y suis allé pour leur donner un coup de main, un peu comme un roadie d’ailleurs ! (Rires) J’avais juste fait un titre comme ça pour m’amuser et j’y suis resté en fin de compte. Et j’ai donc recommencé à jouer…

– Chaque album de CORONER est d’une incroyable minutie, tant au niveau de la composition que de la production. Depuis combien de temps travaillez-vous sur « Dissonance Theory », et est-ce que ce sixième opus vous a demandé plus d’effort ?

J’ai commencé à écrire en 2015 et c’était d’ailleurs sur l’ouverture du riff de « Renewal ». Mais tu vois, j’ai terminé le morceau cette année, ou en fin d’année dernière. Cela a pris beaucoup de temps, et cela s’est aussi passé par blocs. Cela vient du fait que j’ai travaillé pendant très longtemps comme producteur. J’ai fait environ 60 albums durant cette période de pause du groupe. Par exemple, j’en ai fait deux pour Eluveitie et ils étaient en studio pendant deux ou trois mois, et je ne pouvais pas jouer de guitare à ce moment-là. Quand ils sont partis, il m’a fallu quelques jours pour réapprendre à jouer et retrouver mes marques sur ma guitare. Ensuite, j’ai aussi du retrouver le bon rythme et le bon état d’esprit pour composer. Pour diverses raisons, je n’arrivais pas à le faire dans mon propre studio car, dans chaque coin où je posais les yeux, j’y voyais toujours du travail. J’ai donc dû prendre quelques jours et je suis allé dans la montagne, tout seul, et tout s’est remis à fonctionner normalement. Ensuite, un nouveau groupe est arrivé et cela m’a freiné à nouveau. C’est la raison pour laquelle cela m’a pris dix ans. Et puis, il y a la vie aussi qui s’en mêle : des amis sont décédés, mon père est mort, j’ai divorcé de ma femme et après il y a aussi eu le Covid. Ca fait beaucoup, d’autant qu’on voulait vraiment faire un super album !

– « Dissonance Theory » est aussi le premier album avec Diego Rapacchietti (69 Chambers) à la batterie. Est-ce que son arrivée a elle aussi apporté une nouvelle impulsion à CORONER, sachant le rôle primordial de la rythmique chez vous ?

Oui, mais tu sais, je connais Diego depuis longtemps, bien avant qu’il ne joue avec 69 Chambers. J’avais beaucoup travaillé avec lui sur différentes productions dans mon studio. C’est un véritable batteur de session. Il est capable de jouer tous les styles que ce soit de la Pop ou du Metal… Il sait tout faire ! Lorsque nous avons travaillé pour la première fois ensemble, c’était il y a une vingtaine d’années. Nous partageons une forte connexion tous les deux. Pour moi, c’était une évidence qu’il devienne le nouveau batteur de CORONER quand Marky est parti. Et, étant donné qu’il peut absolument tout jouer, cela a été une grande liberté pour moi au niveau de la composition.

– Lorsqu’on a connu, comme moi, le groupe à ses débuts, la première écoute de « Dissonance Theory » a été un moment très particulier, entre une énorme impatience et aussi peut-être une certaine crainte, car on s’imagine légitimement toutes sortes de choses. Or, c’est un album qui est d’une incroyable fluidité et surtout qui n’a absolument rien de passéiste. L’idée était-elle de vous concentrer sur les envies de CORONER en 2025 ?

En fait, j’ai toujours eu les sonorités de l’album en tête, ainsi que la manière dont cela devait être assemblé. Tout d’abord, je voulais une production moderne, car cela sonne mieux que les anciennes. Quand c’est bien fait, en tout cas. Nous avons utilisé diverses machines actuelles, mais avec une approche un peu à l’ancienne. Aujourd’hui, beaucoup de groupes font juste deux prises et les retravaillent pendant des heures. De notre côté, nous avons préféré les refaire jusqu’à ce que nous soyons pleinement satisfaits du résultat. Nous n’avons pas réédité les choses à l’infini. Pas du tout, et même bien au contraire. Cette manière de faire nous a permis d’obtenir un son très moderne avec une approche Old School et je pense que toute la sensibilité de l’album s’en ressent.

– Ce qui est aussi fascinant sur « Dissonance Theory », c’est qu’il n’y a aucune redite et qu’il possède donc cette touche très moderne, fidèle à l’avant-gardisme dont vous avez toujours fait preuve. Pourtant, le CORONER du XXIème siècle est très brut et organique. C’était important aussi pour toi de garder cette grande proximité dans le son et la production ?

Oui, absolument, c’était vraiment très important. Nous avons pris beaucoup de temps pour enregistrer et trouver les différentes sonorités, car nous voulions juste faire le meilleur album possible. Nous avons utilisé uniquement des choses authentiques, de vrais amplis et même pour les claviers, ce sont de véritables Hammond. Tout ça sort directement des amplis et cela nous a bien sûr demandé beaucoup de temps. Mais nous voulions vraiment un disque chaleureux et honnête, pas quelque chose d’artificiel. C’était vraiment le plus important dans tout le processus.

– L’une des impressions qui domine aussi sur l’album est cette facilité dans votre jeu. Pourtant votre Technical Thrash est souvent très complexe. De quelle manière parvenez-vous à le rendre aussi abordable et évident ?

En fait, je pense que la différence principale avec ce que vous avons produit par le passé, c’est que nous ne jouons pas de manière très technique juste pour offrir un rendu esthétique pointu. Auparavant, nous voulions toujours montrer au monde entier que nous répétions beaucoup et que nous étions très forts techniquement dans le jeu. Peut-être trop démonstratifs d’ailleurs. Aujourd’hui, c’est surtout le côté émotionnel de la musique qui nous importe le plus, pas sa complexité. Donc, on se retrouve très bien dans ce Thrash Old School, et on ne le fait pas pour la façade.

– A l’écoute de votre nouvel album, vous donnez l’impression d’être littéralement dans votre monde, car vous ne ressemblez à personne et aucun nouveau groupe ne cherche d’ailleurs à vous ressembler. Vous coupez-vous volontairement de toute influence extérieure, ou est-ce que CORONER ne change pas, mais ne cesse juste jamais d’évoluer ?

Ah ! Tu sais, évidemment que j’écoute les nouveaux groupes et ce qu’ils font. Mais je pense que cela a déjà été fait. Je pense qu’il y a un vrai problème aujourd’hui. Beaucoup de nouvelles formations ont le même son, la même production, les mêmes plugins, des riffs similaires… Et ça ne m’intéresse pas du tout. CORONER est notre groupe, notre art et nous ne voulons bien sûr copier personne. Evidemment qu’il peut y avoir quelques influences aussi chez nous. Peut-être que certains accords ressemblent à d’autres, mais c’est aussi difficile de réinventer tout ça. Tu sais, nous composons avec notre cœur et voilà simplement ce qu’il en ressort ! (Sourires)

– Enfin, c’est très rare qu’un groupe fasse un tel retour. « Dissonance Theory » est tellement enthousiasmant, spontané et honnête qu’on ne souhaite qu’une seule chose, c’est que CORONER entame une deuxième partie de carrière la plus longue possible. Qu’est-ce ce que vous avez à l’esprit en ce moment ? Le retour des fans ? Les concerts à venir ?  

Oui, nous avons aujourd’hui une super équipe de management, une nouvelle agence de booking pour l’Europe et les Etats-Unis, comme pour le reste du monde. Tu sais, nous portons beaucoup d’espoir dans ce nouvel album de CORONER et nous souhaitons vraiment lui donner la meilleure exposition possible. Nous voulons jouer au maximum et le plus longtemps possible ! (Sourires) En ce moment, nous sommes tous très excités et motivés, d’autant que quelques festivals sont déjà confirmés. Et il y a encore beaucoup de choses en cours ! Nous voulons juste jouer le plus possible et que 2026 soit une très belle année ! (Sourires

Le nouvel album de CORONER, « Dissonance Theory », est disponible chez Century Media Records.

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Doom Post-Metal Sludge

Coltaine : un flot d’émotion

Il y a quelque chose d’inaccessible dans la musique de COLTAINE. Si une certaine tristesse domine, elle est aussi le moteur de l’imagination débordante des Allemands. Porté par le magnétisme de la voix de sa chanteuse, ce deuxième effort apporte beaucoup de certitudes sur l’art du dépassement, qui tangue dans le bercement d’un post-Metal qui pousse le Doom et le Sludge dans leurs derniers retranchements. « Brandung » emprunte des courants et des flux, qui débouchent sur une singularité assez rare. Une odyssée captivante.

COLTAINE

« Brandung »

(Lay Bare Recordings)

Fondé en 2022 dans les profondeurs de la Forêt Noire, un lieu à l’univers brumeux a priori mystique, COLTAINE semblait dès le départ avoir beaucoup de choses à dire. En effet, un an après son premier album, « Forgotten Ways », le revoici avec « Brandung » et toujours aussi inspiré. Dans un registre très personnel, le quatuor est guidé par une profonde mélancolie et celle-ci lui permet de transcender les genres. Si l’on considère le post-Doom Metal comme sa base, les volées post-Rock et les fulgurances Sludge et Blackgaze sont aussi très présentes.

Pourtant, tout l’attrait de COLTAINE réside dans sa diversité plus que dans sa complexité. Le jeu du groupe est direct et organique, loin de toutes fioritures mais aux arrangements soignés. Quittant leur dense forêt pour axer « Brandung » sur le concept de l’océan, la formation allemande s’approprie un autre monde, tout aussi captif et impénétrable, celui de la mer, de sa houle et de ses vagues submersives. Et dès l’intro, « Tiefe Wasser », en forme de comptine, on quitte la surface pour des abysses musicaux captivants.

Julia Frasch (chant), Moritz Berg (guitare), Benedikt Berg (basse) et Amin Bouzeghaia (batterie) nous plongent dans une immersion ténébreuse à travers des atmosphères prenantes et des reliefs sonores d’une grande variété. Les riffs incisifs, la rythmique polymorphe et le chant aérien de sa frontwoman font de COLTAINE une entité hors-norme, dont la créativité défie les genres (« Keep Me Down In The Deep », « Wirbelwind », « Maelstrom », « Brandung », « Solar Veil »). Un dépaysement affrontant le Metal avec talent.

Photo : Daniel Kilgus

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Death Metal Doom

God’s Funeral : blackened procession

Avec « El Despertar Dels Morts », c’est l’extrême douleur et la souffrance déclenchées par la Grand Guerre qu’a voulu dépeindre GOD’S FUNERAL. A travers un Doom Death constitué de riffs tranchants, d’une rythmique en suspension, mais massive, et des parties vocales dévastatrices, les Espagnols s’affirment avec force sur ce premier opus complet, en s’engouffrant à l’occasion dans un Funeral Doom, qui va puiser dans les abysses du Metal pour en extraire ce qu’il y a de plus noir et désespéré.

GODS’ FUNERAL

« El Despertar Dels Morts »

(Meuse Music Records)

Valeur sûre du Doom Death catalan, le trio formé en 2016 a pourtant du faire ses preuves avant de s’imposer d’abord dans l’underground local. Et pour cela, GOD’S FUNERAL a quelque peu modifié son approche, passant d’un mix explosif teinté d’un Black Metal agressif au Death Doom qu’il propose aujourd’hui sur « El Despertar Dels Morts » à travers lequel il se meut dans une approche beaucoup plus lente du Metal. S’il n’était si lourd et pesant, on pourrait presque l’imaginer dans une sorte de ténébreuse apesanteur.         

Après une première démo en 2017 (« El Cristo De La Trincheras »), suivi de cinq splits et d’un EP, GOD’S FUNERAL sort enfin son premier album, reflet d’une expérience patiemment acquise au fil des années. Et pour ce long format, Abel Lara (vocaux, basse), Iban Morales (guitare) et Sergi Laboria (batterie) ont ouvert les portes de leur sombre univers pour laisser y pénétrer un peu de lumière. Rien d’aveuglant pour autant, car les claviers d’Eva Molina et le violon de Núria Luis à l’œuvre ici restent très mélancoliques.

Sur le thème de la première guerre mondiale, les Hispaniques se présentent avec cinq morceaux d’une longueur de sept à treize minutes, de quoi installer une ambiance et gagner en intensité. Le growl profond et menaçant du frontman vient accentuer une atmosphère de souffrance, d’où émanent quelques variations bien senties comme l’orgue d’église sur « Itaca ». Le très martial « La Processó De La Ombres » apporte un peu plus de percussion et « Fossa Comuna » et ses chœurs ferment ce prmier chapitre très prometteur de GOD’S FUNERAL.

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Doom Occult Rock

King Witch : Scottish mist

C’est avec beaucoup de mordant, mais aussi des refrains bien sentis, que KING WITCH revient deux ans après son dernier méfait avec un troisième opus qui devrait mettre tout le monde d’accord. Entre Heavy Doom et Occult Rock, « III » s’engouffre dans des méandres très maîtrisés et, grâce à une chanteuse au sommet de son art et des parties de guitares variées et saisissantes, la lumière sort parfois de l’ombre et ce disque s’impose déjà comme l’une des pépites de l’année.

KING WITCH

« III »

(Listenable Records)

Transperçant les brumes écossaises Depuis une dizaine d’années maintenant, KING WITCH surgit avec, comme son nom l’indique, son troisième et sûrement son meilleur album. Après « Under The Mountain » (2018) et « Body Of Light » (2023), c’est sous une formule en trio (sur le papier) qu’il se présente et « III » vient déjà se classer parmi les réalisations incontournables du style. Franchement hors-norme à bien des égards, ce nouvel opus est incroyable de finesse, hyper-Heavy, créatif et immersif d’un bout à l’autre.

C’est aussi peut-être les quelques changements de line-up qui apportent cet élan de fraîcheur. Si l’on retrouve le duo fondateur composé du couple Laura Donnely au chant et Jamie Gilchrist à la guitare et à l’enregistrement, c’est désormais Rory Lee qui officie à la basse, tandis qu’Andrew Scott a assuré les sessions de batterie en studio. Et l’équilibre artistique de KING WITCH est plus solide que jamais. L’osmose est évidente et la multitude d’atmosphères et la force des compositions rayonnent littéralement.

Dans une ambiance occulte, la formation d’Edimbourg ouvre les hostilités avec « Suffer In Life », un titre progressif et tout en lourdeur, qui n’empêche pas sa frontwoman d’afficher sa puissance vocale. Et de ce côté-là, Laura Donnely est sans aucun doute l’une des meilleures de sa catégorie, et de très loin. Le Heavy Doom de KING WITCH est très accrocheur, lancinant et féroce et les mélodies distillées sont lumineuses (« Swarming Flies », « Sea Of Lies », « Behind The Veil », « Diggin In The Dirt », « Last Great Wilderness »). Renversant !

Photo : Simon Anger

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Groove Metal Heavy metal Thrash Metal

Byzantine : en mode guerrier

Malgré un parcours assez chaotique, les Américains sont bel et bien dans une dynamique franchement explosive et cette nouvelle réalisation est peut-être même leur meilleure. Entre Thrash et Groove Metal, le quintet reste très Heavy et « Harbingers » vient couper court à tous débats concernant ses velléités. A mi-chemin entre Lamb Of God et Testament, BYZANTINE sort l’artillerie lourde et se montre aussi complexe dans la forme qu’efficace dans le fond. Radical !

BYZANTINE

« Harbingers »

(Metal Blade Records)

25 ans de carrière, trois splits et un septième album attendu depuis huit ans pour les vétérans de cette fameuse New Wave Of American Heavy Metal, qui a commencé à faire parler d’elle au début des années 2000 justement. Si BYZANTINE a toujours cultivé son côté underground, il se pourrait bien qu’il passe enfin à la vitesse supérieure, ce qui serait amplement mérité. Il faut dire que « Harbingers » est le concentré parfait de ce que la bande du frontman Chris Ojeda sait faire de mieux.  

Avec Peter Wichers (Soilwork, Nevermore) à la production, le quintet a trouvé l’homme de la situation. Très moderne dans l’approche, le Metal de BYZANTINE est chirurgical et technique, sans renier pour autant l’aspect mélodique qui renforce son côté fédérateur. Teintés de Groove Metal, de Thrash et mâtinés de touches Heavy, les neuf morceaux de « Harbingers » percutent sans détour et s’offrent même quelques tonalités Indus. Et cette férocité se fond dans une irrésistible fluidité.

Profondément sombre, ce nouvel opus de la formation de Charleston est direct, véloce et bien rentre-dedans. Cependant, BYZANTINE a aussi pris soin de laisser respirer ses titres grâce à des passages plus calmes sur des guitares claires. Et puis, son chanteur est d’un impact incroyable. Naviguant entre des riffs menaçants et des solos millimétrés, son spectre vocal s’adapte parfaitement en s’aventurant même sur un terrain plus guttural bien maîtrisé et soutenu par une paire basse/batterie démoniaque. Un sommet du genre !

Photo : Jason Adams

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Ambient Ethnic Neo-Folk

Nytt Land : The beating heart of the steppes

Bien avant l’éclosion du néo-Folk teinté d’Ambient qui déferle depuis quelques temps maintenant, NYTT LAND avait entrepris de restituer musicalement la riche Histoire de ses ancêtres. A l’instar de la démarche de Wardruna en Scandinavie, ce sont leurs terres natales de Sibérie que les Russes mettent en avant avec l’objectif de protéger et de partager un patrimoine culturel, qui mêle incantations, ésotérisme, animisme et où les esprits habitent littéralement ce « Songs Of Th Shaman » créatif, saisissant et authentique.

NYTT LAND

« Songs Of The Shaman »

(Prophecy Productions)

Depuis sa création en 2013, NYTT LAND a sorti une petite dizaine d’albums et chacun d’entre-eux est une plongée dans la culture sibérienne, et plus particulièrement dans ses rituels, ses textes et ses chants. Avec « Songs Of The Shaman », il nous emporte hors du temps, dans un espace où règnent les esprits et où même les dieux ne s’aventurent pas. Natalia Pakhalenko (chant, tambours) et son mari Anatoly (chant, talharpa, flûtes, percussions, guimbarde) se mettent au service de leur terre et de ses traditions.

En plus d’être des musiciens expérimentés et très investis, le duo mène aussi des recherches poussées et son travail d’historien est basé sur ses activités scientifiques, à savoir l’étude et la préservation de son ancestral passé. NYTT LAND s’en tient rigoureusement à un matériel directement issus des peuples autochtones. Son implication est complète et la musique qui vient enrober l’ensemble est le fruit de ses propres compositions. Autant dire que l’héritage s’entretient et se perpétue minutieusement et très consciencieusement.

Qualifier le répertoire de NYTT LAND d’immersif est un doux euphémisme. C’est une plongée hypnotique dans un monde chamanique, où la nature et ses sonorités tiennent une place aussi importante que les écrits spirituels de ces communautés reculées. Il y est question de sorts, de mystères et de légendes reproduits avec des techniques comme le chant de gorge sur des rythmes proches de la transe. « Songs Of The Shaman » traverse des paysages sonores aux reliefs parfois hallucinatoires et avec une fluidité envoûtante, presque magique.

Photo : Olga Gellert

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Crossover Sludge Stoner Metal

Tigerleech : sans compromis

Avec «  Bicephalous », les Français donnent leur vision d’un Crossover réinventé sur une base Stoner, où le Sludge, le Metal, le Doom et le HxC cohabitent en toute harmonie. Complet et très nuancé, ce nouvel effort de TIGERLEECH est pourtant très direct, alerte et prend à bras le corps les sujets sociétaux sans tergiverser. Intense et percutant, ce deuxième opus redonne des couleurs et des perspectives à un registre, qui n’a pas encore livré tous les secrets et sa potentialité.

TIGERLEECH

« Bicephalous »

(Octopus Rising/Argonauta Records)

Cela fait un peu plus de dix ans que TIGERLEECH secoue l’underground hexagonal et ce troisième album va encore dans ce sens, avec peut-être même plus de fermeté. Et s’ils ont apporté quelques évolutions musicalement, les Parisiens ont également remanié leur line-up et accueillent un second guitariste sur ce bouillonnant « Bicephalous ». Le mur de guitare s’est donc renforcé, en phase avec l’écrasant duo basse/batterie et le frontman très en verve et revendicatif, qui mène le combo avec force et beaucoup d’aplomb.

Ayant explosé sur la scène française avec l’excellent  « Melancoly Bridge », il y a quatre ans, TIGERLEECH avait entrepris de belle manière un virage plus mélodique dans son Stoner Sludge et cela lui avait franchement réussi. Nouveau changement de direction donc sur ce « Bicephalous » nettement plus radical et abrasif. Mais on ne saurait s’en plaindre, tant le quintet maîtrise son sujet et nous renvoie à cette époque bénie du Crossover. Très Metal, il reste Sludge bien sûr, mais libère aussi des éclats Hard-Core très 90’s.

Sur une production très actuelle, les références à Body Count surtout, mais aussi dans une certaine mesure à RATM et Suicidal Tendencies dans l’esprit, sonnent le retour à une efficacité tranchante et engagée. Avec de subtils éléments post-Rock, TIGERLEECH montre aussi ses capacités à entrer dans le détail tout en assénant de lourdes charges (« When You Cross The Border », « King Of The White Castle », « The Art Of Do It Yourself », « 321 Ignition » et le morceau-titre). Ce retour est fracassant et frontal, donc réjouissant !

Retrouvez aussi la chronique du premier album :

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France Post-HardCore

Point Mort : polymorphic-core [Interview]

Toujours aussi abrasif, mais emprunt cette fois de beaucoup plus de sensibilité, le deuxième album des Parisiens a de quoi surprendre pour qui les suit depuis leur premier EP « Look At The Sky » sorti en 2017. Le style s’est affiné, bien sûr, mais il a aussi gagné en diversité sonore, en impact et se veut nettement plus libre aussi dans l’écriture. Jouant sur les émotions, POINT MORT passe de la lumière à la noirceur absolue d’un claquement de doigt avec une cohérence déroutante. Avec « Le Point De Non-Retour », le quintet affiche une polyvalence de chaque instant, doublée d’une fermeté imparable dans son déroulé. Quelques jours avant sa sortie, Damien Hubert (basse), Olivier Millot (guitare) et Sam Pillay (chant) reviennent sur leurs envies artistiques, l’évolution du groupe et la conception de ce nouvel opus.

– Vous sortez votre deuxième album, « Le Point De Non-Retour », après deux premiers EPs et des prestations scéniques aussi nombreuses qu’explosives. Et puis, POINT MORT a aussi franchi la décennie d’activité. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur ce parcours de dix ans d’existence ?

Damien : On regarde assez peu en arrière et d’ailleurs, on ne joue d’ailleurs pas beaucoup d’anciennes chansons en live. On a aussi beaucoup fait évoluer la musique du groupe au fur et à mesure du temps, et nous avons aussi changé, ce qui fait qu’on ressasse assez peu les événements passés du groupe au final ! 

– Depuis vos débuts, vous avez habillement enrichi et fait évoluer votre post-Hardcore, et POINT MORT reste unique en son genre avec de multiples facettes que vous nourrissez de nombreux styles. Comment procédez-vous justement pour garder une identité si forte ?

Damien : Il n’y a pas de recherche d’identité particulière. J’ai surtout l’impression que sur les textes, la compo, les visuels, on travaille sur ce qui nous parle nous et comme on est plusieurs avec des goûts différents, ça donne cette mixture. Ce qui fait qu’on est vraiment  très content quand quelqu’un clique avec nous, mais la contrepartie c’est que ça ne parle pas à tout le monde. 

Olivier : Rien n’est prémédité. Quand il y a une envie, on décide d’y aller jusqu’au bout. Peu importe si cela colle, ou pas, avec le style dans lequel on est affilié.

– Pour « Le Point De Non-Retour », vous avez de nouveau fait appel au duo Sauvé/Chaumont pour l’enregistrement, le mix et la production. Vous donnez l’impression de grandir ensemble et d’ailleurs, un palier est encore franchi. Quelle était votre ambition première pour ce deuxième album, tant au niveau de la composition que du son ?

Damien : Moins de dissonances et de guitares zinzins, plus de travail sur les voix, mais tout autant de structures à tiroir et de ‘trucs-alambiqués-qui-s’entendent-pas-à-la-première-écoute’. Moins de musique aussi en durée à enregistrer aussi, y’en a marre des albums de plus de 50 minutes !

Olivier : Quand j’ai commencé à écrire cet album, je voulais plus de lisibilité dans la narration et accentuer le côté ‘cinématographique’ des morceaux. Aussi, de prendre le temps pour aller plus loin dans les arrangements des voix et qu’il y ait plus de matière au mixage. Effectivement, on progresse ensemble avec Amaury et Thibault. La communication est plus simple et directe, donc on va plus vite. En plus, pour cet enregistrement, on a eu Etienne Clauzel, qui a complété cette fine équipe.

– Ce nouvel album va bien plus loin que « Pointless… » dans les contrastes notamment. Il est à la fois plus massif et percutant d’un côté et il aborde aussi un aspect plus mélodique et très poétique au niveau des textes. C’est un équilibre que vous avez longtemps cherché, ou s’est-il finalement fait assez naturellement ?  

Damien : Olivier et Sam ont trouvé cet équilibre-là ensemble, puisqu’ils sont les principaux compositeurs et auteurs de tout ce bazar. Rien n’est laissé au hasard. Mais oui, je crois que c’est quelque chose qu’on cherchait depuis quelques années quand même, et on a pris le temps de développer ce côté mélodique.

Olivier : Avec Sam, on voulait plus de chant clean, plus de mélodies, plus de contrepoint ! J’ai beaucoup réécrit les instrus en fonction de ce que Sam composait sur les démos. Comme disait Damien, je ne voulais plus écrire de lignes de guitare/basse qui partaient dans tous les sens. Je voulais que cela soit plus compact, sans perdre cette idée de contrepoint pour les instruments également. Donc, le tout sonne forcément plus massif ! 

– Est-ce qu’on peut parler d’album-concept pour « Le Point De Non-Retour » parce que, si les morceaux ont des durées très différentes et font même parfois le grand écart, il y a un vrai fil directeur et beaucoup de cohésion dans le déroulé ?

Damien : Pas de concept-album, mais des thèmes qui se recoupent, puisque c’est Sam qui écrit les textes. Après il y a une cohérence dans cet album, mais rien qui peut le rattacher à un concept-album.

Olivier : Je dis cela à chaque album, mais pour moi, c’est un seul morceau, découpé en mouvements, comme dans un concerto.

– Comme toujours, vous ne manquez pas d’audace, puisqu’après une intro aux saveurs Electro, vous ouvrez l’album avec « An Ungrateful Wreck Of Our Ghost Bodies », long de dix minutes. Comment prend-on une telle décision ? Ce n’est pas banal… 

Damien : Certains auraient dit qu’ils ont eu une idée de génie comme ça en buvant leur café le matin. Alors que c’était en buvant une tisane le soir. Non, comme d’habitude, rien n’est laissé au hasard, pas d’épiphanie, mais une fois que ce début d’album a été envisagé comme ça, ça n’a jamais plus évolué.

Olivier : C’est simple, c’est le premier morceau que j’ai écrit en pensant qu’il ouvrirait l’album. L’idée de l’intro est venue plus tard !

– Sam, vocalement, on retrouve ta grande polyvalence et cette fois, le chant clair et mélodique est aussi beaucoup plus présent. On te découvre même un peu plus, je trouve. C’était une condition pour réussir à délivrer plus d’émotion dans ces nouveaux morceaux ?

Sam : C’était un postulat de départ. On voulait plus de chant mélodique et harmonique. D’ailleurs, le dernier morceau de « Pointless… », « Ash To Ashes », annonçait déjà les fondements de cette direction artistique. La partie finale, avec toutes ces voix qui se superposent jusqu’à l’explosion, c’était en quelque sorte les prémices. J’aime varier les voix, les timbres, les interprétations. Cela enrichit forcément le discours. Le chant hurlé, pour l’usage que j’en fais, c’est la rage, la hargne, les tripes. Ça peut être déchirant, mais je pense que le chant clair permet une plus grande palette d’émotions. Quand on parle d’instrument, on dit jouer de la guitare, du piano… Et bien moi, je joue du chant. La variété de chant clair, me permet d’être espiègle, enfantine, suave, exaltée… Et j’en passe. 

– D’ailleurs, en aparté, que penses-tu du nombre croissant de femmes qui se mettent au growl ? Et lesquelles ont tes faveurs, ou t’impressionnent ? 

Sam : Chez les hommes comme chez les femmes, je suis peu impressionnée par le growl. Parce que c’est technique et non artistique. Ce serait comme dire à un chef étoilé que j’aime sa découpe de légumes, plutôt que de lui parler de l’ensemble de sa carte. Ce qui me parle davantage, c’est le timbre d’un chanteur ou d’une chanteuse, ou sa façon de livrer sa voix. J’aime une voix parce qu’elle me touche en premier lieu et du coup le seul point commun entre tous les artistes que j’affectionne, c’est que leur empreinte vocale ou leur musicalité m’émeut, me transporte. 

Concernant le nombre croissant de femmes qui growlent, comment répondre autre chose que c’est bien ? Le fait qu’il y ait plus de femmes, tout instrument confondu, dans la musique, c’est forcément bien. Je dirai même plus, c’est juste normal ! D’ailleurs, je ne vois pas pourquoi la question est adressée seulement à moi, les gars, vous avez des growleuses favorites, vous ?

Olivier : Oui, toi Sam! Je ne vais pas être original,  Julie Christmas forcément ! Pareil pour sa richesse de timbres ! Dans « The Wreck Of S.S Needle » (avec Cult Of Luna en 2016 sur l’album « Mariner » – NDR) son interprétation est stratosphérique !

Damien : Aller, pour ne pas répondre comme Olivier, à l’opposée du spectre, Candace Kucsulain de Walls of Jericho, Hard-Core à fond.

Sam : Je suis d’accord, deux voix et personnalités inspirantes !

– On l’a dit, ce nouvel album est chargé en émotion avec des passages très touchants, ce qui n’est pas si courant dans votre registre. Est-ce à dire que « Le Point De Non-Retour » est plus intime et plus personnel aussi dans son propos que son prédécesseur ?

Damien : Il y a toujours eu beaucoup de ‘personnel’ dans POINT MORT, car on ne cherche jamais la facilité, ni même la simplicité, à aucun moment, ni pendant la phase de compo, ni pendant l’enregistrement. Fatalement, cela fait ressortir des trucs qui font que la musique devient forcément intime. Mais celui-là est encore plus marqué par la personnalité des gens qui l’ont fait. En studio, quand le temps a manqué, on a mis l’accent sur l’artistique quitte à passer outre certaines étapes techniques. Ce n’était pas forcément le cas sur les disques d’avant pour lesquels le temps manquait pour tout ! (Rires)  

Olivier : Oui, il est plus intime et personnel, et surtout sans concession. « Pointless… » avait un côté plus  laboratoire et  patchwork. 

– Sam, c’est également toi qui signes la pochette de l’album qui incarne ‘La dame au cou penché’ liée, bien sûr, à votre dernier single « The Bent Neck Lady ». C’est vrai que le morceau est un moment fort de l’album. Cela a-t-il été une évidence de le mettre en avant ?

Sam : Pas forcément non, car c’est un morceau long. Et pour des raisons pratiques, il est préférable de sortir en single des morceaux courts. Ça passe mieux auprès des plateformes. C’est d’ailleurs pour ça qu’on a créé la version ‘radio edit’. C’est un morceau intense, on voulait vraiment le mettre en avant. Pour l’anecdote, tous les morceaux ont changé trois fois de noms avant d’être figés. Le titre « The Bent Neck Lady » a été trouvé sur la ligne d’arrivée. Ce n’est pas le titre qui a inspiré l’artwork, mais l’artwork qui a inspiré le titre. (Sourires)

Damien : Jetez un œil à au deuxième épisode du documentaire pour voir que ce morceau a été un temps fort de l’enregistrement également.

Olivier : Je confirme !

– Enfin, j’aimerais que l’on dise un mot de vos trois clips qui accompagnent l’album, ainsi que du making-of de sa conception. La vidéo est-elle devenu indissociable de votre musique, surtout aujourd’hui où la visibilité est devenue essentielle sur les réseaux notamment ?

Damien : Je crois qu’on aime bien le travail visuel aussi, vu que tout l’habillage est fait par les membres du groupe. Concernant le making-of, j’ai voulu documenter l’enregistrement de l’album, car je trouve qu’il y a une histoire à raconter, sans filtre, sans survendre ou minimiser quoique ce soit. Pas sûr qu’on refasse ça un jour, puisque c’est un enfer logistique. En effet, il y a plus de 50 heures de rushes et il y avait les caméras à gérer pendant que je jouais, même si pendant deux jours intenses Jessica Salitra est venue vraiment filmer. On a d’ailleurs fait le montage à deux. Pour les trois clips, d’un point de vue visuel, avec du recul, on a du clip classique (la chanson-titre), un truc plus ‘punkoïde’ à tendance nonsensique (« Skinned Teeth »), et enfin une proposition artistique hors du temps et délicate (« The Bent Neck Lady »). Finalement, cela reflète un peu la musique du « Point De Non-Retour », j’ai l’impression.

POINT MORT sortira son deuxième album, « Le point De Non-Retour » le 25 avril chez Almost Famous.

Photos : Jessica Salitra

Retrouvez la première interview du groupe à la sortie de « Pointless… » :

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Doom Doom Rock

Messa : magic waves

Après avoir marqué les esprits grâce à un Doom d’une grande richesse musicale en l’espace de seulement de trois albums (et un Live), les Transalpins sont forcément attendus au tournant. Et il faut admettre qu’avec « The Spin », celui-ci est parfaitement négocié. MESSA étend encore son champ d’action. Le groupe est toujours aussi insaisissable et en sortant de sa zone de confort, il asseoit sa réputation avec élégance, tout en restant percutant et sauvage. Plein de rebondissements, cette nouvelle réalisation résonne avec un instinct hors-norme et un feeling débridé.

MESSA

« The Spin »

(Metal Blade Records)

S’imposer aussi fermement et faire l’unanimité à ce point est assez rare dans le monde du Metal, y compris dans un registre comme le Doom. Pourtant, c’est avec beaucoup de classe et surtout un art du renouvellement impressionnant que MESSA est devenu incontournable. Grâce à des certitudes fortes et un line-up soudé et créatif, les Italiens parviennent avec « The Spin » à se surpasser et à surprendre avec énormément d’habileté et une imagination guidée par une audace que rien ne semble pouvoir freiner.

Toujours aussi atypique, le quatuor a jeté son dévolu sur les années 80 à travers des sonorités et une production signée Maurizio Biaggio (The Soft Spoon, Boy Harsher), qui nous renvoie quelques décennies en arrière. Cela dit, pas question pour MESSA de faire dans le réchauffé. « The Spin » ne manque pas d’originalité et les atmosphères dans lesquelles il se déploie sont toujours aussi envoûtantes. Et si la voix toute en nuances de Sara Bianchin y est pour beaucoup, c’est qu’elle est aussi magnifiquement accompagnée.

Avec une douce saveur vintage, « The Spin » n’en demeure pas moins actuel, ou hors du temps, c’est selon. Mélangeant synthés et grosses guitares dans un spectre allant du Metal au Jazz avec une touche Rock, MESSA s’ouvre de nouveaux horizons. L’univers de ce nouvel opus brille par sa diversité et même s’il semble plus compact, il captive dès la première écoute (« Void Meridian », « At Races », « Fire On The Roof », « The Dress », « Thicker Blood »). Déjà incontournable, le groupe signe un disque marquant et authentique. 

Retrouvez la chronique de l’album Live du groupe sorti il y a deux ans :

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Death Metal Livre

Rotting Ways To Misery : northern Death stories

Si pour la majorité des fans de Death Metal, la scène finlandaise se résume souvent à Amorphis ou Sentenced, elle est en réalité bien plus vaste. Peut-être pas aussi rayonnante que sa voisine suédoise à travers le monde, mais elle ne manque pas d’intérêt et elle a même fortement contribué à l’éclosion du style dans toutes la Scandinavie et au-delà. Les EDITIONS DES FLAMMES NOIRES proposent avec « Rotting Ways To Misery » une belle immersion et un retour sur les fastes années des groupes du grand Nord.

ROTTING WAYS TO MISERY : Histoire du Death Metal Finlandais

Markus Makkonen/Kim Strömsholm

(Editions des Flammes Noires)

Les EDITIONS DES FLAMMES NOIRES, maison de l’extrême s’il en est, se penche cette fois sur l’Histoire du Death Metal Finlandais, une partie incontournable de l’ADN du genre. La version française (et améliorée !) de « Rotting Ways To Misery » est donc la traduction du travail initial de Markus Makkonen, chanteur et bassiste ayant œuvré au sein de Sadistik Forest, Never Saw ou Hooded Menace, ainsi que Kim Strömsholm de Festerday, …And Oceans, Havoc Unit et quelques autres. Acteurs, experts et fins connaisseurs, donc !

Sur près de 500 pages, les deux spécialistes reviennent sur l’Histoire du Death Metal de leur pays et la déferlante commence avec National Napalm Syndicate en 1987 avec une première démo qui a mis le feu aux poudres et embrasé la Finlande. D’ailleurs, une liste très complète des maquettes et albums traités, ou évoqués, dans « Rotting Ways To Misery » figure à la fin du livre, histoire de ne rien manquer. En effet, le texte fourni dans l’ouvrage est très conséquent et on se laisse prendre par le récit passionnant de cette épopée métallique.

Avec les EDITIONS DES FLAMMES NOIRES, la mise en page et les illustrations sont toujours très soignées et, dans le cas de « Rotting Ways To Misery », elles nous replongent fin 80’s et dans les 90’s. En ces temps reculés, le Death Metal était essentiellement relayé par les fanzines et les photos, les flyers et les pochettes des réalisations d’alors sont donc une belle madeleine. Entre les pionniers, ceux qui ont fait carrière et ceux qui n’ont fait que passer l’espace d’un profond growl, l’ouvrage est particulièrement complet. Passionnant ! 

480 pages / 27€ (ou 33€ en édition collector) et disponible sur le site de l’éditeur :