C’est de l’autre côté de l’Atlantique que le bluesman ROBIN TROWER est allé chercher sa nouvelle muse artistique en la présence de SARI SCHORR, rayonnante chanteuse de la ‘Big Apple’. Et cette rencontre fait des étincelles sur ce « Joyful Sky », dont on espère qu’il ne soit pas un simple one-shot. Très Soul et R&B dans l’ensemble, le Blues resplendit à travers la guitare du maître, tandis que sa partenaire multiplie les variations en jetant le trouble sur des titres taillés sur mesure. Du grand art !
ROBIN TROWER featuring SARI SCHORR
« Joyful Sky »
(Provogue/Mascot Label Group)
A travers sa belle et longue carrière, ROBIN TROWER n’a eu de cesse de faire preuve de créativité que ce soit en solo ou au cours de ses très nombreuses collaborations. Avec la New-Yorkaise SARI SCHORR, le guitariste a visé juste tant le duo fonctionne à merveille. Partageant aussi le même manageur, les deux artistes se trouvent très naturellement sur des chansons que le Britannique a composé spécialement et d’autres plus anciennes qu’il a réarrangé en fonction de la voix de l’américaine. La combinaison de ces deux talents est tout simplement exceptionnelle, le tout dans une chaleur d’un groove irrésistible.
Si SARI SCHORR n’a pas bénéficié des mêmes lumières que certaines de ses consœurs, elle compte deux albums studio et un live à son actif, est membre du ‘New-York Blues Hall Of Fame’ et fut longtemps la choriste de Joe Louis Walker et de Popa Chubby avant de former un groupe avec Innes Sibun, le guitariste de Robert Plant. Autant dire que la blueswoman n’est pas la première venue comme on peut l’entendre sur « Joyful Sky », où sa voix puissante, délicatement éraillée et sensuelle fait des merveilles. Sa présence aux côtés de ROBIN TROWER ne doit donc rien au hasard.
Interprète des compositions de l’Anglais, elle se meut subtilement entre ses notes pleines d’émotion enveloppées de la wah-wah de sa célèbre Stratocaster rendues inimitables par ce toucher unique. Avec un registre vocal dont on peut retrouver des similitudes chez Beth Hart notamment, SARI SCHORR illumine littéralement « Joyful Sky », qui porte si bien son nom (« Burn », « The Distance », « The Circle Is Complete » avec ses sept minutes très 70’s, « Joyful Sky », « Flatter To Deceive », « I’ll Be Moving On »). Tandis que l’Américaine séduit par une intonation sublime et flottante, ROBIN TROWER éblouit par sa justesse et un feeling brûlant.
Chaque nouvelle réalisation de MARIA DAINES est toujours un enchantement. Dans un Blues délicat, moderne et envoûtant, la chanteuse et compositrice présente des chansons surtout mid-tempo dans un registre British Blues d’une clarté rayonnante. Avec son complice Paul Killington, musicien et producteur, elle pose sa voix sur une musique pleine de sensibilité et d’émotion. « Blue » est un modèle du genre qu’on ne se lasse pas d’écouter.
MARIA DAINES
« Blue »
(Independant)
Il aura donc fallu attendre trois ans pour réentendre la voix exceptionnelle de MARIA DAINES. En effet, c’est en 2020 que la Britannique avait sorti le très, très bon « The River », toujours en indépendant. Même si elle s’est essayée à d’autres styles, c’est bel et bien au Blues qu’elle revient toujours, et toujours accompagnée par le multi-instrumentiste, producteur et exceptionnel guitariste Paul Killington. Le duo est en symbiose totale et cela s’entend une fois encore sur « Blue ».
On pourrait s’étendre longuement sur la voix cristalline de MARIA DAINES, tant il est rare de voir une chanteuse dotée d’un spectre vocal capable de jouer sur une finesse incroyable et l’instant suivant de se déployer dans une énergie dont la puissance est tout aussi spectaculaire. Le chant de l’Anglaise est un instrument à part entière et, comme tous les virtuoses, elle n’a pas besoin d’en abuser pour marquer ses morceaux d’une empreinte indélébile. Et les dix titres sont d’une classe et d’une justesse absolue.
Le Blues du duo de Cambridge peut paraître d’une grande simplicité, tant il est d’une évidence et d’une fluidité absolues. Pourtant, tous deux guidés par un feeling constant, ils ont bâti un nouvel opus aux multiples détails et aux arrangements très soignés. Ouvrir « Blue » avec « Beyond Me », long de 7mn30, montre toute l’audace et le savoir-faire de MARIA DAINES et de Paul Killington, et d’autres perles suivent ensuite (« Sundown Blues », « Ain’t Your Man », « The River », « Blue », …) Brillant !
Avec une approche très live et un son inspiré du Sud des Etats-Unis, THOMAS FRANK HOPPER nous fait voyager dans les grands espaces, grâce à un registre Blues Rock relevé, mélodique et que le groupe qui l’accompagne rend littéralement lumineux. Guitariste accompli, le Belge se révèle également redoutable vocaliste, tant il mène ce « Paradize City » de main de maître, malgré sa jeune expérience. Incandescentes, ses compositions affichent déjà une belle assise et une créativité certaine.
THOMAS FRANK HOPPER
« Paradize City »
(Independant)
Contrairement à sa compatriote Ghalia Volt, le guitariste et chanteur THOMAS FRANK HOPPER n’a pas encore franchi l’océan qui le sépare des Etats-Unis, et c’est depuis sa Belgique natale qu’il distille son Blues Rock. Deux ans après « Bloodstone » où il avait déjà montré de bien belles choses, avec « Paradize City », le songwriter se montre plus audacieux et aussi plus brut dans son jeu. Assez Heavy dans l’ensemble, sa nouvelle réalisation est avant tout très roots et sans artifice.
Particulièrement bien entouré, THOMAS FRANK HOPPER évolue en quintet, ce qui donne sa pleine dimension à des morceaux finement ciselés. Même si ce deuxième album s’inspire des piliers et fondateurs du genre, il s’inscrit terriblement dans l’air du temps, celui du Blues et du Rock. Ainsi dans les arrangements et la production, on perçoit quelques inspirations puisées chez Jack White, Larkin Poe bien sûr, QOTSA et Rival Sons. Mais le Belge affiche un répertoire très personnel, et pour cause !
Le son si particulier de THOMAS FRANK HOPPER vient directement de l’instrument sur lequel il interprète la majorité des titres : une Weissenborn. Sorte de lapsteel qui se joue donc à plat, la guitare libère une chaleur et un grain proche des sonorités Southern. Dès « Troublemaker » au faux air de Queen dans la voix, la guitare se fait grinçante. Entre chansons musclées (« Tribe », « Paradize City », « April Fool », « Crossroads ») ou plus calmes (« Dog In An Alley », « Boundless »), le frontman est très convaincant dans ce bel équilibre.
Gorgé de slide solaire et de riffs entêtants, « Midnight Junction » s’impose assez naturellement comme l’une des meilleures réalisations de Blues Rock de l’année. ERIC SARDINAS a pris son temps et ces nouveaux morceaux libèrent autant de puissance que de finesse et de mélodies. Il est aujourd’hui au sommet de son art et sa maîtrise du dobro couplée au bottleneck (et vice-versa), touche ici la perfection.
ERIC SARDINAS
« Midnight Junction »
(earMUSIC)
S’il s’est mis très jeune à la guitare dans sa Floride natale, c’est durant les années 90 qu’ERIC SARDINAS a commence à faire parler de lui du côté de Los Angeles. Repéré par un certain Steve Vai qui a fait de lui son protégé, il a même participé au fameux G3 sur deux tournées mondiales. Mais c’est le Blues qui anime sa passion pour la six-corde, notamment le dobro, et « Treat Me Right », son premier effort solo sorti en 1999 sous son nom, amorce une aventure musicale très personnelle et débridée.
Neuf longues années après « Boomerang », l’Américain refait surface avec « Midnight Junction », son sixième opus solo, et c’est un véritable All-Stars band qui l’accompagne. Interprétées par le batteur Chris Frazier (Whitesnake, Foreigner), le bassiste Koko Powell (Lenny Kravitz, Sheila E), le claviériste David Schultz (Bo Diddley, The Goo Goo Dools) et le grand harmoniciste Charlie Musselwhite, les 13 chansons sont taillées sur mesure par un ERIC SARDINAS qui rayonne littéralement.
Très roots dans le son comme dans l’approche et malgré un groupe qui joue sur du velours, le songwriter et chanteur fait preuve de virtuosité bien sûr, de feeling évidemment et affiche surtout une très grande liberté. Son Blues Rock est instinctif, électrisant et d’une authenticité qui semble même le galvaniser (« Long Shot », « Said And Done », « White Lightnin’ », « Liquor Store »). Outre les deux superbes instrumentaux (« Swamp Cooler », « Emilia »), ERIC SARDINAS reprend aussi le « Laudromat » de Rory Gallagher avec classe.
Le malheureux timing subi par l’excellent « Sisyphus » il y a deux ans est loin d’avoir refroidi 7 WEEKS. Bien au contraire, le trio fait de nouveau sensation avec « Fade Into Blurred Lines », un album certes moins solaire que le précédent, mais qui livre une vérité musicale comme on n’en voit peu. Le Heavy Rock teinté de Stoner et un brin Grunge des Français dévoile beaucoup de fragilité dans un sens, mais elle vient renforcer une puissance émotionnelle sincère et intense, qui se fond dans des sonorités Blues très personnelles. Julien Bernard, chanteur et bassiste, revient sur le récent parcours du groupe et l’élaboration de ce sixième opus. Entretien.
– Il y a trois ans vous commenciez la série « Sisyphus » avec un très bon album, suivi de l’EP « What’s Next ? » l’année suivante. Avec le recul, qu’en retiens-tu ? La période a été pénible et malgré tout, 7 WEEKS sort deux très belles productions…
Ca a été une période très productive, on a compensé le fait de ne pouvoir jouer l’album sur scène par des projets annexes, c’est-à-dire l’EP, des sessions live acoustiques, des livestreams, etc… On ne pouvait pas tout laisser s’arrêter, on a tenu bon et notre structuration en label indépendant autogéré nous a permis de faire ça, là où tout le monde était en ‘sommeil’. Si on avait été sur un autre label, ou une major, jamais on aurait pu le faire. Ca montre aussi qu’en cas de crise, les petits arrivent à survivre là où les grosses productions s’arrêtent. Le problème est quand ça repart, les ‘gros’ trustent tout ! (Sourires)
– Est-ce qu’après la pandémie, vous avez pu reprendre le chemin des concerts normalement et enfin défendre votre album dans les meilleures conditions ?
Oui, on a réattaqué les dates dès juillet 2021 et on a fait une belle tournée sur l’automne, puis une nouvelle série de concerts jusqu’à l’été 2022, avant de s’attaquer au nouvel album.
– Vous revenez aujourd’hui avec « Fade Into Blurred Lines » sur lequel vous vous affirmez encore plus. Quand avez-vous commencé sa composition, car on le sent très spontané ?
Les premières idées datent de début 2021, mais le travail réel sur l’album s’est fait à partir de janvier 2022. Puis à la fin août, notre clavier a décidé de ne pas repartir sur un nouvel album. On s’est donc retrouvé à trois et nous avons tout repensé et composé dans cette dynamique de trio. C’est effectivement assez spontané dans le sens où on a voulu faire ça de manière très organique, très live.
– Malgré la puissance qu’il dégage, ce nouvel album a aussi un côté encore plus personnel et aussi très intimiste. Comment combinez-vous ces deux aspects, car on vous sent aussi très libérés dans le jeu ? Et il y a l’importance accordée aux textes également…
Exactement, pour la première fois, j’ai pu déléguer la guitare, que je faisais jusque-là sur quasiment tous les albums. J’ai donc vraiment pu me concentrer sur l’écriture dans sa globalité avec mes instruments de prédilection, à savoir le chant et la basse. J’ai travaillé les textes avec une amie anglaise (Katy du groupe Lizzard) et on a été assez loin. On a pris le temps de comprendre ce que je voulais exprimer et trouver la bonne formulation, celle qui sonnerait le mieux avec la musique. Les textes sont écrits de manière à vraiment se livrer en les chantant, d’où le côté intimiste sur des morceaux comme « Mute » ou « Shimmering Blue ». De manière générale, chacun a pu se concentrer sur son instrument et sur la manière d’exprimer au mieux l’état d’esprit ou l’émotion du morceau. Et le fait de se retrouver à trois pour bosser en profondeur sur les titres a permis une musicalité qui est très expressive.
– Pour « Fade Into Blurred Lines », vous avez enregistré l’album en condition live, ce qui lui confère un son très organique, et d’ailleurs la sincérité et l’authenticité qui s’en dégagent sont éclatantes. En quoi cela était-il important pour vous, car la production et les arrangements sont également très soignés ?
On tenait à capturer des prises live très brutes dans le jeu et le feeling pour ensuite ajouter les arrangements, sans se soucier de savoir si on pourrait les jouer sur scène. Si les prises brutes fonctionnent, les arrangements ne sont que la cerise sur le gâteau et non un cache-misère.
– Votre Heavy Rock est toujours teinté de Stoner, légèrement de Grunge et cette fois, il y a également des éléments bluesy qui viennent se greffer. Ca va dans le sens et dans le propos général de l’album ? Ou est-ce juste une volonté artistique et sonore ?
Il me semble qu’on a toujours eu cette fibre Blues, dès « Carnivora » en 2013 sur un morceau comme « Shadow Rider », par exemple. Peut-être était-elle moins ressentie, car la production des disques qui était moins organique. Cette influence-là est logique vu la musique que l’on fait. Mais c’est vrai que cet album s’y prête beaucoup. Le Blues est une forme d’expression, c’est chanter et jouer ce qu’on ressent ou ce qu’on vit de manière très crue. En ce sens-là, nous faisons du Blues sur ce disque. Simplement, nous ne sommes pas du Mississipi ou de Chicago. La forme est différente, mais pas le fond.
– J’aimerais que tu nous dises un mot sur cette très belle pochette, ce qui est d’ailleurs une habitude chez vous. Quelle est ton interprétation de cette statue étonnante et très expressive de Don Quichotte ? Elle est d’ailleurs présente dans le clip de « Gorgo ». Et de qui est-elle l’œuvre ?
Nous avons effectivement la chance de travailler avec Gilles Estines, qui est un ami et qui fait quasiment tous nos visuels. Il nous sort toujours des choses magnifiques. Pour cet album, on lui avait donné plusieurs pistes, dont celle d’un Don Quichotte, qui en en rapport avec le morceau « Windmills ». Après plusieurs propositions, il nous a semblé que ce visuel très fort conviendrait parfaitement au sentiment général du disque et à son titre. Pour le titre « Gorgo », on a eu cette idée de créer la statue en vrai pour la filmer dans le sable pour mieux coller au texte. Puis, on a demandé à une connaissance, Loïc Delage de Hom’ort, de s’inspirer de la pochette et il a crée ce personnage. C’est un sculpteur sur métal très doué. On adore sa statue et elle trône dorénavant dans mon jardin !
– Depuis vos débuts, vous avez produit six albums et deux EP via votre label F2M Planet, et vous gérez également vous-mêmes vos tournées. On comprend facilement votre désir d’indépendance et de liberté, mais est-ce que ce n’est pas trop contraignant dans la mesure où cela pourrait empiéter sur la création musicale ?
Ca empiète surtout sur nos vies personnelles ! (Sourires) C’est une somme de travail considérable, mais ça nous permet de faire les choses comme on l’entend. On respecte les gens qui font ça et on est respecté aussi pour ça. On ne lâche rien et on est honnête dans notre démarche.
– La sortie de « Fade Into Blurred Lines » correspond au démarrage de la première partie de votre tournée. C’est important de le livrer en live, tant qu’il est encore ‘chaud’ ?
Oui, on a hâte de rejouer. Le premier concert était un vrai soulagement après tous ces mois de travail et d’attente. Le trio fonctionne très bien en live et les nouveaux morceaux sont super à jouer.
Le nouvel album de 7 WEEKS, « Fade Into Blurred Lines » est disponible chez F2M Planet.
Retrouvez la chronique du précédent EP du groupe :
CARL ‘BUFFALO’ NICHOLS fait partie de la nouvelle génération du Blues américain, qui a la volonté de marier les racines du style avec une manière d’arranger les titres en portant un regard neuf et en utilisant toutes les techniques présentes et à sa disposition. Echantillonnages, samples d’un autre temps ou boucles aérées et discrètes de percussions, « The Fatalist » est un voyage mélodieux, où le violon, la guitare acoustique et l’électronique se côtoient et font cause commune autour d’un chant saisissant et captivant.
BUFFALO NICHOLS
« The Fatalist »
(Fat Possum Records)
Ce deuxième album de BUFFALO NICHOLS a quelque chose de fascinant. Ancré dans un Blues très roots et hors du temps, il est pourtant terriblement actuel et ce malgré son aspect très épuré. Car s’il sonne si organique, « The Fatalist » regorge de samples, de synthés et de programmation, ce qui le rend assez unique en son genre. Par ailleurs, le musicien du Wisconsin s’est occupé de l’intégralité du disque, à savoir de l’enregistrement, du mix et de la production, sans oublier le chant, la guitare, le banjo et les éléments électroniques comme des bruits de nature.
Avec sa voix rauque et profonde, BUFFALO NICHOLS nous transporte dans une sorte de western moderne, d’où quelques sonorités Country et Bluegrass s’échappent délicatement. Très sombre dans ses textes, le songwriter se livre sur des sujets personnels et sociétaux qu’il fait résonner d’une façon si évidente. Jamais avare de quelques slides, il s’est forgé un univers musical incroyablement riche. Et sur « The Fatalist » encore plus que sur son premier opus éponyme, le talent du bluesman de Milwaukee se niche dans les détails… et ils sont innombrables.
Relativement urbain dans le traitement sonore, l’apport du violon de Jess McIntosh sur trois morceaux offre de la légèreté à « The Fatalist », qui se veut touchant et tout en émotion. Le côté très acoustique du Blues très Folk de BUFFALO NICHOLS se fond même dans un fiévreux Gospel sur le « You’re Gonna Need Somebody On Your Bond » de Blind Willie Johnson. Mêlant le passé du genre avec son futur, on assiste à une mise en œuvre très hybride, mais loin d’être synthétique. Et le poignant duo avec Samantha Rose (« This Moment ») vient clore l’album avec classe.
C’est dorénavant depuis la péninsule ibérique que Mike Vernon exerce son art, celui du Blues. Aussi intemporel que voyageur, le style de l’Anglais traverse toutes les époques et tous les courants du genre, comme pour en extraire la substantifique moelle. Et avec CAT SQUIRREL, son nouveau groupe, c’est chose faite comme en témoigne « Blues What Am », un vrai disque de baroudeurs.
CAT SQUIRREL
« Blues What Am »
(Dixiefrog/Rock & Hall)
Si ce premier album de CAT SQUIRREL parait si familier, cela ne doit rein au hasard. En effet, la formation a vu le jour à l’initiative et sous l’impulsion du grand Mike Vernon, à qui l’atmosphère espagnole, pays où il réside depuis une vingtaine d’années, semble faire le plus grand bien. Et c’est tout naturellement qu’il s’est entouré de cinq bluesmen locaux, et non des moindres, pour créer cette nouvelle entité et sortir ce « Blues What Am », qui apparait comme un concentré délicat de la carrière du Britannique.
Pour rappel, Mike Vernon n’est autre que le fondateur du label Blue Horizon et a découvert, produit ou collaboré avec les plus grands, passant de John Mayall à Ten Years After et de Peter Green à David Bowie ou encore Elmore James. Garant de l’esprit du British Blues Boom, le chanteur et songwriter établit pourtant de belles passerelles entre le Blues du Delta, le Swamp, le Boogie, le Shuffle, le Rock ou le Swing. Et CAT SQUIRREL saute d’un rythme à l’autre, d’une ambiance à une autre avec une belle élégance.
Entouré des flamboyants Kid Carlos (guitare), Mingo Balaguer (harmonica), Oriol Fontanals (contrebasse) et Pascoual Monge (batterie), Mike Vernon démontre qu’il a toujours de la voix et surtout de l’inspiration. Sur plus d’une heure, le quintet présente 14 morceaux, dont quatre reprises, notamment celles de Big Bill Broonzy et Jimmy Reed. De Chicago au Royaume-Uni, CAT SQUIRREL nous balade avec une joie non-dissimulée dans un monde où le Blues est roi et où le Blues sourit constamment.
Avant de reprendre le chemin des concerts (d’ailleurs a-t-il seulement arrêté ?) pour des prestations qui s’annoncent hors normes, sur mer comme sur terre et y compris avec le fameux Black Country Communion, le guitariste et chanteur se fait plaisir avec un deuxième volume de son « Blues Deluxe », paru en 2003. JOE BONAMASSA nous gratifie de huit magnifiques reprises et de deux originaux inédits, le tout avec la virtuosité et le feeling devenus sa signature.
JOE BONAMASSA
« Blues Deluxe Vol.2 »
(J&R Adventures/Mascot)
Afin de se rappeler au bon souvenir de son album « Blues Deluxe » sorti il y a 20 ans et qui l’a célébré dans le monde entier, JOE BONAMASSA nous offre un second volet tout aussi brillant et inspiré par les artistes qui ont façonné son style. C’est aussi une façon pour l’Américain de jeter un regard sur une carrière exceptionnelle, où il s’est hissé parmi les bluesmen aussi incontournables que prolifiques. Il faut reconnaître que le chemin parcouru en deux décennies est défiant, tant il incarne aujourd’hui le renouveau du Blues.
Composé donc pour l’essentiel de reprises, « Blues Deluxe Vol.2 » donne toute la mesure de la progression (et oui !) de JOE BONAMASSA en tant que guitariste bien sûr, mais surtout comme chanteur, un rôle qu’il avoue avoir toujours du mal à pleinement assumer. Pourtant, la maturité de son chant est incontestable, tout comme la finesse et la précision de son approche des standards qu’il interprète ici. Et au-delà bien sûr de la qualité de la production, les arrangements sont comme toujours très soignés.
De Bobby ‘Blue’ Bland à Fleetwood Mac en passant par Guitar Slim et Albert King, JOE BONAMASSA revient à ses premières amours, celles qui ont forgé son identité de bluesman. Repris avec toute l’élégance qu’on lui connait et avec beaucoup d’humilité, ces huit morceaux cohabitent avec deux originaux. « Hope You Redize It (Goodbye Again) » a été composé avec Tom Hambridge, tandis que son complice et guitariste Josh Smith signe « Is It Safe To Go Home ». Une fois encore, c’est du grand luxe !
Bluesman (très) averti et baroudeur de longue date sur la scène hexagonale notamment, c’est sous le pseudonyme de DR SUGAR que le songwriter français se présente en solo. Les dix titres de « These Words » semblent avoir été composés en Louisiane, sur les rives du Mississippi, tant l’atmosphère contient des effluves en provenance directe de la Nouvelle-Orléans. Irrésistible.
DR SUGAR
« These Words »
(Rock & Hall)
Depuis de longues années maintenant, Pierre Citerne, alias DR SUGAR, fait partie de ces artisans incontournables de la scène Blues française. Ancien leader des Marvellous Pig Noise, il se livre cette fois seul, mais toujours très bien accompagné, sur ce « These Words » qui nous transporte du côté du delta du Mississippi, non loin de la Nouvelle-Orleans avec un Blues chaleureux et personnel. Ici, les couleurs et les sons s’entremêlent dans une douceur bienveillante.
C’est à Montpellier et sous la houlette de Niko Sarran des Red Beans & Pepper Sauce, qui tient ici aussi les baguettes en plus de signer la production, que DR SUGAR a mis en boîte ses nouveaux morceaux et « These Words » a vraiment quelque chose de réjouissant. Un pied dans le bayou et l’autre dans les quartiers animés et festifs de ‘Big Easy’, le Blues du Français a des saveurs Soul, Gospel, R&B et Funky, qui sont autant de gourmandises saupoudrées d’un groove exceptionnel.
Le dobro en bandoulière et l’harmonica jamais bien loin, DR SUGAR nous embarque dans une balade Deep South très roots. Entraînant et gorgé de soleil, le musicien enchaîne les titres avec un groupe où rayonnent l’orgue Hammond et les chœurs. La touche très ‘Churchy’ de son registre flirte habillement avec une nostalgie joyeuse et dans une belle fluidité (« Ready To Give Love Again », « I Want To Go To New-Orleans », « Drinking Muddy Water », « The Little Church » et le morceau-titre). Vivifiant et tonique !
Même s’il est le fils d’une légende du Heavy Metal, Seb Byford n’entend pourtant pas marcher dans les pas de son père musicalement. Cela dit, il est parvenu à l’embraquer dans l’aventure HEAVY WATER loin de l’institution Saxon. Avec « Dreams Of Yesterday », l’ambiance est plutôt Rock, même si quelques sonorités assez Old School et un brin Hard Rock émanent de ce deuxième effort rondement mené par le mythique frontman et sa progéniture.
HEAVY WATER
« Dreams Of Yesterday »
(Silver Lining Music)
Si le rapprochement artistique père/fils qui a donné lieu à « Red Brick City » il y a deux ans en pleine période de Covid, il semblerait que la Byford Family ait décidé de récidiver et d’inscrire HEAVY WATER dans le temps. Même si Biff a depuis sorti « Carpe Diem » et le navrant « More Inspirations » avec Saxon, le duo créé avec le fiston n’a pas été un one-shot, puisque les revoilà avec « Dreams Of Yesterday », un deuxième album varié et solide, dans la lignée du premier.
A la guitare et au chant, Seb paraît toujours tenir la boutique avec force et talent, Biff assurant la basse et les chœurs avec son inimitable timbre de voix. Loin de son Heavy Metal habituel et même s’il avait laissé entrevoir d’autres registres sur les deux non-essentiels opus de covers de Saxon, c’est assez surprenant de le retrouver dans certains styles abordés sur « Dreams Of Yesterday ». Mais il ne fait que tenir la basse sur HEAVY WATER… et d’ailleurs cela s’entend !
Le groupe a trouvé ses marques et même s’il se cherche encore un peu, une empreinte et une identité commencent à se dessiner. Très ancré dans les années 80 et 90, HEAVY WATER rappelle autant Led Zeppelin que Soundgarden ou Alice In Chains et penche sur des titres assez nerveux dans un Rock Hard classique, bluesy parfois, alternatif et légèrement Stoner (« Another Day », « Be My Savior », « Don’t Take It Granted », « Castaway »). Un peu éparse, mais très soudé !