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France Modern Metal

Asylum Pyre : human tribe [Interview]

Moderne, puissant et mélodique, voilà en trois mots comment on pourrait résumer le nouvel album des Français d’ASYLUM PYRE. Bénéficiant d’une production sans faille, massive et fluide, « Call Me Inhuman » est un concentré très actuel de toutes les musiques qui viennent nourrir le quintet avec une prédominance Metal, cela va de soi. Alors que la cinquième réalisation du groupe vient tout juste de sortir, Ombeline ‘Oxy’ Duprat (chant) et Johann ‘Jae’ Cadot (chant, guitare rythmique, claviers et loops) m’ont fait le plaisir de répondre à quelques questions.

– Avant de parler de ce nouvel album, j’aimerais que l’on revienne sur votre parcours. C’est votre cinquième album et il sort en autoproduction comme le premier. Vous avez sorti deux disques avec Massacre Records et un autre chez M&O. Ca devient compliqué de rester sur un label à long terme, ou c’est un désir d’indépendance ?

Ombeline : Ni l’un, ni l’autre ! Concernant « Call me Inhuman », nous avons envoyé notre album à plusieurs labels. Tous les retours que nous avons reçus étaient franchement unanimes et enthousiastes à l’égard de ce nouvel album. Mais… nos ‘chiffres’ Spotify et autres étaient bien trop bas pour les intéresser. S’investir dans un projet, culturel ou musical, c’est devoir faire preuve de patience, d’abnégation et de remise en questions. C’est être en proie aux doutes et se demander pourquoi on fait ça, au final. Et lorsque ce type de réponses arrive, c’est encore plus frustrant. Nous avions deux options : laisser tomber ou tenter de corriger ce défaut. Nous avons décidé de repartir à zéro, et nous travaillons en ce sens.

– Pour « Call Me Inhuman – The Sun – The Fight – Part 5 », vous êtes tout de même distribués par Season Of Mist. C’est une licence qui reste indispensable pour une meilleure visibilité et accessibilité, selon vous ?

Ombeline : La distribution, et notamment digitale, est au coeur de la stratégie. Mais, le disque physique est aussi important pour nous, dans la mesure où nous continuons à en acheter et nous savons que le public Metal, et a fortiori le nôtre, est en demande de ce type d’objet. C’est aussi une autre manière d’écouter de la musique, en feuilletant le livret, en laissant son imagination vagabonder… En ce sens, une bonne distribution est nécessaire afin de permettre de toucher tous les publics, y compris les derniers gaulois résistant toujours et encore au grand tout numérique (Merci beaucoup, je me sens moins seul ! – NDR).

Ombeline ‘Oxy’ Duprat

– Depuis les débuts d’ASYLUM PYRE, vous développez un concept très précis, tout en incarnant chacun un personnage. C’est quelque chose qu’on ne voit plus beaucoup. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans cette démarche artistique globale comme celle-ci ?

Johann : Nous n’avons pas vraiment réfléchi à ce qui se faisait ailleurs, tout ceci est venu naturellement, sans vraiment s’en rendre compte en fait. On avait envie de le faire et ça nous permettait un type de composition immersif que l’on tente de retranscrire pour l’auditeur.

– Comme je le disais, vous suivez le même concept depuis le premier album. En 2009, vous aviez déjà en tête la trame de toute l’histoire, ou est-ce que vous l’écrivez et/ou la modifiez au fur et à mesure ?

Johann : Ce concept a grandi avec nous, il est né peu à peu, un peu inconsciemment, par notre regard sur le monde. Depuis « N°4 » il guide un peu plus notre musique et inversement. Il a des inspirations qui viennent directement du monde actuel et de nos études personnelles.

– Parlons de ce cinquième album. Il parle de l’évolution des humanités d’aujourd’hui jusqu’en 2062 dans un univers qui rappelle celui de ‘Mad Max’. Est-ce que vous vous basez uniquement sur de la fiction ou faites-vous aussi des parallèles avec notre époque en imaginant ce que notre monde pourrait devenir ?

Ombeline : Il y a toujours, peu ou prou, plusieurs manières d’interpréter les paroles d’ASYLUM PYRE, mais la trame narrative s’inspire effectivement de notre quotidien. Les métaphores permettent d’établir un rapport direct entre certaines souffrances humaines et celles que nous infligeons à la planète, les deux pouvant être intimement liées sur certains sujets. En 2019, la pochette de « N°4 » arborait un masque… Nous ne savions pas que neuf mois après la parution de l’album, une crise sanitaire d’une telle ampleur allait s’abattre sur nous. Par contre, au regard des expérimentations diverses et variées, sanitaires ou alimentaires, menées par l’Homme, il était tout à fait possible de prévoir une telle catastrophe.

– Votre album, et plus largement ASYLUM PYRE dans son ensemble, fait aussi un focus sur la cause environnementale. C’est le message principal autour du concept du groupe ? Et de quelle manière cela se concrétise-t-il dans vos textes et aussi peut-être dans votre démarche ?

Johann : Oui, c’est le message principal. Avec son impact, de fait, sur l’être humain qui n’est qu’une partie de ce ‘grand’ tout qu’est la planète. ’Grand’ entre guillemets vis-à-vis de l’univers qui nous entoure. C’est présent à chaque seconde. C’est présent dans nos démarches, mais il serait difficile d’en parler ici en quelques mots. Il nous faudrait des représentations graphiques, des équations…

– Parlons de votre musique qui est à la fois très moderne et très Metal. Pourtant, on y décèle aussi de multiples courants avec un ensemble soutenu par une production solide et ample. Là encore, il y a un côté rassembleur et fédérateur. C’est cet aspect et cette intention qui vous guident ?

Ombeline : Pour ma part, je pense que les compositions de Johann offrent un écrin pour nous permettre d’apporter des influences diverses, celles qui nous ont construites en tant que musiciens. Nous sommes un groupe, mais nous sommes aussi des amis, avec des hauts et des bas, mais également, nos forces et la confiance que l’on a pour chacun. Nous arrivons avec nos idées, nous les testons et lorsque nous jugeons cela intéressant et utile pour la chanson, nous validons et travaillons le son.

Johann : « Rassembleur et fédérateur », si tu as perçu ça, alors tu fais déjà de moi un homme heureux !

Johann ‘Jae’ Cadot

– Ombeline, c’est ton deuxième album avec ASYLUM PYRE et le duo formé avec Johann également au chant montre une belle entente et une complémentarité évidente. Est-ce que, comme moi, vous pensez tous les deux que « Call Me Inhuman – The Sun – The Fight – Part 5 » est l’album le plus abouti du groupe artistiquement et vocalement en l’occurrence ?

Ombeline : Me concernant, je ne peux comparer qu’avec notre précédent album, « N°4 », même si j’ai mon avis sur les autres productions du groupe. Mais très clairement, cet album me paraît être celui de la maturité, et en tout cas, la suite logique de ce que nous avions commencé à faire avec « N°4 ». Vocalement, j’ai senti une différence, peut-être plus de lâcher prise, de confiance vis-à-vis de l’équipe, mais aussi de moi-même ! Johann sait aussi comment me ‘pousser’. J’ai enregistré en deux jours, comprenant aussi les très nombreuses pistes de doublage. Cela m’a valu quelques courbatures. Mais je pense que l’énergie impulsée s’en ressent dans l’album !

– Enfin, ASYLUM PYRE joue également beaucoup sur les ambiances et les atmosphères des morceaux. Est-ce que c’est quelque chose sur laquelle vous allez tout particulièrement travailler pour rendre vos concerts encore plus immersifs ?

Ombeline : Très clairement, cela serait intéressant de pouvoir proposer des concerts sortant des sentiers battus et nous avons déjà évoqué plusieurs idées. Il va nous falloir un peu de temps pour travailler ça et faire une belle proposition au public. En attendant, on se concentre sur la promotion de l’album. Les retours sont vraiment excellents et nous sommes ravis de l’accueil fait à « Call Me Inhuman » de la part de nos auditeurs, ainsi que des professionnels !

Johann : On va faire le max pour ça oui !

Le nouvel album d’ASYLUM PYRE, « Call Me Inhuman », est également disponible sur le Bandcamp du groupe : https://asylumpyre.bandcamp.com/

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Alternative Rock Pop Rock

Chloe+Clyde : un regard sur le futur

Avec un tel premier album, CHLOE+CLYDE fait une très belle entrée sur la scène Rock française. Entre Alternative Rock et Electro Pop, le duo a su se créer un univers très personnel. Au chant, Chloé alterne force et douceur, tandis que Clyde joue les chefs d’orchestre avec brio. Très complémentaires, la chanteuse et le multi-instrumentiste font des étincelles sur « Mort Ou Vif ».

CHLOE+CLYDE

« Mort Ou Vif »

(Jamm Production)

Dans une époque de plus en plus agitée et complexe, CHLOE+CLYDE se pose beaucoup de questions qu’elles soient d’ordre philosophique ou plus concrètement environnementales. Entre dystopie et constat amère d’un monde en perdition, le duo sort un premier album, « Mort Ou Vif », qui fait suite à un EP éponyme sorti en avril de l’année dernière. Et c’est aux fameux studios ICP en Belgique que s’est opéré l’enregistrement. Un gage de grande qualité.

C’est à ‘City7’, imaginé comme la ville d’un futur délibérément exagéré et noirci, que nous plonge CHLOE+CLYDE. A travers des textes en français très bien écrits et plein de sens, ce qui est toujours un exercice périlleux en France, les interrogations se multiplient passant en revue nos excès en tous genres et plaçant l’humain au cœur de dilemmes et de choix parfois utopiques, mais qui s’avèrent primordiaux. Pas de leçons, mais un parti-pris volontaire.

Musicalement, on bascule d’un Alternative Rock (« Game Over », « Piratage ») à des sonorités empruntes de Pop/Rock Electro (« Pulsations », « Emotion Et Raison ») et des passages plus acoustiques et organiques (« Renaître Ou Disparaître », « Pensées »). Faisant preuve d’un bel éclectisme, CHLOE+CLYDE n’a aucun mal à nous séduire grâce à un univers très personnel, et finalement très positif et plein d’espoir.

Photo : Nicolas Gihr

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Power metal Symphonic Metal

Avaland : un monde parallèle

Hors de notre monde, AVALAND s’est créé son propre univers et, à l’instar d’une grande saga, il nous invite à le suivre. Avec « The Legend Of The Storyteller », le groupe nous en dit un peu plus sur les protagonistes à l’œuvre. S’étalant sur une heure, les nouvelles compositions évoluent dans un Metal Symphonique parfois Progressif et Power. Un cap est franchi.

AVALAND

« The Legend Of The Storyteller »

(Rockshots Records)

Toujours aussi épique et symphonique, ce deuxième album des Grenoblois vient poursuivre l’aventure commencée il y a deux ans presque jour pour jour avec « Theater Of Sorcery ». Cependant, « The Legend Of The Storyteller » n’en est pas vraiment la suite, mais le préquel du premier album. AVALAND ne brouille pas pour autant les pistes, il offre d’avantage d’indices sur l’histoire en cours.

Plus sombre et plus Heavy, ce nouveau chapitre entamé par le quintet est aussi plus direct dans le jeu, même si les Français présentent toujours un style très étoffé et riche. Guidé par son créateur, Adrian G. Gzagg (compositeur, chanteur, claviériste et arrangeur), AVALAND a également stabilisé son line-up en intronisant Jeff Kanji comme deuxième frontman, s’offrant ainsi de nouvelles possibilités.

Et comme son prédécesseur, « The Legend Of The Storyteller » accueille plusieurs guests comme Zak Stevens (ex-Savatage, TSO) qui fait son retour, Madie (Faith In Agony, ex-Nightmare), Bruno Ramos (Sortilège), ainsi que des membres de Lionsoul, Eltharia et Edguy. AVALAND a encore vu les choses en grand en soignant les détails, tout en livrant des passages Power Metal musclés. Mélodique et volumineux !

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Hard 70's Proto-Metal

Red Cloud : rockin’ cumulus

Fortement ancré dans les seventies, RED CLOUD semble procéder, dès son premier effort, à un retour aux sources du Rock et même du Hard à travers leur registre originel, qu’il a pourtant réussi à renouveler. Car il règne un souffle vivifiant et très actuel sur ce « Red Cloud », qui se fond parfois même dans des sonorités Psych vraiment bienvenues. Le combo a de la suite dans les idées et cet opus ne manque pas d’originalité.    

RED CLOUD

« Red Cloud »

(Independant)

Tout semble être allé très vite pour le quintet parisien, même si Roxane Sigre (chant) et Rémi Bottriaux (guitare) sont déjà à l’œuvre en duo depuis 2018. Avec les arrivées de Maxime Mestres (basse), Laura Luiz (orgue) et Mano Cornet Maltet (batterie), RED CLOUD prend forme trois ans plus tard et le groupe entame les concerts pour y roder son répertoire. Les choses dans l’ordre en somme…

Enregistré, mixé et masterisé par son guitariste, ce premier album éponyme tient toutes ses promesses. Sur des ambiances vintage revendiquées, RED CLOUD livre un Rock Hard 70’s aux contours proto-Metal frais et dynamique. Mais si les influences se nichent quelques décennies en arrière, il n’en est rien des morceaux et surtout de la production qui les habille et qui affiche une belle modernité.

Sur une énergie très live et un son organique, RED CLOUD enchaine les morceaux en multipliant les atmosphères. La chanteuse apporte beaucoup de variations, tout comme les parties d’orgue qui rivalisent de créativité avec la guiatre. Mené par une rythmique hors-pair, « Red Cloud » se révèle très accrocheur (« The Battlefield », « Bad Reputation », « The Night », « Hey Sugar »). Un baptême du feu réussi haut la main !

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Metal Progressif

Jirfiya : un univers unique

Dotée d’une très bonne production, les Parisiens s’affirment avec talent sur une première réalisation menée de main de maître. Eclectique et pimenté, JIRFIYA se dévoile à travers un registre où les parties instrumentales dominent pour s’étendre dans des ambiances colorées et puissantes. Très bien arrangé, « W » est loin de livrer tous ses secrets à la première écoute. Il faut donc creuser un peu pour en saisir toute la substance.

JIRFIYA

« W »

(Independant)

Déjà auteur de deux EP, JIRFIYA présente enfin son premier album et les Franciliens frappent fort. Sorti il y a quelques semaines en autoproduction, « W » est à l’image de la scène progressive française actuelle : techniquement imparable et particulièrement inspirée. Oscillant entre Metal et Rock, le groupe s’est construit un univers riche et varié, qui lui permet d’aborder des atmosphères et des sonorités très originales.

Dès « Asylum » et ses neufs minutes, le ton est donné. JIRFIYA ne manque ni d’ambition, ni de créativité. Puissante et atmosphérique, l’entrée en matière laisse présager d’un opus plein de surprises… et c’est peu de le dire ! Au chant, Ingrid Denis (frontwoman du groupe de Rock Progressif Oscil) se montre sobre et efficace, laissant le côté lyrique aux amateurs de Metal Symphonique. Très bien structuré, « W » ne montre que peu de failles.

Pour accompagner les deux guitares, JIRFIYA a fait appel à la violoniste Coline Verger sur cinq morceaux, au violoncelliste Quentin Fauré sur ces mêmes titres et au trompettiste Jules Jassef sur deux compositions qui prennent une dimension incroyable dans la veine d’un certain Amin Maalouf. Envoûtante sur « Sister In Blood », « Dark Storms », « The Factory » ou « The Girl With The Perfect face », la formation régale et enchante.

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France Metal Indus

Treponem Pal : groove, Metal & tattoo [Interview]

Identifiable entre mille, les pionniers du Metal Indus français sont enfin de retour avec « Screamers », un nouvel album toujours aussi fracassant et Heavy. Entre samples et riffs tranchants, la voix de Marco Neves s’engouffre et vient sondé les âmes sur des textes percutants. Ce huitième album de TREPONEM PAL reste marqué de cette empreinte groove et Metal, qui fait la force du groupe depuis plus de trois décennies maintenant. Entretien avec le chef de la meute, prêt à en découdre sur une tournée qui s’annonce déjà musclée et envoûtante.   

Photo : Suzanne Brun

– Vous nous avez laissé il y a six ans avec « Rockers Vibes » où vous passiez en revue vos influences à travers des reprises très marquées de l’empreinte TREPONEM PAL. Finalement depuis « Survival Sounds » en 2012, vous n’aviez pas énormément composé. J’imagine que la motivation et l’envie n’ont pas manqué pour « Screamers »…

Oui, la motivation était forte, ainsi que l’envie de revenir aux sources et d’avoir une diversité assez conséquente sur l’album avec trois grosses tendances. Et puis, on a aussi trouvé ce deal avec At(H)ome, car ce n’était pas évident de trouver un bon label. On voulait qu’il soit français et indépendant et on est tombé dans le mille. Pour la France, ça démarre bien et on ne va pas tarder à attaquer l’étranger. Tout le monde est motivé et c’est formidable !

– J’ai pu lire que vous aviez réalisé une première version de l’album et que, mécontents du résultat, vous aviez retravaillé l’ensemble. D’autres s’en seraient sûrement contenter, qu’est-ce qui n’allait pas ?

On a surtout retravailler les voix et les textes, en fait. On a aussi habillé et monter quelques morceaux différemment. On a refait environ 70% de ce qui avait été réalisé.

Photo : Muriel Delepont

– Comme souvent chez TREPONEM PAL, il y a du mouvement au niveau du line-up, mais avant de parler des deux nouveaux musiciens, j’aimerais que tu nous parles du retour de Laurent Bizet à la guitare, qui est un membre historique du groupe. Dans quelles conditions son retour s’est-il effectué ? Il y avait un goût d’inachevé de part et d’autre ?

Ce qu’il faut savoir tout d’abord, c’est que Laurent, Nicki et Bastien, qui nous ont tous rejoint pour « Screamers », n’ont pas travaillé sur l’album. Nous l’avons fait à quatre avec Polak, Didier et Jean-Pierre Mathieu. Je le précise à chaque fois, car c’est la vérité de ce disque. Et en fait, une fois qu’on avait terminé tout ça, nous nous sommes dit qu’il nous fallait un bon bassiste, un bon batteur et pour Laurent, on s’est retrouvé par hasard, en fait. On habitait au même endroit sans le savoir et de fil en aiguille, on s’est revu. On s’est ensuite dit qu’on repartirait bien ensemble pour vivre cette aventure avec le reste de l’équipe de TREPONEM. Pour le moment, il est question de la scène et pour l’avenir, on attaquera ensemble le prochain album.

– « Screamers » voit donc l’arrivée de Nicky Tchernenko à la basse et de Bastien Amy à la batterie. Vous vous connaissiez déjà ou est-ce qu’on auditionne aussi chez TREPONEM PAL ?

Oui, on a fait des sortes d’audition. C’est aussi quelque chose qu’on fait toujours de toute façon. Et ça a été long évidemment.

Photo : Muriel Delepont

– Il y a une impression qui domine encore cette fois, c’’est que peu importe le temps qui passe, on retrouve le son et la patte de TREPONEM PAL au fil des albums. Est-ce que finalement la faculté d’adaptation à chaque époque ne résiderait pas dans de solides fondations ?

Oui bien sûr et les nôtres sont là depuis le début. On a une identité, un truc bien à nous et auquel on tient. Nous, on sait que ce que c’est, même si on ne se l’explique pas. On a les sonorités qu’on veut, les rythmes qu’on veut et des ambiances bien définies.

– Avec Polak et Laurent Bizet, TREPONEM PAL est particulièrement bien pourvu au niveau des guitares et pourtant les samples sont aussi très présents. Sans dévoiler vos secrets de composition, comment l’équilibre se fait-il pour rester aussi Metal ?

Je ne sais pas vraiment. Si tu prends un groupe comme Prodigy, ils ont fait quelques morceaux avec des guitares et ils y arrivent très bien. Sur les anciens Ministry, même s’il y a surtout des samples parlés, il y a ce même savoir-faire. Cela dit, on a essayé des trucs électroniques et ça ne fonctionne pas avec les guitares. C’est vrai qu’on a l’habitude de savoir gérer les samples, les claviers et autres avec un équilibre basé sur des guitares très Heavy.

Photo : Muriel Delepont

– A l’écoute de « Screamers », on a le sentiment que vous avez effectué une fois encore un gros travail sur le groove des morceaux. Est-ce que c’est finalement ça qui vous guide ?

Le groove, on l’a toujours eu. Je n’écoute que ça, que ce soit du Reggae et en parallèle des trucs Indus et Punk que j’ai toujours kiffés. J’adore le Reggae Dub surtout et tout ce qui est expérimental en général. C’est vraiment ce que j’aime avec le HardCore-Punk et l’Anarcho-Punk, qui sont des styles droits dans la tête. J’ai aussi besoin de ça par moment, je navigue entre différentes choses.

– D’ailleurs, toujours à propos de sample, ‘machine’ est un mot qui revient souvent dans tes textes avec également ‘Sound System’. Depuis l’album « Higher », les deux termes sont très présents. C’est inconscient ou c’est plus simplement la marque de TREPONEM PAL ?

Oui, c’est un peu la marque de TREPONEM, c’est vrai. En même temps, c’est aussi quelque chose d’inconscient. Cette obsession à la machine est quelque chose qui revient souvent chez moi. Je ne saurais pas te l’expliquer, j’ai besoin de dire ce mot ! (Rires)

– J’aimerais qu’on dise un mot de la pochette, qui renvoie à celle de « Survival Sounds » avec son graphisme asiatique réalisée par Keuns. Celle de « Screamers » est signée Rafto Dilo, qui est aussi tatoueur. Comment est née cette collaboration ? Est-ce lors d’un tatouage et faut-il y voir l’élaboration d’une trilogie d’albums, par exemple ?

En fait, Rafto Dilo a son salon de tatouage, ‘Utopia Tattoo’, à Poitiers et il travaillait auparavant avec Keuns, avec qui je suis entré en contact par le Net. Je l’avais découvert en interview dans un magazine. Il se trouve qu’il connaissait bien TREPONEM. De là, on s’est vu et il m’a tatoué un baku sur le bras droit (créature folklorique japonaise, qui se nourrit des mauvais rêves – NDR). C’est un éléphant et un chasseur de cauchemar, ce qui m’a m’allait très bien ! Ensuite, j’ai rencontré Rafto Dilo, puisqu’il travaillait ensemble, et de fil en aiguille, je lui ai demandé de faire mon bras gauche. Peu de temps après, Keuns a fait la pochette de « Survival Sounds » et en 2020/21, j’ai branché Rafto pour faire la nouvelle, celle de « Screamers ». Alors une trilogie, pourquoi pas ? Je pense que la pochette du prochain viendra encore d’un tatoueur, mais dans un autre style, je pense.

Photo : Muriel Delepont

– Concernant tes textes, ils sont toujours aussi concis et souvent revendicatifs. Comment les travailles-tu, car on peut prendre certains refrains notamment comme des punchlines ?

Oui, depuis toujours. C’est quelque chose qu’on retrouve aussi dans le Hip-Hop ou dans les groupes Electro HardCore. C’est vrai que les punchlines sont un truc que j’aime bien et qui sort naturellement chez moi.

– Il y a un peu plus de 20 ans, en 2001, tu avais sorti un album monumental avec Elephant System. Est-ce que, par un heureux hasard, on pourrait imaginer une suite ?

Oui, mais pas tout de suite. Mais on y a déjà travaillé un peu. C’est vrai que le premier a un son en béton, c’est Adrian Sherwood, quoi ! 

– Enfin, vous allez fouler en juin prochain pour la troisième fois la scène du Hellfest. Tout d’abord, comment abordes-tu un rendez-vous comme celui-ci qui est devenu depuis majeur et surtout est-ce qu’une tournée plus conséquente est-elle en cours de préparation ?

Oui, on a déjà 5/6 dates avant à Paris, Rouen, Strasbourg, Lyon et Lille et ensuite ce sera le Hellfest. On a aussi des concerts prévus pour l’été et la rentrée et on en fera l’annonce un peu plus tard. Mais pour en revenir au Hellfest, Ben Barbaud a vraiment créé un truc de fou ! Il va falloir qu’on montre au public qu’on est toujours là et on va donner le meilleur !

Le nouvel album de TREPONEM PAL, « Screamers », est disponible depuis le 10 mars chez At(H)ome.

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Rock Hard

MohoVivi : le pacte

MOHOVIVI est la réunion de deux grandes figures du Rock, parfois restées dans l’ombre, mais dont l’apport créatif et musical s’est avéré très important au sein notamment du plus grand groupe de Rock/Hard français. « Komando » est un opus qui transpire la rage autant que l’amitié et l’authenticité.

MOHOVIVI

« Komando »

(FTF Music)

Anciens compagnons d’armes sur les albums « Marche Ou Crève » et « Trust IV (Ideal) » et surtout compagnons de route sur de nombreuses tournées avec Trust, MOHO (Mohamed Chemlakh) et VIVI (Yves Brusco) célèbrent leurs retrouvailles discographiques avec « Komando », une première réalisation (trop) courte de dix morceaux entre Rock et Hard et aux saveurs 80’s.

Complété par Camille Sullet (batterie) et Sylvain Laforge (guitare), MOHOVIVI renoue avec un style musclé et efficace à la française. Mais ne nous y trompons pas, les deux vétérans de la scène hexagonale ne sont pas là pour perpétuer l’héritage du légendaire groupe au bulldozer. L’empreinte est personnelle même si, bien sûr, on ne se refait pas. Il reste forcément quelques traces … et on ne s’en plaindra pas !

Bourré d’une énergie presqu’adolescente, notamment au niveau des textes en français, « Komando » fait surtout la part belle aux riffs emprunts d’une légère touche bluesy. Relativement intenses et formatés, les titres proposés par MOHOVIVI font leur effet et on se laisse prendre à ce registre à la fois léger et entraînant (« Tic Tac », « Game Over », « C’est Pas Facile », « Candem Square »). Probant, ma foi !

Photo : Christian Montajol
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Thrash Metal

Praetor : bulldozor

Un pied en Lorraine et l’autre dans le Duché de Luxembourg, PRAETOR est solidement ancré dans un Thrash Metal percutant et sans détour. Rageur, le combo se montre facile dans un exercice très maîtrisé pour un premier album. Bien aidé par une riffeuse et soliste hors-pair, l’unité affichée se montre fracassante et très prometteuse. 

PRAETOR

« Praetor »

(Metal East Productions)

Forcément pour avoir œuvré dans des Tribute Bands dédiés à Metallica, Sepultura et Pantera, les influences de PRAETOR sur ce premier album éponyme sont manifestes. Et on ne va pas s’en plaindre ! Bien au contraire, les Franco-Luxembourgeois sont parvenus à élaborer un mix vraiment convaincant à travers des compositions musclées, efficaces et rentre-dedans.

Avec des tonalités Old School et directement marqué par l’héritage de la Bay Area, le quatuor a des arguments que les puristes de Thrash Metal trouveront familiers et addictifs. Composé d’Hugo Centero (guiatre, chant), Alex Guignard (batterie), Sébastien Gouttes (basse) et Noémie Bourgois (guitare), PRAETOR envoie du bois avec un savoir-faire de vieux briscards.

Ce premier effort présente une production puissante et massive, où les dix morceaux se libèrent dans un registre à la fois rugueux et sans concession. Véloce et groovy, le style de PRAETOR se détache rapidement de ses modèles avec des titres agressifs et mélodiques (« No Return », « Enemy », « Dormant Brain », « Screens », « Distant Road »). Une belle et grosse claque !

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Doom France Sludge

Seum : montée en puissance [Interview]

Porteur d’un Doom’N’Bass massif et puissant depuis ses débuts, SEUM a étoffé son répertoire à vitesse grand V depuis que le trio français a posé le pied à Montréal. Et depuis sa nouvelle terre d’accueil, le groupe effectue une montée en puissance assez phénoménale, qui se traduit par de nombreuses sorties discographiques en un laps de temps record. De quoi avoir la banane ! Alors que le virulent combo sort son nouvel album, « Double Double », l’occasion était trop belle pour s’entretenir une nouvelle fois avec Piotr (basse), Gaspard (chant) et Fred (batterie) que Rock’n Force suit depuis leurs débuts dans la Belle Province.

Photo : Alban Soto

– Avant de parler de « Double Double », j’aimerais que l’on revienne sur ces derniers mois où vous avez enfin pu enchaîner les concerts avec également quelques dates en France. J’imagine qu’après la période pénible de vos débuts avec la pandémie, vous commencez à trouver vos marques et à vous éclater…

Piotr: Effectivement, lorsque Gaspard, Fred et moi avons monté SEUM, on était en pleine période de Covid et on passait le plus clair de notre temps en studio. Lorsque les mesures ont commencé à s’assouplir à l’été 2021, on s’est empressé de faire découvrir notre musique en concert. Je crois même que nous avons été les premiers à organiser un concert Metal à Montréal en Juillet 2021 après le déconfinement – concert encore pirate à l’époque – c’est dire si on était motivé ! Depuis, on a enchaîné les shows sur Montréal et ses alentours et on est même venu en France faire la première partie d’ASG à Paris et quelques autres dates dans la foulée. Après avoir connu des débuts difficiles, on essaye d’en profiter au maximum.

– Avec le recul que vous avez aujourd’hui, quel premier bilan dressez-vous de votre expatriation au Québec ? La différence avec la France est-elle vraiment notable ? Les choses se font-elles plus facilement là-bas ?

Piotr : Le bilan est globalement très positif. Ça fait déjà plus de cinq ans que nous sommes là et nous avons trouvé nos marques dans nos vies quotidiennes et musicales. Malgré la langue commune, il y a des différences culturelles avec la France. On est en Amérique du Nord, un continent où la débrouille et l’entreprenariat sont très encouragés. Je pense que ça nous a influencé et nous a poussé à traiter le groupe plus sérieusement. On a investi dans notre propre matériel d’enregistrement, on produit nos disques, on organise nos concerts et nos tournées. J’ai l’impression qu’on était un peu plus passifs avec les groupes qu’on avait précédemment en France. C’est dû au changement de culture, mais aussi à l’expérience, car on est plus vieux. En revanche, je ne veux pas te faire un portrait idyllique, non plus. Pour les concerts par exemple, c’est plus facile de les organiser au Canada. Par contre, tu te débrouilles tout seul, la salle ne fait que te prêter ses locaux. En France, tu peux généralement compter sur un repas chaud, à boire et si tu as fait de la route, tu auras aussi un endroit où dormir. Ce sont deux réalités différentes avec leurs avantages et leurs inconvénients.

Gaspard : Il y a effectivement des différences entre la France et le Canada. Je dirais qu’ici rien n’arrive tout seul. Il faut en quelque sorte être l’artisan de son propre bonheur, personne ne va venir te prendre par la main. Je pense que c’est ce qu’on fait avec SEUM. On fait tout nous-mêmes, ce qui demande pas mal de temps, mais on prend beaucoup de plaisir à travailler ensemble notre musique ! Les longs hivers te donnent vraiment l’occasion de créer. Pour le côté personnel, je dirais que le Canada m’a permis d’évoluer professionnellement. J’ai enfin pu accéder à mon job de rêve : brasseur. Il faut savoir que la bière, comme la musique, est une de mes passions. Si je dois faire le bilan, je dirais que c’est positif.

Fred : Je ne m’attendais pas à autant de différence entre le Québec et la France ! On a une langue commune mais, culturellement, c’est un monde différent, en tout cas pour moi. En termes de mentalité, ça me rappelle beaucoup plus les Etats-Unis. C’est très dynamique, les choses évoluent rapidement et on a l’impression qu’il y a tout à faire. C’est un vrai paradis si tu es un peu entrepreneur et que tu veux créer quelque chose de nouveau. C’est vrai aussi pour SEUM : on s’est bâtit notre communauté tout en découvrant ce pays, un gros challenge, mais très gratifiant.

Photo : Mouad El Ykb

– Depuis vos débuts au Québec, SEUM s’est montré très actif avec le premier EP « Summer Of Seum », un split avec Fatima, suivi de l’album « Winterized », puis le « Live At The Seum Cave » et enfin « Blueberry Cash ». C’est assez surprenant une telle production en si peu de temps…

Piotr : C’est vrai qu’avec le recul, on n’a pas chômé ces dernières années. C’est dû à plusieurs choses : on a d’abord été coincé en studio avec le Covid et on avait que ça à faire que d’enregistrer ! Mais aussi, on a très vite voulu être indépendants, on s’est donc trouvé un local à nous et on a acheté du matériel pour pouvoir s’enregistrer nous-mêmes. Et puis Fred a de bonnes notions en enregistrement et mixage (en dehors de SEUM, il a mixé le dernier album de Fatima, « Fossil », par exemple). Tout ça nous a permis de pouvoir enregistrer beaucoup plus rapidement que si on avait dû aller en studio. Et puis, je ne te cache pas qu’on adore ça. Chaque projet est l’occasion de tester de nouvelles méthodes d’enregistrement, un nouveau son, de collaborer avec des gens de l’extérieur, que ce soit Greg Dawson pour « Blueberry Cash » ou John Golden pour « Double Double ».

– Et donc, vous revoilà déjà avec « Double Double », un album assez court et ramassé, mais qui tabasse une fois encore ! Vous composez très vite, ou est-ce que vous aviez déjà des morceaux de côté ?

Piotr : Un peu des deux, en fait. La majeure partie de « Double Double » a été composée très rapidement à l’hiver 2021, mais on a ensuite passé une bonne partie de 2022 à peaufiner les titres. Jusqu’à présent, on a toujours découpé notre processus de composition en deux étapes : je maquette d’abord les titres dans mon coin de manière à avoir un squelette des morceaux avec des batteries programmées, puis on rebosse avec l’ensemble en groupe. On retouche les structures, Fred s’approprie les batteries et Gaspard ajoute le chant. Le but étant d’obtenir à la fin des morceaux catchy qui sonnent presque ‘évidents’, mais c’est un long chemin pour arriver à un résultat qui nous convienne. L’avantage de cette manière de travailler, c’est aussi de pouvoir réfléchir les projets dans leur ensemble en amont, qu’ils ne soient pas qu’un enchaînement de titres. Sur « Double Double », encore plus que sur « Winterized », on a voulu que l’album puisse s’écouter à la suite et on a donc composé les titres en conséquence.

Photo : Mouad El Ykb

– Dites-moi si je me trompe, mais ce deuxième album sonne assez Punk dans l’énergie déployée et dans le chant notamment. Est-ce à dire que vous êtes en train de faire bouger les lignes ? De passer d’un Sludge Doom à un registre plus rapide ?

Piotr : L’album est définitivement plus direct et plus Punk. Si « Winterized », composé en plein confinement, était lourd et oppressant, « Double Double » lui est extraverti et énergique. Les nombreux concerts qu’on a donnés et les réactions du public ont eu une influence sur les morceaux. Par contre, ce n’est pas un virage définitif. On admire beaucoup des groupes comme Boris ou les Melvins qui, bien que liés à la scène Metal et Sludge, sont complètement imprévisibles d’un projet à l’autre. Et un virage à 180 degrés pour le prochain projet n’est pas impossible…! (Sourires)

– Est-ce que le fait d’ouvrir le groupe en faisant produire vos morceaux par quelqu’un comme John Golden vous a fait prendre conscience de nouvelles possibilités, d’ouverture et peut-être de champ d’action que vous n’aviez pas pensé explorer jusqu’à présent ?

Piotr : La collaboration avec John Golden est née d’un besoin, mais aussi d’une envie des fans que nous-sommes, associer notre ‘petit’ groupe à l’ingé-son qui a masterisé des groupes aussi légendaires que les Melvins, Sleep, OM, Weedeater, Sonic Youth, Soundgarden et j’en passe… C’est un sacré kiff ! Je pense que la grosse révélation de cette collaboration est qu’on s’est rendu compte que le mastering est une étape essentielle de la production. Elle ouvre la porte à des sons qu’on n’aurait pas imaginé obtenir pour les productions à venir.
Fred : John a vraiment fait un travail incroyable sur notre album et en un temps record. Quel talent ! Cela m’a aussi permis de gagner du temps au mixage, car je savais que le mastering était entre de bonnes mains. Typiquement, cela me prend beaucoup de temps d’écouter le mix sur plein de systèmes différents (écouteurs, enceintes, voiture, …) pour être sûr que le tout est bien équilibré. Mais John sait faire ça plus efficacement avec toute l’expérience acquise et son studio dédié.

Photo : Mouad El Ykb

– « Double Double » bénéficie donc d’une production beaucoup plus soignée et peut-être même plus ‘ronde’. Qu’est-ce qui a changé à ce niveau-là ? Vous aviez besoin de faire évoluer votre son ?

Fred : Sur cet album, le processus d’enregistrement était assez proche de « Winterized », si ce n’est qu’on a changé l’ampli basse pour un bon gros Orange. Ce qui fait la grosse différence, c’est d’avoir fait appel à John Golden pour le mastering, comme on le disait plus haut. Pour lui laisser le plus de possibilités, j’ai mis très peu de compression sur mon mix. La compression est une étape super importante pour obtenir un gros son, mais si c’est mal fait, on perd en dynamique et en clarté… Avec John aux manettes, on savait qu’il nous ferait un master dynamique et impactant, tout en gardant une bonne épaisseur. Grâce à son expertise, il a su aussi corriger tous les petits défauts d’équilibrage de fréquence pour que l’écoute ne soit pas fatigante et que tous instruments restent lisibles. Comme tu dis, le rendu est donc plus soigné, un vrai step en qualité pour nous.

– Cette nouvelle production amène aussi beaucoup de groove à votre jeu. J’ai l’impression que cette étiquette ‘Doom’N’Bass’ prend enfin toute son ampleur. C’est aussi votre avis ?

Piotr : L’étiquette Doom’N’Bass est née spontanément lorsqu’on a commencé le groupe et elle vit sa propre vie depuis. (Sourires) Elle décrit finalement assez bien notre son et elle se révèle encore plus sur « Double Double ».

Fred : Pour moi, cet album est plus varié dans les ambiances… Parfois quasiment Punk, parfois plus Rock, mais toujours Sludge… On varie davantage notre répertoire avec des morceaux qui prennent leur temps comme « Seum Noir » et des rafales comme « Dollarama ». C’est peut être ça le groove, quand il y a du contraste ! Surtout en opposition avec l’approche Doom Metal classique où les morceaux sont dans la lourdeur monolithique… Ce que l’on fait sur le morceau éponyme d’ailleurs, mais on n’abuse pas de cette carte, pour que l’auditeur ait envie de rejouer l’album encore et encore.

Photo : Alban Soto

– Maintenant que vous avez un répertoire conséquent, quel est le programme ? Est-ce que vous envisagez de multiplier les concerts, d’éventuellement aller vous produire en dehors du Canada ? Ou d’aller voir à l’Ouest aussi, car le pays est grand…

Piotr : Après Montréal et la France, on a effectivement décidé d’élargir notre champ d’action. Nous ferons nos premiers concerts aux Etats-Unis début avril et nous enchaînerons aussi sur une tournée en Ontario avec des concerts, entre autres, à Toronto et Ottawa début mai. On a hâte de partager notre musique avec ce nouveau public !

– J’aimerais aussi que vous nous parliez du visuel, qui a une part importante chez SEUM. Là encore, vous avez fait fort. Avec qui avez-vous travaillé et comment se passent toutes ces collaborations, qui sont toujours très étroites entre vous et les autres artistes ?

Piotr : Ravi que la pochette de « Double Double » te plaise, on l’aime beaucoup aussi ! Elle a tendance à diviser ce qui était dans nos intentions. On voulait un visuel atypique pour du Metal, qui puisse aussi bien correspondre à du Punk, de la Pop ou n’importe quel autre style de musique. On a la chance d’avoir pas mal de dessinateurs et d’artistes dans notre entourage, on aime aussi partir à la découverte d’artistes méconnus, comme ce fut le cas pour Fadzee, le dessinateur malaysien qui a fait la pochette de « Blueberry Cash ». Dans le cas de « Double Double »,  on a collaboré avec un ami, Gorka Uztarroz, qui avait déjà fait la pochette de notre split avec Fatima. On est arrivé avec le titre de l’album et quelques propositions de concepts  qui, avec le recul, n’étaient pas vraiment terribles. On avait en référence la pochette de « Houdini » des Melvins. Gorka nous a poliment écouté et est revenu avec sa propre proposition, un personnage au visage ‘double’, qui nous a immédiatement convaincu. On a ensuite itéré autour du concept avec d’abord l’idée d’intégrer des vrais bâtiments caractéristiques de Montréal, puis d’avoir des sets de couleurs différentes suivant les versions : orange pour le digipack, vert pour le vinyle et enfin faire que ces deux versions se répondent (l’album sur le Billboard au verso de la version digipack est la version vinyle et vice-versa), etc… On trouve que l’identité visuelle d’un album est importante et on y investit autant de temps et d’efforts que dans la musique.

– Enfin, vous êtes toujours fidèles à une confection et une conception DIY de votre musique. Est-ce que le travail avec John Golden vous a donné des envies de signature sur un label, par exemple, ou l’idée n’a pas encore fait son chemin ?

Piotr : Tu n’es pas le premier à nous le demander. Tout faire en indépendant nous permet de prendre des décisions atypiques et d’être à 100% aux commandes du groupe. La pochette de « Double Double » en est un exemple, mais il y a d’autres cas. Pour promouvoir l’album, on a passé des nuits à parcourir Montréal et peindre des pochoirs SEUM aux quatre coins de la ville. On a ensuite organisé un concours pour nos fans consistant à prendre les pochoirs en photo et les partager sur leurs réseaux sociaux pour, finalement, récompenser ceux qui en auraient trouvé le plus. Pas sûr qu’un label nous aurait suivi sur une idée aussi loufoque ! Mais on n’est pas fermés à l’idée d’un label sur le principe, il faudrait rencontrer une équipe de gens aussi tordus que nous. Ce n’est pas une mauvaise manière de conclure l’interview d’ailleurs : vous avez un label ? Vous aimez faire tout le contraire de ce qu’il faudrait faire ? Contactez-nous !

Retrouvez SEUM sur son Bandcamp : https://seumtheband.bandcamp.com/

Et SEUM sur Rock’n Force, ça fait aussi un moment que ça dure !

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Heavy metal

Manigance : sans frontières

Alors qu’ils auraient pu surfer encore un peu sur « Le Bal Des Ombres », où ils ont montré de bien belles choses, les musiciens de MANIGANCE se sont donné un nouveau challenge. En réarrangeant et surtout en interprétant ce dernier album en anglais, l’objectif est clairement affiché : s’exporter le mieux possible au-delà de nos frontières. Si certaines tentatives se sont révélées plutôt approximatives, celle des compagnons de François Merle s’avère très convaincante.

MANIGANCE

« The Shadows Ball »

(Rockshots Records)

Il y a un an, presque jour pour jour, MANIGANCE sortait « Le Bal Des Ombres » (Verycords) et amorçait un retour fracassant avec un registre riche et très bien arrangé. Très Heavy et surtout porté par sa nouvelle chanteuse Carine Pinto, en lieu et place de Didier Delsaux, et juste après la sortie de « Machine Nation » en 2018, l’album avait reçu un bel accueil et le groupe a livré quelques concerts mémorables. Très à l’aise dans cette nouvelle formule où le chant féminin apporte un vrai plus, le groupe a pris une nouvelle envergure.

A l’aube d’une tournée européenne avec les Italiens de Rhapsody Of Fire, le quintet a eu la riche idée de réinterpréter son dernier opus, cette fois en anglais. L’objectif est bien sûr de communier plus facilement avec le public et aussi de s’ouvrir des portes à l’international que le chant en français ne permet souvent pas. Et MANIGANCE a vu juste car, devenu « The Shadows Ball », la neuvième réalisation des Pyrénéens présente une saveur, certes différente, mais tout aussi à propos et surtout bluffante à bien des égards.  

Armé d’une puissance vocale à la fois sensuelle et solide, le combo perpétue un Heavy Metal aux reliefs Old School penchant vers un Power très moderne avec une vigueur de chaque instant et tout en conservant son identité première. Sur une production de son guitariste François Merle, MANIGANCE réussit parfaitement l’adaptation de son disque dans la langue de Shakespeare, et celle-ci offre même beaucoup de volume à plusieurs morceaux. Les Français nous font traverser une multitude d’ambiances avec une belle assurance.