DANKO JONES est avant tout un groupe de scène, qui a pour habitude de composer et de répéter inlassablement en studio pour donner vie à des morceaux inscrits dans un Rock brut aux saveurs Hard Rock et à l’énergie presque Punk. Sauf que ces derniers mois, le trio de Toronto a du modifier ses plans et revoir sa façon de faire. « Power Trio » ne souffre pourtant pas d’un manque de spontanéité, ni d’énergie… bien au contraire ! John ‘JC’ Calabrese, bassiste de la formation canadienne, nous en dit plus sur la création de ce dixième album.
Photo : Dustin Rabin
– « Power Trio » est votre dixième album et il marque aussi vos 25 ans d’existence. Alors que tout était réuni pour que la fête soit totale, la pandémie est venue tout bouleverser. Comment est-ce que vous le vivez ?
Ce confinement vécu par tout le monde a été inédit et difficile. J’ai tout de suite pensé qu’il serait sage d’utiliser notre temps pour travailler à distance sur des chansons. C’est comme ça que le processus a commencé pour l’écriture de ce dixième album studio. Il est différent des précédents, mais nous avions neuf albums studio et une grosse expérience sur lesquels nous appuyer.
– D’ailleurs, vu la situation, comment avez-vous composé ce nouvel album, vous qui avez l’habitude de travailler de manière traditionnelle et assez classique ?
Les chansons ont toutes été arrangées sur Logic, puis partagées par e-mail. Chacun a enregistré ses propres parties lui-même. J’ai fini par faire l’arrangement des chansons et j’ai aidé à tout organiser de sorte que le moment venu, il soit prêt à passer en production.
Photo : Mike Highfield
– Ce qui est également remarquable avec « Power Trio », c’est que malgré les circonstances votre son reste puissant, compact et très vif. DANKO JONES conserve aussi un son très contemporain et moderne. Quelle est votre recette ?
Merci. C’est aussi le résultat de nombreuses tournées et d’années à apprendre à faire un disque. En fin de compte, nous sommes un groupe live, mais ce processus de création de « Power Trio » nous a aidés à apprendre à écrire d’une nouvelle manière. Et en fait, je nous vois même continuer comme ça à l’avenir.
– Vous vous êtes aussi inspirés du confinement pour l’écriture de vos textes, ainsi que du meurtre de George Floyd et du mouvement Black Lives Matter. Est-ce à dire que vous prenez une voie plus engagée, voire politisée ?
Les paroles sont toutes signées Danko (Jones, guitariste et chanteur – NDR). Il a été ému par les événements entourant la mort de George Floyd et le mouvement Black Lives Matter. Je ne pense pas que nous deviendrons un groupe politique, mais avoir une chanson avec ce sentiment est génial, et peut-être qu’elle en engendrera quelques autres à l’avenir.
– « Power Trio » est également un album sans concession, ni compromis. L’efficacité brute et direct des morceaux montre une fougue toujours aussi Rock’n’Roll, comme si les modes et les tendances actuelles n’avaient aucune prise sur vous. C’est le cas ?
Oui, nous n’allons pas emmener l’auditeur dans un voyage de découverte de soi, où je jouerai de la flûte en essayant d’atteindre une conscience alternative. (Rires) Nous sommes un groupe de Rock et nous savons ce qu’on attend de nous !
Photo : Dustin Rabin
– Ce nouvel album sort dans une période qui reste instable pour les groupes, les concerts et les festivals en Amérique du Nord comme en Europe. Vous auriez pu patienter quelques temps. Vous étiez impatients d’en découdre, de proposer ce nouveau disque ?
Nous espérions planifier une tournée autour de la sortie de l’album, mais bien sûr tous les plans sont tombés à l’eau. Espérons que nous nous remettrons tous sur la bonne voie pour chavirer tous ensemble en concert. Je suis cependant certain que beaucoup de gens apprécieront « Power Trio » !
– Enfin, Danko Jones, votre chanteur et guitariste, a déclaré qu’il était facile d’écrire des chansons Rock. Tu partages aussi son avis ? C’est tellement si simple ?
Oui, mais c’est difficile d’en écrire des bonnes ! (Rires) Je pense que c’est vraiment une question d’éthique de travail. Il faut continuer à écrire et persévérer quoi qu’il arrive. Les chansons n’apparaissent pas comme par magie. Je pense que les gens entendront le travmate in germany,ail acharné et le plaisir que nous avons eu à faire cet album. En fin de compte, il faut que cela soit amusant pour tout le monde.
L’album « Power Trio » de DANKO JONES est disponible depuis le 27 août chez Mate in Germany/Tonpool.
Quelques mois après avoir sorti un très bon premier album, « Quest Of Oblivion », en autoproduction, le quatuor de Seattle a résonné jusqu’en Californie où sa musique est arrivée aux oreilles affûtées du staff de Ripple Music. Il faut dire que le Doom Blues très Psych, Stoner et Grunge de SUN CROW surprend par sa fluidité et sa créativité. Ben Nechanicky, guitariste du combo, revient sur le parcours du groupe et surtout sur sa vision de la musique et de l’état d’esprit des Américains.
– « Quest For Oblivion » possède déjà une belle histoire. Vous l’aviez déjà sorti sur Bandcamp à l’automne dernier avant qu’il ne suscite l’intérêt de Ripple Music, qui le sort aujourd’hui en physique. J’imagine que ce doit être gratifiant d’être repéré par un label comme celui-ci, non ?
Oh oui, carrément. Nous étions aussi confus que tout le monde quant à ce qu’il fallait faire quand la pandémie faisait rage. Alors, nous nous sommes dits : sortons simplement l’album et mettons-le là où les gens pourront le trouver. Lorsque nous avons parlé pour la première fois aux gens de Ripple Music, qui avaient vu l’album grimper dans les Doom Charts (ce qui était aussi une sacrée surprise), ça a tout de suite été génial. Nous l’avions publié en autoproduction de manière simple, honnête et assez modeste. Etre repéré par des gens aussi cool et expérimentés que Todd (Severin, le boss du label – NDR) et l’équipe de Ripple, qui sont profondément dans l’esprit des musiques dont nous sommes de grands fans, est incroyable.
– Avant d’aller plus loin, éludons le changement de chanteur avec le remplacement de Charles Wilson par Todd Lucas. Que s’est-il passé ? Son départ a eu lieu dans l’intervalle, avant la signature avec Ripple Music ?
SUN CROW était dans une étrange période musicale depuis un moment. Nous ne savons pas ce qu’il s’est réellement passé avec Charles, nous ne savons même pas s’il le sait lui-même. Il était là, nous nous sommes retournés et il était parti. Sans blague ! Il s’est présenté comme un fantôme une fois tôt le matin, a dit des choses étranges et a laissé un numéro qui ne fonctionnait pas. Nous avons attendu un certain temps, aucun des anciens numéros ou de comptes ne fonctionnaient. Nous avions tous convenu de faire ce que nous pouvions pour terminer le travail et sortir l’album. Nous pensons qu’il est préférable de s’assurer que sa voix soit entendue sur ces enregistrements, où qu’il se trouve. Aussi étrange que cela ait été (et soit toujours), le groupe a décidé de continuer en son absence à travailler avec notre ami Todd sur la suite.
– Charles Wilson avait produit une très forte prestation vocale sur l’album. Quelle va être votre démarche avec Todd Lucas ? Reproduire le même esprit au niveau du chant, ou partir sur tout autre chose plus en adéquation avec son style ?
Ouais, c’est vrai. Son art et son travail sont uniques, et il est important pour nous que les gens puissent l’entendre. Il est très clair que ce sont des personnes très différentes, mais ils ont aussi des choses en commun. C’est vraiment étonnant, mais ils ont un passé et des expériences similaires dans leur jeunesse. Ils viennent tous les deux de régions arides de l’est de Washington et ont tous deux des gammes vocales proches. Leur style et leurs influences sont un peu différents. Todd est un peu plus ancré dans les années 70, alors que Charles l’était solidement dans les années 90. Nous sommes enthousiastes quant à leurs points communs, mais aussi leurs différences.
– Musicalement, « Quest For Oblivion » est étonnant de maturité et de créativité pour un premier album. Vous avez fait très fort ! Ce sont des morceaux que vous travaillez et mûrissez depuis longtemps, car l’écriture est précise et les morceaux solides ?
Ca fait très plaisir à entendre, merci ! Keith (Hastreiter, batterie – NDR) et moi avons joué ensemble pendant longtemps. Nous avons travaillé les morceaux de manière organique et les choses ont avancé très naturellement. Les chansons sont à l’origine conçues sous la forme d’un set live à interpréter dans l’ordre du disque. D’une certaine manière, « Quest for Oblivion » capture à la fois une performance et une idée prévue de longue date. Il reflète notre façon de vivre, autant qu’il projette une histoire.
– Contrairement au Doom Metal classique, votre jeu est très véloce sans être trop écrasant. Au contraire, SUN CROW propose un style très aéré et aérien. C’est important pour vous de vous démarquer des codes du genre en vigueur ?
Merci, c’est un vrai compliment. Je dirais que peut-être que certaines des parties disposent d’une sorte de fluide naturel. En jouant fort, il y a des oscillations et des tensions qui ont besoin de se libérer. Peut-être que les sons plus désorientés reflètent nos intérêts pour le mystérieux, et nos discussions sur la nature des choses que nous ne comprenons pas. Ensuite, c’est une réaction à ces sentiments. Nous ne nous efforçons pas vraiment d’être différents ou d’essayer de nous conformer, nous faisons juste notre truc et nous en tenons à ça.
– Justement, votre jeu est fait de plusieurs composantes comme le Grunge et le Blues pour l’essentiel. On a l’impression que dès qu’un groupe vient de Seattle, il y a forcément l’influence du Grunge. C’est vraiment si présent dans la ville et parmi les groupes ?
Je pense que oui. Le grunge est une sorte de terme inventé pour expliquer quelque chose de viscéral qui était dans la musique ici pendant longtemps avant que le reste du monde ne commence à le définir comme une catégorie. C’est quelque chose qui est très naturel dans le nord-ouest du Pacifique. Cela s’est même étendu de la Colombie-Britannique au Canada, jusqu’au nord de la Californie dans un vaste paysage culturel où certaines de ces façons d’être se sont tout simplement implantées. L’eau froide, les forêts sombres, les paysages isolés et les longs hivers sont des facteurs directs. Parfois, les mythologies se nourrissent d’elles-mêmes, mais c’est peut-être quelque chose de moins important que la météo et la culture palpable. Tout ça est évident dans le son, bien que chaque expérience soit toujours unique suivant les gens.
– On a parlé du Grunge, mais le Blues est aussi très présent dans votre musique et surtout dans son aspect sombre. D’où viennent vos références en termes de Blues ? Et comment l’intégrez-vous dans ce Doom Metal imposant ?
C’est un sentiment, un aspect plus sombre qui nous attire. Pour nous, tout le Metal lourd est fondamentalement du Doom Blues existentiel. Les premiers musiciens, qui utilisaient le volume et le gain de leurs amplis pour en extraire ce son, étaient les grands joueurs de Blues originaires du fleuve Mississippi. C’est devenu le Rock’n’Roll, et tout est rapidement devenu plus fort à mesure que les amplis devenaient plus puissants. Les groupes des années 60 et 70 l’ont rapidement porté à un niveau que nous pourrions reconnaître comme du Metal aujourd’hui, mais les mêmes motifs étaient suggérés dès les années 40. Même les tout premiers artistes comme Bukka White (qui était principalement un musicien acoustique) obtenaient ces sons en utilisant une diapositive qui ressemble beaucoup à ce que vous obtenez avec une distorsion amplifiée. Lorsque vous ajoutez cela aux technologies d’enregistrement limitées de l’époque, les sons étaient assez sauvages et bruts. C’est une réponse physique plus qu’autre chose. Tant de choses sont venues de ces gens-là et de leur art, nous nous inspirons beaucoup d’eux et essayons de l’honorer de la meilleure façon possible.
– Enfin, j’aimerais qu’on dise un mot sur la production et le mix de « Quest Of Oblivion ». De quelle manière avez-vous travaillé et dans quelles conditions l’album a-t-il été enregistré ?
Notre ami, ingénieur et producteur Gary Mula, a mis tout son talent et sa vision dans le processus. Nous avons enregistré la plupart des morceaux dans un studio de notre quartier que notre bassiste (Brian Steel – NDR) a aidé à mettre en place. Enregistrer là-bas semblait être un choix évident, et c’est juste en haut de la rue où vivent quelques-uns d’entre nous. Maintenant que j’y pense, Brian vivait en fait juste à côté du studio. Nous avons produit un bon ensemble de sessions, qui ont finalement donné à Gary un puzzle surréaliste de bonne qualité pour commencer le mix. Nous sommes vraiment heureux qu’il ait partagé avec nous ses dons pour démêler des nœuds en quatre dimensions. Les amitiés que nous y avons tissées sont pour la vie.
Le premier album de SUN CROW, « Quest Of Oblivion », est disponible chez Ripple Music depuis le 2 juillet.
Depuis son début de carrière tonitruant dans les années 80 avec une succession de hits incontournables, LEE AARON mène sa barque en étant devenue sa propre productrice et en effectuant avec « Radio On ! » un remarquable retour à un Rock Hard mélodique percutant et entêtant. La Canadienne n’a rien perdu de sa fougue, bien au contraire, et parle sans détour de son amour du Rock, de son nouvel album et de la place des femmes dans ce milieu toujours très masculin.
– Depuis 2016 et l’album « Fire And Gazoline », tu es revenue au Rock de tes débuts dans lequel d’ailleurs ta voix prend une dimension incroyable. Et « Radio On ! » est lui aussi entièrement Rock. Finalement, on revient toujours à ses premières amours ?
Ah, ah ! Excellente question ! Je suppose que nous sommes tous enclins à vouloir retrouver nos premières amours. Quand nous écrivions les chansons de « Radio On ! », je voulais simplement capter cette énergie et ce sentiment que nous avions à l’adolescence quand nous étions si excités par les groupes que nous écoutions. Tout ce que nous voulions faire était de nous retrouver dans un garage et de jouer fort de la musique Rock pour nos amis. Nous n’essayions pas d’écrire des chansons à succès en soi, nous faisions juste de la musique que nous pensions être cool et qui faisait battre nos cœurs un peu plus vite. Je suppose que cela revient à la bonne vieille musique Rock’n’Roll pour nous. Nous sommes toujours de grands fans de la musique des autres. Je pense que cela nous motive pour continuer à créer.
– Avec ce nouvel album, tu reviens au Melodic Rock, voire au Hard Rock, qui a fait ton succès. Alors que le genre semble retrouver un regain d’intérêt, tu restes fidèle à ce que tu as toujours fait et cette authenticité est vraiment palpable. Te sens-tu détentrice d’un certain héritage musical ?
Je ne sais pas si héritage est le mot juste, mais j’ai toujours fait les albums que je voulais. J’ai exploré d’autres genres de musique (comme le Jazz, le Blues et même l’Opéra), mais je reviens toujours au Rock. Je pense que ces expériences musicales ont élargi ma réflexion et ma créativité pour faire de moi une meilleure chanteuse et une meilleure auteure-compositrice de Rock. Je pense qu’on retrouve les saveurs de ces différents styles dans ma musique et notamment sur « Radio On ! ». Pour ce qui est de faire des albums très mélodiques, je me suis toujours efforcée d’écrire des chansons avec des refrains qui restent dans la tête des gens et leur donnent envie de chanter. Pour moi, c’est la recette d’une bonne chanson.
– A l’écoute de « Radio On ! », on retrouve cette fougue et cette sincérité à travers un Rock féminin pêchu et mélodique. Tu es d’ailleurs simplement accompagnée d’un groupe en formule guitare/basse/batterie très efficace. Tu souhaitais donner un son brut et direct à ce nouvel album ?
Je suis convaincu qu’en matière de production, plus c’est simple, mieux c’est. Si tu as perçu ce son comme brut et direct, c’est exactement ce que nous espérions ! Je préfère retirer des choses plutôt que d’en ajouter. Si une chanson se tient sur une instrumentation de base avec juste une voix, alors c’est un travail solide. À l’ère de la technologie numérique, il n’est même plus nécessaire pour les artistes de bien jouer de leur instrument. Tout peut être mis en boucle, édité, collé et corrigé. Je suis toujours dans cette idée ‘Old School’ selon laquelle les musiciens obtiennent de meilleurs sons quand ils jouent ensemble et en direct.
– Depuis tes débuts, tu es l’une des rares représentantes féminines dans le milieu du Rock et même du Hard Rock mélodique. Comment expliques-tu la situation actuelle et comment est-ce que tu penses que cela pourrait éventuellement changer ?
Être une femme dans le milieu du Rock a toujours été difficile et ça l’est toujours. J’ai maintenant le cuir épais face à la critique. Il y a toujours un journaliste ou un critique musical, qui veut vous réduire à votre « apparence » et rejeter votre talent et votre dur travail. J’en suis à mon 17ème album maintenant, donc évidemment, j’ai une éthique de travail féroce depuis des années. Nous sommes toujours moins nombreuses que nos homologues masculins, et cela ne compense pas notre sous-représentation sur les scènes des festivals et dans l’industrie musicale. Les hommes dirigent encore majoritairement le business et on voit assez rarement des groupes féminins avoir les mêmes cachets ou être en tête d’affiche des festivals Rock. L’ensemble du mouvement #MeToo a braqué les projecteurs sur certains promoteurs pour prendre conscience du fait que les femmes ont besoin d’être représentées plus équitablement dans les festivals. En 1984, à 21 ans, quand j’ai écrit la chanson « Metal Queen », je pensais que les femmes méritaient le respect et l’égalité totale dans le Hard Rock. C’était tout l’intérêt de la chanson, mais ce message a été complètement perdu dans le marketing sexiste des années 80. Les fans masculins pensaient que je m’autoproclamais comme leur propre déesse du sexe en Metal, ce qui était exactement le contraire. C’est pourquoi, pendant un certain temps, j’ai refusé de la chanter. Ce n’est que maintenant – 37 ans plus tard – que les journalistes m’interrogent sur la véritable signification de ces paroles.
– Sur « Radio On ! », tu abordes de nombreux sujets assez sensibles et personnels. C’est l’époque qui veut ça ou c’est un désir plus profond qui t’anime depuis plus longtemps ?
J’écris toujours sur ce que j’ai dans le cœur et à l’esprit à un moment précis. J’avais beaucoup pensé à la mort, ayant perdu ma mère en 2017, ainsi que beaucoup d’amis musiciens et chanteurs au cours des cinq ou six dernières années. Devenir parent de deux enfants a également changé ma façon de voir le monde. Parfois, je me retrouve tellement en colère contre la stupidité et la politique, le mépris de l’environnement et la façon dont nous nous restons si passifs face à l’impact des réseaux sociaux et des fake news. Cette colère me procure aussi de quoi écrire beaucoup de chansons ! (Rires)
– Même si Mick Fraser a travaillé sur le mix de « Radio On ! », c’est déjà le sixième album que tu produis. C’est important pour toi d’être à chaque étape du processus ?
Absolument ! J’ai mon propre label, Big Sister Records, et à travers je gère le studio, les ingénieurs, le mastering, le mix, les photographes, l’équipe de conception artistique et vidéo, etc… et je dirige chaque partie des albums jusqu’à leur finition. Ainsi, que ce soit un succès commercial ou non, je suis à chaque fois satisfaite du résultat. J’ai appelé Mike Fraser et je lui ai demandé s’il voulait mixer l’album (les morceaux étaient déjà terminés à 100%), et il a été vraiment excité à l’idée de travailler avec nous. Je me sens très chanceuse d’avoir pu travailler avec Mike et j’ai beaucoup appris à ses côtés… même s’il hésite encore à dévoiler certains de ses « secrets de mixage »… ! (Rires)
– En tant que chanteuse, tu n’as jamais été tentée de monter un groupe entièrement féminin, par exemple, comme cela se fait toujours régulièrement ?
C’est une excellente question. La réponse est pourtant non. Mais il y a tellement de grandes musiciennes avec qui j’ai pu travailler. La claviériste de mon groupe à la fin des années 90 était une femme, qui a également joué du Jazz avec moi pendant plusieurs années. Cela m’intéresse de travailler avec des musiciens qui sont les meilleurs et ils ne sont pas faciles à trouver. J’ai travaillé avec beaucoup d’hommes qui ne correspondaient pas non plus à mon groupe. En ce moment, j’ai un groupe fantastique de gars talentueux avec qui j’aime écrire et enregistrer. Nous avons ensemble une alchimie musicale assez redoutable. Alors, pourquoi est-ce que j’en changerais ?
– Les concerts reprennent petit à petit. Comment vas-tu constituer ta set-list entre anciens et nouveaux morceaux ? Cela ne doit pas être si évident avec autant de titres incontournables, si ?
Mon set se compose de beaucoup de nouvelles chansons. Parfois, j’ai du mal à intégrer tout ce que nous voulons jouer et ce que le public veut entendre. Mes fans apprécient vraiment le fait que j’enregistre toujours et demandent à entendre les nouveaux morceaux. Bien sûr, je vais toujours inclure les classiques comme « Whatcha Do To My Body », « Hands On », « Barely Holdin’ On », « Some Girls Do », « Metal Queen », , etc… Je change les chansons en fonction de l’endroit dans le monde où je joue, parce que certains pays ont leurs titres préférés qui sont très populaires. Quand je vois la joie qu’apportent ces vieux morceaux aux gens, c’est vraiment incroyable. Cela les ramène à une période plus jeune de leur vie et leur rappelle de bons souvenirs. Mais la plus belle chose de voir des jeunes qui ont été élevés par leurs parents en écoutant notre musique. Quand ta musique dépasse plus d’une génération, c’est la plus grande récompense.
L’album de LEE AARON, « Radio On ! », sera disponible 23 juillet sur Metalville Records.
A force de préciser systématiquement quand il s’agit de Thrash Metal qu’il est Old School, pourquoi ne pas se résoudre au fait que c’est l’essence-même du style et qu’il est inamovible et intemporel ? C’est en tout cas, le parti pris de DEAD TREE SEEDS qui revient sous les projecteurs avec un très bon deuxième album. Old School certes, mais résolument moderne dans le son, l’approche et la production, le quintet francilien monte en gamme comme l’atteste la puissance de « Push The Button ». Entretien avec Alex, batteur indéboulonnable du combo depuis ses débuts.
– La première chose qui interpelle à la lecture de votre biographie, ce sont les innombrables changements de line-up. Depuis Triakanthos, on les compte plus. Pourtant malgré tout, vous n’avez cessé de tourner. Vous êtes sacrément tenaces, dis-moi ?
Oui, c’est clair et ce qui est important de rappeler, c’est qu’à fois il n’y a eu aucune animosité. Ce sont des changements simplement liés à la vie avec des départs dans d’autres pays, des changements d’activités professionnelles ou juste le fait d’arrêter la musique pour faire autre chose. Il n’y a jamais rien eu de dramatique ! On continue d’y croire, on aime ce qu’on fait et je pense que ce nouveau line-up, musicalement et humainement, est vraiment stable. C’est plus costaud déjà, et puis on a aussi vieilli et ça nous permet de voir l’avenir plus sereinement.
– D’entrée de jeu, vous avez annoncé la couleur avec un Thrash Metal orienté Old School. C’est le style qui vous parle le plus, même si vous avez fait évoluer votre registre vers une orientation plus technique ?
En fait, on n’y prête pas vraiment attention, ce n’est pas intentionnel. C’est vraiment instinctif, c’est notre style de prédilection. Il n’y a aucun calcul. Il se trouve juste que lorsque chacun apporte quelque chose, c’est ce qui en ressort naturellement.
– Justement, on assiste depuis quelques temps à l’émergence de multiples courants avec des aspects plus progressifs, d’autres tirants sur le Death et bien sûr un groove que vous vous êtes d’ailleurs appropriés. On a le sentiment que votre désir est vraiment d’aller à l’essentiel. C’est le cas ?
Le désir est simplement de faire ce qu’on aime, tout simplement. Certains titres sont peut-être plus techniques, mais on garde cette puissance que dégage le Thrash Metal. C’est vraiment notre subconscient qui parle.
– Depuis 2013, vous évoluez sous le nom de DEAD TREE SEEDS. C’était important pour vous de changer de nom, pour peut-être aussi donner une nouvelle impulsion au groupe ?
C’était même obligatoire ! En fait, après pas mal de péripéties, nous nous sommes retrouvés à trois dans Triakanthos avec une pleine liberté sur le répertoire du groupe et la suite à donner. Le nom du groupe est celui d’un arbre d’Amérique, et nous nous sommes fait la réflexion qu’il était finalement mort. Mais il restait les graines, d’où le nom « les graines de l’arbre mort » : DEAD TREE SEEDS. Et musicalement aussi, on était vraiment parti sur autre chose.
– Est-ce que, malgré tous ces changements de line-up, il reste une ligne directrice à DEAD TREE SEEDS, moi qui n’ai malheureusement pas pu écouter votre premier album ?
Oui bien sûr, notre ligne directrice reste la puissance telle qu’on la perçoit. Ce qui est marrant, c’est notre premier album était composé d’anciens et de nouveaux morceaux. Cette fois, l’approche est très différente : c’est plus travaillé et plus approfondi. Et le fil rouge reste le Thrash Metal Old School, tel qu’on le ressent.
– Depuis une dizaine d’années que vous évoluez sur la scène Thrash hexagonale, quels sont les changements ou les évolutions que vous avez pu noter. Est-ce que, selon vous, le style a gagné en visibilité et s’est développé sur la scène française ?
Avec les réseaux sociaux, on voit apparaitre beaucoup de groupes qui font parler d’eux et peut-être même parfois un peu trop. Avant, il y avait assez peu de groupes et on en parlait. Maintenant avec le Web, on est un groupe parmi des milliers d’autres. C’est plus compliqué d’émerger aujourd’hui qu’auparavant. Après, sur la scène française actuelle, il y a vraiment de très bons groupes, qui sont malheureusement pour beaucoup noyés dans la masse.
– Parlons de « Push The Button », qui est remarquablement bien produit et qui regorge d’excellents morceaux, le tout dans une belle homogénéité. De quelle manière l’avez-vous composé et est-ce que vous êtes partis d’anciens morceaux ou, au contraire, sur de nouvelles bases ?
De l’ancienne époque, il ne reste qu’un seul morceau, qui n’avait pas figuré sur le premier album. Entre les deux line-up, il ne reste que moi qui suis membre du groupe depuis le départ. Tout est neuf et a été composé au feeling, comme on le fait habituellement.
– Ce deuxième album sort sur le label Music Records avec une première parution en digitale cet été, puis en physique en octobre. Pourquoi un tel choix ? C’est dû aux contraintes commerciales et marketing ou, plus simplement, parce que vous êtes impatients de le faire découvrir à votre public ?
C’est un peu ça ! (Rires) On a eu des opportunités auxquelles on en s’attendait pas vraiment. Au départ, on n’avait pas de label et on devait le sortir en mars 2020 et le hasard a fait que nous sommes entrés en contact avec Music Records. On a signé chez eux, mais il y avait des sorties, etc… Donc, on s’est calé avec eux. Il y avait aussi beaucoup d’impatience, car sept ans entre deux albums, c’est très long ! On voulait vraiment sortir de toutes ces galères de line-up et véritablement se lancer ! C’est un peu pour ça que l’album sort d’abord en digital, et ensuite en physique.
– Enfin justement, les concerts reprennent peu à peu et les tournées se mettent en place surtout à partir de cet automne. Où en êtes-vous de ce côté-là, vous y travaillez aussi ? La scène reste tout de même un instant de vérité incontournable ?
Bien sûr et surtout pour le Thrash, qui est véritablement une musique de concert et de scène. Quand j’écoute du Thrash, j’ai plutôt tendance à écouter des albums live, parce que c’est là où le style prend toute sa mesure. Il y a un côté rouleau-compresseur imparable. En ce qui concerne les concerts, nous avions quelques dates en 2020, qui seront sûrement reportées à 2021 ou 2022. En fait, on attend un peu plus de perspectives et surtout de savoir qui aura survécu à la pandémie, car c’est un gros problème pour le monde de l’organisation et de nombreux lieux. A partir de ce moment-là, nous allons remonter des choses forcément !
L’album de DEAD TREE SEEDS, « Push The Button », sera disponible le 3 juillet en digital et le 2 octobre en physique chez Music Records.
Dernier représentant de la scène Metal HxC française, PRIMAL AGE est toujours debout, et semble même plus virulent et motivé que jamais. Avec « Masked Enemy », le quintet s’inscrit dans son temps avec des compos très rentre-dedans aux textes acidifiés. Dimitri, bassiste et fondateur du groupe, revient sur le parcours du combo, ses convictions et ce très bon nouvel album.
– Pour vous suivre depuis le début des 90’s, la première chose que j’ai notée en écoutant « Masked Enemy », c’est que votre jeu semble beaucoup plus complexe, tout en restant très direct. C’était votre intention première ?
La seule intention a été de faire un album brutal, genre uppercut au foie. La complexité vient si elle doit venir, mais sans calcul. Ce qui ressort quand on lit les chroniques, c’est ce côté rouleau compresseur.
– PRIMAL AGE a toujours évolué dans un registre Punk HardCore teinté de Metal, et vous n’avez pas changé. Pourtant votre son et vos compos ont une résonnance et une production très actuelles. Finalement, votre évolution a été permanente toutes ces années ?
En 28 ans, bien sûr et heureusement que le dernier disque ne sonne pas comme le premier. (Rires) La prod’ est forcément plus grosse, car ça a beaucoup évolué dans ce domaine. Quand tu écoutes certaines productions de HardCore il y a 25 ans, il y avait franchement peu de moyen et la qualité pouvait être très limite. En revanche, on a trouvé dès les débuts notre identité musicale et on s’y tient, car c’est exactement le son qu’on veut faire. On a réussi à évoluer dans la continuité et faire notre meilleur album au bout de 28 ans, comme quoi…
– « Masked Enemy » est un album très varié et il aborde plusieurs styles musicaux, mais sans porter dans la Fusion pour autant. Il est aussi très homogène et montre un registre assez peu répandu et toujours underground. PRIMAL AGE semble se jouer des modes et des courants. C’est le cas ?
Clairement, les modes on s’en cogne. Quand tu t’inscris dans la durée et que tu veux suivre le dernier truc qui marche, ça fait du n’importe quoi, t’imagines la discographie qu’on aurait ? Cela dit, Flo et moi, qui avons composé les morceaux sur cet album, écoutons des styles variés et ça ressort. En même temps il est impératif que le tout reste cohérant et je pense qu’on a bien réussi à se compléter et à apporter un max de relief et de richesse.
– Vous faites partie des vétérans, ou précurseurs, de la scène Metal HardCore française, et pourtant vous êtes sûrement les plus discrets et les moins exposés. C’est un choix de votre part ou un concours de circonstance ?
C’est un choix dans le sens où on a toujours voulu rester amateurs et que, par conséquent, nous ne sommes pas appuyés par de grosses structures. La différence se fait là et il faut l’assumer, même si on sent bien qu’on aurait pu faire de plus belles choses encore si on était plus soutenus et donc mis en évidence. On souffre clairement d’un déficit d’image, mais ça ce n’est pas de notre ressort. C’est comme ça que fonctionne le milieu de la musique. Cela dit, dans ce style et de cette époque, il n’y a plus que nous en France.
– Pionniers, vous l’êtes aussi en ayant adopté une philosophie straight edge dès vos débuts, alors que personne n’en parlait. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur ce mouvement, dont on ne parle qu’épisodiquement, et êtes vous toujours dans cette démarche ?
Il n’y a plus que Didier au chant et moi comme membres d’origine. Nous sommes toujours straight edge. Par la suite, si on voulait continuer à jouer, on a dû s’ouvrir, car on n’aurait pas pu faire une formation complète. Ce n’est pas très répandu dans la scène Metal, mais tant pis, ça nous permet de rester en forme à nos âges, ce choix est le nôtre et chacun fait comme il le sent.
– Au niveau des textes de ce nouvel album, on vous sent toujours engagés et revendicatifs. Contrairement à beaucoup d’autres, vous ne faites pas que dresser des constats, votre propos est plus incisif et protestataire. Votre démarche est toujours très politique finalement ?
Beaucoup de sujets sont politiques finalement, mais on n’a jamais eu de carte pour autant. Ca ne veut pas dire qu’on est indifférent. Il n’est pas question de laisser la politique à ceux dont c’est le métier et l’écologie être représentée par des guignols avec lesquels on n’a rien à voir. Ces sujets m’inspirent et reviennent dans chaque album quand je me mets à écrire. Mais comme pour la musique, l’idée est d’avoir de la variété dans les sujets traités.
– Vous qui êtes issus de la mouvance Metal HardCore, quel est votre sentiment sur le phénomène MetalCore, très Pop, que l’on subit depuis quelques années ? Vous êtes plutôt amusés, intéressés, tentés par l’expérience ou carrément indifférents ?
Je crois qu’on s’en fout un peu. Encore fois, quand on compose, on sort la musique qu’on a envie de faire sans se préoccuper de ce qui marche. On fait ça par passion et avec authenticité, le reste importe peu.
– Pour conclure, le line-up de PRIMAL AGE semble stabilisé avec l’arrivée de Miguel derrière les fûts. Les batteurs et vous, c’est une longue histoire. Cette fois, c’est le bon ?
Oui, on espère et il nous donne de bonnes garanties pour le peu qu’on a eu d’occasions de jouer ensemble. C’est un vrai musicien. La batterie est un élément très important pour la musique qu’on fait. Hormis le tout premier « MCD » sorti en 1999 avec Stéphane, et ce dernier pour lequel on a eu l’aide providentielle de Rudy d’Explicit Silence, il a toujours fallu expliquer aux batteurs comment jouer de leur instrument. Les phases de compo ont toujours été compliquées à ce niveau. Quand on écoute le résultat final, on est sûr d’avoir fait les bons choix. Avec Rudy, nous n’avons rien eu à lui dire, il comprend notre musique et est un excellent musicien. Miguel semble avoir cette fibre.
« Masked Enemy » de PRIMAL AGE est disponible depuis le 11 juin chez WTF Records.
Même instrumentale, la musique de GLEN ne manque ni de poésie, ni d’expression. Le Post-Rock Progressif du groupe berlinois prend une dimension nouvelle sur ce deuxième album, « Pull ! », parfaitement interprété et superbement bien produit. Parvenant à captiver à travers des morceaux pourtant assez longs, mais très rythmés et accrocheurs, le quatuor présente de multiples facettes dues aux parcours singuliers de ses membres. Entretien avec Wilhelm Stegmeier et Eleni Ampelakioutou pour évoquer ce nouvel opus, mais pas seulement…
– On sait que Berlin est une capitale culturelle cosmopolite et GLEN avec son line-up international en est la preuve. Comment vous êtes-vous rencontrés et sur quelles bases et quelles influences musicales avez-vous décidé de bâtir votre répertoire ?
Wilhelm : Eleni et moi sommes des collaborateurs de longue date, tant dans la musique qu’au cinéma. Nous avons collaboré sur plusieurs projets de films : Eleni en tant que réalisatrice, et moi comme compositeur de longs métrages, de documentaires et de films abstraits expérimentaux. Brendan Dougherty nous a été présenté. En plus d’être batteur, il travaille dans le théâtre en tant qu’artiste sonore et a collaboré avec l’Ensemble de danse Meg Stuarts, « Damad Goods », ainsi qu’avec divers autres groupes de danse et de performance. Nous connaissons aussi Maria Zastrow depuis assez longtemps. Elle a animé une émission dans une station de radio indépendante à Berlin, où elle nous avait invité à présenter notre précédent album « Crack ». Elle s’est demandé pourquoi nous ne lui avons pas demandé de jouer de la basse. Et comme elle avait déjà participé à un autre projet musical avec nous, on lui a simplement proposé.
– Vous venez de sortir « Pull ! », votre deuxième album et il est cette fois entièrement instrumental. Le choix de se passer de chant a été une décision que vous aviez prise dès le départ, ou est-ce venu naturellement ? Les morceaux se suffisant à eux-mêmes finalement ?
Wilhelm : Au sein du groupe, il y a toujours eu un terrain d’entente. Il y a une forte influence de l’élément narratif épique issu de la musique cinématographique, la création de nouveaux espaces sonores et de structures ouvertes aux musiques expérimentales ; et d’autre part, celle de la puissante dynamique et l’énergie du Noise, du Drone et du Rock Progressif également. Nous ne voulons pas nous limiter à produire de la musique qui contribue à un genre spécifique. Il y a une transformation constante au sein du groupe.
– Bien qu’instrumental, « Pull ! » se présente comme un album-concept. Est-ce que vous pouvez entrer dans le détail pour nous l’expliquer, et est-ce que le fait de se priver de textes complique les choses pour le côté narratif ?
Eleni : Le titre « Pull ! », ainsi que chaque titre de l’album ouvre la voie à une ambiguïté délibérée. Le morceau « Ahab » et ses illustrations font référence à Mocha Dick, une célèbre baleine agressive, mentionnée pour la première fois en 1839 dans une histoire publiée dans « The Knickerbocker » et « New-York Monthly Magazine », et qui ont probablement été une inspiration pour « Moby Dick » de Melville. Par ailleurs, il se dégage d’autres thèmes comme les personnages mythiques à domination masculine dans « Ahab », les efforts insurmontables sur « Korinth » et le bouton de rose comme énigme de « Davos », entourés de la « Montagne magique » de Thomas Mann accueillant le Forum Economique Mondial, et « Buffalo Ballet », qui est le témoin des batailles historiques de l’urbanisation, sont ouverts à de multiples interprétations. Autant, chacun de ces titres signifie quelque chose pour nous, autant ils laissent suffisamment d’espace à l’auditeur pour de multiples interprétations. Et c’est ce que nous voulions.
– Wilhelm, toi qui viens de la composition de musiques de films, tu as dû être peut-être plus à l’aise dans l’écriture de ces nouveaux morceaux, non ?
Wilhelm : Je suis venu à la musique de film, car j’étais fan de musique de film. J’aime les aspects narratifs des compositions et les paysages sonores de compositeurs comme Ennio Morricone, Pierre Jansen, Georges Delerue, Jerry Fielding ou Michael Small pour n’en citer que quelques-uns. J’aime les images que crée cette musique, même sans regarder le film. Travailler comme compositeur de film, c’est un rêve devenu réalité d’une certaine façon. D’un autre côté, c’est un engagement, car il faut servir les images du réalisateur, bonnes ou mauvaises. En travaillant sur la musique sans ces limitations, je peux servir et orchestrer mes propres images personnelles. Au-delà de cela, travailler en tant que compositeur peut aussi être une entreprise solitaire. Mais j’aime collaborer dans un contexte de groupe et apporter à la musique l’élan des autres musiciens.
– Le fait aussi que les nouveaux titres soient assez longs doit faciliter l’installation d’ambiances musicales grâce à une plus grande liberté, notamment pour un album-concept, non ?
Wilhelm : Tu as tout à fait raison. Certains effets ont besoin de temps pour se développer et s’élever. Par exemple, le rythme répétitif de « Yoo Doo Right » du groupe Can crée un vortex hypnotique qui dure 20 minutes. Cela créé une atmosphère qui rappelle la transe des percussions tribales. Sunn O))) a aussi créé un environnement transcendantal sacré avec son Drones et son volume massif. Pour ce genre de compositions, le temps est une partie essentielle de la musique. C’est un concept complètement différent d’une chanson Pop de trois minutes.
– Musicalement, l’univers de GLEN est assez vaste, même si on peut vous définir comme un groupe de Post-Rock Progressif. C’est une façon de brouiller les pistes, de ne pas se restreindre à un style ?
Eleni : Comme Wilhelm l’a mentionné précédemment, nous ne voulons pas contribuer à la musique d’un genre spécifique. On ne pense jamais à ça. Le terme « Post-Rock » contient tellement de musique et de styles différents que nous nous sentons assez à l’aise pour être définis comme tel, même si nous n’aimons vraiment pas être cataloguer de quelque manière que ce soit.
– Etonnamment, « Pull ! » est un album très technique musicalement et pourtant il est très abordable et ne présente pas de complexité apparente à l’écoute. C’est important pour vous d’être le plus « lisible » possible ?
Wilhelm : Pour moi, la musique est avant tout une expression émotionnelle et non une représentation de virtuosité et de technique. C’est une autre forme de communication. C’est merveilleux quand cette connexion émotionnelle se produit. Donc être « lisible », c’est probablement souhaité par n’importe quel musicien. Cela dit, nous ne changerons jamais un morceau ou une partie pour la rendre plus « lisible » ou consommable. En écoutant notre précédent disque, un ami a été surpris de pouvoir même danser sur notre musique… Je lui ai dit : eh bien danse ! D’un autre côté, Morricone, même avec ses compositions les plus expérimentales pour le cinéma et avec le collectif de compositeurs d’Avant-Garde Gruppo Di Improvvisazione Nuova Consananza ou The Group, a toujours réussi d’une manière ou d’une autre à créer des « Hits », en tout cas selon moi.
– Un dernier mot aussi sur votre travail avec le grand Reinhold Mack, qui a mixé l’album. Comment s’est passé votre collaboration et comment le contact a-t-il eu lieu ?
Wilhelm : Pour faire court, nous avons grandi dans le même petit village dans le sud profond de l’Allemagne… mais pas exactement au même moment. Sa famille avait un magasin de piano à côté de la maison de mes parents. Quand j’étais petit, il avait déjà du succès dans le monde de la musique. Dans le magasin de piano, ses parents avaient exposé une collection de ses disques d’or et je me tenais devant la fenêtre quand j’étais jeune, pensant qu’il y avait une sorte de sortie par là… Je me souviens juste de l’avoir sans doute vu une fois avec mon père quand j’avais peut-être trois ans dans la rue. Il portait un long manteau et des cheveux longs avec un autre gars dans le même style. Je les pointais du doigt en disant « Deatels », ce qui était censé signifier « Beatles ».
De nombreuses années plus tard, j’ai reçu un e-mail surprenant de sa part. Il était à Los Angeles et il venait de rentrer d’Allemagne. Il a allumé la télévision et a regardé un film allemand découvrant mon nom dans le générique de fin pour la musique… Calculant alors que nous étions autrefois voisins… Nous avons alors eu des contacts sporadiques. Quand on travaillait sur « Pull ! », il m’a contacté pour tout autre chose. Nous avons parlé un peu de musique et de business, je lui ai parlé de GLEN et du fait que nous travaillions sur un nouvel album.
De retour au studio, Eleni et moi étions coincés sur un morceau et on avait tendance à en faire de trop. J’avais nos échanges en tête et je lui ai dit : « Qu’aurait fait Mack ? », en pensant à la simplification parfaite de « Another One Bites the Dust ». Nous avons écouté la chanson et avons été subjugués par la parfaite production. Je lui ai alors écrit et il m’a répondu : « Si vous avez un problème, envoyez-le moi ». C’est ainsi qu’a commencé la collaboration, qui a été une belle expérience et vraiment un grand plaisir ! Au final, il a mixé l’intégralité de l’album et nous lui en sommes très reconnaissants ! Ce qui est drôle, c’est que nous ne nous sommes jamais rencontrés en personne jusqu’à présent… sauf par incident quand j’étais petit garçon… peut-être.
L’album « Pull ! » est disponible chez Anesthetize Productions depuis le 7 mai.
Après avoir sorti son deuxième album l’an dernier de son côté et entre deux déconfinements, le groupe a été approché par Listenable Records pour la distribution de « Void », petit bijou de Death Metal Progressif. LUNA’S CALL a dorénavant les coudées franches pour avancer plus librement et surtout s’adresser à un plus large public. Il faut dire que « Void » est étonnant et percutant, tout en étant très technique. L’occasion était donc trop belle pour en parler avec son chanteur et guitariste Neil Purdy.
– En dehors du fait que vous ayez sorti votre premier album « Divinity » en 2016 et que vous êtes anglais, on vous connait malheureusement assez peu en France. Pouvez-vous nous dire dans quelles conditions s’est créé LUNA’S CALL et ce qu’il représente musicalement pour vous ?
En effet, nous sommes un quatuor de Death Metal Progressif originaire du Lincolnshire, au Royaume-Uni. Tout a commencé en 2012, c’était mon projet solo alors que j’étudiais à l’université. J’ai écrit et enregistré une démo et j’ai demandé à mes colocataires de l’époque, Brad et James, s’ils aimeraient me rejoindre pour réenregistrer les parties de basse et de batterie. J’avais déjà fait partie de plusieurs groupes avec Brad (Laver – basse) et James (Batt – batterie), donc je savais que nous aurions une bonne base pour le groupe. Puis, nous avons rencontré Liam (Underdown – guitare), lors d’un concert, où il jouait avec un autre groupe. On a tout de suite su qu’il devait rejoindre LUNA’S CALL. Ironiquement, alors que nous avons tous des goûts musicaux différents, nous n’écoutons pas beaucoup de Death Metal Progressif. En fait, nous faisons la musique que nous aimerions écouter !
– Votre deuxième album, « Void », est sorti en août 2020 et la situation due à la pandémie a bouleversé beaucoup de choses. C’est pour cette raison que vous le ressortez actuellement chez Listenable Records ?
Listenable Records nous a contacté fin 2020 et nous a demandé si nous serions intéressés pour rééditer « Void ». La raison pour laquelle nous les avons rejoint est que nous voulions que notre musique atteigne un public beaucoup plus large. Le fait qu’ils prennent en charge nos ventes physiques me libère plus de temps pour travailler sur d’autres choses, comme l’écriture et l’enregistrement de nouveaux morceaux. La pandémie nous avait en fait aidé à prendre du recul par rapport à la pratique, et à nous concentrer davantage sur la promotion en ligne de « Void ».
– Par rapport au premier album, « Void » est nettement plus abouti et il semble aussi que vous soyez vraiment parvenu à définir votre style et votre son. C’est aussi votre sentiment ?
Écrire les chansons de « Void » nous a semblé beaucoup plus naturel. Après de nombreuses années à jouer ensemble, il est bon de connaître ses forces, mais aussi ses faiblesses, pour savoir comment avancer musicalement. « Divinity » était plus une expérience personnelle pour voir comment je pouvais me dépasser en tant que guitariste. « Void » a un son plus défini, mais cela changera, espérons-le, encore une fois sur le prochain album. Nous voulons continuer à être un groupe ‘Progressif’, de par la nature même de ce terme. On veut grandir, se développer et modifier notre son au fur et à mesure.
– Ce nouvel album est particulièrement bien réalisé et sa production est toute aussi massive. Dans quelles conditions l’avez-vous enregistré, avec qui et quelle a été votre degré d’implication dans les différentes étapes du processus ?
Nous avons réalisé la majorité de la production nous-mêmes. L’album a été écrit en l’espace d’un an et demi environ, puis on est entré en phase d’enregistrement en 2018. Nous voulions faire tout ça près de chez nous et enregistrer autant que nous le pouvions nous-mêmes. La batterie a été enregistrée dans notre studio de répétition. Nous l’avons réservé pendant cinq jours d’affilée et avons essayé d’enregistrer autant que possible. On n’avait pas de date limite pour l’album, et avec les concerts et le travail à temps plein, on a du espacer l’enregistrement de toutes les instruments. Il a parfois fallu plusieurs semaines entre les prises !
Ces courtes pauses m’ont permis de réfléchir à chaque morceau et de continuer à expérimenter d’autres idées, telles que les percussions ou les éléments orchestraux. Ce n’est que lorsque tout a été enregistré et terminé que nous avons demandé à Russ Russell de mixer et de masteriser l’album. Nous savions que Russ ferait un travail incroyable et que le disque était entre de bonnes mains. J’ai eu la chance de passer quelques jours avec lui à le regarder mixer les morceaux et dans l’ensemble, j’ai eu très peu de choses à lui demander. Dès le début, il était clair qu’il savait ce que nous essayions de réaliser avec cet album, et il est même allé au-delà.
– La musique de LUNA’S CALL est assez complexe notamment dans la structure des morceaux et à travers son aspect très technique. De quelle manière travaillez-vous et combien de temps vous a pris l’écriture de « Void » ?
Il y a une grande partie de moi qui souhaite pouvoir être un musicien capable de s’asseoir dans une pièce avec d’autres et jouer. Mais le compositeur solitaire que je suis préfère rester avec ses idées et les sculpter lentement. Habituellement, j’essaie d’intégrer dans les démos ce qui va ressembler à l’idée finale avant de les envoyer au reste du groupe. Puis, il y a encore beaucoup d’apports et de changements dans l’étape de pré-production et même pendant l’enregistrement. L’album n’ayant pas de date limite, nous avons pu expérimenter et essayer différentes approches des chansons et des arrangements.
– Votre Death Metal Progressif emprunte autant à un style très brutal qu’à des composantes de Rock Progressif plus classiques. On a souvent l’impression que contrairement à d’autres groupes, vous tenez presque à séparer et distinguer les deux registres. C’est quelque chose qui vous a paru important dans vos morceaux et sur l’ensemble de l’album ?
Il n’a jamais été dans mon intention de séparer les différents styles en deux registres. J’ai toujours essayé de me mettre au service de la chanson et cela a été un objectif majeur dans l’écriture de « Void ». Je voulais que les chansons possèdent une sensation et un flux naturels, plutôt que de se sentir forcés de passer d’une section Death Metal à du Rock Progressif. L’idée était qu’elles se fondent l’une dans l’autre. Être étiqueté comme groupe progressif me donne certainement la liberté artistique d’expérimenter et d’inclure toutes ces idées.
– LUNA’S CALL se distingue aussi à travers le chant qui est tantôt clair, tantôt growl. Est-ce parce que vous tenez à ce que certains textes soient plus compréhensibles afin de faire passer certains messages, par exemple ?
C’est un point de vue intéressant ! Je suppose que je fais ce qui sonne le mieux pour la chanson. J’essaie souvent différentes approches du chant (clean ou growls) dans certaines parties et je garde la version qui me convient le mieux au final.
– Techniquement, à travers « Void », vous êtes assez étourdissants tout en maintenant une grande cohésion sur tout l’album. Vous n’avez jamais peur d’en faire trop ? Ou au contraire, est-ce que vous vous freinez même un peu ?
On a voulu que « Void » ait des moments très techniques et extrêmes propres au Metal. Cependant, l’équilibre est quelque chose que nous voulions maintenir tout au long de l’album. Nous aimons le Death Metal Technique et même les formes extrêmes de musique progressive, mais un album entier peut, selon moi, souvent paraître épuisant et un peu fatiguant pour l’auditeur. Nous voulions que « Void » l’emmène dans un voyage, un peu comme dans un film. Il y a des moments extrêmes et d’autres plus calmes tout au long de l’album. L’essentiel est que les choses soient fraîches et intéressantes.
– Enfin, j’ai lu beaucoup d’articles sur LUNA’S CALL et tous vous comparent sans cesse à Opeth. Si le lien existe, c’est indéniable, c’est assez hallucinant et très restrictif de s’en contenter. De votre côté, vous êtes amusés ou agacés par le manque d’imagination et finalement de culture musicale de certains médias Metal ?
Un peu des deux je suppose ? Nous sommes ravis de la comparaison avec Opeth, et il me semble que tous les groupes qui impliquent à la fois du clair et de l’extrême leur seront désormais comparés par défaut. Nous avons eu cette discussion d’innombrables fois, et nous ne voyons pas d’autres raisons que celle d’avoir une gamme vocale et un style similaires. Bien que nous ne puissions nier qu’Opeth nous ait influencé en tant que musiciens, ils ne représentent qu’une petite partie du nombre d’artistes que nous aimons et par lesquels nous sommes influencés.
L’album « Void » est disponible chez Listenable Records depuis le 30 avril.
Aussi brut dans l’attitude que dans sa musique, ACID’S TRIP débarque avec un premier album fortement imbibé de Rock’n’Roll aux effluves bluesy et Southern. Originaire de Göteborg en Suède, le quatuor vient de livrer un « Strings Of Soul » aussi ébouriffant qu’intemporel entre riffs Hard Rock et ambiance Psych. Anna, guitariste et chanteuse de la formation, revient sur la conception de ce premier album et aussi sur sa vision de la musique à travers le groupe.
– Avant tout, j’aimerais qu’on revienne sur la formation d’ACID’S TRIP en 2018. Tu jouais avec Honeymoon Disease jusqu’à ce moment-là. Que s’est-il passé ? Tu as senti que c’était le moment de passer à autre chose ?
ACID’S TRIP est né dans mon esprit bien avant que nous ayons jamais parlé de nous séparer avec Honeymoon Disease. Je voulais jouer un Rock plus dur et plus technique, et je n’avais pas le sentiment que le groupe était le bon pour ce genre-là. Je voulais donc créer ACID’S TRIP en tant que groupe parallèle, tout en conservant Honeymoon Disease pour continuer d’exprimer ma créativité. Mais après la dernière tournée espagnole, les autres membres ont abandonné et je n’ai eu d’autre choix que de me concentrer à 100% sur ACID’S TRIP, qui est alors devenu mon groupe principal. C’est ce qui pouvait arriver de mieux d’ailleurs. J’adore le mélange de Soul et de Hard Rock que nous produisons, et nous ne pourrions pas être plus heureux de la sortie de notre nouvel album. J’ai même l’impression que nous venons juste de commencer à jouer même si ça fait déjà trois ans. Le temps passe si vite quand on s’amuse !
– Avec ACID’S TRIP, on a l’impression d’un retour aux sources du Rock’n’Roll avec un son brut, efficace et sans concession. C’est l’objectif ? Aucun artifice ?
Oui, notre principal objectif était ce retour aux sources avec un son plus brut et technique même s’il reste facile d’accès. Nous aimons les riffs intelligents, amusants mais qui sont bien pensés et qui donnent une note personnelle à la tonalité dans laquelle nous jouons. Ce genre de riffs est original, car il n’y a pas beaucoup de groupes aujourd’hui, qui consacrent autant de temps juste pour trouver « ce riff parfait ». De nos jours, tout semble axé sur une voix entraînante et des accords Rock, ce qui n’est pas grave, mais les gens ne se souviendront plus de ces morceaux dans quelques années. Notre album fait partie de ceux qui dureront des décennies et plus, vous ne vous ennuierez jamais en l’écoutant. Laissez-vous aller !
– Et il y a cette superbe Flying V sur laquelle tu joues. On en voit beaucoup trop peu depuis un moment, et notamment dans la nouvelle génération. J’imagine qu’il y a une histoire personnelle autour de cette guitare aussi, non ?
Ouais, ma Vera est ma principale et la seule guitare sur laquelle que je joue en fait. J’ai aussi une excellente guitare JPN SG, mais elle est ma guitare de secours en tournée, car j’aime un peu trop la V. J’ai vu cette édition spéciale de 1998 en 2014-2015, lorsque je passais devant un magasin de guitares ici à Göteborg. Je l’ai vu à travers la vitrine et 10 minutes plus tard, j’ai acheté la guitare de mes rêves. Elle a un son génial et surtout, le manche me parle et je joue beaucoup mieux. Les guitares sont très personnelles et j’adore la forme en V. J’élargirai ma collection V, lorsque le groupe atteindra les grands charts ! (Rires !) Et si Gibson lit ceci, passez-moi un coup de fil !!!
– Avec une inspiration très 70’s, ACID’S TRIP est résolument ancré dans son temps entre Rock lourd et Stoner Psych. L’accent est aussi porté sur un groove imparable et une folie permanente dans l’attitude, comme une sorte de défouloir très orchestré finalement. C’est votre comportement qui guide votre musique, ou l’inverse ?
Oui, c’est l’amour de vieux groupes comme Captain Beyond, The Dead Boys, MC5 et le Kiss des 70’s à leur apogée. Nous écoutons beaucoup de musique Rock et Heavy, et depuis que je collectionne les vinyles, j’ai écouté des milliers de disques qui ont perfectionné mon style d’écriture et la façon dont j’entends les mélodies. Tout ce que j’écris fait référence à quelque chose que j’ai entendu auparavant, et cela sonne comme je l’entends. J’adore l’album, car il a une âme, peu de groupes de Rock aborde le Rock de cette façon.
– J’aimerais que tu me dises un mot sur l’intro de l’album, « Prelude », elle aussi très originale. Quand on connait la suite de « Strings Of Soul », on imagine que vous avez voulu désorienter votre auditoire dès le début, non ?
Quand l’album était presque terminé, il nous restait quelques notes d’orgue à enregistrer. Mon père jouait sur tous les disques Honeymoon Disease, alors je lui ai demandé s’il voulait aussi le faire sur l’album d’ACID’S TRIP. Je connais sa façon de jouer, et lui celle dont je chante les mélodies. C’est comme ça aussi que j’entends les arrangements de chorale et ça sort naturellement pour moi. Je lui ai demandé de jouer un morceau mélancolique auquel j’ajouterai plus tard des voix. Je veux que les gens réfléchissent lorsqu’ils écoutent notre album, et « Prelude » était un moyen de mettre les gens de bonne humeur. Certaines personnes aiment ça et d’autres veulent juste des chansons Rock pour ensuite passer à l’album suivant. Je viens du milieu Psych Prog avec beaucoup de Blues, et on ne peut pas donner une âme à un album sans une bonne intro à mon avis.
– Avec ACID’S TRIP, on touche au Hard Rock un peu Old School, mais aussi à des ambiances Stoner, bluesy et même Southern. En, fait, vous êtes un groupe de cow-boys and girls scandinaves des temps modernes ! C’est ça ?
(Rires) Oui, je suppose que oui ! Quand je cherche une grande variété d’émotions, je mets du Lynyrd Skynyrd. Quand j’ai besoin de réfléchir à quelque chose, je me tourne plutôt vers des sons de Floride, et quand j’ai besoin d’inspiration pour des harmonies, je mets du Allman Brothers et du Big Mama Thorton. Et quand j’ai besoin de vitesse, les Hellacopters sont le meilleur choix. Et voilà, vous avez le mix d’ACID’S TRIP ! Le voyage que j’ai fait en 2018 à Nashville puis à Jacksonville, en Floride, m’a vraiment donné une perspective sur les choses et j’ai réalisé que le Rock peut être beaucoup plus que simplement maltraiter des guitares. Bien que ce soit amusant à faire, il faut être plus intelligent que ça.
– Vous avez entièrement enregistré « Strings Of Soul » vous-mêmes, qui a ensuite été mixé et masterisé par Ola Ersfjord. La première étape était importante pour vous, afin de délivrer ce son particulier qui forge vraiment l’identité d’ACID’S TRIP ?
Je pense que oui, surtout quand il s’agit du chant et de toute la production de l’album. Lorsque vous entrez en studio, le résultat est souvent ce que le producteur est capable de faire. Cela peut être une expérience vraiment géniale et qui peut également améliorer la qualité de l’album, car c’est un travail de professionnel. Mais cela peut aussi compromettre le son, le rendre trop commercial et « trop » clean, car il n’y a plus de place pour les erreurs et les joyeux petits accidents. J’ai pris le rôle de producteur pour cet album, ce qui m’a pris beaucoup de temps et d’efforts. Sans mon intervention, l’album aurait probablement un son plus moderne, ce qui pourrait être une bonne chose. Mais nous voulions garder l’ambiance que nous avions sur ce projet : beaucoup de café et de longues heures passées à répéter. J’ai fait le chant dans une pièce sombre toute seule, ce qui a été une expérience formidable. J’ai fait confiance à mon instinct et ça s’est bien passé.
– Assez rapidement et notamment du à la qualité de vos concerts, vous vous êtes faits remarquer par le patron du très réputé label underground Heavy Psych Sounds Records. C’est une belle récompense, en plus d’être la maison de disques idéale pour vous aussi, non ? Elle vous ressemble beaucoup…
Elle nous ressemble beaucoup, c’est vrai. Oui, on adore Heavy Psych Sounds Records ! Le label nous a vraiment pris sous son aile et nous n’aurions pas pu avoir de meilleurs partenaires dans ce domaine. L’ambiance et le style sont parfaits pour nous. Et c’est très direct !
– Le printemps est là et la pandémie semble nous laisser un peu respirer. Avec un album encore tout chaud, vous devez bouillir d’impatience de remonter sur scène ?
Absolument, mais à l’heure où nous parlons, nous prévoyons des concerts pour 2022, car nous ne voulons pas le faire cet automne. Il y a de grandes choses à venir et nous visons les festivals pour l’année prochaine. L’album est pertinent et il le sera encore à l’avenir !
L’album « Strings of Soul » d’ACID’S TRIP est disponible chez Heavy Psych Sounds Records depuis le 7 mai !
Elevé dans le chaudron, LOUIS MEZZASOMA fait partie de cette nouvelle génération, qui a parfaitement digéré la culture et l’Histoire du Blues pour être à même d’en proposer sa propre version. Créatif et audacieux, le Stéphanois a livré il y a quelques mois un troisième album, « Mercenary », aussi surprenant qu’envoûtant. Rencontre avec ce musicien pluri-cordistes très inspiré et à l’approche très personnelle du Blues.
Photo : Nanou
– Tout d’abord, comment en arrive-t-on à incarner et ressentir autant le Blues lorsqu’on a à peine 30 ans et que l’on vient de Saint-Etienne, qui n’est pas vraiment le berceau du genre ?
A vrai dire, je ne me pose pas la question, je le fais ! Cette musique, c’est moi, c’est qui je suis. Il se trouve que cette musique s’appelle le Blues. Pour moi, c’est très important d’être soi-même, certains se sont trouvés en adéquation avec eux-mêmes en faisant de la poterie, du fromage de chèvre ou je-ne-sais-quoi. Pour moi, c’est sortir ce que j’ai au fond de mes tripes, au fond de moi-même. C’est ça, le blues. Je crois que je suis une espèce d’énergumène qui a tendance à foncer, à ne rien lâcher. C’est comme ça que j’ai fait ma place et que je continue de le faire.
Pour parler un petit peu de ma ville, oui, Saint-Etienne n’est pas vraiment le berceau du Blues, mais j’ai eu la chance de voir passer pas mal de monde dans le coin. Aussi bien des locaux que des artistes internationaux. Il faut reconnaître qu’on a quelques lieux encore bien friands de bon Blues.
– Ce troisième album marque un cap dans le son et aussi dans tes compositions. On a presque l’impression qu’il y a eu un déclic, une sorte de maturité atteinte. C’est aussi ton sentiment ?
Pour moi, ce nouvel album est vraiment un beau sommet atteint. J’écris mes chansons quand l’inspiration vient et non sur commande. Au fur et à mesure, on a arrangé et structuré le “guitare/voix” initial. Cet album n’est pas issu d’un déclic, mais bien d’une progression, d’une évolution et d’une affirmation de ma part, qui s’est faite au fil des années, à jouer, à écouter de la musique, à faire des concerts et à voir d’autres artistes en live… et petit à petit trouver ma place. Il s’agit vraiment d’un album produit pour lequel on a eu une vraie préparation, qui nous a permis d’être prêts pour le studio et d’aller chercher le son dans les détails. Je suis vraiment très fier de cet album « Mercenary ».
– Les textes de « Mercenary » sont très personnels et plein d’émotion. Très souvent, les bluesmen s’inspirent de leur vie pour chanter le Blues. C’est ce que l’on ressent chez toi : une authenticité et une sincérité évidente. Qu’est-ce qui t’inspire ? Ton vécu ou est-ce que tout est fictif ?
Toutes les chansons sont inspirées d’histoires vécues. Je me permets, pour l’écriture, de narrer et de romancer, mais sans donner tous les détails de ce qui m’est arrivé. Ainsi, l’auditeur peut se faire sa propre interprétation de la chanson et éventuellement s’y projeter et voyager.
L’inspiration vient de mes rencontres, de voyages, des concerts que j’ai pu faire, mais aussi de ce que je peux ressentir à un moment donné. Certaines chansons viennent d’une expression, d’une phrase que j’ai entendue et qui m’a parlé, inspiré.
Pour faire le lien avec l’actualité, car l’album a été enregistré en Juillet 2020 en pleine pandémie. L’enfermement n’est, dans mon cas, vraiment pas propice à l’inspiration. C’est bien l’ouverture vers le monde, les autres et les différentes cultures qui sont sources de création.
D’autre part, je me rends compte (pour le côté stylistique), petit à petit, que j’aime beaucoup la musique de film (et notamment de western), et en effet mes chansons ont toujours eu tendance à nous plonger dans une atmosphère et un climat, que l’on peut retrouver dans le cinéma.
Photo : Cédric Masle
– Même s’il y a du monde sur ce nouvel album, tu as longtemps joué seul dans une configuration d’homme-orchestre. Qu’est-ce qui est le plus plaisant et le plus satisfaisant au final : être seul à la manœuvre ou jouer en groupe, ce qui grossit également le son ?
Ce qui est génial, c’est d’être seul à la manœuvre et de jouer en groupe. En effet, quand j’ai démarré en one-man-band, j’avais l’avantage de pouvoir amener mes chansons dans la direction que je souhaitais, et de me laisser porter par les émotions, le feeling du moment, notamment en fonction de la réaction avec le public. Nous avons fait quelques dizaines de concerts sous la nouvelle formule guitare/batterie, qui reste une formule réduite et dans laquelle je reste maître des changements harmoniques. La batterie me suit dans mes idées et surtout donne de l’épaisseur et de l’impact au son. Pour moi, cette idée de manœuvre est surtout valable pour la partie live, pour suivre les différentes improvisations et changement de structure s’il y en a. Pour un album, on se doit de fixer les choses et de les planifier, que ce soit seul ou en groupe.
– Justement sur « Mercenary », tu es accompagné du batteur et percussionniste Gaël Bernaud qui apporte de la puissance aux morceaux, ainsi que de l’harmoniciste Jean-Marc Henaux et des cuivres de Sylvère Décot et d’Anthony Tournier qui offrent tous beaucoup de chaleur et de diversité. C’est un large panorama dans lequel on voyage énormément. De quelle école ou famille du Blues te sens-tu le plus proche ou l’héritier ?
L’arrivée de Gaël Bernaud au sein du groupe devient vraiment officielle avec ce nouvel album. Faire un album, c’est pour moi l’occasion de présenter des nouveaux titres, mais aussi de proposer quelque chose que l’on ne trouvera pas dans le live, ou du moins pas de la même manière. C’est le moment de faire une recherche approfondie dans le son, et aussi de faire appel à d’autres musiciens. C’est pourquoi nous avons invité aux trompettes, Sylvère Décot et Anthony Tournier sur le titre « RustyMan », et Jean-Marc Henaux sur quatre autres chansons. Diversifier les instruments permet de la variété et surtout d’éviter la monotonie. J’ai toujours présenté des titres assez différents entre ballades et chansons bien énervées. Pour répondre enfin à la question, je pense venir de plusieurs familles de Blues assez différentes, mais avec une grosse influence par le Country-Blues notamment par mon jeux de fingerpicking. On va dire que mes techniques de jeu sont issues d’un Blues rural, plutôt originaire du sud des Etats-Unis. Cependant, mes manières d’amplifier les guitares font aussi le lien avec le Rock.
– On retrouve aussi cette diversité dans tes instruments que ce soit la guitare, le banjo, le dobro ou la cigar-box. Est-ce que tu les vois comme des vecteurs d’ambiances très distincts et avec lequel es-tu le plus familier et le plus inspiré ?
Les changements d’instruments à cordes et leurs différents accordages sont vraiment une source d’inspiration pour la composition de mes chansons. Et en effet ils apportent des ambiances très différentes, même si il y a un univers bien ciblé. Ma cigar-box est vraiment jouée sur des morceaux Rock, alors que ma guitare folk va plus être utilisée sur des ballades Country-Blues. Je réalise que mon dobro, joué en open D et au bottleneck, est peut être le plus polyvalent et me permet une amplitude de style entre ballade lancinante, Blues primitif ou Rock. C’est aussi l’instrument que j’ai le plus utilisé sur tous mes albums. Pour tout te dire, sur « Mercenary », j’ai utilisé sept guitares (ou instrument à cordes) différentes : folk, dobro, demi-caisse, électrique, 12 cordes, cigar-box et banjo
Photo : Nanou
– Ton Blues s’inspire beaucoup des pionniers du genre, or il n’est jamais nostalgique ou passéiste, notamment dans le son. Comment alimentes-tu ton jeu à travers des influences si anciennes, même si elles sont intemporelles ?
Malgré le genre qui ne date pas de la veille, j’écoute beaucoup d’artistes de Blues et de styles proches (Folk, Country, Rock…) d’aujourd’hui, dont certains que j’ai vu en live. Le Blues, c’est notre histoire personnelle. Peut être que si je chantais le Blues des autres, ou un Blues à l’honneur des pères du genre, je serais nostalgique ou passéiste. Mais je joue mon Blues, donc les histoires sont d’actualité, du moins de mon actualité.
Je vais me faire engueuler en disant ça mais perso, les vieux albums comme Robert Johnson, c’est génial pour le collectage, pour l’Histoire, pour les chansons, pour le jeu de guitare, mais c’est très dur à écouter, le son n’est vraiment pas fou. Le parti-pris pour notre album était de garder l’authenticité de la musique et des instruments, mais de traiter le son de façon moderne. On a utilisé des bons vieux micros vintage à l’ancienne avec les bons préamplis. On a fait des vraies prises de sons de batterie en s’acharnant sur le choix et les réglages de la caisse claire en fonction de chaque morceau. J’ai chanté dans un micro fait dans un obus de la seconde guerre mondial, les guitares étaient branchées dans des amplis à lampes bien crades que l’on a poussé à fond. Jusque-là, ça aurait pu marcher pour un groupe de Blues traditionnel, mais le traitement du son, lui par contre, a fait la différence. On a joué sur les effets, tordu les sons. Je pense aussi que certains arrangements comme des guitares additionnelles, des banjos et les chœurs ont eu eux aussi leur importance pour donner ce côté moderne.
– Enfin, le Blues est une musique de communion et de partage. Comment vis-tu la situation actuelle et comment envisages-tu ton retour sur scène ?
Mal… Jouer, faire des concerts c’est ma raison de vivre, c’est ma passion, mais aussi mon gagne-pain et on est en train de nous enlever tout ça. Le statut est assez précaire, mais c’est un choix pour faire ce que l’on aime. On doit faire de nombreux sacrifices pour y arriver… C’est assez dur de devoir rester en stand-by en attendant mois après mois de pouvoir reprendre. Pour vivre de la musique live, ça implique de faire des dizaines de concerts par an et chaque concert est dur à programmer, c’est un travail de longue haleine qui se fait entre six mois et un an et demi à l’avance. Depuis plus d’un an, on reporte, annule et reporte des événements déjà reportés, et c’est sans parler des lieux, des salles de spectacle et des festivals qui ferment. Je ne parle pas des Zénith ou des artistes qui passent à la TV régulièrement. Je parle des scènes alternatives trop souvent oubliées par les médias, des petits et moyens festivals, qui survivent grâce aux organisateurs et aux nombreux bénévoles qui se battaient, et se battent toujours, pour offrir de la culture, de la joie, de la convivialité et du bonheur.
Et oui, le Blues est une musique de partage, une échappatoire à la dureté de la vie pour faire place à de l’expression et de la joie. J’espère que nous sommes dans la dernière ligne droite et que nous allons pouvoir présenter ce nouvel album, « Mercenary », sur les planches très rapidement…
« Mercenary » est disponible depuis le 5 mars chez Le Cri Du Charbon.
C’est en 2006 sur leur île, l’Islande, qu’ont résonné les premiers riffs, les premières rythmiques et les premiers refrains de THE VINTAGE CARAVAN. Cinq albums plus tard, c’est un trio plus qu’aguerri, sûr de lui et terriblement inspiré qui arpentent les scènes du monde entier. Avant de les retrouver pour quatre dates françaises l’an prochain, entretien avec le très bon et très sympathique bassiste du trio, Alexander Örn Númason, qui revient sur cette belle épopée et une aventure faite de persévérance et de travail.
– Vous avez créé THE VINTAGE CARAVAN alors que vous étiez très jeunes et avec un premier deal d’album il y a presque 10 ans. J’imagine que cette déjà longue expérience vous a permis d’éviter certains écueils professionnellement ?
Oui, c’est vrai que le groupe existe depuis un certain temps maintenant. Je pense que nous avons eu la chance d’avoir beaucoup d’opportunités dans notre carrière, mais nous avons aussi commis beaucoup d’erreurs. C’est inévitable, mais cela vous oblige à faire de meilleurs choix par la suite. Ça a été financièrement difficile de faire fonctionner le groupe, mais cela s’améliore avec l’expérience que nous avons maintenant !
– Après votre premier album éponyme, « Voyage », « Arrival » et « Gateway » ont assis votre réputation qui a été confortée par de très bonnes prestations live. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cette dernière décennie, alors que sort votre cinquième album « Monuments » ?
Eh bien, je pense que les choses se sont toujours déroulées assez lentement mais toujours régulièrement pour THE VINTAGE CARAVAN. Rien n’a vraiment été jamais tout noir ou tout blanc. Nous travaillons très dur à la fois sur scène et en dehors, et finalement on récolte ce que l’on sème. Nous sommes toujours aussi impatients et nous cherchons à être meilleurs dans ce que nous faisons. Alors, on attend avec impatience ce que la nouvelle décennie nous réserve !
– Avant de parler du nouvel album, pourquoi avoir quitté Nuclear Blast pour Napalm Records ? Votre collaboration ne répondait plus à vos attentes ?
Nuclear Blast a récemment été rachetée par un grand conglomérat de médias et ils ont procédé à un changement complet de personnel dans tous les départements. Nous avions la possibilité d’aller chez Napalm Records et nous avons pensé que c’était le moment idéal. Nous espérons beaucoup des nombreuses années à venir chez Napalm. Ce sont vraiment des gens formidables !
– Il y a quelques années, en 2014, vous avez aussi quitté votre Islande natale pour le Danemark. C’était devenu compliqué pour vous de tout gérer depuis votre île ?
C’est tout simplement impossible sur le plan logistique, notamment pour les tournées, car il faillait toujours s’envoler vers et depuis l’Islande. Nous avons eu la chance de pouvoir déménager au Danemark et de vivre juste à côté de la frontière allemande. Alors, c’est ce que nous avons fait. Nous y sommes restés deux ans et nous avons fait en moyenne 80 à 90 concerts par an, ce qui n’aurait jamais été possible depuis l’Islande. Nous voulions juste jouer tous les spectacles qui présentaient, peu importe d’ailleurs le tarif ou le nombre de spectateurs. Maintenant, c’est un peu différent, nous sommes plus établis et que nous pouvons choisir avec une plus grande liberté.
– THE VINTAGE CARAVAN présente aussi un line-up stable depuis le départ de votre premier batteur. Le côté solaire et positif de votre musique vient-il aussi de cette sérénité acquise dans la durée ? Vous vous connaissez très bien tous les trois…
Nous avons le même line-up maintenant depuis environ 6 ans, ce qui est vraiment agréable. Le changement de batteur a été une situation très stressante, il a donc fallu un certain temps pour s’adapter. Mais maintenant, nous nous sommes posés et avec ce deuxième album avec ce même line-up, nous savons comment travailler ensemble plus simplement, tout en restant très concentrés pour obtenir le meilleur résultat.
– L’ADN du groupe réside dans ce groove incroyable guidé par des influences très 70’s, Psych et progressive. Vous qui n’avez pas connu cette époque très créative, comment êtes-vous tombés amoureux de ce style et que lui trouvez-vous de si pertinent ?
La musique qui vient de cette époque est tout simplement incroyable et aussi très diversifiée. Il y a une grande liberté qui s’entend sur les albums Prog qui sont sortis comme King Crimson, Yes, Rush et beaucoup d’autres. C’est juste quelque chose qui a toujours résonné en nous. Mais il y a aussi beaucoup d’influences modernes et, honnêtement, je pense qu’il n’y a pas de groupe de Rock qui ne soit pas, au moins un peu, influencés par les groupes des années 70, à savoir Led Zeppelin, Black Sabbath, Jimi Hendrix, etc.
– Sur ce nouvel album, on sent qu’un cap a été franchi dans les compostions comme dans les arrangements, qui sont beaucoup plus riches que sur « Gateway » notamment. C’est aussi votre sentiment ?
Bien sûr, nous nous efforçons toujours d’être meilleurs dans ce que nous faisons et cela implique bien sûr les compositions, mais aussi les arrangements. Personnellement, cela fait longtemps que je ne me concentre plus sur le simple fait de devenir un meilleur bassiste. Maintenant, il s’agit plus concrètement de comprendre l’espace et la profondeur qui accompagnent les morceaux et les enregistrements, ainsi que d’essayer de créer des chansons qui n’ont pas de points faibles en termes de flux. C’est le processus actuel et j’espère qu’avec le prochain album, nous serons encore meilleurs !
– Sur « Monuments », on retrouve les ingrédients de THE VINTAGE CARAVAN avec des envolées très Hard Rock, parfois Metal, et cette fois il y a aussi un côté Stoner plus prononcé. Et c’est vrai que votre style s’y prête bien. C’est un registre que vous vouliez explorer depuis longtemps ?
Je pense que nous avons atteint le sommet dans notre côté Stoner Rock avec « Arrival ». Il y a énormément d’influences sur ce nouvel album avec notamment du Rock, du Metal et du Stoner, mais aussi beaucoup de Funk, de Jazz, voire de Hip-Hop. Nous avons tous des goûts musicaux assez variés, donc cela finit par être un joli melting-pot. C’est parfois difficile de déterminer d’où tout cela provient, mais c’est une bonne chose car je pense que cela signifie que nous nous ressemblons de plus en plus, et que notre style est de plus en plus personnel.
– Un mot aussi sur la production de « Monuments » qui est dense et massive. Dans quelles conditions avez-vous enregistré l’album, et aviez-vous des exigences particulières quant à sa couleur sonore ?
Oui, il s’est passé beaucoup de choses, et nous avons eu beaucoup de chance de retravailler avec Ian Davenport (Band of Skulls, Gaz Coombes, Philip Selway, etc …), qui a fait un excellent travail de production et de mixage. L’album a été enregistré dans les fameux studios de Hljóðriti en Islande, qui a un caractère sonore très spécial et un matériel à peine croyable. Alors, nous avons passé de longs moments à expérimenter pendant les 22 jours que nous avons passés là-bas.
– Justement, vous venez d’annoncer les dates de votre prochaine tournée en 2022, avec d’ailleurs quatre passages par la France. Vous qui êtes véritablement un groupe de scène, vous devez être plus qu’impatients, non ?
Bien sûr, nous avons hâte de remonter sur scène. Nous attendions juste le bon moment. C’est une situation difficile, car les concerts ont été reportés si souvent qu’il était presque difficile de croire que les tournées allaient reprendre un jour !
« Monuments » est disponible depuis le 16 avril chez Napalm Records.