Classique et classieux à la fois, GOTUS se présente avec une première réalisation, d’où le plaisir transpire à très grosses gouttes. Ces cinq-là s’éclatent et cela s’entend tout au long du disque. Suffisamment rare pour être souligné, la formation suisse, pour l’essentiel, est le fruit d’une émanation d’artistes qui se connaissent très bien et qui donnent surtout le sentiment de faire enfin ce qu’ils ont toujours voulu faire avec Krokus ou Gotthard, notamment. Ce premier opus a quelque chose de flamboyant, tant il dégage une impression de liberté ultime et de joie de faire un Hard Rock fédérateur et tellement feel-good.
GOTUS
« Gotus »
(Frontiers Music)
Parmi les très nombreux projets du chanteur Ronnie Romero, tous ne sont pas forcément heureux, c’est vrai. Bâtir un groupe autour d’un seul homme, certes irréprochable et talentueux, ne suffit pas toujours. Avec GOTUS, le Chilien apparaît plutôt, non comme une pièce rapportée, mais un membre dont l’unique présence ne suffit pas à guider l’ensemble. Car on parle ici surtout d’un groupe pensé et imaginé par Mandy Meyer, éminent guitariste passé chez Gotthard, Krokus, Asia et Cobra notamment et de son ami et batteur Pat Aeby, lui aussi membre de Krokus, Storace et de Sideburn. La donne est donc différente et la suite aussi comme le démontre ce très bon « Gotus ».
L’idée de départ était juste le live, mais l’idée du studio s’est rapidement concrétisée pour devenir un groupe à part entière. Se sont joints à la petite fête le bassiste Tony Castell (Krokus, Crystal Ball) et l’expérimenté claviériste helvète Alain Guy. Et avec Romero derrière le micro, les ex ou toujours membres de Gotthard et Krokus ont légitimement imaginé GOTUS, un quintet tournée vers un Hard Rock estampillé 80’s/90’s, c’est-à-dire dans la lignée de ce qu’ils ont toujours fait, et très bien fait. Respectueux du style et actuel dans la production, ce premier album des Suisses est une très belle surprise pour peu qu’on aime la bande à Coverdale… car son ombre plane.
En effet, sans manquer de respect aux musiciens très expérimentés de GOTUS, on se prend parfois à imaginer un album fantôme de Whitesnake. Ronnie Romero ne pourrait renier la filiation et on lui pardonne aisément et avec plaisir, tant les chansons sont magnifiquement composées et interprétées. Le quintet dépoussière littéralement le registre et y apporte une touche très rafraîchissante (« Beware Of The Fire », « Take Me To The Mountain », « When The Rain Comes », « The Dawn Of Tomorow »). Les riffs et les solos rayonnent de toutes parts, notre Chilien est au top et la rythmique tellement complice. Espérons que ce premier opus ne soit pas un one-shot, car le plaisir est au rendez-vous.
Même s’ils se sont nettement plus penchés qu’à l’habitude sur les arrangements, les Allemands continuent de verser dans un Heavy Metal bien Speed, et peut-être un peu moins brut. Toujours guidé par l’inamovible Axel Julius, SCANNER se détache de belle manière de l’ombre d’Helloween, grâce à des titres plus personnels, gorgés de riffs tendus et de solos bien sentis. « The Cosmic Race » est plutôt une bonne surprise.
SCANNER
« The Cosmic Race »
(ROAR! Rock OF Angels Records)
Depuis quelques semaines, SCANNER met les bouchées doubles, bien décidé à marquer son retour en replongeant aussi dans les débuts de sa carrière. En décembre dernier, le groupe a réédité ses albums les plus emblématiques, à savoir « Hypertrace » (1988) avec une tracklist renouvelée, « Mental Reservation » (1995) qui inclue cette fois sa première démo, « Conception Of A Cure » (1994) et « Ball Of The Damned » (1996). Il faut dire qu’après neuf ans d’absence, une petite piqûre de rappel ne fait jamais de mal.
A l’arrêt depuis « The Judgement » (2015), SCANNER livre un album-concept basé sur une histoire peu joyeuse, où la survie sur Terre serait devenue difficile en raison de problèmes nucléaires notamment. Mais un nouveau monde s’offre à quelques élus qui reprennent espoir dans l’espace, mais la menace ressurgit sur cette autre planète. Bon, voilà pour le pitch. En l’occurrence, il vaut peut-être mieux s’intéresser et se pencher sur le Heavy Metal teinté de Speed, et d’un peu de Power, à l’œuvre sur « The Cosmic Race ».
Du line-up originel, seul Axel A.J. Julius reste en poste à la guitare et s’est même chargé de toute la composition, de l’enregistrement, du mix et de la production de ce septième opus. A noter aussi que Dominik Rothe (guitare) et Sascha Kurpanek (batterie) ont rejoint SCANNER et apportent un souffle assez vivifiant. Toujours aussi épique et ancré dans une tradition toute teutonne, le quintet ne bouleverse pas grand-chose, mais fait très bien le job. Les fans de Heavy classique peuvent donc se réjouir du come-back des Allemands.
Loin des fadasses Tribute bands, « Original Seeds » est le nouvel EP de HEART LINE et il ne se présente pas dans une optique nostalgique, mais avec plutôt dans l’idée de reprendre avec respect, tout en se les appropriant clairement, des morceaux très représentatifs des glorieuses années de l’AOR. Exaltés et techniquement monstrueux, les solos retrouvent une seconde jeunesse, les claviers brillent comme jamais et le frontman montre toute l’étendue de son talent. Quelques covers en guise de récréation, finalement bien trop courte…
HEART LINE
« Original Seeds »
(Pride & Joy Music)
Non seulement en l’espace de seulement deux albums, « Back In The Game » et « Rock’n’Roll Queen », HEART LINE s’est imposé comme le représentant français du Hard FM/AOR/Melodic Rock qu’on attendait tant, mais au-delà de ça, il vient confirmer avec « Original Seeds » qu’il n’a plus rien à prouver aux piliers du genre. Un peu plus de deux ans après sa formation, le quintet incarne littéralement le renouveau d’un style propre aux années 80, certes, mais dont l’univers n’a pas fini d’être exploré.
Derrière la légendaire DeLorean de ‘Retour Vers Le Futur’, qui trône sur la pochette toujours réalisée par l’excellent Stan W. Decker, se cache une petite surprise que nous réservent les Bretons. Regroupant cinq morceaux qui ne sont pas issus de son répertoire, HEART LINE nous gratifie de reprises aussi piquantes que les originales et nous replongent forcément au cœur des 80’s. Et plutôt que de se contenter des hits, le groupe s’est penché sur des titres moins connus, ce qui vient ajouter une petite dose d’inconnu à l’ouvrage.
Du Royaume-Uni avec Tobruk, Aviator et Virginia Wolf, à la Suède avec Alien et aux Etats-Unis avec Dakota, HEART LINE a véritablement repris ces chansons à son compte. Sorties entre 1984 et 1988, le premier lifting tient bien sûr dans la dynamique et la production, mais pas uniquement. Au chant, Emmanuel Creis montre une superbe polyvalence, tandis qu’Yvan Guillevic et Jorris Guilbaud forment l’essentiel et explosif duo guitare/claviers tellement incontournable dans l’AOR. Une vraie gourmandise !
Photo : Mat Nina Studio
Retrouvez les interviews accordées à Rock’n Force par HEART LINE et la chronique du dernier album :
C’est du côté de l’Espagne que la guitariste, compositrice et productrice, Sonia Anubis est allée reconstruire le line-up de son groupe COBRA SPELL. Après avoir œuvré dans le Heavy Metal de Burning Witches et le Death Metal de Crypta, c’est dans un registre très 80’s que l’autodidacte hollandaise s’épanouit aujourd’hui. Après deux EP, c’est sous la bannière de Napalm Records que le quintet livre « 666 », un premier album très varié, Heavy et solide, où les femmes dictent leurs règles. Entretien avec une musicienne très enthousiaste.
Photo : Raquel Garcia
– Avant de parler de votre premier album, j’aimerais que l’on parle du line-up de COBRA SPELL, qui a changé depuis « Anthems Of The Night ». En dehors de toi bien sûr, Sonia, la formation est entièrement espagnole. Comment vous êtes réunies et est-ce que tout le groupe est dorénavant installé en Espagne… ou ailleurs ?
J’ai fondé le groupe avec le rêve de créer un groupe de Heavy Rock inspiré des années 80. COBRA SPELL a démarré comme un projet parallèle avec des musiciennes vivant à l’international. Les deux EP, « Love Venom » et « Anthems of the Night », ont été extrêmement bien reçus, au-delà même de nos attentes. Depuis, le groupe a grandi et a eu de belles et multiples opportunités, ce qui a conduit à des changements. Il faut être prêt à tout. Maintenant que nous avons signé avec Napalm Records et que nous sortons un premier album, le groupe avait besoin d’un line-up solide comme le roc et le moyen le plus simple d’y parvenir était de ne pas vivre trop loin les unes des autres. Nous sommes donc majoritairement installées en Espagne.
– Tu as fondé le groupe il y a quatre ans maintenant après tes expériences au sein de Crypta et Burning Witches, qui étaient également des groupes entièrement féminins. Que tu sois entourée de femmes était aussi ta priorité pour COBRA SPELL ?
En fait, COBRA SPELL a été fondé avant Crypta et non pas suite mon départ de ces groupes. Et faire partie d’une formation entièrement féminine est quelque chose de très valorisant. Lorsque je faisais partie de Crypta, j’ai vu beaucoup de jeunes femmes venir me voir et me dire que ce que je fais en tant que musicienne les inspirait. Le sentiment d’avoir cet effet sur d’autres femmes est incroyable. A l’époque où nous vivons, il existe toujours un déséquilibre entre les sexes et il est donc important d’avoir des modèles féminins et également de se serrer les coudes en tant que femmes et se soutenir mutuellement. J’ai donc décidé de faire de COBRA SPELL une formation entièrement féminine pour diffuser cette énergie dans le monde de la musique.
Sonia Anubis
– D’ailleurs, tes deux anciens groupes évoluent dans des styles très différents de COBRA SPELL. Est-ce que, maintenant, tu fais enfin ce que tu as toujours voulu musicalement et est-ce que c’est aussi ce qui t’avait déjà justement poussé à monter ton propre projet ?
Oui, c’est vrai ! COBRA SPELL est le groupe où je peux exprimer ma créativité et ma vision musicale sans contraintes. Après avoir été musicienne ‘live’ pendant dix ans auparavant, il était temps de me lancer dans quelque chose de plus personnel ! Et c’est la meilleure décision que je n’ai jamais prise de m’engager pleinement dans COBRA SPELL.
– Après « Venom Love » (2020) et « Anthems Of The Night » (2022), le premier album sort enfin. C’était important pour toi de passer avant par deux formats courts, ou c’est juste une question de circonstances ?
Il était important pour COBRA SPELL de sortir d’abord ces deux EP pour trouver la bonne identité au niveau du son, mais aussi au niveau du line-up. Je voulais aussi sortir un album uniquement avec le soutien d’un label. La signature avec Napalm Records et la solidification du line-up font que nous sommes prêtes à 100% pour ce premier album ! Hell yeah !
– Avec COBRA SPELL, vous explorez un Heavy Metal très Sleaze, aux multiples influences et surtout très marqué par les années 80. Est-ce que, comme beaucoup de fans, tu considères cette époque, qu’aucune d’entre-vous n’a d’ailleurs connu, comme l’âge d’or du Metal ?
Absolument ! Je ne l’ai pas vécu, mais la meilleure musique, les meilleurs films, les voitures, le design, tout ce que vous voulez… viennent des années 80 !
– « 666 » présente donc un Heavy très Sleaze et 80’s comme on l’a dit, où beaucoup de courants du Metal se croisent. C’était important pour toi qu’il soit le plus varié possible, d’autant que Kristina Vega, la frontwoman du groupe, possède une large palette vocale ?
Damn ! C’est un réel plaisir de travailler avec une telle professionnelle ! Kristina est une chanteuse incroyablement talentueuse avec de très grandes possibilités vocales. Quant à la composition et à l’écriture de la musique de COBRA SPELL, je ne me limite pas à un seul sous-genre des années 80. J’aime explorer de nombreux sons et des ambiances issues de courants comme l’AOR, le Speed Metal, le Power Metal, le Glam, le Rock’n’Roll et plus encore. Le mélange de toutes ces influences est ce qui devient finalement l’identité du son de COBRA SPELL.
– Au-delà du line-up, « 666 » est également très féminin dans le propos à travers des chansons et des textes souvent explicites. C’est aussi pour vous une façon de livrer un message à l’intention des femmes dans une période où leur parole se fait justement beaucoup mieux entendre ?
Les paroles ont été écrites sans filtre et avec le cœur ! Je n’aime pas faire de compromis sur les attentes du public, ou sur ce que les gens aimeraient entendre. Je suis assez intrépide à cet égard. C’est quelque chose de spontané et de naturel, car les paroles ont été écrites par une femme et les thèmes, s’ils proviennent souvent d’expériences personnelles, le sont toujours à travers le regard d’une femme.
– Entre Glam Rock, Heavy Metal, Sleaze et même Rock’n’Roll, COBRA SPELL montre beaucoup de diversité et il y a aussi ce langoureux solo de saxo sur « Love = Love ». Il fallait un instant plus ‘glamour’ aussi sur cet explosif « 666 » ?
« Love = Love » est l’exemple parfait d’une chanson typiquement inspirée de l’AOR dans le style. Je compose d’ailleurs les morceaux les plus mélodiques sur un synthé, plutôt qu’à la guitare. Le solo de saxophone est une décision de dernière minute que j’ai proposée quand nous étions au studio d’enregistrement et le producteur a vraiment aimé l’idée ! Il devait y avoir un solo de guitare, mais non, c’est ça que je voulais… Il fallait qu’il y ait un solo de sax ! Alejandro, notre producteur, a donc cherché un saxophoniste parmi ses contacts et a contacté la bonne personne. La saxophoniste, Nata Estevez, a interprété un solo entièrement improvisé et qui figure désormais à jamais sur le disque. La chanson ressemble maintenant beaucoup plus à la bande originale d’un film des années 80 et j’adore ça !
– Enfin, j’aimerais qu’on dise un mot des parties de guitares. On sent beaucoup de complicité entre toi et Noelle. Comment vous êtes-vous réparties les rôles et est-ce que vous avez composé ensemble les rythmiques et les solos ? A moins que tu aies conservé le lead sur tout l’album ?
J’ai composé toutes les chansons et les mélodies de « 666 », mais il y en a une sur laquelle Noelle m’a aidé, c’est « Love Crime ». Concernant les solos, c’est quelque chose que nous nous sommes partagées toutes les deux sur l’ensemble de l’album.
L’album de COBRA SPELL, « 666 », est disponible chez Napalm Records
LARSEN & LIES déboule sur la scène Hard’n Heavy hexagonale avec « Live A Good Lie », qui a plutôt fière allure. Musclé et mélodique, ce premier format court approche la demi-heure et ne manque pas de fraîcheur. Sur des morceaux accrocheurs, le combo parvient à capter l’attention grâce à des sonorités 90’s, c’est vrai, mais qui ont tout d’une savoureuse madeleine de Proust. Avec un premier six-titres de ce calibre, le groupe avance déjà de solides arguments.
LARSEN & LIES
« Live A Good Lie »
(Independant)
Après quelques années à se faire les dents avec des reprises sous le nom de Six Floors Under, les choses ont commencé à prendre une tournure plus personnelle et sérieuse, lorsque les Franciliens se sont mis à composer leurs propres chansons. Fortement imprégné de la scène Hard Rock américaine, et même californienne, des années 80 et 90, LARSEN & LIES reprend le flambeau pour entretenir la flamme de belle manière.
Surfant sur une vague revival à l’œuvre depuis un petit moment, le quintet se montre vivifiant et le niveau technique affiché y est pour beaucoup. Mené par un chanteur costaud et une très bonne rythmique, LARSEN & LIES possède aussi deux très bons guitaristes qui, entre riffs acérés et solos très techniques, se font vraiment plaisir et offrent beaucoup de respiration à ce « Live A God Lie » très équilibré.
Bien produit, l’EP est un brin old school dans son approche, mais le Heavy Rock proposé reste pourtant très actuel (« Too Many Guitars », « Damaged Goods », « Liar »). Même si LARSEN & LIES s’est forgé une identité, quelques gimmicks ont la dent dure et les noms de Skid Row (première époque, le vraie), Dokken, Extreme ou encore Mr Big sur la power-ballad « Now It Begins » ressortent… et c’est un vrai plaisir. Un premier essai très concluant.
Avec deux récentes réalisations studio qui ont définitivement acté son retour au premier plan, ce fleuron du Heavy Metal français aborde ses concerts avec une inébranlable confiance renforcée par un line-up racé et des fans toujours fidèles au rendez-vous. Entre incontournables et nouveaux morceaux, ce SORTILEGE 2.0 a mis le feu à une foule reprenant en chœur les refrains et ravie de retrouver le quintet dans une configuration éblouissante avec un répertoire taillé pour la scène.
SORTILEGE
« Coram Populo »
(Verycords)
Son frontman et parolier, Christian ‘Zouille’ Augustin, l’avait annoncé : ce live au Forum de Vauréal allait être mémorable. Et il n’avait pas menti, puisque devant un public entièrement acquis à sa cause, SORTILEGE a sorti le grand jeu en livrant un set époustouflant avec même quelques surprises du chef à la clef. Après un retour en grande forme en 2021 avec « Phoenix », suivi en mars dernier de « Apocalypso », le groupe affiche un Heavy Metal musclé et très actuel. Une vraie renaissance pour ce groupe français devenu mythique.
Avec un parcours assez chaotique malgré des débuts fracassants il y a 40 ans, le quintet a vu son line-up renouveler, mêlant jeunesse et expérience, et c’est avec une vigueur retrouvée et qui l’a même transformé que SORTILEGE sort son premier album live. Une première réussie dans les grandes largeurs, tant la captation (dispo aussi en DVD avec le set du Hellfest 2022) bénéficie d’une prise de son irréprochable, qui colle parfaitement à la massive production du dernier opus, tout en conservant l’authenticité du combo.
Pour marquer les esprits et surtout ravir ses fans, une superbe setlist, alliant les classiques du groupe et les nouveaux titres, a été soigneusement élaborée. Du dernier opus, SORTILEGE a livré « Attila », « La Parade Des Centaures » avec Stéphane Buriez en guest, ainsi que « Vampire » et le morceau-titre. Julian Izard d’Existance a rejoint le combo sur « Le sacre Du Sorcier », puis « Sortilège ». Et la magie a opéré aussi et surtout sur « Amazone », « Toujours plus Haut », « Majesté », « Mourir Pour Une Princesse » et « Métamorphose ».
Malgré son nom, RIOT AT THE MOONSHINE BAR n’a rien d’une formation de pub Rock débarquée d’Australie, qui s’en ait fait une spécialité. Bien au contraire, les Teutons balancent un Hard Rock hors d’âge généreux et que l’intemporalité rend toujours incroyablement actuel. « Midnight Anthems » fait suite à un bon EP et ce premier opus réserve de belles surprises.
RIOT AT THE MOONSHINE
« Midnight Anthems »
(Independant)
Il y a deux ans, j’avais eu un coup de cœur pour ce groupe basé dans le nord de l’Allemagne. RIOT AT THE MOONSHINE BAR venait de sortir, déjà en autoproduction, un EP de six titres baptisé « RATMOB », plutôt inspiré. Sans véritablement bousculer l’ordre établi, le quintet distille un Classic Hard Rock solide et dynamique directement hérité de l’âge d’or du genre, les années 80 et 90… forcément. Un mode revival très maîtrisé qui lui donne des ailes et nous renvoie à une époque un brin plus sauvage.
C’est dans ce même élan créatif que RIOT AT THE MOONSHINE BAR sort enfin son premier album, « Midnight Anthems ». La donne n’a pas changé, ni le fameux bar. Le ‘Moonshine’ encaisse les décibels et les nouveaux morceaux montrent la même envie d’en découdre. La production reste la même, entre classicisme et modernité, et les Allemands ont parfaitement réussi à peaufiner un style désormais identifiable. La patte est perceptible et le combo semble avoir trouvé sa voie.
Avec un frontman qui a sérieusement pris de l’assurance, une paire basse/batterie qui ronronne et deux guitaristes très enthousiastes, RIOT AT THE MOONSHINE BAR affiche un tout autre visage et ne manquera pas d’accrocher les fans de Hard Rock. Teinté de Heavy avec des riffs racés, des twin-guitares virevoltantes et des solos plein de feeling, « Midnight Anthems » prouve que le combo se projette avec une volonté d’acier (« Evil Inside », « Rock ‘Til The Morning », « Dirty Hariette », « Bozzeday Tuesday »).
Costaud et efficace, le groupe nordique fait son retour avec une nouvelle réalisation qui, espérons-le, ne subira pas le même sort que la première passée inaperçue à cause de la pandémie. Entre Speed et Heavy Metal, SATAN’S FALL perpétue la tradition avec une vigueur qui l’honore et à l’ancienne, ce qui ne signifie pas qu’il regarde dans le rétroviseur, loin de là. « Destination Destruction » emboîte le pas des pionniers du genre avec beaucoup de modernité et sur un rythme d’enfer.
SATAN’S FALL
« Destination Destruction »
(Steamhammer/SPV)
Depuis « Seven Nights », sa première démo sortie en 2016, les Finlandais n’ont pas ménagé leurs efforts at après un EP, quelques singles, ils avaient même sorti un premier album, « Final Day », il y a trois ans en même temps qu’une compilation retraçant leurs débuts (« Past Of »). Cependant, comme beaucoup d’autres, c’est au pire moment que SATAN’S FALL avait décidé de prendre son envol. Entre temps, il a quitté son ancien label et a aujourd’hui toute la confiance de Steamhammer pour son deuxième opus. Une très bonne chose !
Et « Destination Destruction » ne manque pas d’intérêt. Les deux pieds dans les années 80, les Scandinaves s’inscrivent dans la mouvance NWOBHM à laquelle ils ont ajouté d’autres sonorités, passant par le Speed Metal et le Hard Rock notamment. Et SATAN’S FALL n’a rien de passéiste, bien au contraire, et offre à son registre beaucoup de puissance et de vélocité, ce qui rend cette nouvelle galette irrésistiblement actuelle d’autant que la production présente de l’impact, de la volonté et montre une belle assurance.
Mené par son inamovible frontman Mikka Kokko, on note les arrivées de Ville Koskinen comme lead-guitariste et Artu Hankosaari à la batterie, aux côtés de Tomi Mäenpää à la six-corde et Joni Pentander à la basse. Ainsi consolidé, SATAN’S FALL dispose de belles ressources et livre un « Destination Destruction » musclé et mélodique, qui nous renvoie aux fondamentaux du Heavy Metal en version réoxygénée et très accrocheuse (« Lead The Way », « Swines For Slaughter », « Kill The Machine », « Dark Star »). Punchy !
Très attendu par des fans toujours très nombreux qui entretiennent sans doute une certaine nostalgie, « Heaven Comes Down » ne parvient pas complètement à raviver le feu qui brûlait chez DOKKEN quelques décennies en arrière. Si son guitariste Jon Levin est époustouflant et très inspiré et les compos plutôt bien écrites, on ne peut que regretter que son leader ne soit plus tout à fait à la hauteur. S’il n’y a pas non plus de quoi rougir, le quatuor n’est plus aussi incendiaire qu’il le fut.
DOKKEN
« Heaven Comes Down »
(Silver Lining Music)
Il y a toujours un peu d’émotion à présenter un nouvel album de DOKKEN, notamment lorsqu’on a suivi et vécu en temps réel l’ascension et le parcours plus que chaotique du groupe. Onze ans après « Broken Bones », ce treizième opus surgit alors même qu’on avait du mal à imaginer cette institution des années 80/90 faire son retour et renaître de ses cendres. Mais Don Dokken n’est pas homme à plier les gaules si facilement, et avec une formation pareille, il aurait d’ailleurs bien tort. Et voilà donc « Heaven Comes Down » sur les platines et ça pique forcément la curiosité.
En confiant le mix à Kevin Shirley (Aerosmith, Maiden, Bonamassa), DOKKEN a misé sur l’homme de la situation et quant à la production, elle est assurée par le frontman et Bill Palmer. Côté line-up, on retrouve l’excellent Jon Levin, fidèle depuis 20 ans, à la guitare et la rythmique de House Of Lords, à savoir Chris McCarvill à la basse et BJ Zampa à la batterie. Autant dire que ça joue vraiment bien et l’expérience se fait d’ailleurs sentir sur chaque titre de « Heaven Comes Down ». Mais la principale interrogation se trouve ailleurs.
Dès « Fugitive », DOKKEN fait du DOKKEN et il y a quelque chose de réjouissant, bien sûr. Seulement, et comme on pouvait s’en douter, Don Dokken n’est plus aussi puissant que jadis. Cependant, tout en évoluant dans un ton en dessous, il a su s’adapter et c’est son six-cordiste (comme souvent !), qui donne l’élan et parfois même le tournis (« Gypsie », « Is It Me Or You ? », « Over The Mountain »). Sans accabler son fondateur, et malgré l’énergie et la volonté affichées, les Américains ne ressuscitent pas vraiment le mythe.
La lumière ne passe que très rarement sur les réalisations de CIRITH UNGOL, ce qui ne l’empêche pas, et ne l’a d’ailleurs jamais empêché, de briller grâce à une créativité toujours très mesurée pour plus d’efficacité. Le quintet semble peser chaque note comme pour mieux respecter un style savamment élaboré depuis des décennies. « Dark Parade » est un modèle du genre, l’essence-même du Metal où le Doom et le Heavy guident une cavalcade épique torturée, qui vous happe sans crier gare. Un monument… encore !
CIRITH UNGOL
« Dark Parade »
(Metal Blade Records)
CIRITH UNGOL, c’est une aventure qui démarre discrètement dans la ville de Ventura en Californie, bastion que le groupe n’a d’ailleurs jamais quitté. Tirant bien sûr son nom de l’œuvre de J.R.R. Tolkien, c’est en 1972 que les premières notes résonnent pour donner vie à un premier album neuf ans plus tard, « Frost And Fire ». S’en suivront les classiques « King Of The Dead »(1984), « One Foot In Hell » (1986) et « Paradise Lost » (1991) qui sont les bases fondatrices du son si particulier des Américains. La légende est marche et, malgré un coup d’arrêt jusqu’en 2020 et un retour avec « Forever Black », elle est restée terriblement vivante.
Malheureusement, ou heureusement selon ses membres, CIRITH UNGOL est toujours resté dans l’ombre underground d’un style auquel il a pourtant donné ses plus belles lettres de noblesse de l’autre côté de l’Atlantique. Précurseur du Doom (avec d’autres) et délivrant un registre épique que d’autres prendront d’ailleurs à leur compte, le quintet est peut-être celui qui incarne le mieux le Heavy Metal dans sa forme primale et originelle. Extrêmement pointilleux et perfectionniste, il n’y a pas trace de superflu et encore moins d’esbroufes techniques sur les disques des Californiens, et « Dark Parade » s’inscrit bien sûr dans cette lignée.
Si certains considèrent, peut-être à juste raison, que CIRITH UNGOL est une formation vintage au son prisonnier des années 80, une écoute très attentive de ce sixième album s’impose. La production est massive, d’un équilibre parfait, avec des guitares idéalement réparties, offrant ça et là une multitude détails qui donnent du coffre et surtout une énergie et une vélocité très maîtrisées et si évidentes (« Relentless », « Sailor on the Seas of Fate », « Looking Glass », « Dark Parade », « Distant Shadows »). Les riffs sont imparables, la rythmique ronronne, les solos tranchent et la voix de Tim Baker ensorcelle ! What else ?