Catégories
Alt-Country Blues Rock International Soul

Samantha Fish : bluesy adventures [Interview]

Affichant désormais neuf albums à son actif, SAMANTHA FISH n’en finit plus de surprendre en empruntant des voies la menant là où on ne l’attend pas. Plus éclectique que jamais, elle se présente avec « Paper Doll », un disque dans lequel son fougueux jeu de guitare fait toujours autant d’étincelles, mais surtout avec une confiance vocale aussi étonnante qu’attendue. S’il est toujours question d’un Blues très Rock, son vagabondage musical nous mène cette fois aussi dans des contrées Alt-Country, Folk et Soul. Entretien avec une artiste qui ne lève que très rarement le pied, et qui s’épanouit en musique.

– Notre dernière interview date de la sortie de « Death Wish Blues », ton album en duo avec Jesse Dayton. Quel souvenir en gardes-tu et surtout de la tournée qui a suivi ? Tes fans ont-ils été un peu surpris ?

J’ai beaucoup appris de cette expérience. Travailler avec Jesse et notre producteur, Jon Spencer, nous a permis de comprendre comment nous démarquer tout en nous soutenant mutuellement. C’est une dynamique intéressante quand on se produit en duo. Jesse et moi avons tous les deux beaucoup travaillé sur cet album et nos concerts étaient vraiment passionnants. Je pense que nous sommes tous les deux connus pour nos styles musicaux particuliers, donc c’était une collaboration un peu inattendue. Cette expérience a réuni de nombreux fans de musique différents. Lorsque nous avons reçu une nomination aux Grammy, nous avons été à la fois surpris et touchés. C’était une expérience formidable à tous les niveaux et quelque chose qui, je le sais, a changé nos vies.

– Ton dernier album studio et en solo « Faster », remonte déjà à quatre ans. Quand as-tu vraiment commencé à te plonger dans l’écriture de « Paper Doll » ? Avais-tu déjà une trame en tête au moment de « Death Wish Blues » ?

Je savais qu’après « Death Wish Blues », j’aurais besoin d’un album qui mette vraiment en valeur mes ‘super-pouvoirs’. Je me pousse constamment à me dépasser, mais j’avais l’impression que celui-ci marquait un retour en forme, d’une certaine manière. En écrivant, les paroles se sont imposées naturellement. J’écris sur ce que je connais, mais j’aime aussi collaborer et écrire avec d’autres. Je voulais créer un album avec des sons de guitare vraiment excellents. Je voulais que le Blues soit la racine et le fondement de tout l’album, mais je voulais aussi m’aventurer dans des contrées captivantes et dépasser les frontières des genres. Et puis, je voulais aussi mettre en valeur mon chant. Mais avant tout, l’essentiel dans les chansons consiste à avoir de bonnes accroches et de belles mélodies.

– On le sait, tu n’es jamais aussi bien que sur scène. Tu es même l’une des rares artistes de Blues à te produire autant. C’est assez rare de donner des concerts de manière aussi soutenue. C’est de là que vient ta créativité ? C’est une manière d’entretenir ton flux artistique ?

Parfois, des idées me viennent sur scène. Je crois que ma méthode personnelle d’écriture la plus efficace est de me promener en voiture. Il suffit de laisser sa concentration vagabonder. Des mélodies me viennent à l’esprit par moments, et il faut les capturer à l’instant où elles sont présentes dans ma tête.

– D’ailleurs, « Paper Doll » a été enregistré en pleine tournée, à la fois à Austin au Texas et à Los Angeles en Californie. Tu n’avais pas envie de te donner un peu de répits et te concentrer sur la scène ? D’attendre la fin des concerts et de te poser plus tranquillement en studio ensuite ?

Bien sûr, mais notre emploi du temps ne le permettait pas. Je savais que je voulais enregistrer un nouvel album. Il s’agissait donc simplement de faire le nécessaire pour y parvenir. Le fait de faire les choses comme il fallait le faire, c’est-à-dire par séquence, a contribué à donner à l’album un côté live et une énergie particulière. Je pense donc que cela a joué en notre faveur.

– On peut aussi y voir une certaine continuité de cette tournée, dans l’esprit en tout cas, avec beaucoup d’énergie et surtout avec les musiciens qui t’accompagnaient à ce moment-là sur scène. L’idée était-elle de garder cette vibration très live ?

Oui et c’est comme ça que cela s’est passé. Le groupe de tournée que j’accompagne est phénoménal, donc c’était agréable d’explorer leur créativité. Je pense que le temps passé sur scène nous a permis de nous entendre assez rapidement.

– Un mot aussi sur la production signée Bobby Harlow de Detroit et avec la collaboration ponctuelle de Mick Collins de The Gories, tous deux issus du Garage Rock. On vous retrouve d’ailleurs en duo sur « Rusty Razor ». Après Jesse Dayton, tu t’aventures à nouveau hors du monde du Blues. C’est une façon aussi de quitter une certaine zone de confort ?

Je pense que tout ce que je fais est ancré dans le Blues. C’est comme ça que j’ai appris à jouer et à chanter. Chaque chanson commence par un hommage à un riff ou à une idée qui vient de là. C’est agréable aussi de pouvoir intégrer d’autres styles pour enrichir ma vision du Blues. Je me sens à l’aise pour créer ma propre version des choses. Je veux écrire des chansons qui définissent mon son, tout en étant ouverte à d’autres influences.

– Et il y a aussi la chanson « Sweet Southern Sounds » que tu as composé avec ton fougueux voisin de la Nouvelle Orleans, Anders Osborne. C’est un morceau incroyablement intense et chaleureux. Vous n’avez pas eu l’envie de le chanter ensemble ? Là encore, cela aurait été un beau duo…

Anders est génial. On a écrit cette chanson ensemble en sachant qu’elle finirait sur mon nouvel album. D’ailleurs, je ne pense pas qu’il ait eu l’intention de la chanter. Mais je suis sûre qu’on le fera ensemble un jour sur scène.

– Vocalement, on te sent très libre et forte à la fois. Tu as dit avoir trouvé ta voix en studio. Que voulais-tu dire ? Que c’est exercice différent de celui de la scène, et qui demande peut-être un placement plus précis et un peu opposé aux concerts, où l’énergie prime ?

Les performances live ont un avantage : elles permettent d’être plus libre. Je cherche à créer une connexion avec le public, donc je ne me concentre pas tant sur la précision et la perfection. Le studio peut être complexe, car il n’y a pas grand-chose à exploiter, si ce n’est sa propre inspiration. Il m’a fallu du temps pour trouver comment me détendre et me concentrer naturellement sur ma voix.

– Musicalement aussi, « Paper Doll » est une fois encore un album très varié, où l’on retrouve ton Blues avec ses côtés Rock et Soul et teinté de Country et de Folk. Justement, est-ce que tu cherches un certain équilibre au moment de la composition, ou c’est seulement ton inspiration qui te guide ?

J’ai parfois une idée en tête quand j’écris une chanson, mais quand on va en studio, quelque chose d’autre prend souvent le dessus. Il faut parfois laisser la chanson se développer toute seule.

– Pour tout le monde, tu es la très électrique guitariste à la cigarbox. Dans quelle mesure cet instrument trouve-t-il sa place dans la composition et dans l’enregistrement de tes morceaux sur ce nouvel album ?

J’essaie de l’intégrer de temps en temps en studio. Mais si ça ne convient pas à la chanson, je ne vais pas l’imposer de force. J’aime bien lui donner une place en concert, mais je ne veux pas qu’un instrument dicte le potentiel d’une chanson. Il faut être ouvert à la nouveauté. J’ai toujours cette idée en tête et je saute sur l’occasion de l’utiliser quand c’est le bon moment.

– Une dernière question plus personnelle pour conclure. Ta sœur Amanda a sorti un très bel album dans un style différent du tien l’année dernière. Evidemment, on imagine qu’une collaboration artistique serait incroyable. Avez-vous déjà évoqué le sujet toutes les deux ?

Amanda et moi avons toujours été assez indépendantes. Je pense qu’étant donné notre âge très proche, il est important pour nous d’être autonomes et libres dans notre musique et nos carrières. Mais peut-être plus tard. Qui sait ? Cela dit, en ce moment, nous aimons nous soutenir mutuellement et faire notre propre musique séparément.

« Paper Doll », le nouvel album de SAMANTHA FISH, est disponible chez Rounder Records.

Photos : Aries Photography (2, 3) et Doug Hardesty (4).

Retrouvez la précédente interview de l’artiste et la chronique de son album avec Jesse Dayton :

Catégories
Blues Rock International

Ally Venable : rich blue notes [Interview]

Qu’il semble loin le temps où la toute jeune ALLY VENABLE faisait ses premiers pas avec « Wise Man » en 2013. Pourtant, c’est déjà avec un sixième album que la Texane de 26 ans seulement affirme aujourd’hui un jeu très mature et une voix qui porte bien plus qu’à ses débuts. Avec « Money & Power », elle franchit un palier supplémentaire, forte d’une assurance et d’une confiance à toute épreuve. En restant attachée à ses racines Blues Rock, la guitariste et chanteuse s’aventure même dans des registres inexplorés jusqu’à présents, et cela lui réussit plutôt bien. Entretien avec une musicienne qui a la tête sur les épaules, affirme des convictions fortes et a une idée très précise de sa musique.

– « Money & Power » est déjà ton sixième album et il dégage beaucoup de maturité. De quelle manière es-tu abordé son écriture, toujours accompagné de ton batteur et producteur Tom Hambridge ? Aviez-vous déjà une idée globale de sa thématique ?

Nous souhaitions explorer ces thèmes sous différents angles, en les canalisant dans notre un Blues Rock brut et plein d’émotion. La production de Tom a été essentielle pour donner vie à cette vision. Je suis très fière du résultat de cet album : c’est notre œuvre la plus ciblée et la plus percutante à ce jour. J’espère que les fans se sentiront concernés par les thèmes et l’énergie que nous y avons mis.

– Alors que tes précédents albums étaient clairement Blues Rock, avec « Money & Power », tu explores des registres plus Soul et cuivrés, funky, avec aussi une petite touche Alt-Country et même légèrement Reggae. Avais-tu besoin d’explorer d’autres sonorités et aussi de varier ton jeu ?

Tu as raison, avec « Money & Power », j’ai clairement élargi ma palette sonore au-delà du Blues Rock pur et dur de mes précédents albums. C’était une décision consciente d’explorer de nouveaux territoires musicaux et d’y incorporer des éléments de Soul, de Funk, de Country alternative et même d’un peu de Reggae. Mais le son blues de ma guitare et l’émotion qui le sous-tend resteront toujours au premier plan.

– Ce nouvel album est aussi une déclaration féministe, au moment où les femmes n’ont jamais été aussi présentes sur la scène Blues mondiale. Si cela va mieux en termes d’exposition et que les talents émergent enfin, que manque-t-il encore pour que la reconnaissance soit totale, selon toi ?

« Money & Power » a une forte connotation féministe, ce qui est important compte tenu de la présence croissante des femmes sur la scène Blues mondiale. Si des progrès sont réalisés en termes de visibilité et de reconnaissance du talent féminin, je pense qu’il reste encore du travail à faire. C’est pour cela que je pense qu’il est crucial pour les femmes du Blues et du Rock de se rassembler, de créer leurs propres espaces et de s’encourager mutuellement. L’unité et le refus de se laisser monter les unes contre les autres sont une force. Lorsque nous sommes solidaires, il devient beaucoup plus difficile de nous rejeter.

– Tu as toujours beaucoup aimé les duos. Après Devon Allman et Kenny Wayne Shepherd sur « Heart Of Fire », puis Joe Bonamassa et Buddy Guy sur « Real Gone », tu accueilles cette fois Christone ‘Kingfish’ Ingram et la chanteuse new-yorkaise Shemekia Copeland. Qu’est-ce qui te plait dans cet exercice ? Le partage ? La communion ?

Echanger des riffs avec Kingfish a été un vrai plaisir. On perçoit vraiment les personnalités distinctes de chaque artiste, qui transparaissent dans ces collaborations. Que ce soit le jeu de Kingfish ou la maîtrise vocale inébranlable de Shemekia, ils ont chacun laissé leur empreinte sur l’album et une présence qui l’a propulsé au niveau supérieur ! Et c’est génial pour ça de travailler avec ses amis ! J’ai été honoré qu’ils acceptent !

– J’aimerais qu’on dise un mot de la pochette de ce nouvel album, car elle sort littéralement des standards que l’on peut voir dans le Blues en général. L’idée était-elle de provoquer avec un visuel fort ? De marquer les esprits ?

Je voulais créer un visuel fort et provocateur qui capterait immédiatement l’attention de l’auditeur et donnerait le ton aux thèmes abordés sur l’album. L’image de moi assise au bureau d’un grand patron, la guitare à mes côtés, comptant de l’argent et savourant un cigare et un whisky, fait assurément forte impression.

– Par rapport à tes précédents albums, je te trouve un peu moins démonstrative et plus au service des chansons. Ton intention était-elle de plus te concentrer sur la composition, les textes et les mélodies ? 

Il était également important pour moi d’éviter de tomber dans le piège du culte du guitar-heros, qui peut parfois survenir dans le monde du Blues Rock. Si je suis fière de mes compétences techniques, je ne veux pas que cela occulte les intentions artistiques et émotionnelles profondes qui se cachent derrière ma musique.

– Il y a six ans déjà, tu avais participé à la fameuse « Blues Caravan » de Ruf Records, aux côtés de Katarina Pejak et Ina Forsman. Un casting entièrement féminin, qui renvoie forcément à la thématique de ton album. Quels souvenirs en gardes-tu et y as-tu pensé en composant « Money & Power » ?

Ina et Katarina sont toutes deux des artistes dynamiques et j’étais émerveillée de les voir dominer la scène soir après soir. Mais au-delà de ça, elles étaient aussi des partenaires de groupe formidables et d’un grand soutien. Nous avions une véritable camaraderie et un sens de la communauté qui, je pense, ont vraiment trouvé un écho auprès du public devant lequel nous avons joué. Cette tournée a été une expérience formatrice pour moi, en tant que musicienne et en tant que femme dans ce milieu. Ainsi, même si la tournée « Blues Caravan » remonte à des années, son influence est toujours très présente dans mon processus créatif. C’est une pierre angulaire qui me rappelle la force et la complicité que nous pouvons trouver lorsque nous nous unissons en tant que femmes dans ce milieu.

– Enfin, la scène Blues féminine au sens large compte aujourd’hui de grandes musiciennes qui sont unanimement reconnues. Parmi elles, de qui sens-tu la plus proche ? Je pense à Ana Popovic, Samantha Fish, Joanne Shaw Taylor, Sue Foley, Grace Bowers, Ghalia Volt, Erja Lyytinen, Gráinne Duffy, la Française Laura Cox, Dana Fuchs, Susan Tedeschi et j’en oublie beaucoup…

Bien que j’éprouve une profonde affinité et une profonde admiration pour toutes les femmes que tu as mentionnées. Je dois dire que je suis particulièrement attirée par le talent artistique de Samantha Fish, Susan Tedeschi et Joanne Shaw Taylor. Il y a quelque chose dans leur jeu de guitare qui est brut et sans complexe, et leur voix pleine d’âme résonne vraiment en moi. Voir d’autres femmes s’éclater sur scène est une source constante de motivation pour moi. C’est un puissant rappel que nous pouvons absolument nous affirmer, que nos voix et notre talent artistique méritent d’être entendus.

Le nouvel album d’ALLY VENABLE, « Money & Power » est disponible chez Ruf Records.

Photos : Jeremiah Shepherd (1, 3, 4)

Retrouvez aussi les chroniques de ses albums précédents :

Catégories
Contemporary Blues

Robin Trower : étincelant

Du haut de ses 80 ans, ROBIN TROWER peut fièrement afficher une carrière hors-norme bâtie sur un répertoire qui frôle l’excellence. Depuis ses débuts avec Procol Harum, puis avec son groupe, le guitariste reste d’une fluidité et d’une précision implacables, servi par un feeling exceptionnel et un sens du groove ravageur. Après quelques problèmes de santé l’an dernier, l’Anglais fait son retour sur scène, ainsi que sur disque avec ce superbe « Come And Find Me ». 

ROBIN TROWER

« Come And Find Me »

(Provogue/Mascot Label Group)

Il nous avait laissé il y a deux ans avec « Joyful Sky », brillant album qu’il partageait avec la chanteuse new-yorkaise Sari Schoor, laquelle offrait un charme et surtout une couleur différente de l’habituel répertoire du bluesman. Une collaboration transatlantique qui reste à ce jour l’un des plus beaux albums de Blues de ses dernières années. C’est seul cette fois, mais avec toujours en main sa célèbre et inséparable Fender Stratocaster, que ROBIN TROWER illumine de toute sa classe « Come And Find Me », merveilleusement accompagné d’un groupe de fidèles. 

Il a enrôlé des compagnons de confiance et l’on retrouve le batteur Chris Taggart, le bassiste américain Glenn Letsch, qui fait son retour auprès du maître sur les morceaux « Tangled Love » et « I Fly Straight To You », ROBIN TROWER jouant comme souvent sur le reste des chansons. Au chant, son ami de longue date Richard Watts enveloppe chaudement et tout en délicatesse les mots toujours très personnels du compositeur… Et quelle voix ! Et puis, cerise sur le gâteau, la britannique Jess Hayes livre une performance incroyable sur le solide « Tangled Love ».

« Come And Find Me » a beau être son 28ème album solo (sauf erreur !) et pourtant ROBIN TROWER conserve cette exigence, tant dans le son que dans la composition. Avec un jeu et un toucher inimitables, il déroule ce nouvel opus avec une telle fraîcheur qu’on en oublierait son âge. Il séduit et percute avec une élégance et une modestie qui forcent le respect («  A Little Bit Of Freedom », « Time Stood Still », « One God Round », et la chanson-titre). Son Blues, à son image d’ailleurs, vit bien et semble même éternel, tant il est porté par une production inscrite dans son temps.

Retrouvez les chroniques de ses deux derniers albums :

Catégories
Roots Rock Southern Blues Rock Southern Rock

The Commoners : southern kingdom

Le live est souvent l’épreuve de vérité et un passage obligatoire pour tous les musiciens, au-delà d’un plaisir total et d’un certain aboutissement. L’échange avec son public, une fois gravé, peut être à double-tranchant. Cependant, THE COMMONERS a réalisé de belles captations qui mettent en valeur, en relief et en perspective ce dont il est capable sur scène. L’énergie déployée sur ce « Live In The UK » gomme à elle seule quelques imperfections tout à fait acceptables et carrément pardonnables.

THE COMMONERS

« Live in the UK »

(Gypsy Soul Records)

Même si leurs débuts datent de 2016 avec « No Stranger », les Canadiens ont réellement pris leur envol avec « Find A Better Way », six ans plus tard. Depuis, ils ne cessent de tourner et ont sorti le très bon « Restless » l’année dernière. C’est justement lors de cette venue en Europe, en notamment en Angleterre, qu’ils ont enregistré ce « Live In The UK », fruit de plusieurs concerts. Et c’est vrai que les prestations de THE COMMONERS sont franchement explosives. On y retrouve toute l’énergie et l’enthousiasme de ses disques, le tout en symbiose avec son public.

Alors que le groupe s’apprête justement à fouler à nouveau les planches des salles du Royaume-Uni en élargissant cette fois sa venue en Europe à d’autres pays, ce « Live In The UK » tombe à pic, même s’il ne doit évidement rien au hasard. Passé ces considérations marketing, THE COMMONERS propose neuf morceaux issus de ses deux derniers témoignages et l’on découvre un quintet qui prend toute sa dimension sur scène. Et si l’on connait la précision et le soin apporté en studio, la fougue et l’aspect brut de ses titres sont tout aussi réjouissants.

Sans rien enlever à l’émotion qui transparait du répertoire de la formation de Toronto, son approche scénique est tout autre, et demeure très intéressante. Loin du confort du studio, c’est l’instantanéité de son jeu qui prend ici le dessus avec une sincérité et un côté très instinctif, qui nous ramènent aux fondamentaux de ce Southern Rock très roots. Finalement, c’est la communion avec ses fans qui prend tout son sens, peu importe le style, et de ce côté-là, les Nord-Américains montrent une authenticité qui nous transporte au cœur de la fosse avec un état d’esprit et une attitude hyper-Rock’n’Roll.

Photo : Halukgurer

Retrouvez justement les chroniques des deux derniers albums studio :

Catégories
Blues Blues Rock Boogie Blues Contemporary Blues Soul Southern Blues

Carolyn Wonderland : une grande dame

L’intensité, qui se retrouve dans le mordant de son approche tant vocale que guitaristique, semble être une seconde nature chez CAROLYN WONDERLAND. La musicienne, qui avait véritablement pris son envol en solo il y a quatre ans avec le génial et audacieux « Tempting Fate » sur lequel elle jonglait avec sa Gibson et sa lap-steel, monte encore en émotion et en virtuosité dans un équilibre musical, qui doit beaucoup à une confiance acquise au fil du temps. « Truth Is » est une sorte d’apothéose, tant au niveau de l’écriture que de cette voix, où la puissance n’a d’égal que sa douceur. Monumental.

CAROLYN WONDERLAND

« Truth Is »

(Alligator Records)

CAROLYN WONDERLAND est une fine gâchette, cela n’aura échappé à personne, et sur ce deuxième effort chez l’institution Alligator Records, on prend pleinement conscience de ses talents de chanteuse et de compositrice. Une reconnaissance qui arrive peut-être un peu tard, mais qui est aujourd’hui incontestable. Elle qui a joué avec presque toutes les légendes Blues du Texas et qui a aussi effectué un beau et assez long passage au sein des Bluesbreakers de John Mayall, semble littéralement épanouie sur ce « Truth Is », marqué de son empreinte. Car la musicienne est loin de manquer de personnalité, bien au contraire.   

D’une rare polyvalence, elle fait un beau tour d’horizon des courants dans lesquels elle se retrouve… et il y en a ! Forcément très sudiste dans le jeu, on retrouve chez la Texane des notes de Soul, de Gospel, de Jazz, de Country et de Roots Rock, qui font de son Blues un refuge éclectique pour des saveurs chaleureuses et sincères. CAROLYN WONDERLAND a de nouveau confié la production de « Truth Is » à Dave Alvin, lequel sublime des compositions entraînantes, mais aussi très touchantes et toujours authentiques. On passe de sa ville natale de Houston à la Nouvelle Orleans, avec un crochet par Memphis, en un clin d’œil.   

Avec son inimitable picking, elle signe l’essentiel de cette nouvelle réalisation, tout en coécrivant quelques titres avec son producteur et Shelley King, et en s’offrant la liberté de reprendre « Wishful Thinking » (Greg Wood/Eddie Hawkins) et « Orange Juice Blues » (Richard Manuel pour The Band). Mais le plus beau et surtout le plus réjouissant vient de ses propres compositions et elles sont franchement renversantes (« Sooner Or Later », « It Should Take », « I Ain’t Going Back » avec Ruthie Foster et Marcia Ball, l’ensoleillé « Deepest Ocean Blue », le bouleversant « Blues For Gene » et la somptueuse chanson-titre. Incontournable.   

Photo : Mary Bruton

Retrouvez la chronique de « Tempting Fate » :

Catégories
Blues Rock Contemporary Blues

The Davidson Trio : hot ride

La réunion de talents laisse souvent entrevoir de très belles choses et c’est précisément le cas avec ce torride et sensuel « Cougar », livré par une formation où l’expérience et la complicité sont en totale symbiose. THE DAVIDSON TRIO transpire le Rock et respire le Blues et sa configuration offre le meilleur ajustage possible dans ce style relevé et très contemporain. Emmené par un chanteur et bassiste inspiré, ce premier effort est sensationnel à plus d’un titre.

THE DAVIDSON TRIO

« Cougar »

(Independant)

Bassiste chevronné et réputé, Owen Davidson monte enfin son projet personnel après avoir accompagné tant d’artistes, Depuis Uli Jon Roth jusqu’à Rumour avec un très bon opus sorti il y a quatre ans. Et c’est toujours en indépendant qu’il a  créé THE DAVIDSON TRIO, dont le premier album, « Cougar », est largement à la hauteur des attentes. Soutenu par le guitariste Ben Bicknell et le batteur Ellis Brown, il prend aussi le chant en plus de son instrument, et le Blues Rock qui en ressort naît d’une belle inspiration commune.

Même si les britanniques font leurs premières armes ensemble, il ne faut pas longtemps pour comprendre que « Cougar » n’est pas du travail d’amateurs. Fluides et percutants, ils se montrent solides et créatifs. L’objectif avec THE DAVIDSON TRIO était pour son fondateur de renouer avec ses racines Blues, Rock et Funk et surtout dans une formule power trio, dont on connaît la redoutable efficacité. Et la touche British Blues et le registre de nos trois bluesmen naviguent aussi des rives du Mississippi jusqu’aux contrées plus au Sud des Etats-Unis.

Très Rock d’entrée sur « Medusa Touch », THE DAVIDSON TRIO place la barre très haut et le chant très Soul d’Owen se fait aussi accrocheur que les guitares, dont le solo d’ouverture donne le ton. Le combo de Birmingham évolue sur un groove sans faille, aussi chaleureux que sensible. Old School sur « The Deep », dynamique sur « Hold On » et « The Cure », ou plus roots sur « Blues River », il fait preuve d’une incroyable diversité et d’un feeling hors-pair. Les trois musiciens se trouvent les yeux fermés et chacun brille pour l’autre.

Catégories
Blues Rock Boogie Blues Hard Blues Southern Blues Rock

Pino Scotto : bluesy clash

Loin du Heavy Metal de ses débuts, PINO SCOTTO a embrassé la cause du Blues et le fait avec beaucoup de talent et un aplomb réjouissant. Car si les décibels ont baissé d’un cran, le propos reste d’une franche virulence. Toujours alerte sur le monde qui l’entoure, il livre son ressenti sur des chansons au souffle alerte et sans tabou. « The Devil’s Call » plaque au sol les attitudes fantomatiques, démonte une époque en pleine déliquescence avec une belle vigueur et dans le style le plus authentique qui soit.   

PINO SCOTTO

« The Devil’s Call »

(Wanikiya Record)

Guiseppe Scotto di Carlo, alias PINO SCOTTO, a toujours eu le verbe haut et ce nouvel album vient confirmer qu’il n’a pas changé ses habitudes. Connu, en marge de son parcours musical, dans son pays pour ses diatribes envers la société et à travers elle la politique, mais aussi l’industrie artistique plus largement, il n’en demeure pas moins un homme de cœur, un musicien aguerri et d’une grande sincérité. Avec « The Devil’s Call », il vient pousser onze nouveaux coups de gueule sur ce monde qu’il juge brisé, et avec beaucoup de force.

Ancien leader de Vanadium dans les années 80, PINO SCOTTO mène depuis trois décennies environ une carrière solo et avec ce nouvel opus, il offre une belle suite à « Eye For A Eye » (2018) et « Dog Eat Dog » (2020). Sorte d’électrochoc bluesy,  ce nouvel effort traverse sans filtre des registres aux sonorités très américaines, entre Hard Rock et Southern Rock, pour se fondre dans des Boogie fiévreux et un Blues Rock ravageur. Les riffs sont appuyés et tranchants, les solos claquent et le chant de l’Italien fait mouche sur des textes brûlants.

PINO SCOTTO démarre sur les chapeaux de roue avec un « No Fear No Shame » hyper-Rock’n’Roll, aux faux airs de Lemmy dans l’intonation. Si le frontman n’a pas son pareil pour transmettre une énergie intense, il sait aussi dévoiler sans far une facette plus sensible (« A Dozen Souls », « True Friends »). La voix rauque et éraillée et la guitare affûtée, on se laisse porter par des morceaux très directs, efficaces et dont les refrains laissent des traces (« Full Circle », « Afraid Of Living », « Big Mama »). Brut et audacieux !

Catégories
Blues Blues Rock Contemporary Blues

Emanuel Casablanca : on the way

« Hollywood Forever » est un disque assez troublant, le troisième pour le New-Yorkais. En effet, sous des traits bluesy, il nous embarque dans un univers très disparate, éclectique à souhait et qui, finalement, se cherche encore un peu. Il ne propose pas de fil conducteur, de sorte de voie à suivre et dans laquelle il pourrait s’affirmer pleinement. EMANUEL CASABLANCA séduit par sa voix feutrée et un jeu solide, mais peine un peu à convaincre en tant que véritable bluesman. Si la modernité de ses compositions est incontestable et agréable, elle pèche par un manque d’authenticité criant.

EMANUEL CASABLANCA

« Hollywood Forever »

(Bad Boy Of Blues Media)

Bad boy, EMANUEL CASABLANCA ? Pas vraiment, si l’on se refère à sa musique. Car l’Américain a plusieurs cordes à son arc, dont quelques aventures cinématographiques, un passé de basketteur et la création d’une fondation dédiée à la promotion des droits humains et de la justice sociale dans le monde, et qui est aussi le nom de son label. Donc, le musicien de Brooklyn est plutôt du côté des gentils. Et c’est tant mieux, même s’il reste sur des thèmes chers au Blues, sans vraiment toucher aux problèmes qui fâchent. Mais parlons musique !

Troisième album donc pour le guitariste et chanteur, et le moins que l’on puisse dire, c’est que « Hollywood Forever » est particulièrement riche et généreux. 16 chansons au total pour une durée d’une heure, dont un morceau-titre qui atteint presque les neuf minutes. C’est d’ailleurs peut-être là où le bât blesse. EMANUEL CASABLANCA se disperse un peu, montre des difficultés à afficher un style personnel et à insuffler sa touche à un opus qui aurait peut-être pu (et dû ?) être plus resserré, tant sur les compositions que les registres abordés.

Cela dit, la diversité de « Hollywood Forever » livre aussi de très bons moments, où alternent des passages clairement Blues Rock, d’autres plus légers et presque Pop et des parties acoustiques à l’approche pus traditionnelle. Sans être un virtuose de la six-corde, EMANUEL CASABLANCA se rattrape très bien sur les mélodies et sa voix douce très Soul lui permet bien des écarts. Dans ce dédale de titres, « The Squeeze », « Me And The Devil », « Black Man’s Burden », « India Stoker », « Lust And Lie », « Juggernaut » et « Flying » sortent du lot. 

Catégories
Blues Soul / Funk Southern Blues Rock

Little Feat : a brand new legend

Sans rien changer à son sens du groove et avec un feeling incroyable, LITTLE FEAT poursuit son chemin comme si de rien n’était. En quête perpétuelle d’un style qui rassemble autant le Blues le plus authentique, la Soul profonde de Louisiane que des cuivres incandescents hyper-funky, l’emblématique et éternel groupe livre enfin de nouveaux titres inédits. Avec une humilité, une technicité et un art du songwriting qui se réinvente avec beaucoup de modernité, « Strike Up The Band » ne dépareille pas une seule seconde de l’immense héritage discographique d’une formation inépuisable et insatiable.  

LITTLE FEAT

« Strike Up The Band »

(Hot Tomato Records)

Près de 55 ans après sa création, LITTLE FEAT tient toujours debout et, malgré une carrière en dent de scie, des changements de line-up et quelques disparitions marquantes, il semble même avoir retrouvé un nouvel élan. Alors que « Sam’s Place », sorti l’an dernier, résonne encore de ses vibrantes reprises, c’est avec un tout nouvel album entièrement original que le sextet fait un retour époustouflant, son premier depuis 13 ans. Et que la fête est belle ! Enregistré entre les studios Blackbird de Nashville et le Studio One Two Seven de Harlem à New-York, « Strike Up The Band » célèbre avec toujours autant de classe un Blues sudiste très varié et plein de surprises, qui paraît si éloigné de sa Californie natale.

Autour du solide socle constitué de Bill Payne, au chant et aux claviers depuis 1969, et de Paul Barrere (chant, guitare), Sam Clayton (conga, percussions, chant) et Kenny Gradney (basse) tous présents depuis 1972, LITTLE FEAT peut compter depuis un bon moment maintenant sur les fidèles et talentueux Fred Tackett (guitare, mandoline, trompette, chant) Tony Leone (batterie) et le virtuose guitariste et compositeur Scott Sharrad. Et cette armada du groove continue son exploration du Blues, du Funk, du Southern Rock et de ses envolées Soul avec une fraîcheur, une élégance, un enthousiasme et une complicité, qui nous ramènent aux premières heures de ce combo hors-norme.

Dans la chaleur des cuivres et la torpeur de la slide, LITTLE FEAT s’est ouvert à quelques collaborations, et non des moindres. Côté compositions, « Bayou Mama » est l’œuvre de Payne et de Charlie Starr des Blackberry Smoke, tandis que « Bluegrass Pines » doit son texte à Robert Hunter, légendaire parolier de Grateful Dead et où l’on retrouve le six-cordiste Larry Campbell, les chœurs de sa femme Teresa Williams et Molly Tuttle en embuscade. Dans cette heure assez magique, les sœurs Lowell de Larkin Poe enveloppent la touchante chanson-titre, puis la féérie continue sur « 4 Days Of Heaven, 3 Days Of Work », « New Orleans Cries When She Sings », Too High To Cut My Hair », « Midnight Flight »… Grand !

Catégories
Blues Rock International

Jennifer Lyn & The Groove Revival : 70’s passion [Interview]

Originaire du Minnesota et dorénavant basée dans le Dakota du Nord, la chanteuse, guitariste et compositrice JENNIFER LYN poursuit son chemin avec sa formation, THE GROOVE REVIVAL, devenue une redoutable machine. Dans un Blues Rock costaud, entraînant et mélodique, elle nous fait part aujourd’hui d’une évolution notable, que ce soit dans son jeu, mais aussi dans cet esprit de groupe, forgé au fil du temps, et que ce troisième album vient véritablement consacrer. Live et organique, « Retrograde » nous plonge dans des atmosphères très 70’s que la production très actuelle parvient à parfaitement conserver. Entretien avec une artiste passionnée et touche-à-tout, qui semble avoir trouvé le parfait équilibre dans sa musique.   

– Je t’avais découvert en 2019 à la sortie de « Badlands », qui faisait suite à ton premier album « I’m All Wrong For You Baby ». Tu as ensuite enchaîné avec les EP « Nothing Holding The Down » et « Gypsy Soul », puis « Live From The Northern Plains ». Alors que sort « Retrograde », quel regard portes-tu sur ton parcours de ces six dernières années ?

Quelle aventure ! Se remémorer les débuts de l’album rend le voyage encore plus surréaliste. Des albums comme « Badlands » et « I’m All Wrong for You Baby » semblent comme des échos d’une autre époque. D’ailleurs, il s’agissait plutôt de démos brutes : je dirigeais alors un trio et je commençais tout juste à façonner ma voix d’auteure-compositrice. Maintenant, avec un groupe de cinq musiciens derrière moi, nous créons enfin le son que j’ai toujours imaginé et nous construisons un répertoire, qui capture exactement ce que nous voulions créer. Ce fut une évolution aussi folle qu’enrichissante.

– Alors que tu ne fait qu’aller de l’avant ces dernières années, ton troisième album s’intitule « Retrograde », ce qui peut surprendre. Tu as souhaité faire un contraste fort entre le titre et le contenu, ou y a-t-il un autre message ?

Mon co-auteur et membre du groupe, Richard Torrance, et moi composons une musique imprégnée de cette ambiance Rock si caractéristique des années 70. C’est cette époque qui a façonné nos goûts et qui alimente encore aujourd’hui tout ce que nous créons. Parce que notre son s’inspire de cet esprit vintage, nous avons intitulé l’album « Retrograde », en clin d’œil à cette tendance à contre-courant. C’est notre façon de prendre le contre-pied et de rendre hommage à la musique qui nous touche le plus.

– Pour te suivre depuis un moment maintenant, je trouve que ton chant a considérablement évolué. Il est nettement plus libre et le registre plus ample aussi. C’est un aspect de ta musique que tu as beaucoup travaillé et sur lequel tu t’es plus concentrée, car il est également plus fluide et varié ?

Merci, j’apprécie que tu me dises cela. Je perfectionne constamment mon jeu. Une routine régulière et ciblée m’a aidé à élargir ma tessiture et ma technique vocales au fil du temps. Chanter est une exploration continue, et j’essaie de l’aborder avec patience et curiosité : il s’agit de découvrir ce qui est possible, une note à la fois.

– Avant de parler de ce nouvel album, j’aimerais que l’on dise un mot de ton jeu de guitare. J’ai noté une évolution, pas au sens strictement technique, mais plutôt dans la façon d’aborder les riffs et les mélodies. Qu’est-ce qui a changé, selon toi, dans ton rapport à ton instrument ?

La guitare a toujours été une passion. Je m’y mets dès que j’en ai l’occasion et cette motivation constante m’a permis de progresser. Ecrire avec mon partenaire Richard, qui est un guitariste exceptionnel, me permet d’aller encore plus loin dans cette évolution. C’est lui le maître des riffs, tandis que je me concentre sur la mélodie. Ensemble, c’est un véritable processus collaboratif et créatif.

– Avec toujours cette touche 70’s, ton Blues Rock est toujours aussi percutant et sonne aussi très actuel. Cette dynamique, on la doit aussi aux musiciens qui t’accompagnent. On sent une réelle connexion entre vous. Est-ce qu’ils ont aussi participé à l’écriture de l’album, ou as-tu composé seule les chansons de « Retrograde » ?

Chaque chanson de l’album a été co-écrite avec Richard. Ensemble, nous gérons tous les aspects de l’écriture, de la composition aux arrangements jusqu’aux paroles, créant ainsi une structure complète pour chaque morceau. Une fois les chansons écrites, nos compagnons de groupe leur donnent vie en concevant chaque partie dans le respect de ces limites. S’ils ne contribuent pas à l’écriture en elle-même, leur musicalité, leur expérience et leur interprétation ajoutent profondeur et dimension à la performance finale.

– Au niveau du son, « Retrograde » est très bien produit et il offre un relief et un volume irréprochable. Dans quelles conditions l’avez-vous enregistré et as-tu aussi participé à son élaboration ?

Richard et moi coproduisons nos albums et tous nos albums studio sont enregistrés dans mon home-studio, où je m’occupe de l’ingénierie, du mixage et du mastering. Le studio est devenu mon sanctuaire créatif. J’adore le processus du début à la fin. Prendre le contrôle total de l’enregistrement est à la fois un défi et une étape extrêmement enrichissante de notre parcours.

– « Retrograde » a aussi un aspect très live. C’est important pour toi de conserver cette approche directe et toujours très Rock ?

Lors de l’enregistrement, notre objectif est de capturer le plaisir de faire de la musique ensemble. Il ne s’agit pas seulement des morceaux : nous apprécions sincèrement la compagnie des autres et cette connexion nourrit l’énergie créative qui règne dans la pièce. On nous a dit que l’album avait un côté live et nous pensons que cela reflète le plaisir et l’alchimie que nous avons partagés pendant l’enregistrement.

– Ce qui ressort aussi de « Retrograde », c’est cette belle complicité avec Richard Torrance à la guitare. Y a-t-il beaucoup d’échange entre vous sur le jeu et de quelle manière vous répartissez-vous les rôles entre la rythmique et le lead ?

Richard est notre guitariste principal et il a une façon unique de s’exprimer à travers ses solos : ils sont vraiment parlants. Lorsqu’un morceau nécessite deux parties de guitare solo, c’est là que j’interviens. J’aime échanger et superposer des lignes solo avec lui lorsque cela enrichit le morceau. Côté rythmique, nous nous concentrons sur la création de parties complémentaires qui étoffent la gamme de fréquences de la guitare, en utilisant des voicings (la disposition des notes pour réaliser un accord – NDR) et des textures variés qui se complètent et soutiennent le son global.

– L’album fait aussi la part belle aux émotions avec des chansons plus calmes et mid-tempos, et l’orgue apporte aussi beaucoup de chaleur. L’objectif était-il aussi d’être le plus organique possible, de rester connecter au Blues originel, tout en restant très électrique et actuel dans l’ensemble ?

Absolument. La musique que nous aimons créer est profondément ancrée dans le Blues, et puiser dans ces racines apporte richesse et profondeur à tout ce que nous faisons. Barb Jiskra, notre claviériste, apporte ce caractère vintage au mix, ajoutant des sonorités Soul et Old School, qui complètent parfaitement les guitares et le groove de Jim Anderson à la batterie et de Nolyn Falcon à la basse. C’est ce mélange qui donne à notre son sa signature.

– Enfin, ces dernières années, tu as été plusieurs fois nominée aux ‘Independent Blues Music Awards’ et tes trois derniers disques se sont touts classés dans le Top 10 des radios Blues américaines. Malgré toutes ces reconnaissances, tu n’es pas intéressée par une signature sur un label, ou est-ce que tu tiens à garder ta liberté artistique ?

Les labels ont leur place dans l’industrie, mais nous n’avons jamais laissé l’absence de représentation majeure nous freiner. Notre lien avec les fans a toujours été notre principal moteur. Au-delà de la musique elle-même, c’est le fondement de tout ce que nous faisons. Rester indépendant présente de réels avantages. Des artistes comme Joe Bonamassa ont ouvert la voie et cela se produit désormais dans tous les genres. Certes, il faut se démener pour ouvrir des portes qui autrement resteraient fermées sans label, mais elles ne sont pas verrouillées. Il suffit de continuer à frapper.

Les albums de JENNIFER LYN & THE GROOVE REVIVAL sont disponibles sur le site de l’artiste : https://jlynandthegrooverevival.com/