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AOR Classic Rock

Masque Of Art : à visage découvert

Riffs acérés, rythmique soutenue, claviers discrets et efficaces et surtout un frontman à la voix et à la technique irréprochable, MASQUE OF ART possède des arguments et de très beaux atouts, qui sont parfaitement restitués sur « Masquerade ». Le premier album des Suédois présente un AOR/ Classic Rock rafraîchissant très relevé où l’expérience du sextet fait toute la différence.

MASQUE OF ART

« Masquerade »

(Wormholedeath Records)

Depuis quelques temps déjà, on assiste un vrai renouveau de l’AOR et plus largement du Classic Rock, et ce n’est pas un mirage. Avec l’émergence de nombreux groupes, le public semble suivre, obligeant à une nécessaire créativité. Et de ce côté-là, la Suède n’a jamais été en reste et c’est avec plaisir que l’on découvre aujourd’hui MASQUE OF ART, un sextet expérimenté et inspiré.

Né de la réflexion du guitariste et songwriter Jörgen J. Andersson, c’est avec le batteur Peter Lundgren et le très bon chanteur Michael Storck que le projet a réellement pris corps. Rejoint par Nalle Påhlsson à la basse, Mathias Norberg aux claviers et Jorgen Svensson à la guitare et aux claviers, MASQUE OF ART présente un line-up très affûté et surtout un premier album équilibré et solide.

Si « Masquerade » ne manque pas de références, les Suédois tirent très bien leur épingle du jeu, avec des morceaux accrocheurs, pêchus et aux mélodies imparables (« Don’t Let It Rain », « We Live In America », « Sensation »). Grâce à l’expérience et à la technique de ses membres, MASQUE OF ART s’inscrit dans un registre fédérateur qui ne manquera pas de régaler les fans d’AOR et de Classic Rock.

NB : au moment de terminer la chronique de ce très bel album, j’apprends le décès soudain, survenu le 3 juillet, de Jörgen J. Andersson. Un coup dur et une grande tristesse pour MASQUE OF ART, et toutes mes pensées vont bien entendu à sa famille et aux membres du groupe. Le musicien a eu le temps de terminer l’enregistrement des guitares, et un deuxième album, en son honneur, sortira dans quelques temps.

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Hard Rock

MegaSnake : high voltage

C’est avec de la dynamite au bout des doigts que MEGASNAKE a composé son premier album. Resserré sur huit morceaux pétillants d’un Hard Rock rafraîchissant, « Charming » n’est pas l’œuvre de jeunes Finlandais en mal de sensations. Aguerri et techniquement imparable, le quatuor libère une énergie très communicative.

MEGASNAKE

« Charming »

(Inverse Records)

Formé par des musiciens plus que chevronnés, MEGASNAKE est la vraie bonne surprise de ce mois de juin et elle nous arrive de Finlande. Composé du chanteur Richard Johnson (Leningrad Cowboys, Gringos Locos, Apocalyptica en live), du batteur Twist Erkinharju (Peer Günt, Leningrad Cowboys), du guitariste Samuel Hjelt (Kings of Modesty, ex-Ancara) et du bassiste Henrik Tuura (Kings of Modesty, Killer Kachina), le quatuor présente de solides arguments sur ce survolté « Charming ».

Dans un Hard Rock teinté de Heavy, MEGASNAKE avance d’un seul homme dans un registre qui sent bon les années 80 et 90. On retrouve donc les ingrédients de l’énorme créativité de ces deux décennies. Musclé et véloce, le quatuor balance des riffs solides et inspirés, rappelant les belles heures de Dokken, Dio, Tesla avec un soupçon de Twisted Sister. De quoi avoir le sourire pendant un bon moment !

Formé il y a un peu plus d’un an et fort d’une récente signature chez Inverse Records, le gang finlandais montre un enthousiasme à toute épreuve. « Charming » évolue dans une atmosphère de liberté totale sur des morceaux entraînants où la qualité et la désinvolture du chant cohabitent à merveille avec des solos fougueux et vigoureux (« Sun Don’t Shine », « Shame On Me », « Stone River », « Don’t », « HeVil »). MEGASNAKE s’impose déjà !

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Progressif Rock

Solace Supplice : dystopie poétique

Acteurs reconnus dans le monde Rock Progressif, Anne-Claire Rallo et Eric Bouillette mènent désormais de front SOLACE SUPPLICE et leur groupe Nine Skies. Cependant, sur « Liturgies Contemporaines », c’est à travers un Rock plus direct, assez épuré et sur des arrangements subtils et soignés, qu’ils évoluent en quatuor. Porté par des textes délicats, touchants et forts, ce premier album rayonne par ses atmosphères parfois sombres, mais toujours scintillantes.

SOLACE SUPPLICE

« Liturgies Contemporaines »

(FTF Music)

Alors qu’ils viennent tout juste d’annoncer avoir commencé à travailler sur le prochain album de Nine Skies, Anne-Claire Rallo et Eric Bouillette sont déjà sur le pont avec le premier album de SOLACE SUPPLICE, side-projet en français et clairement orienté Rock. Egalement soutenu par Willow Beggs (basse) et Jimmy Pallagrosi (batterie), « Liturgies Contemporaines » est une évasion poétique et envoûtante guidée par un quatuor solide et inspiré.

Deux ans après un très bon EP éponyme, le duo revient dans un format où il peut aller au bout de ses idées dans un registre très personnel et finalement assez peu répandu. Très Rock tout en lorgnant à l’occasion sur le Prog, SOLACE SUPPLICE présente les compositions d’Eric (également au chant, guitare, claviers, violon et aux arrangements) mises en lumière par les textes étincelants d’Anne-Claire, dont on connait toute la finesse de la plume.

Forcement, parler d’osmose entre les paroles et la musique est un doux euphémisme, tant elles forment une combinaison évidente (« Le Tartufe Exemplaire », « En Guidant Les Hussards »). Sur des guitares souvent gilmouriennes, le chant vient déclamer librement et avec un grand soin une réflexion poétique toute en émotion (« Sunset Street », « A Demi-Maux », « Cosmos Adultérin » et le morceau-titre). SOLACE SUPPLICE impose sa patte avec une classe naturelle et un feeling communicatif.  

Pour vous procurer l’album, rendez-vous sur le bandcamp du groupe : https://solacesupplice.bandcamp.com/album/liturgies-contemporaines

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Blues Blues Rock International

Brave Rival : une touche féminine irrésistible [Interview]

Avec un tel premier album, « Life’s Machine », les Anglais de BRAVE RIVAL n’ont mis longtemps à se faire remarquer. Pour preuve, une première nomination aux UK Blues Awards et un avenir qui s’annonce radieux. Avec ses deux chanteuses et sa batteuse, le quintet affiche une forte empreinte féminine, qui apporte un souffle d’une grande fraîcheur et une belle inspiration entre Blues, Soul et Rock. Chloe Josephine revient pour nous sur les débuts du groupe et l’élaboration de ce premier opus, particulièrement réussi.

Photo : Rob Blackham

– « Life’s Machine » est votre premier album et il a déjà une belle histoire. Alors que vous deviez entrer en studio, la pandémie a tout stoppé et à peine sorti,  vous êtes nominés aux UK Blues Awards. Même si vous n’avez pas gagné, BRAVE RIVAL commence de la meilleure des manières, non ?

Ces derniers mois ont été fous. Nous sommes extrêmement reconnaissants d’avoir été nominés pour un Blues Award, d’autant plus que nous n’avions sorti qu’un album live à ce moment-là ! Les choses vont de mieux en mieux pour nous et nous avons hâte de voir où cela va nous mener.

– Vous êtes basés à Portsmouth et le quintet se présente avec deux chanteuses et une batteuse. On dirait que les femmes ont pris le pouvoir chez BRAVE RIVAL. Comment s’est monté le groupe ?

Au départ, le groupe a commencé avec trois femmes dans un registre plus folk. Donna (Peters – NDR) jouait de la guitare, mais son truc était plutôt d’être derrière sa batterie. Nous sentions que les chansons appelaient un groupe complet, et c’est ce que nous avons fait ! Nous espérons vraiment que nous pourrons être une source d’inspiration pour les hommes et les femmes. Beaucoup considèrent sans doute cette industrie comme étant masculine, vu qu’elle est tellement dominée par les hommes. Mais un jour, nous aimerions voir un équilibre se créer.

Photo : Rob Blackham

– Vous avez enregistré « Life’s Machine » grâce à une campagne de crowdfunding. C’est par une volonté d’indépendance, ou est-ce qu’il est devenu de plus en plus difficile de signer un premier album sur un label ?

Nous ne sommes pas contre l’idée d’un label, mais cela ne nous a pas semblé nécessaire pour ce disque. Nous avons une base de fans fantastique, qui voulait nous aider à faire l’album. Et le faire de cette façon nous a offert une totale liberté pour explorer nos idées et la vision de notre musique. Cet album a été financé par nos fans et en fin de compte, il est fait pour eux. Les commentaires que nous avons reçus jusqu’à présent ont été extrêmement positifs et nous ne les remercierons jamais assez, non seulement pour leur soutien, mais aussi surtout pour nous avoir permis de faire le disque.

– Pour ce premier album, vous aviez 50 morceaux et vous en avez gardé 12. Même si « Life’s Machine » dure près d’une heure, vous êtes très prolifiques. D’où vous vient cette créativité débordante ?

Nous nous retrouvons tous constamment à proposer des parties de chansons. Nous avons un lecteur en ligne, où nous mettons toutes nos idées et certaines inspirent d’autres membres du groupe à les développer davantage. Nous les développons ensuite en répétition, lors de jams. Au final, on en a tellement qu’on ne sait plus quoi en faire ! Le défi était de réduire l’ensemble à seulement douze, même si au départ, nous étions censés proposer juste dix morceaux.

– Avec autant de chansons, cela a du être très compliqué de faire des choix, non ?

Absolument. Nous avons beaucoup écrit pendant les confinements et on avait encore plus de choix au moment de l’enregistrement. Il a fallu essayer d’être impartial et de choisir les chansons qui étaient les meilleures pour l’album, plutôt que sur les compositions de chacun.

Chloe Josephine et Lindsey Bonnick – Photo Rob Blackham

– J’aimerais que l’on parle du duo que vous formez toutes les deux au chant avec Lindsey. Au-delà d’une grande et évidente complicité qui est l’une des forces du groupe, comment vous répartissez-vous les rôles et de quelle manière écrivez-vous les textes ?

Généralement, l’une de nous propose une partie, généralement avec les paroles et la mélodie. Il y a souvent des trous dans les paroles que l’autre comble. Avoir une deuxième chanteuse pour faire rebondir les idées évite beaucoup de blocages. Quand l’une de nous est coincée, l’autre a généralement quelque chose. Ensuite, on voit là où l’une est meilleure que l’autre. Nous avons des voix très différentes, mais après avoir chanté ensemble pendant si longtemps, nous nous trouvons naturellement.

– Et il y a aussi cette chorale que vous avez créée et enregistrée dans l’église St Mary de Portsmouth. La prestation est superbe. Comment est née cette idée ?

Nous avons toujours imaginé une chorale sur « Long Time Coming », qui est l’une des plus anciennes chansons de l’album. Nous voulions que la chorale soit le point culminant du morceau. Comme nous avions réservé la chorale pour une soirée complète à l’église, il était logique de les faire également jouer sur quelques autres chansons. D’ailleurs, « Break Me » a été complètement métamorphosé grâce à elle.

– Par ailleurs, cette production très organique est incroyable pour un premier album et le mastering signé Katie Tavini est excellent. BRAVE RIVAL est décidemment une histoire de femmes. Cette collaboration était importante pour vous au-delà de l’artistique, dont la qualité est incontestable ?

Absolument ! Notre producteur, Tarrant (Shepherd – NDR), avait travaillé avec elle auparavant, et nous avons été tellement impressionnés par son travail que nous lui avons demandé si elle serait intéressée. Elle nous a vraiment plu, parce que non seulement elle est géniale dans ce qu’elle fait, mais nous avons pensé qu’il était important de travailler avec d’autres femmes dans cette industrie autant dominée par les hommes, en particulier dans le secteur de la production.

Photo : Rob Blackham

– Sur l’album, il y a aussi un aspect très Rock qui dépasse le Blues. Vous mariez la slide avec des riffs très costauds. Dès le départ, vous vouliez que BRAVE RIVAL puisse évoluer dans un spectre musical très large ?

Nous avons tous des goûts musicaux différents, qui vont du Rock à la Soul en passant par la Folk et le Blues. BRAVE RIVAL est l’aboutissement de toutes ces influences. Nous n’avons jamais pris de décision consciente, mais c’est arrivé comme ça. Le Rock est une caractéristique claire pour nous, donc je suppose qu’il est naturel que ce soit quelque chose de très présent. D’ailleurs, « What’s Your Name Again ? » est la chanson préférée de nos fans !

– Pour conclure, j’ai une question sur votre style et votre son. A l’écoute de « Life’s Machine », il est difficile de déceler l’origine de votre jeu. BRAVE RIVAL garde un pied dans le British Blues, tout en montrant de nombreuses influences américaines. C’est cette synthèse que vous souhaitiez faire dès le début ?

On en revient encore une fois à nos influences. Beaucoup de chansons ont été écrites en acoustique et cela apporte naturellement une influence Folk. D’autres commencent par un riff de guitare et est naturellement plus Rock. Cela ne ressemble à BRAVE RIVAL que lorsque nous jouons tous ensemble, car c’est là que ‘notre’ son ressort. Il est difficile de dire d’où il vient, mais je suppose que c’est ce qui rend chaque groupe unique.

L’excellent album de BRAVE RIVAL, « Life’s Machine », est disponible sur le site du groupe : www.braverival.com

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Post-HardCore Post-Metal

[Going Faster] : Yarotz / Wntrhltr

Parce qu’il y a beaucoup, beaucoup de disques qui sortent et qu’il serait dommage de passer à côté de certains d’entre eux : [Going Faster] se propose d’en mettre plusieurs en lumière… d’un seul coup ! C’est bref et rapide, juste le temps qu’il faut pour se pencher sur ces albums, s’en faire une idée, tout en restant toujours curieux. C’est parti !

YAROTZ – « Erinyes » – Independant/XL Tour

Baptisé The Third Eye à sa création, ce qui fut aussi le titre de sa première démo en 2019, le trio d’Aquitaine livre son premier album « Erinyes ». Fondé entre autres par deux membres de Junon, YAROTZ libère un Metal féroce et brutal dont les influences balaient un large spectre. Très impulsif dans son côté Hard-Core et plus mélodique dans ses aspects post-Metal, le groupe présente des compositions très convaincantes et aussi sombres que rageuses. Doté d’une excellente production, le premier effort de YAROTZ déploie une force à travers laquelle l’expérience du power trio peut s’exprimer pleinement (« Vergogna », « Deliverance », « Phoenix »). Et, cerise sur ce beau gâteau, le combo accueille Christian Andreu de Gojira sur l’incendiaire « Childish Anger ». Un disque sauvage et massif.  

WNTRHLTR – « Deu.Ils » – Independant

D’une beauté sombre et dans une intensité de chaque instant, WNTRHLTR refait surface avec « Deu.Ils », un EP très dense qui fait suite à un premier single, « Sonar », sorti il y a trois ans. Avec ce format court, la consonance est toute particulière pour son guitariste et chanteur Thomas Winterhalter, souhaitant à travers ces titres se libérer d’un deuil. Les six morceaux ont donc un écho très personnel, qui saisit dès les premières notes de « Prologue » jusqu’à « Deuil », deux titres où la voix de Laure Le Prunenec (ex-Igorrr, Rïcïnn) apporte un peu de lumière. WNTRHLTR propose un post-HardCore en forme de complainte puissante, hypnotique et froide. Une superbe libération artistique ténébreuse, qui aurait même mérité de s’étendre un peu plus encore.

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Blues Rythm'n' Blues Soul / Funk

Touch Of Groove : du bout des doigts

La Soul et le Rythm’n Blues ne semblent plus seulement être l’apanage de la scène américaine, loin de là, et les Français de TOUCH OF GROOVE viennent en apporter une preuve irréfutable avec ce premier album éponyme, digne des meilleures productions d’outre-Atlantique. Même si on reste au premier abord subjugué par la prestation de sa chanteuse, le quintet est d’une minutie et d’un feeling dignes des plus grands.   

TOUCH OF GROOVE

« TOG »

(Touch Of Groove Music/Absylone)

Si le son des productions de Stax Records et d’Atlantic Records des années 60 et même 70 continue de susciter chez vous l’émotion, ce premier album de TOUCH OF GROOVE va vous régaler et ne plus quitter votre platine pendant un long (et très agréable !) moment. Le quintet français est parvenu à concentrer la quintessence de la Soul Music, un brin bluesy, de cette époque bénie pour livrer une première réalisation éponyme de toute beauté, où chaque accord est d’une justesse imparable.

TOUCH OF GROOVE est composé de Letty M. incroyable au chant, de Sylvain Lansardière rayonnant aux claviers, de Pascal Guegan tellement subtil à la guitare et de la flamboyante rythmique menée par Olivier Marchevet à la batterie et de Pascal Diouf à la basse. Autant dire qu’à eux cinq, ils en connaissent un rayon sur le groove et ils apportent une modernité à la fois efficace et délicate à ce « TOG » de très haute volée et guidé par une performance vocale impressionnante.

Certes, le groupe rend un hommage appuyé et sans détour à la Soul et au Rythm’n’ Blues de ses héros, mais il n’est aucunement question ici de nostalgie, et plus certainement de l’expression d’un immense respect. A commencer par cette reprise, « (Sweet Sweet Baby) Since You’ve Been Gone », de la reine Aretha Franklin, qui prend un relief étonnant. Et sur l’ensemble de l’album, TOUCH OF GROOVE déroule avec une facilité déconcertante des titres accrocheurs (« Breathe », « This Summer 21 », « Evolved World »). Réjouissant !

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Speed Metal Thrash Metal

The Damnnation : girl power

Pour leur premier album, les thrasheuses brésiliennes de THE DAMNNATION n’y sont pas allées de main morte. Arborant un Speed/Thrash légèrement Old School, « Way Of Perdition » est un belle surprise. Féroce et déterminé, le trio féminin s’en sort franchement bien dans un registre très maîtrisé.

THE DAMNNATION

« Way Of Perdition »

Soulseller Records

Originaire de São Paulo, le trio sort son premier album et il laisse plutôt une bonne impression. Composé de Renata Petrelli (guitare, chant), Aline Dutchi (basse, chant) et de Luana Diniz (batterie), THE DAMNNATION vient renforcer la scène Metal extrême féminine avec ce « Way Of Perdition » bien mené. Dans un registre au large spectre, les Brésiliennes livrent un opus convaincant.

Bercés par des influences Old School, les dix titres qui composent ce premier effort sont resserrés et compacts et s’étendent sur une grosse demi-heure. Bien produit, « Way Of Perdition » évolue dans un Speed/Thrash de la première époque et sur un chant essentiellement growlé et solide. Cependant, THE DAMNNATION propose une partition moderne et racée.

Depuis son premier EP, « Parasite » il y a deux ans, le combo a renforcé son répertoire et les musiciennes ont véritablement gagné en maturité. Accrocheurs et massifs, les nouveaux morceaux se basent sur une rythmique musclée et des riffs bien plus aiguisés (« Before The Drowling », « Into The Sun », « Slaves Of Society »). THE DAMNNATION offre un style percutant et enthousiaste.   

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Hard-Core Post-HardCore

Anna Sage : sans sommation

Le magma dans lequel nous propulse ANNA SAGE sonne la révolte et donne l’assaut dans un Metal HxC brutal et sombre, qui n’en oublie pas pour autant de poser des ambiances savamment dissonantes et franches. Dans une veine post-HardCore sauvage, le quatuor parisien joue sur différents tableaux avec une redoutable efficacité. Rageur et captivant à la fois.

ANNA SAGE

« Anna Sage »

(Klonosphere)

A quelques mois près, ANNA SAGE fêtait ses dix ans d’existence. Un dixième anniversaire qui aurait pu être célébré de main de maître par ce premier album éponyme franchement digne de ce nom. Mais bon… Blague à part, avec « Anna Sage », les Parisiens entrent avec fracas dans la cour des grands, toujours armés du post-HardCore aussi ténébreux qu’incendiaire. Et le quatuor n’a rien laissé au hasard en appuyant là où il faut.

Après deux EP (en 2014, puis en 2018), ANNA SAGE n’a pas réduit la voilure et encore moins l’intensité de son jeu. Quatre ans plus tard, il renouvelle sa confiance à Francis Caste, celui-là même à qui l’on doit la superbe production du dernier album de Hangman’s Chair. Et bien leur en a pris, car on est d’emblée saisi par l’atmosphère de « Anna Sage » et  par la finesse des arrangements et du mix.

Moderne, technique et percutant, ANNA SAGE se veut à l’image du célèbre hors-la-loi, John Dillinger, coincé par le FBI grâce à une prostituée qui a donc donné son nom au groupe. Sans concession, parfois chaotique et toujours très frontal (« The Holy Mice », « Hostile Cage », « Sinner Ablaze »), les titres sont très compacts et cette première réalisation ‘long format’ offre des sonorités impactantes phénoménales (« Wall Of Hate », « Loveless »). Pleine face ! 

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France Groove Metal Post-Metal

Stengah : entre deux turbulences [Interview]

A force d’un travail acharné, les Lillois se présentent avec un album incroyable de créativité et osent à peu près tout à travers un registre où viennent s’entrechoquer des ambiances et des fulgurances étonnantes. STENGAH, en reprenant le titre d’un classique de Meshuggah comme nom, vise très haut et « Soma Sema » laisse entre voir le meilleur pour le quintet. Entretien avec Eliott Williame, batteur et compositeur du groupe.

Photo : Earlawakes

– STENGAH est un nouveau venu sur la scène Metal française et dès votre premier album, vous mettez tout le monde d’accord en affichant une puissance phénoménale. Avant de parler de « Soma Sema », pouvez-vous revenir sur votre parcours, ainsi que sur votre signature chez Mascot Records pour vos débuts ? 

Merci pour ce retour ! On a débuté le projet en 2013 en cherchant un line up stable et cohérent pour prendre le temps aussi de définir une identité précise et personnelle. C’est vraiment en 2016 que le groupe a commencé à exister avec les premiers concerts et la démo « Mechanic of the Sphere », sortie en avril la même année. En 2017, nous avons été sélectionnés et avons remporté le ‘Metal Battle France’, qui nous a envoyé jouer au ‘Wacken Open Air’, ce qui a été un gros tremplin pour nous faire repérer et gagner en visibilité. Ça nous a ouvert pas mal de portes, et de plus en plus de monde a commencé à s’intéresser à STENGAH. On a été très encouragé et très soutenu pendant la création de l’album jusqu’à tomber dans l’oreille d’un certain Richard Gamba, aujourd’hui notre manager et ami. Il nous a appris des milliers de choses et nous a accompagnés dans un premier temps pour sortir « Soma Sema » sur un label. Ce qui a fait la différence avec Mascot Records, c’est qu’ils se fichent un peu de savoir si le groupe est déjà connu, ou seulement émergent. Ce qui les intéresse avant tout, c’est la proposition artistique et le potentiel qui va avec. Ils y vont un peu au coup de cœur, et c’est pour ça qu’ils nous ont signé à l’époque. Honnêtement, c’est une des plus belles reconnaissances qu’on ait pu avoir sur ce disque. 

– Entre Groove et post-Metal, votre style est aussi créatif que technique, ce qui rend votre album saisissant à tout point de vue. Vous jouez aussi sur les atmosphères avec un côté très progressif. STENGAH est un concentré de beaucoup de choses. Comment canalisez-vous toute cette énergie ?

Il y a un jeu de nuance que je retrouve principalement dans le Rock Progressif et le Jazz, où chaque moment va être impactant parce qu’il vient contrebalancer des couleurs musicales différentes. Ici, on joue sur le même plan, c’est-à-dire qu’un passage doux dans un morceau va renforcer énormément le suivant qui sera beaucoup plus agressif, ou inversement. Quelque chose de très sombre et très compacté va être mis en avant, parce qu’il va entrer en collision avec quelque chose de très lumineux et ouvert. Même si ça ne dure pas longtemps, ça suffit à ce que tout dans un morceau soit mis en valeur. Il y a des morceaux qui nous laissent, le public et nous-mêmes, totalement à bout de souffle. Et ça marche parce qu’il y a un temps de respiration avant ou après. Le défi évidemment est d’arriver à rendre tout ça très cohérent. Là, il faut y aller au feeling, tester, prendre des risques et se sentir satisfait quand ça fonctionne. 

– « Soma Sema » fait vraiment penser à un voyage musical aussi chaotique que précis et très structuré. Quel est le point de départ de vos compositions ? Vous partez d’un thème mélodique, ou vous vous laissez guider par le texte ?

En général, il y a un thème qui me vient en tête, que je n’arrive pas forcément à identifier et qui me prend par surprise, puis en vient un autre, etc… Je dis souvent qu’il y a un côté accidentel. Je me laisse moi-même surprendre par la composition, ce qui demande beaucoup de concentration pour arriver mentalement à tout assembler comme un puzzle, en recherchant les bonnes transitions et le meilleur équilibre. Le texte peut arriver avant, pendant ou après. Il est un peu composé comme une guitare ou une batterie en attendant d’être restitué par le chant. Cette idée de voyage, de chaos et de structure, c’est tout à fait ça. Les trois cohabitent en permanence et forment un tout très personnel, et en même temps très ouvert et très contemplatif. 

– Ce qui surprend aussi sur l’album, c’est l’approche presque animale des morceaux et leur aspect très moderne. C’est sur cette dualité que se basent le style et la démarche de STENGAH pour l’essentiel ?

Oui, je dirais que ça vient de la somme de nombreuses influences musicales et même d’autres formes d’arts, comme la peinture ou plus récemment la danse. Quand on ressent le mouvement de l’artiste dans sa production, je trouve ça saisissant.  De même, il est très important pour moi de ressentir le musicien derrière son instrument dans la musique de STENGAH. C’est une manière de raconter quelque chose de sincère, qui prend aux tripes dès qu’on se laisse embarquer. 

Photo : Earlawakes

– Vous avez également un côté très avant-gardiste, malgré des riffs très Metal et tendus. A l’écoute de « Soma Sema », on a presque le sentiment que le Métal ne vous suffit pas et qu’il vous faut franchir d’autres caps. C’est le cas ? 

A l’époque où le groupe s’est fondé, il était question de monter un ‘groupe de musique’,  sans vraiment parler de Metal ou autre. J’aime préciser que le style Metal s’est imposé de lui-même à travers la composition et à mesure que le line-up s’est créé, notamment avec l’arrivée du chanteur qui est capable d’aller très loin en termes d’intensité musicale. Aujourd’hui, et je pense que c’est la grande force de STENGAH, on a un style musical très ouvert, qui va pouvoir se permettre d’emprunter à tous les genres musicaux. C’est une musique qui transpirera toujours notre amour pour le Metal sous toutes ses formes, mais qui a le potentiel d’évoluer constamment et de surprendre tout en restant cohérente. 

– J’aimerais qu’on parle de la production et du mix qui présentent un parfait équilibre entre les deux guitares, la rythmique et le chant. Dans quelles conditions et avec qui avez-vous travaillé ? Et est-ce que le résultat est à l’image de ce que vous aviez en tête au départ ?

Je pense que ce qui donne cette sensation d’équilibre, c’est que nous nous sommes acharnés à donner un aspect ‘Live’ aux enregistrements studios. À la batterie, je ne cherche pas à coller absolument au clic. Le métronome est plus là en guise de repère. Je considère la basse comme une extension de la batterie, et vice versa. Donc même chose, dans quasiment tous les passages de l’album on joue seulement à deux, et non pas à trois avec le clic. On a bossé avec Thomas Jankowski au Sound Up Studio à Tourcoing, qui est aussi notre ingé-son live. L’avantage est que Thomas est lui-même batteur, ce qui lui permet de comprendre facilement cette approche rythmique un peu hors du temps et des mesures. Autre exemple, j’ai parfois fait refaire les parties de guitares, car elles étaient trop précises avec le tempo, ce qui donnait un aspect mécanique à certains riffs parmi les plus techniques. 

– Vocalement, il y a aussi beaucoup de changements de tons et de tessitures. Comment adaptez-vous la voix à la ligne musicale ? Elle-t-elle le lead sur les morceaux ?

Pour le chant, on a enregistré au studio d’Alex Orta, qui est plus tard devenu guitariste au sein du groupe. À l’époque, nous avons enfermé Nicolas dans un tout petit espace, comme s’il se retrouvait lui-même piégé dans la thématique de l’album (qui parle d’un esprit piégé dans son propre corps). Je te rassure, on a pris soin de lui quand même ! Mais l’idée a été pour lui de s’immerger totalement dans les textes et la musique, et de mon côté, je lui racontais des paysages entiers, des rêves, avec des couleurs et des sensations. En quelque sorte, on a un peu joué avec le principe de synesthésie… Finalement, Nico s’est approprié tout ça et en a fait sa propre interprétation. C’est vraiment là que la voix s’est parfaitement intégrée dans la musique, à travers quelque chose à la fois d’écrit et de spontané. Ça nous a permis d’aller explorer tout un tas d’émotions qui sont parfaitement retranscrites dans son chant, et donc avec tout un tas de sonorités parfois même inattendues. On l’entend essoufflé dans « Swoon » ou à bout de souffle à la fin de « Blank Masses Inheritance », et ce n’est pas du bluff. C’est le fruit d’un engagement corporel et mental énorme de la part de tous à l’intérieur de cette musique. 

– Enfin, un petit mot sur la scène, car avec la qualité des groupes français actuels, on peut imaginer de très beaux plateaux. Avec quelles formations seriez-vous ravis de partager l’affiche?

Il y a tellement de groupes… J’ai envie de dire à peu près tout le monde, même dans des styles un peu différents, on est toujours très ouverts quelque soit la nature du groupe. Si on reste en France, je dirais Igorrr, Hangman’s Chair, Gorod, Benighted ou même Gojira… des projets déjà bien connus, mais c’est vrai qu’il y a un paquet de belles découvertes à faire en France ou chez nos voisins en Europe. Et depuis qu’on a repris les concerts, c’est intéressant de découvrir comment tous ces groupes ont évolué durant les deux ans de stand-by général. J’ai envie de citer Oddism ou The Lumberjack Feedback qui sont de chez nous, ou Huntsmen (US) et Loathe (UK). Nous allons prochainement retrouver un groupe de Rock Prog semi-acoustique à Bordeaux, qui s’appelle Qlay, avec qui nous partageront une date là-bas le 14 Novembre 2022. On va mélanger les genres, et ça va être énorme. On serait encore ‘hors Metal’, mais mon plus grand rêve serait de partager un jour la scène avec le groupe français légendaire Magma, mené par Christian Vander. 

« Soma Sema », l’album de STENGAH, est disponible depuis le 18 mars chez Mascot Records.

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Alternative Metal Modern Metal

Face The Legacy : le respect de l’héritage

L’éventail musical proposé par les Finlandais de FACE THE LEGACY est d’une justesse suffisamment rare pour être soulignée. Plutôt que de s’enfermer dans un registre précis, le quatuor voit plus loin et passe d’un style à l’autre avec brio et impertinence. Hard Rock des 80’s/90’s, Heavy et la plupart des courants Metal des années 2000 : tout y passe et jamais on ne crie à l’imposture. « Ashes On The Ground » impose une détermination, une technique, une production et une inspiration surprenantes pour un premier album.

FACE THE LEGACY

« Ashes On The Ground »

(Out Of Line Music)

Les Finlandais de FACE THE LEGACY ne pouvaient trouver meilleur nom pour décrire leur musique et surtout leur démarche artistique. Se promenant entre les années 80 et 90 et avec de judicieuses incursions dans des courants bien plus récents et sur une puissante et limpide production, le quatuor réussit une synthèse complète et très intéressante d’un grand nombre de styles, dont les amateurs de musiques un peu fortes s’abreuvent depuis 40 ans. Avec un tel premier album, les portes lui sont grandes ouvertes.

Malgré le jeune âge de ses membres, c’est une étonnante maturité qu’affiche FACE THE LEGACY sur « Ashes On The Ground », sa première réalisation. La prouesse est d’autant plus respectable que les Finlandais n’ont pas connu la plupart des styles qu’ils s’approprient avec une facilité presque naturelle. Efficace avec sa formation guitare-basse-batterie-chant, le combo en rappelle forcément d’autres, mais il parvient tout de même à proposer une set-list très originale, percutante et franchement agréable.

Dès les premières notes de « Downfall », puis avec « United As One » et « I Still Burn », FACE THE LEGACY balance de gros riffs, une rythmique massive et surtout un chant capable de passer par de belles lignes mélodiques comme de s’engouffrer dans des screams bien sentis et tendus à souhait. Ces quatre jeunes hommes ont de l’énergie et de la ressource à revendre, et surtout, ils ne tombent jamais dans le panneau de la redite (« Bleed For Me », « I Am The Wind », « Hear us Out »). Bluffant et hyper-pêchu !