Tout en menant une belle carrière solo et divers projets en parallèle, la chanteuse, guitariste et songwriter Buick Audra poursuit l’aventure FRIENDSHIP COMMANDERS avec le batteur et bassiste Jerry Roe qui, de son côté, enchaîne les sessions studio sur un rythme soutenu. A eux deux, ils élaborent un Heavy Rock aux accents Stoner et Metal et avec « Bear », ils sont parvenus à une synthèse très solide, cohérente et mélodique. Intelligent, solide, accessible et plein de finesse, ce nouvel effort ouvre des brèches où il fait bon se perdre.
FRIENDSHIP COMMANDERS
« Bear »
(Magnetic Eye Records)
Après quatre EPs et une flopée de singles depuis dix ans, le duo de Nashville sort son quatrième album, « Bear », et il ne manque pas de saveur. En effet, la chanteuse et guitariste Buick Audra et le batteur, bassiste et claviériste Jerry Roe ont concocté, et aussi coproduit, dix nouveaux titres, qui se dévoilent un peu plus à chaque écoute. Entre Heavy Rock et Stoner Doom, FRIENDSHIP COMMANDERS froisse les étiquettes autant qu’il les rassemble pour obtenir un univers artistique très singulier, où le Sludge côtoie aussi le Hard-Core très naturellement.
Malgré son aspect expérimental, « Bear » est d’une grande fluidité et d’une liberté totale. Il faut aussi préciser que le tandem est aussi ardent qu’expérimenté et reconnu. Auréolée de deux Grammy Awards, Buick Audra est une songwriter accomplie, tandis que Jerry Roe est l’une des batteurs les plus demandés. Avec FRIENDSHIP COMMANDERS, ils jouent sur les contrastes en confrontant les styles. Et ils finissent par faire de ces apparentes contradictions un épanouissement musical, qui défie les codes et explose dans un Rock musclé et accrocheur.
Deux ans après « Mass », « Bear » se montre assez insaisissable et pourtant, il y a une réelle unité artistique chez les Américains. Grâce à la puissance et la polyvalence vocale de sa frontwoman, FRIENDSHIP COMMANDERS œuvre dans un Heavy Rock qui emprunte autant au Grunge qu’au Metal, ce qui en fait un modèle d’éclectisme, tout en maîtrise (« Keeping Score », « Dripping Silver », « Midheaven », « Dead & Discarded Girls »). Energétique, épais et positif, ce nouvel opus porte bien son nom et on se régale littéralement d’autant de créativité.
Détaché de l’atmosphère très intimiste et assez sombre de son précédent effort solo, « Moon Swings », le natif de Caroline du Sud retrouve la lumière et remet surtout sur les rails le génial MARCUS KING BAND. Si certains tourments demeurent, « Darling Blue » présente une nouvelle dynamique, toujours très sudiste, mais plus festive où sa guitare côtoie les violons, les banjos et les cuivres dans une belle harmonie. Directes et organiques, ces nouvelles chansons sont d’une authenticité absolue et guidées par une voix touchante et sincère. Il n’en finit plus de surprendre et aussi de faire des choix artistiques audacieux.
MARCUS KING BAND
« Darling Blue »
(American Recordings/Republic Records/Universal)
Il semblerait que l’empreinte de Nashville, où il est installé depuis un moment maintenant, ait une emprise grandissante sur le jeu et surtout les envies musicales de MARCUS KING. On n’en voudra pourtant pas au bluesman de s’imprégner de son environnement direct, puisque cela le mène dans des contrées où il excelle également. Preuve en est que le jeune homme, qui approche la trentaine, est d’une rare polyvalence et a aussi une faculté d’adaptation hors-norme, car « Darling Blue », s’il reste très bluesy, avance dans une lignée Honky Tonk marquée par la Country. D’ailleurs, les guest présents ici sont directement issus du sérail, ou très proches.
Il faut aussi souligner que « Darling Blue » marque le grand retour du MARCUS KING BAND, que le guitariste avait mis en sommeil depuis 2016 après un excellent album éponyme. Après presque dix ans passés an solo, et qui lui ont tout de même valu ses plus grandes récompenses, il retrouve des musiciens qu’il n’a jamais vraiment quittés et qui restent un socle inamovible de sa musique, quand bien même elle a pu prendre des chemins de traverse souvent surprenants. Pour ce quatrième opus en groupe, la tonalité est donc plus Country-Rock et Blues avec aussi quelques douceurs R&B très touchantes qui surgissent toujours (« Carolina Honey », « No Room For Blue »).
L’entame de « Darling Blue » est très marquée de Country et de Honky Tong, avant de revenir à des chansons plus imprégnées de Blues et de Soul. Il faut dire que les présences de Jamey Johnson et Kaitlin Butts (« Here Today »), puis Jesse Welles (« Somebody Else ») y sont pour beaucoup. On retrouve d’ailleurs aussi Billy Strings plus tard sur une version ‘Nashville’ de « Dirt ». Sur « The Shadows », Noah Cyrus, fille de et sœur de, qui vient poser un beau duo très aérien entouré d’un MARCUS KING BAND rayonnant. Décidemment plein de surprises, ce nouvel opus montre à quel point l’univers du musicien est d’une grande richesse et qu’il ne cesse de se renouveler brillamment.
Retrouvez les chroniques de ces derniers albums précédents :
Avec un tel potentiel et une virtuosité sans faille, CHRISTONE ‘KINGFISH’ INGRAM s’est forgé une belle réputation, loin d’être usurpée. Capable de faire parler la poudre comme d’être d’une finesse absolue, l’Américain parrainé par les plus grands poursuit son chemin avec élégance et beaucoup de raffinement dans le jeu. Six-cordiste polymorphe et chanteur délicat, c’est avec « Hard Road » qu’il fait son retour. Un opus très personnel sur lequel il ne se refuse rien, n’en fait pas trop, mais où il pèche par un manque d’accroche récurrent. On reste cependant sous le charme de ce futur très grand du Blues.
CHRISTONE ‘KINGFISH’ INGRAM
« Hard Road »
(Red Zero Records)
Du haut de ses 26 ans, CHRISTONE ‘KINGFISH’ INGRAM affiche une carrière assez incroyable, et même s’il se présente avec son troisième album studio (auquel il faut ajouter « Live In London » en 2023), il fait déjà figure de vieux routard du Blues. Originaire de Clarksdale, épicentre du légendaire Mississippi Delta, il fait ses armes très tôt pour ensuite enchaîner un nombre incalculable de featuring en jouant sur les disques de Devon Allman, Eric Gales, Popa Chubby, Ally Venable, Albert Castiglia, Buddy Guy ou Keb’ Mo’ notamment, sans compter qu’il a partagé la scène avec les plus grands noms. Le jeune homme a donc un solide bagage.
Lauréat d’un Grammy Award du meilleur album de blues contemporain en 2022 pour « 662 », il est déjà considéré comme l’un des bluesmen incontournables et ce n’est donc pas très surprenant de le voir sortir « Hard Road » sur son propre label, Red Zero Records. Une émancipation précoce là aussi. Evoluant dans un registre très actuel, CHRISTONE ‘KINGFISH’ INGRAM excelle autant dans des sonorités très Rock que d’autres plus Soul et presque Gospel. Redoutable guitariste, il n’a pas son pareil pour enflammer un morceau et lui donner instantanément du relief. Il électrise un titre en quelques accords et c’est là toute sa force.
Enregistré entre les Royal studios de Memphis, à Santa Monica et à North Hollywood sous la houlette de Tom Hambridge, Nick Goldston et Patrick Hayes, « Hard Road » est donc, et légitimement, très attendu. Une fois encore, ses parties de guitares sont somptueuses, son chant aussi a pris du coffre et de l’assurance, mais c’est du côté de la composition que réside la plus grande inconnue. Bien sûr, l’âge de CHRISTONE ‘KINGFISH’ INGRAM est un élément important, qui vient expliquer certaines facilités sur la longueur et, par conséquent, une absence de piment, de vécu et d’homogénéité. Mais l’attente est-elle peut-être trop forte ?
Les Suédois prennent de la hauteur et haussent le ton, c’est en tout cas ainsi qu’on pourrait définir « The Reckoning » s’il n’était pas aussi fin dans son interprétation comme dans son écriture. Ce quatrième effort est terriblement efficace et accrocheur, preuve d’une maturité et de beaucoup de certitudes quant à la direction à mener. SOLE SYNDICATE a parfaitement cerné les contours de son Melodic Metal et se montre intraitable dans son exécution. En variant les sensations et les tempos, il s’affiche comme l’un des meilleurs groupes du genre et laisse exploser un caractère bien trempé.
SOLE SYNDICATE
« The Reckoning »
(El Puerto Records)
Et si ce quatrième album de SOLE SYNDICATE était enfin celui de la consécration sur la scène Metal européenne ? C’est en tout cas ce que laisse entrevoir « The Reckoning », qui montre le quatuor à un pic créatif évident. Trois ans après l’enthousiasmant « Into The Flames », le style est peaufiné, épuré au niveau des compositions, jadis parfois un peu pompeuses, pour revenir à l’essence-même du Melodic Metal, dont leur terre de Scandinavie est un vivier inépuisable et surtout porteuse de l’ADN du genre. Tonique et multipliant les émotions, ces dix nouveaux titres montrent une force et une assurance indiscutable.
Toujours mené par son fondateur, chanteur et guitariste Jonas Månsson, qui offre une performance incroyable et s’impose en leader incontestable, SOLE SYNDICATE avance pourtant d’un seul homme et sans la moindre hésitation. Si la voix à la fois ferme et touchante du frontman captive et séduit, la force du combo réside dans sa faculté à marier la puissance d’un Hard Rock tirant sur le Heavy avec des atmosphères plus planantes, guidé par un sens de la mélodie très travaillé, qui donne à « The Reckoning » une sorte d’évidence dans son déroulé. Tranchant et subtil, l’ensemble est minutieux et solide.
Produit en collaboration avec Jakob Herrmann, qui a notamment travaillé avec Evergrey et Art Nation, ce quatrième opus voit aussi la claviériste Katja Rasila prendre un peu plus de place au niveau du chant (« Love Is Only »), et c’est d’ailleurs une piste que SOLE SYNDICATE devrait explorer un peu plus sérieusement. Sur un groove musclé et une profondeur vocale envoûtante, les guitares sont explosives, serrées et toujours au service des morceaux (« On The Back Of A Angel », « The Way That You Are », « The Voice Inside », « The Mob Rules », « Rise Like A Phoenix », « Eye Of The Storm »). Moderne et audacieux, tout y est !
Chaque production de la formation de Caroline du Nord est une nouvelle exploration. Avec « The Turning », elle continue avec beaucoup de robustesse et des rythmiques appuyées sa belle aventure. Basé sur un Stoner Rock aux teintes sudistes, l’univers de BASK est aussi complexe que ses contours sont parfois si nombreux que l’on peut s’y perdre. Pourtant, l’unité artistique des Américains est évidente et c’est ce côté insaisissable qui la rend justement irrésistible.
BASK
« The Turning »
(Season Of Mist)
Il y a déjà un peu plus de dix ans, BASK faisait son apparition avec « American Hollow » (2014), un premier album audacieux qui affichait déjà beaucoup d’ambition. Depuis, le groupe n’a pas revu ses prétentions à la baisse, « Ramble Beyond » (2017) et « III » (2019) attestant de sa grande créativité. En l’espace de trois réalisations, il a créé ce qu’il nomme lui-même de la ‘Heavy Americana’, un style qui est le point de rencontre entre le Roots Rock, le Psychédélique, le Stoner et le Desert Rock avec une touche Southern des Appalaches.
Cela dit, même si toutes ces sonorités sont présentes, et auxquelles on peut aussi ajouter un soupçon de Space Rock, considérer que BASK fait partie de la grande famille Heavy Stoner Psych résume assez bien les choses. Et « The Turning » s’inscrit parfaitement dans cette veine aussi solide que tourbillonnante. Puissant et aérien, ce nouvel opus accueille également le guitariste Jed Willis, qui brille ici par son jeu de pedal steel et projette les morceaux dans une dimension encore plus Psych. Les tessitures s’y multiplient et sont sinueuses.
Le voyage commence dès d’intro et promet d’entrée de jeu d’être immersif. « The Turning » est une sorte de labyrinthe musical, où se succèdent des atmosphères liées par un chant qui tient lieu de guide. Avec un aspect compact, BASK se montre très changeant tout en gardant un cap hypnotique (« In The Heat Of The Dying Sun », « The Traveler », « Unwound », « Dig My Heels », « Long Lost Night » et le morceau-titre). Dans un élan cosmique, le quintet se fait narratif, Sludge, progressif et même Folk. Une véritable prouesse d’ingéniosité.
Massif et très bien produit, « Who’s Who In The Zoo » vient définitivement consacrer le statut et les capacités du combo de Melbourne. THE VENDETTAS met les choses au clair grâce à des morceaux cinglants et délicats, posés sur des bases Hard Rock et Classic Rock. Avec un frontman à la présence magnétique, des guitares puissantes et un groove rythmique transpirant le Rock’n’Roll, les Aussies sortent les crocs et sont plus fédérateurs que jamais.
THE VENDETTAS
« Who’s Who In The Zoo »
(Golden Robot Records)
Identifiable entre tous, le Rock australien se démarque grâce à son aspect fougueux et un alliage savamment dosé de Classic Rock, de Hard Rock et de cet épais Pub Rock qui en fait sa particularité. Et même s’il fait partie de la nouvelle génération, THE VENDETTAS véhicule avec brio cet héritage atypique et lui apporte toute la fraîcheur de sa jeunesse. Entre une puissance brute et un songwriting peaufiné, ce quatrième album témoigne d’une créativité sans complexe, qui s’inscrit dans une modernité exaltée.
Un peu plus de 15 ans après sa formation, le quatuor se présente avec un nouvel opus particulièrement énergique et varié. Après deux années passées entre les studios Cavern Sound et ColourSound, THE VENDETTAS présente un travail soigné sur une production très organique, mais n’oublie pas pour autant les fondamentaux du Rock de son île-continent, à savoir un côté sauvage et roots. Et, combiné à des mélodies accrocheuses et des riffs entrainants et solides, cela le rend franchement irrésistible.
« Who’s Who Is The Zoo » ne manque pas d’audace et est même ferme, direct et bien rentre-dedans. Globalement dominé par une sensation Hard Rock, THE VENDETTAS sait aussi se montrer sensibles (« Out In The Rain », « Fly On The Wall »). Mais lorsqu’il allume la mèche, le quatuor se fait rebelle et hargneux, capable de faire vibrer un stade comme faire trembler les murs d’un pub bondé (« Jealous And Evil », « This Time Around », « Lovesick Man », « Raise The Weary »). Habille et convaincant, le groupe franchit un cap essentiel.
Si avec un titre comme celui-ci, HEBI KATANA semble jouer la carte de la modestie, le contenu de cette nouvelle réalisation n’a franchement rien de timide ou d’emprunté. Au contraire, « Imperfection », qui marque par ailleurs l’arrivée de la formation nipponne chez Ripple Music, est audacieux, parfois complexe, occulte aussi et d’une intensité brute et organique. Heavy et sombre, la musique des Tokyoïtes prend une forme saisissante.
HEBI KATANA
« Imperfection »
(Ripple Music)
Avec cette pochette qui en rappelle une autre très célèbre, les Japonais donnent quelques indices quant au contenu de leur quatrième album. Mais si l’univers de HEBI KATANA s’inscrit clairement dans un proto-Metal puissant et véloce, il faut aussi y ajouter des notes Doom, Punk et Hard Rock dans une épaisse atmosphère Stoner. Et cette fusion opérée par le power trio révèle encore d’autres surprises qui mènent à des élans très Heavy avec un groove sauvage directement ancré dans les années 70 et 80.
Sur ce nouvel opus, HEBI KATANA conjugue la philosophie traditionnelle wabi-sabi basée sur l’acceptation de l’imperfection et celle de la fugacité avec son ‘samouraï Doom’ aussi riche que varié. En mélangeant ainsi les genres, le groupe s’évertue surtout à rassembler les courants touchant de près ou de loin au Heavy Metal au sens large du terme. On pourrait même imaginer qu’il est en quête d’un style absolu qui touche à l’intemporel. Et c’est vrai qu’en ce sens, « Imperfection » est un modèle du genre, aussi humble que féroce.
Malgré les lourdeurs inhérentes au Doom, HEBI KATANA sait aussi se montrer plus léger et épuré, laissant ainsi apparaître des mélodies soignées. Assez classique dans l’ensemble, la tension est palpable sur des titres comme « Dead Horse Requiem », « Praise The Shadows » ou encore « Echoes From The Old Tree ». Très Fuzz notamment sur les basses, le combo affiche à l’occasion un aspect épique et plus sensible (« Blood Spirit Rising »), démontrant sa faculté à se jouer des étiquettes. « Imperfection » traduit une évidente maturité artistique.
Retrouvez la chronique de leur premier album éponyme :
Clairement ancré dans des sonorités Rock et Metal très 70’s, le quintet de Cincinnati, Ohio, fait un retour lumineux avec « EC4 », un quatrième album qui présente aussi un nouveau membre à part entière aux claviers et surtout une inspiration hors-norme. Sur un proto-Metal dominant, ELECTRIC CITIZEN s’engouffre dans des effluves psychédéliques où des passages Folk côtoient des ambiances plus Doom. Tout en restant attachés à une approche classique du genre, les Américains redoublent de créativité à travers d’incroyables arrangements, des riffs captivants et une voix envoûtante. C’est donc Laura Dolan, la frontwoman du groupe, qui revient sur l’élaboration de ce nouvel opus polymorphe et hypnotique, qui se révèle un peu plus à chaque écoute.
– Cela fait maintenant sept ans que l’on attend le successeur de « Helltown ». Même s’il y a eu la pandémie et que vous avez aussi beaucoup tourné, l’idée était-elle de faire un retour avec un album hors-norme comme c’est le cas, ce qui prend donc plus de temps ?
Dès le début, nous avons souhaité aborder cet album avec la même patience et le même soin que pour le premier, en le laissant se développer naturellement. Les sept dernières années ont été marquées par des défis auxquels nous avons tous les quatre été confrontés : le Covid, la famille, la santé, la vie quotidienne, mais malgré tout, nous n’avons jamais cessé d’écrire et de travailler sur « EC4 ». Nous adorons faire de la musique ensemble, et ce temps supplémentaire nous a aussi permis de créer quelque chose que nous sommes vraiment fiers de partager.
– Vous avez élaboré ce quatrième album pendant des années et cela s’entend. En quoi a-t-il nécessité plus de temps que les autres ? L’enregistrement en lui-même, ou son écriture ?
Avec des conflits d’emploi du temps entre les membres du groupe et les ingénieurs, nous aurions pu nous précipiter ou changer de cap, mais nous l’avons maintenu et continué à peaufiner les choses jusqu’à ce que l’album soit prêt à être présenté à un label. Pour « EC4 », nous voulions expérimenter avec des sons différents et superposés, un peu plus doux et avec de longues parties, qui ouvrent de nouveaux paysages sonores.
Ross (Dolan, guitare – NDR) gère la plupart de nos compositions instrumentales et ses idées ont tendance à se concrétiser rapidement, même si c’est toujours un travail collaboratif avec le groupe. Nick (Vogelpohl, basse – NDR) apporte des lignes de basse percutantes et une contribution créative. Owen (Lee, claviers – NDR) a co-écrit « Tuning Tree » et a ajouté des couches de clavier essentielles, tandis que la batterie et les percussions de Nate (Wagner, batterie – NDR) opèrent leur magie habituelle. Et enfin, j’écris les paroles et les mélodies vocales, bien que Ross ait eu les idées initiales pour « Lizard Brian ».
Je dois aussi aborder un sujet personnel, qui a certainement ralenti le processus. Pendant l’écriture de l’album, j’ai été confronté à un grave problème de santé : un mélanome. Grâce à un dépistage précoce et à une opération chirurgicale, je suis là aujourd’hui et complètement rétablie. Alors, tout le monde, faites examiner votre peau. Ce n’est pas seulement un conseil, c’est ce qui m’a sauvé la vie.
– Vous avez déclaré que « EC4 » amorçait un renouveau pour ELECTRIC CITIZEN. Même si musicalement, on note quelques changements, qu’entendez-vous par un retour aux sources ? Une façon de revenir à l’essentiel du Rock, même si vous ne vous en êtes jamais vraiment éloigné ?
C’est la première fois depuis notre premier album « Sateen » que nous composons avec un claviériste dédié. Sur « Higher Time » et « Helltown », nous avons fait appel à des musiciens invités pour apporter des parties sur des morceaux déjà terminés. Si ces collaborations ont été excellentes, le fait que ces textures soient intégrées dès le début de la composition façonne véritablement la façon dont le groupe aborde la musique. Nous sommes toujours restés très liés à notre son de base, mais nous avons aussi toujours souhaité évoluer en tant que musiciens. Cette approche nous permet d’explorer de nouveaux sons, tout en restant fidèles à nous-mêmes.
– Pour le mix et le mastering de l’album, vous avez fait appel à Collin Dupuis (Lana Del Rey, The Black Keys) et JJ Golden (Calexico), qui n’évoluent pas forcément dans le même univers que vous. Vous aviez besoin d’un regard neuf pour ces nouveaux morceaux ?
Ce sont tous deux des ingénieurs du son pour lesquels nous avons un immense respect. Nous avions déjà travaillé avec Collin sur « Higher Time ». C’est le genre de gars qui comprend immédiatement ce que l’on veut. Son véritable génie est de réussir à intégrer parfaitement chaque instrument dans le mix sans qu’ils se gênent. Pour cet album, il nous a recommandé JJ, et il a réussi à sublimer le tout en restant fidèle aux mixages originaux. Nous avons eu beaucoup de chance de travailler avec eux deux.
– Ce qui surprend sur « EC4 », c’est la construction des morceaux qui évoluent dans des ambiances très variées et surtout qui bénéficient d’arrangements particulièrement soignés. Votre objectif était-il de fusionner tous les genres qui forgent votre identité musicale ?
Oui, c’est une approche que nous défendons, car rien ne se crée de manière isolée. La musique s’appuie sur ce qui l’a précédée, à travers toutes les époques et tous les styles. Je pense que la clef est d’honorer toutes ces influences en créant en même temps quelque chose qui reste profondément personnel. Nous sommes attirés par les sonorités vintage, mais nous ne cherchons pas simplement à les reproduire. Pour nous, il s’agit d’intégrer cet esprit dans quelque chose de nouveau et d’actuel.
– Par ailleurs, le sentiment qui domine sur certains titres est qu’ils suivent tes lignes vocales. Avez-vous composé dans ce sens, ou peut-être avez-vous changé votre façon de travailler ?
Ross a toujours été notre moteur. Il pose d’abord les bases de chaque chanson et cette approche n’a pas changé. Pour ma part, je traite les mélodies vocales comme un instrument supplémentaire. Parfois, elles se faufilent dans la musique, parfois elles lui répondent. C’était particulièrement agréable de chanter sur « Tuning Tree », par exemple, grâce à la façon dont mon chant se combine à la basse, comme si elle était une seconde voix dans la conversation.
– Cette fois encore, vous puisez dans le proto-Metal, le Psych et le proto-Doom, ce qui est la marque de fabrique d’ELECTRIC CITIZEN. Est-ce que dans la déferlante de productions et les changements de supports d’écoute actuels, c’est le son et la créativité des années 70 qui vous touchent toujours le plus ?
Oui, on adore ces genres, surtout les sons des années 60 et 70. Mais on apprécie aussi le classique, la Soul et le Folk, pour n’en citer que quelques-uns. Nos goûts sont très variés. Quant aux sons Heavy du passé, ils alimentent ceux du futur. Et si on y participe, même un peu, c’est l’essentiel.
– Comme toujours, l’ensemble est très organique avec une forte présence de sonorités acoustiques, qui confèrent à « EC4 » un aspect presque épuré. C’est un contraste que lequel vous vouliez jouer également, malgré la densité des morceaux ?
Merci de l’avoir remarqué ! Oui, c’était intentionnel. Nous voulions des couches riches qui fonctionnent ensemble, et non les unes contre les autres. Le retour de la guitare acoustique, que nous n’avions d’ailleurs pas utilisée depuis notre premier album, a permis de libérer ce potentiel. Elle apporte des textures Folk très organiques, tout en ajoutant une profondeur qui s’intègre parfaitement au mix.
– Un petit mot aussi sur la pochette de l’album signée Neil Krug, qui avait réalisé celle de votre premier album, « Sateen ». On peut d’ailleurs y voir beaucoup de symbolique, dont j’aimerais que tu nous parles. Est-ce que cela fait-il aussi partie de ce retour dont vous parliez ?
Nous avons l’immense chance de collaborer avec Neil Krug, car sa vision photographique est unique. Les images de la pochette et de la back cover proviennent de ses archives. Nous lui avons parlé de notre nouvel album et de sa direction générale, et il a trouvé la perle rare. C’est l’un de ces moments heureux, où des morceaux distincts s’assemblent comme s’ils étaient faits pour être ensemble. Les thèmes de ces chansons, qui s’articulent toujours autour de visions surnaturelles, de futurs apocalyptiques et de démons intérieurs obsédants, s’accordent avec ses images d’une manière que nous n’aurions jamais pu imaginer.
– Enfin, j’aimerais qu’on dise aussi un mot sur votre changement de label avec une signature chez Heavy Psych Sounds. Qu’est-ce qui a motivé le choix d’une maison de disques européenne ?
Nous sommes ravis de collaborer avec Heavy Psych Sounds. Ils nous correspondent parfaitement et ont été des partenaires fantastiques sur cet album. Pour nous, la question de savoir si un label est américain ou européen ne s’est jamais vraiment posée, puisque nous tournons sur les deux marchés.
Cela dit, nous serons toujours reconnaissants à Riding Easy Records d’avoir lancé notre groupe. Ils nous ont permis de démarrer et nous entretenons toujours une excellente relation. Nous continuons de collaborer sur les licences de nos trois premiers albums, dès que l’occasion se présente.
Le nouvel album d’ELECTRIC CITIZEN, « EC4 », est disponible chez Heavy Psych Sounds.
Photos : Kevin Blumeyer (1), Sally Townsend (4) et Andrew Benge (5).
Si vous pensiez que PRIMAL AGE s’était calmé avec le temps, « Until The Last Breath » va vite vous refroidir… à moins qu’il ne fasse plutôt grimper votre tension. En effet, ce quatrième album (auquel il faut ajouter quelques EPs) est l’extension actuelle de ce qu’il propose depuis ses débuts : un Metal HxC agressif et impactant. Le quintet, malgré de multiples changements de personnel, ne s’est jamais renié et continue sur une voie qu’il connait bien et sur laquelle il n’aura jamais été aussi efficace. Un modèle du genre !
PRIMAL AGE
« Until The Last Breath »
(WTF Records)
Chez PRIMAL AGE, cela fait plus de 30 ans que ça tabasse, que ça revendique, que ça dénonce et à en croire ce très bon « Until The Last Breath », ce n’est pas près de s’arrêter de si tôt. Jusqu’au dernier souffle ! Fer de lance du Metal HxC underground français, le combo normand en a encore sous le pied. Sa rage est intacte et son jeu toujours aussi brutal et incisif évolue avec son temps, sans perdre une seule seconde de vue sa première intention : évoluer dans une intensité ravageuse sur des textes qui mettent le poing là où ça fait mal.
Celles et ceux qui ont connu cette scène marquante des 90’s se reconnaîtront une fois encore dans ce nouvel opus, attendu comme les autres avec la même impatience. Le chant, toujours sur la brèche, de Didier Cauchois semble imperméable au temps qui passe et la ferveur, comme la colère, paraît elle aussi se préserver tel un joyau. Car, PRIMAL AGE ne triche pas et attaque frontalement, littéralement alimenté par une invitation à un mosh perpétuel et imperturbable. Une marque de fabrique inamovible devenue si familière.
Passé l’intro, on entre dans le vif du sujet avec l’explosif « Empire Will Always Fall », qui rappelle ô combien les Français restent sans filtre. On retrouve cette patte Bay Area dans les guitares et une rythmique qui martèle avec la facilité qu’on lui connait. A noter que « Until The Last Breath » a été enregistré en Normandie et masterisé à New-York par Alan Douches. Il y a donc du volume ! PRIMAL AGE se déploie ici encore avec une puissance phénoménale (« False Pretence », « No Regrets », « Shadows Of Intolerance », « Walls Of Stone »). Rageur !
Retrouvez l’interview accordée au site à l’occasion de la sortie de « Masked Enemy » :
GYPSY PISTOLEROS n’est pas prêt à entrer dans le rang et ce n’est pas ce bon « Church Of The Pistoleros », pourtant moins sauvage de prime abord, mais toujours très fougueux, qui viendra apporter la contradiction. Les Anglais y ont une fois encore mis toute leur âme et leur savoir-faire dans ce renversant cri de ralliement. Le combo en appelle à tous les laissés pour compte de la société dans une unité artistique à la fois courageuse et marginale. Accrocheur et revendicatif, l’attitude et l’audace affichées sont d’une fraîcheur réjouissante.
GYPSY PISTOLEROS
« Church Of The Pistoleros »
(Earache Records)
Après quatre singles convaincants (« Church Of The Pistoleros », « Shadow Walker », « Whatever Happened To The Old Town » et le punkisant « Last train To Nowhere »), GYPSY PISTOLEROS avait laissé entrevoir du changement et une orientation musicale légèrement différente. L’arrivée de l’ancien batteur de South Of Salem, Pip Sampson, a donné un bon coup de fouet au groupe, mais ce qui étonne surtout, c’est la production massive et presque trop ‘propre’ de ce nouvel effort, qui semble pourtant ouvrir une nouvelle ère à nos desperados.
Le Glam Metal/Rock du quatuor n’a rien perdu de sa verve, de sa vélocité et de son impact, c’est juste l’équilibre qui est plus évident. GYPSY PISTOLEROS mûrit et plutôt bien ! Enregistré aux renommés studios Old Cider Press de Pershore et surtout produit par Dave Draper connu pour son travail avec Nickelback, Terrovision ou Ginger Wildheart, « Church Of The Pistoleros » se présente comme un quatrième album très bien ciselé. Une manière aussi, finalement, de rendre les compositions aussi accessibles que percutantes. Car, ça claque !
Si GYPSY PISTOLEROS n’est pas constitué de membres d’un gang latino, mais de citoyens britanniques, il a aussi la particularité de proposer un son typiquement américain, sorte de triptyque Rock’n Roll effervescent et très cohérent. Toujours Glam dans l’esprit, le frontman n’est pas sans rappeler les invectives chères à Vince Neil ou Billy Idol, mais le combo s’en sort grâce à une originalité très particulière où se côtoient Metal, Rock, et Flamenco dans un bel élan fédérateur et souvent irrésistible (« Revolution », « Last Of The Comancheros »).