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Carolyn Wonderland : une grande dame

L’intensité, qui se retrouve dans le mordant de son approche tant vocale que guitaristique, semble être une seconde nature chez CAROLYN WONDERLAND. La musicienne, qui avait véritablement pris son envol en solo il y a quatre ans avec le génial et audacieux « Tempting Fate » sur lequel elle jonglait avec sa Gibson et sa lap-steel, monte encore en émotion et en virtuosité dans un équilibre musical, qui doit beaucoup à une confiance acquise au fil du temps. « Truth Is » est une sorte d’apothéose, tant au niveau de l’écriture que de cette voix, où la puissance n’a d’égal que sa douceur. Monumental.

CAROLYN WONDERLAND

« Truth Is »

(Alligator Records)

CAROLYN WONDERLAND est une fine gâchette, cela n’aura échappé à personne, et sur ce deuxième effort chez l’institution Alligator Records, on prend pleinement conscience de ses talents de chanteuse et de compositrice. Une reconnaissance qui arrive peut-être un peu tard, mais qui est aujourd’hui incontestable. Elle qui a joué avec presque toutes les légendes Blues du Texas et qui a aussi effectué un beau et assez long passage au sein des Bluesbreakers de John Mayall, semble littéralement épanouie sur ce « Truth Is », marqué de son empreinte. Car la musicienne est loin de manquer de personnalité, bien au contraire.   

D’une rare polyvalence, elle fait un beau tour d’horizon des courants dans lesquels elle se retrouve… et il y en a ! Forcément très sudiste dans le jeu, on retrouve chez la Texane des notes de Soul, de Gospel, de Jazz, de Country et de Roots Rock, qui font de son Blues un refuge éclectique pour des saveurs chaleureuses et sincères. CAROLYN WONDERLAND a de nouveau confié la production de « Truth Is » à Dave Alvin, lequel sublime des compositions entraînantes, mais aussi très touchantes et toujours authentiques. On passe de sa ville natale de Houston à la Nouvelle Orleans, avec un crochet par Memphis, en un clin d’œil.   

Avec son inimitable picking, elle signe l’essentiel de cette nouvelle réalisation, tout en coécrivant quelques titres avec son producteur et Shelley King, et en s’offrant la liberté de reprendre « Wishful Thinking » (Greg Wood/Eddie Hawkins) et « Orange Juice Blues » (Richard Manuel pour The Band). Mais le plus beau et surtout le plus réjouissant vient de ses propres compositions et elles sont franchement renversantes (« Sooner Or Later », « It Should Take », « I Ain’t Going Back » avec Ruthie Foster et Marcia Ball, l’ensoleillé « Deepest Ocean Blue », le bouleversant « Blues For Gene » et la somptueuse chanson-titre. Incontournable.   

Photo : Mary Bruton

Retrouvez la chronique de « Tempting Fate » :

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Blues Rock Contemporary Blues

The Davidson Trio : hot ride

La réunion de talents laisse souvent entrevoir de très belles choses et c’est précisément le cas avec ce torride et sensuel « Cougar », livré par une formation où l’expérience et la complicité sont en totale symbiose. THE DAVIDSON TRIO transpire le Rock et respire le Blues et sa configuration offre le meilleur ajustage possible dans ce style relevé et très contemporain. Emmené par un chanteur et bassiste inspiré, ce premier effort est sensationnel à plus d’un titre.

THE DAVIDSON TRIO

« Cougar »

(Independant)

Bassiste chevronné et réputé, Owen Davidson monte enfin son projet personnel après avoir accompagné tant d’artistes, Depuis Uli Jon Roth jusqu’à Rumour avec un très bon opus sorti il y a quatre ans. Et c’est toujours en indépendant qu’il a  créé THE DAVIDSON TRIO, dont le premier album, « Cougar », est largement à la hauteur des attentes. Soutenu par le guitariste Ben Bicknell et le batteur Ellis Brown, il prend aussi le chant en plus de son instrument, et le Blues Rock qui en ressort naît d’une belle inspiration commune.

Même si les britanniques font leurs premières armes ensemble, il ne faut pas longtemps pour comprendre que « Cougar » n’est pas du travail d’amateurs. Fluides et percutants, ils se montrent solides et créatifs. L’objectif avec THE DAVIDSON TRIO était pour son fondateur de renouer avec ses racines Blues, Rock et Funk et surtout dans une formule power trio, dont on connaît la redoutable efficacité. Et la touche British Blues et le registre de nos trois bluesmen naviguent aussi des rives du Mississippi jusqu’aux contrées plus au Sud des Etats-Unis.

Très Rock d’entrée sur « Medusa Touch », THE DAVIDSON TRIO place la barre très haut et le chant très Soul d’Owen se fait aussi accrocheur que les guitares, dont le solo d’ouverture donne le ton. Le combo de Birmingham évolue sur un groove sans faille, aussi chaleureux que sensible. Old School sur « The Deep », dynamique sur « Hold On » et « The Cure », ou plus roots sur « Blues River », il fait preuve d’une incroyable diversité et d’un feeling hors-pair. Les trois musiciens se trouvent les yeux fermés et chacun brille pour l’autre.

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Blues Blues Rock Contemporary Blues

Emanuel Casablanca : on the way

« Hollywood Forever » est un disque assez troublant, le troisième pour le New-Yorkais. En effet, sous des traits bluesy, il nous embarque dans un univers très disparate, éclectique à souhait et qui, finalement, se cherche encore un peu. Il ne propose pas de fil conducteur, de sorte de voie à suivre et dans laquelle il pourrait s’affirmer pleinement. EMANUEL CASABLANCA séduit par sa voix feutrée et un jeu solide, mais peine un peu à convaincre en tant que véritable bluesman. Si la modernité de ses compositions est incontestable et agréable, elle pèche par un manque d’authenticité criant.

EMANUEL CASABLANCA

« Hollywood Forever »

(Bad Boy Of Blues Media)

Bad boy, EMANUEL CASABLANCA ? Pas vraiment, si l’on se refère à sa musique. Car l’Américain a plusieurs cordes à son arc, dont quelques aventures cinématographiques, un passé de basketteur et la création d’une fondation dédiée à la promotion des droits humains et de la justice sociale dans le monde, et qui est aussi le nom de son label. Donc, le musicien de Brooklyn est plutôt du côté des gentils. Et c’est tant mieux, même s’il reste sur des thèmes chers au Blues, sans vraiment toucher aux problèmes qui fâchent. Mais parlons musique !

Troisième album donc pour le guitariste et chanteur, et le moins que l’on puisse dire, c’est que « Hollywood Forever » est particulièrement riche et généreux. 16 chansons au total pour une durée d’une heure, dont un morceau-titre qui atteint presque les neuf minutes. C’est d’ailleurs peut-être là où le bât blesse. EMANUEL CASABLANCA se disperse un peu, montre des difficultés à afficher un style personnel et à insuffler sa touche à un opus qui aurait peut-être pu (et dû ?) être plus resserré, tant sur les compositions que les registres abordés.

Cela dit, la diversité de « Hollywood Forever » livre aussi de très bons moments, où alternent des passages clairement Blues Rock, d’autres plus légers et presque Pop et des parties acoustiques à l’approche pus traditionnelle. Sans être un virtuose de la six-corde, EMANUEL CASABLANCA se rattrape très bien sur les mélodies et sa voix douce très Soul lui permet bien des écarts. Dans ce dédale de titres, « The Squeeze », « Me And The Devil », « Black Man’s Burden », « India Stoker », « Lust And Lie », « Juggernaut » et « Flying » sortent du lot. 

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Blues Soul / Funk Southern Blues Rock

Little Feat : a brand new legend

Sans rien changer à son sens du groove et avec un feeling incroyable, LITTLE FEAT poursuit son chemin comme si de rien n’était. En quête perpétuelle d’un style qui rassemble autant le Blues le plus authentique, la Soul profonde de Louisiane que des cuivres incandescents hyper-funky, l’emblématique et éternel groupe livre enfin de nouveaux titres inédits. Avec une humilité, une technicité et un art du songwriting qui se réinvente avec beaucoup de modernité, « Strike Up The Band » ne dépareille pas une seule seconde de l’immense héritage discographique d’une formation inépuisable et insatiable.  

LITTLE FEAT

« Strike Up The Band »

(Hot Tomato Records)

Près de 55 ans après sa création, LITTLE FEAT tient toujours debout et, malgré une carrière en dent de scie, des changements de line-up et quelques disparitions marquantes, il semble même avoir retrouvé un nouvel élan. Alors que « Sam’s Place », sorti l’an dernier, résonne encore de ses vibrantes reprises, c’est avec un tout nouvel album entièrement original que le sextet fait un retour époustouflant, son premier depuis 13 ans. Et que la fête est belle ! Enregistré entre les studios Blackbird de Nashville et le Studio One Two Seven de Harlem à New-York, « Strike Up The Band » célèbre avec toujours autant de classe un Blues sudiste très varié et plein de surprises, qui paraît si éloigné de sa Californie natale.

Autour du solide socle constitué de Bill Payne, au chant et aux claviers depuis 1969, et de Paul Barrere (chant, guitare), Sam Clayton (conga, percussions, chant) et Kenny Gradney (basse) tous présents depuis 1972, LITTLE FEAT peut compter depuis un bon moment maintenant sur les fidèles et talentueux Fred Tackett (guitare, mandoline, trompette, chant) Tony Leone (batterie) et le virtuose guitariste et compositeur Scott Sharrad. Et cette armada du groove continue son exploration du Blues, du Funk, du Southern Rock et de ses envolées Soul avec une fraîcheur, une élégance, un enthousiasme et une complicité, qui nous ramènent aux premières heures de ce combo hors-norme.

Dans la chaleur des cuivres et la torpeur de la slide, LITTLE FEAT s’est ouvert à quelques collaborations, et non des moindres. Côté compositions, « Bayou Mama » est l’œuvre de Payne et de Charlie Starr des Blackberry Smoke, tandis que « Bluegrass Pines » doit son texte à Robert Hunter, légendaire parolier de Grateful Dead et où l’on retrouve le six-cordiste Larry Campbell, les chœurs de sa femme Teresa Williams et Molly Tuttle en embuscade. Dans cette heure assez magique, les sœurs Lowell de Larkin Poe enveloppent la touchante chanson-titre, puis la féérie continue sur « 4 Days Of Heaven, 3 Days Of Work », « New Orleans Cries When She Sings », Too High To Cut My Hair », « Midnight Flight »… Grand !

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Blues Chicago Blues Hill Country Blues Soul / Funk

Tony Holiday : une classe éblouissante

Si TONY HOLIDAY se présente avec des réalisations surpassant les précédentes sur un tel rythme, il devrait toucher la perfection d’ici peu. D’une écriture éclatante et entouré d’incroyables musiciens, il parvient à un somptueux mélange des genres, où les guitares rivalisent avec les cuivres, l’orgue et l’harmonica dans une rare harmonie. Avec « Keep You Head Up », le bluesman s’affirme comme une valeur sûre et incontournable de la scène Blues actuelle.

TONY HOLIDAY

« Keep Your Head Up »

(Forty Below Records)

TONY HOLIDAY a de la suite dans les idées et c’est peu de le dire. Septième album depuis « Porch Sessions », son premier opus sorti en 2019, et alors qu’on pourrait imaginer un certain essoufflement, c’est tout le contraire. Le chanteur se bonifie disque après disque et son style s’affine d’autant plus vite. Originaire de l’Utah et installé à Memphis depuis 2017, le songwriter distille un Soul Blues très expressif, basé sur un savant mix de Blues texan, de celui de Chicago aussi et de Blues Rock auquel il faut ajouter une touche de Hill Country. Et le pont entre les styles est solide.

Et le plus surprenant chez l’Américain est qu’il parvient à conserver une touche Old School tout en se présentant avec des chansons modernes dans leur écriture comme dans le son. Et pour « Keep Your Head Up », TONY HOLIDAY a fait appel à de très nombreux musiciens, dont quelques invités de renom. Enregistrés entre le Tennessee et la Californie par Eric Corne, les huit morceaux sont impressionnants de feeling et de finesse d’interprétation, et la profondeur, tout comme le relief et la chaleur, de la production sont exceptionnels. En somme, on cherche en vain les défauts.

Même si « Keep Your Head Up » ne s’étend que sur une demi-heure, les surprises sont nombreuses. Avec Eddie 9V sur le funky « She’s A Burglar », en duo avec le brillant Kevin Burt sur « Twist My Fate », accompagné par la guitare de Laura Chavez sur « Shoulda Known Better » ou aux côtés d’Albert Castiglia sur « Drive It Home », TONY HOLIDAY est à l’aise dans tous les registres. Y allant de son tonique harmonica sur trois titres, il porte littéralement ce nouvel album de sa voix enveloppante et tellement Soul. Une fois encore, il nous régale avec talent et on en redemande.

Photo : Mary Gunning

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Blues Rock Delta Blues Soul / Funk

Kustan Adam : on the way to the summits

Compositeur, guitariste et chanteur, KUSTAN ADAM présente un deuxième album constitué de Blues Rock énergique et de titres plus Funky et Soul. « Pretty Black Suit » est un beau condensé du savoir-faire et du raffinement musical du Hongrois. Entre accords bien sentis et solos enflammés, il réussit à capter l’attention grâce à une approche très élégante et des mélodies imparables. Toujours réalisé en indépendant, le musicien ne devrait pas tarder à être approché par de sérieux labels.

KUSTAN ADAM

« Pretty Black Suit »

(Independant)

Après un  premier effort convaincant en 2021, « I Ain’t Got A Car », KUSTAN ADAM confirme ses débuts prometteurs avec « Pretty Black Suit ». Le Hongrois a passé du temps sur la route, s’est aguerri et cela s’entend. De retour avec son power trio, son Blues Rock aux saveurs Soul a pris du volume et, grâce à une production très soignée, son jeu de guitare resplendit et pas seulement. Ses talents de songwriter montrent aussi un artiste plus mature et qui élargit aussi son spectre musical dans une polyvalence stylistique très bien maîtrisée.

Très imprégné d’un Rock 60’s savoureux, KUSTAN ADAM distille un Blues moderne qui ne renie pas non plus ses racines, notamment celles du Delta. Dynamique et jouant sur une certaine légèreté qui rend ses morceaux assez aériens, le bluesman s’avère être aussi un très bon chanteur. Sa jeunesse apporte également beaucoup de fraîcheur sur ce « Pretty Black Suit », bien trop court au final. Rock, Funky ou Soul, il s’approprie tous ces registres avec facilité et une séduisante décontraction, qui rend l’ensemble très fluide.

En libérant un riff bien fuzz dès le départ sur « Little Blue Man », KUSTAN ADAM montre qu’il n’a pas froid aux yeux et ce deuxième opus s’annonce haut en couleur. Même si la suite est plus posée (« I’m Alone »), le très Funky « We Were Born » remet du tonus avant la belle slide de « Young Boy ». Et c’est « Travellin’ Man » et son Blues Rock contagieux qui emporte tout grâce aussi à un superbe dialogue avec sa choriste. Des douces notes de trompette sur le morceau-titre, jusqu’au délicat « Going Down To Memphis », on est tenu en haleine.

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Blues Folk/Americana Rock

Nina Attal : les cordes sensibles

Compositrice, chanteuse et guitariste accomplie, NINA ATTAL se présente avec une cinquième réalisation très aboutie, remarquablement bien produite et d’une belle diversité. Fluide et instinctif, son jeu paraît évident, malgré une technicité de chaque instant qui se niche au creux de chaque arrangement. Avec beaucoup de fraîcheur et d’énergie, « Tales Of A Guitar Woman » est la signature d’une artiste aguerrie et pleine de ressources. Organique et moderne.

NINA ATTAL

« Tales Of A Guitar Woman »

(LVCO)

Ce qui caractérise notamment NINA ATTAL depuis ses débuts il y a un peu plus de 15 ans, c’est son indépendance et sa liberté artistique. Et c’est sûrement ce qui a contribué à son éclosion et sa longévité… au-delà de son talent, bien sûr. Devenue incontournable sur la scène Rock et Blues française, elle s’est affranchi des frontières musicales depuis longtemps déjà pour laisser éclore un style très personnel où la Folk, le Rock, l’Americana et la Pop trouvent refuge autour d’un Blues rassembleur, qui fait le guide.

Quatre ans après un resplendissant « Pieces Of Soul », NINA ATTAL livre son cinquième album et il se montre largement à la hauteur des attentes. Très introspectif dans les textes, il est aussi une véritable déclaration d’amour à son instrument : la guitare. Et sur « Tales Of A Guitar Woman », elle passe de l’électrique à l’acoustique, de la 12 cordes au dobro avec la même dextérité, le même feeling et cette même technique qui fait d’elle l’une des plus impressionnantes et éclectiques musiciennes du paysage musical actuel.

Composé de 13 chansons, ce nouvel opus nous conte aussi 13 histoires, qui sont autant de propos intimes que de réflexions sur l’état de notre monde. NINA ATTAL joue sur les émotions avec douceur, toujours chevillée à cette explosivité qu’on lui connaît. Incendiaire ou délicate, la musicienne reste d’une spontanéité constante, et peu importe le style abordé. Enfin, « Tales Of A Guitar Woman » compte également trois titres en français et des duos, qui viennent confirmer sa polyvalence et un sens du songwriting imparable. Intense !

Retrouvez également sa récente interview et la chronique de « Pieces Of Soul » :

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Americana Blues Soul

Janiva Magness : in search of truth

Pour son 17ème album, celle qui compte sept Blues Music Awards dont le fameux BB King remis par la légende elle-même, nous plonge à la découverte de quelques trésors qu’elle a le don de régénérer en intériorisant les chansons pour les faire siennes. JANIVA MAGNESS est une interprète hors-norme et cette facilité à les personnaliser confère à ses reprises une authenticité toute flamboyante. Et si l’on ajoute le fait que « Back For Me » ait été enregistré en condition live, on constate que la blueswoman s’est à nouveau surpassée.   

JANIVA MAGNESS

« Back For Me »

(Blue Élan Records)

Originaire de Detroit, Michigan, JANIVA MAGNESS est ce que l’on pourrait qualifier de diva (au bon sens du terme !), tant elle parvient à chaque nouvel album à fusionner le Blues, la Soul et l’Americana avec une grâce que l’on n’entend que très rarement. Avec sa voix rauque et puissante, elle reste toujours incroyablement captivante et, en un peu plus de 30 ans de carrière, ne déçoit jamais. Pourtant, l’Américaine est également une grande spécialiste des reprises qui, à chaque fois, sortent brillamment de l’ordinaire par leur choix.

Non que JANIVA MAGNESS ne soit pas une très bonne songwriter, bien au contraire, mais elle excelle dans l’art de magnifier les morceaux des autres en les transformant au point d’en faire de véritables déclarations personnelles. Et c’est encore le cas sur « Back For Me », où elle se montre à même de se les approprier avec un charisme incroyable pour leur offrir une nouvelle vie. Et comme cela ne paraît pas suffire, elle a même convié Joe Bonamassa (encore lui !), Sue Foley et l’électrique Jesse Dayton à la fête.

Une autre des multiples particularités de la chanteuse est aussi de dénicher des pépites méconnues d’artistes aux horizons divers. Et cette fois, c’est chez Bill Withers, Ray LaMontagne, Allen Toussaint, Doyle Bramhall II, Tracy Nelson et Irma Thomas que JANIVA MAGNESS a trouvé l’inspiration. Toujours produit par son ami Dave Darling, « Back For Me » balaie un large éventail de sonorités et de terroirs Blues et Soul, qui vibrent à l’unisson sur une dynamique brûlante entre émotions fortes et rythmes effrénés. Sompteux !

Photo : Kimberly Fongheiser

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Blues Rythm'n' Blues Soul / Funk

Allison August : a sunlight

Elle chante depuis sa tendre enfance et, aujourd’hui, la force et la puissance qu’elle dégage est au service d’un Blues emprunt de Soul, de R&B, de Funk et d’Americana. Avec « August Moon », ALLISON AUGUST multiplie les écarts, passant d’un registre à l’autre avec une totale maîtrise. D’une belle authenticité et avec une sincérité très perceptible, elle interprète de manière limpide des chansons qu’elle a écrites ou co-écrites et où elle brille en offrant une sensation très familière et proche. Un moment de vie sur une musique très élégante.

ALLISON AUGUST

« August Moon »

(MoMojo Records)

Elle a le soleil dans la voix et neuf longues années après « Holy Water », elle signe enfin son retour avec un nouvel album auquel elle se consacre depuis quelques années. Et si la Californienne affiche déjà un beau parcours, ce nouvel opus vient sonner en quelque sorte l’heure d’une certaine consécration artistique pour elle. En effet, ALISSON AUGUST a fait appel au grand et awardisé Tony Braunagel, batteur auprès des plus grands noms du Blues et de la Soul, et sur plusieurs titres du disque, ainsi que metteur en son pour Eric Burdon, Mike Zito, Taj Mahal ou Coco Montoya pour ne citer qu’eux.

Autant dire que la voix de l’Américaine résonne de la plus belle des manières sur ce « August Moon », qui nous transporte sur des ambiances variées et qui, dans un écrin Blues Americana, laisse échapper des styles qui la porte depuis toujours comme le Jazz, le R&B, la Country-Soul ou la Funk. C’est d’ailleurs le cas sur « I Won’t Say No » qu’elle interprète magistralement en duo Sugaray Rayford, autre monument électrisant de la scène Soul Blues. Deux personnalités qui se complètent à merveille sur ce titre qui vient confirmer qu’ALLISON AUGUST mène sa barque avec une folle énergie.

Tendre ou survoltée, la chanteuse passe par toutes les émotions sur un groove de chaque instant, magnifiquement orchestré par un groupe qui met toute son expérience au service d’un feeling implacable. Soutenue par un trio de chœurs vibrants et chaleureux, elle enchaîne des morceaux au songwriting efficace et elle laisse respirer les chansons tout en évoquant des sujets souvent très personnels, traités avec délicatesse. ALLISON AUGUST livre ici l’une de ses plus belles performances sur album et on se délecte de chaque instant (« Blue Eye Boy », « Blues Is My Religion », « I Ain’t Lyin’ »). Somptueux !   

Photo : Frank Lee Drennen

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Blues

Bobby Rush & Kenny Wayne Shepherd : magic connection

L’addition de talents ne garantit pas forcément l’enthousiasme, ni un résultat à la hauteur. Et si les exemples sont nombreux, il y a toujours des exceptions qui débouchent sur des albums renversants où l’on touche la perfection. Le grand BOBBY RUSH et l’incontournable KENNY WAYNE SHEPHERD ont mis en commun leur expérience et leur feeling dans une réalisation qui fera date sans aucun doute. « Young Fashioned Ways » incarne un Blues intemporel et majestueux. La classe et le feeling en symbiose.

BOBBY RUSH & KENNY WAYNE SHEPHERD

« Young Fashioned Ways »

(Deep Rush Records)

L’un a 91 ans et l’autre 47. Deux générations les séparent et pourtant, ils ont le même amour et la même passion du Blues. Alors, lorsqu’une légende vivante rencontre une si belle étoile qui incarne à elle seul l’avenir du genre, on ne peut que se réjouir. Il faut bien avouer que BOBBY RUSH et KENNY WAYNE SHEPHERD n’ont pas mis bien longtemps à s’aligner sur la même longueur d’onde. Et ce qui est assez génial sur « Young Fashioned Ways », c’est qu’aucun de ces deux géants du Blues n’a fait de concession dans son jeu. Au contraire, si le respect est palpable, c’est surtout la complicité entre eux qui brille !

Bien sûr, le timbre de voix et l’harmonica de BOBBY RUSH est identifiable en quelques secondes seulement et il va sans dire que le toucher et le son de guitare de KENNY WAYNE SHEPHERD ne laissent pas l’ombre d’un doute, non plus. La connexion est instantanée entre l’approche très moderne du Blues de l’un et toute la classe et l’héritage si bien préservé de l’autre. Il faut aussi préciser aussi que notre duo vient de Louisiane et les deux musiciens partagent donc des valeurs et une vision commune du Blues, cette atmosphère si spécifique à cet autre berceau du style. Et c’est pourtant ailleurs qu’ils vont se retrouver.

Entre compostions originales et réinterprétations de classiques de BOBBY RUSH, « Young Fashioned Ways » témoigne aussi de l’amour que les deux hommes ont pour Muddy Waters, comme en témoigne le titre de l’album. Accompagné d’un groupe virtuose, on se laisse littéralement envoûter par cette éclatante célébration de l’Histoire, de la culture et même de l’âme du Blues. Et KENNY WAYNE SHEPHERD navigue sur des tempos et des ambiances différentes avec le talent inouï qu’on lui connait. On peut ici parler de chef-d’œuvre, tant les deux artistes atteignent des sommets, tout en se faisant vraiment plaisir.

Retrouvez la chronique du dernier album solo de BOBBY RUSH…

… Et celles des dernières réalisations de KENNY WAYNE SHEPHERD :