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Hard US Rock US Sleaze

Buckcherry : un Rock mature

Trop peu connu en France, BUCKCHERRY fait pourtant partie du paysage Rock et Hard américain depuis de longues années, et même du haut du panier. Typiquement ancré dans un style propre aux Etats-Unis, le combo de la côté ouest se différencie pourtant aisément de la scène dont il est issu grâce, notamment, à son frontman et à sa débordante énergie. « Vol.10 » est sans doute moins impertinent que ses prédécesseurs, mais il n’en demeure pas moins consistant.

BUCKCHERRY

« Vol. 10 »

(Earache Records)

Après des débuts explosifs et couronnés de succès entre 1995 et 2002, puis un retour avec « 15 » en 2006, qui a véritablement installé le groupe, BUCKCHERRY poursuit sa route et enchaîne les albums avec une belle régularité artistique. Ses derniers disques, « Warpaint » et « Hellbound », sont venus conforter cette stabilité tout en le portant au rang d’institution du Rock Hard US estampillé L.A.

Josh Todd et ses hommes font encore le job sur cette dixième réalisation, qui marque aussi un franchissement important pour les Californiens. Les riffs de Stevie D traversent les morceaux avec le côté tranchant qu’on lui connait. Les solos de Kevin Roentgen dynamisent l’ensemble, fermement emmené par Kelly LeMieux (basse) et Francis Ruiz (batterie). BUCKCHERRY est en place et solide comme un roc.

Toujours aussi bien produit, on ne retrouve malheureusement pas complètement le côté Sleaze et irrévérencieux du quintet, malgré de très bons morceaux (« This And That », « Good Time », « Shine Your Lights », « Let’s Get Wild », « With You »). Et bien sûr, BUCKCHERRY nous gratifie de deux bonnes ballades, sorte de marque de fabrique depuis sa création (« Feels Like I Love », « Pain »). Toujours aussi efficace, mais moins frénétique.

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Rock Progressif

Arena : la force des mélodies

Les années ne semblent pas avoir d’emprise sur ARENA, dont le Rock néo-Progressif est aussi moderne qu’emprunt d’une tradition musicale éprouvée. Avec « The Theory Of Molecular Inheritance », le quintet britannique accueille aussi un nouveau frontman d’expérience et de grand talent, Damian Wilson.

ARENA

« The Theory of Molecular Inheritance»

(Verglas Music)

Fondé il y a plus de 25 ans par le claviériste Clive Nolan et le batteur Mike Pointer, ARENA livre le dixième album de sa belle discographie avec un nouvel atout… et il est de taille. Damian Wilson (ex-Threshold) fait en effet son arrivée au micro, ce qui fait de lui le cinquième chanteur du quintet anglais. Et il faut bien reconnaître que le poste lui va comme un gant, tant il rayonne sur ce « The Theory Of Molecular Inheritance ».

Alliant puissance et émotion, le nouveau frontman se fond parfaitement dans le collectif au point que tous les membres d’ARENA ont participé à l’écriture des nouveaux titres. Pour autant, l’identité musicale est intacte et les Britanniques sont identifiables dès les premières notes de « Time Capsule ». Caractérisé par son élégance, le style du groupe continue son évolution, tout en restant ancré dans un Rock Progressif très actuel.

La finesse des parties de guitares de John Mitchell et le groove de Kylan Amos restent un maillon essentiel, tout comme les claviers qui apportent beaucoup de vélocité et des atmosphères prenantes (« Integration », « The Heiligenstadt Legacy », « Under The Microscope », « Part Of You »). Sans se réinventer, ARENA continue d’oxygéner son Rock néo-Progressif avec talent et une technicité incontestable depuis ses débuts.

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Alternative Rock

Nickelback : keep rockin’

Toujours aussi ‘feel good’, NICKELBACK vient poser une dizième pierre à son édifice discographique avec la même volonté, la même ambition et cette même production survitaminée qui a porté les Canadiens au panthéon des groupes de Rock très présentables. Et s’ils n’ont pas inventé la poudre, ils savent toujours y mettre le feu. Ainsi, « Get Rollin’ », emprunt d’une certaine nostalgie, ne déroge pas à la règle.

NICKELBACK

« Get Rollin’ »

(BMG)

Il vous reste bien quelques gouttes de bile, quelques crachats d’un venin malfaisant ou quelques adjectifs hautement lettrés, non ? Parce que ce dixième album de NICKELBACK se doit d’être accueilli comme les autres. Rarement sur la brèche et toujours à l’équilibre, le quatuor canadien ne dévie pas d’un iota sa route et reste d’une incroyable fidélité à son Alternative Rock très formaté, entêtant et terriblement efficace. Car oui, et n’en déplaise aux pointilleux métalleux, on parle bien ici de Rock et pas d’autre chose.

Evoluant sous le même line-up depuis près de 18 ans, NICKELBACK a soigneusement élaboré un style et un son immédiatement identifiables et c’est d’ailleurs sûrement ce qui fait sa particularité. Et lorsque, comme moi, on apprécie la musique du groupe, on a la chance d’être rarement déçu. En effet, « Get Rollin’ » s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs, même s’il donne un peu plus dans la facilité que « Feed The Machine ». Les mêmes ingrédients, mais en moins épicé, en somme. 

Une fois encore, Mike Kroeger (basse) et Daniel Adair (batterie) bétonnent la rythmique de manière méthodique, tandis que les riffs et les rares solos de Ryan Peake délivrent des mélodies que la guitare et la voix rocailleuse de Chad Kroeger enveloppent avec chaleur et précision. Fougueux et percutants (« Saint Quentin », le sudiste « High Time », « Vegas Bomb », « Skinny Little Missy ») ou carrément sirupeux (« Tidal Wave », « Horizon »), NICKELBACK n’a pas son pareil pour fédérer les masses… et ça fait du bien !

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Hard 70's Hard Blues Hard Rock

Vinnie Moore : classieux

Réputé pour sa légendaire technique et un style qui a fait école depuis de longues années, VINNIE MOORE est loin d’être en reste au niveau feeling, bien au contraire. Avec ce dixième album solo, le guitariste d’UFO s’amuse à passer d’un registre à un autre avec une dextérité peu commune. Et pour une fois, il a même invité quelques chanteurs sur ce très bon « Double Exposure ».

VINNIE MOORE

« Double Exposure »

(Mind’s Eye Music)

C’est après un album avec Vicious Rumors (« Soldiers Of The Night » – 1985) que le grand VINNIE MOORE s’est lancé en solo pour mieux d’adonner à son exercice préféré : la guitare shred. Longtemps affilié au courant néoclassique à l’instar de Malmsteen,  il est surtout connu pour son jeu au sein d’UFO avec qui il s a sorti six albums studio. Parallèlement, on a aussi pu l’entendre avec Alice Cooper, Jordan Rudess et Destruction.

« Double Exposure » est le dixième album du virtuose américain et il présente une surprise de taille. En effet, pour la première fois sur ses propres productions, VINNIE MOORE a fait appel à des chanteurs, et pas des moindres, pour interpréter quelques morceaux. On retrouve sur la moitié de ce nouvel opus Ed Tery (Rage And Beyond), Keith Slack (MSG, Mother Road), Mike DiMeo (Riot) et Brian Stephenson (Old James). Inédit !

Moins démonstratif qu’à l’habitude, mais conservant cet incroyable toucher, VINNIE MOORE joue même sur une Gibson SG, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. De fait, l’album sonne plus Rock et même légèrement Blues et Funky (« Still Waters Run Deep », « River Flow », « Astro Man », Southern Highway »). « Double Exposure » est certainement le plus varié de la carrière du six-cordiste, qui se montre toujours inspiré.

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Groove Metal Thrash Metal

Machine Head : la leçon

A en croire certains, MACHINE HEAD n’est plus que l’ombre de lui-même depuis quelques albums. Assez inégal, c’est vrai, le quatuor de la Bay Area reste pourtant une valeur sûre du Thrash/Groove Metal depuis trois décennies. Avec « Øf Kingdøm And Crøwn », le combo fait bien plus que de redorer son blason : il l’illumine. Rendant coup pour coup, cette dixième réalisation vient remettre l’église au centre du village Metal avec éclat.

MACHINE HEAD

« Øf Kingdøm And Crøwn »

(Nuclear Blast)

Et si, avec ce dixième album, MACHINE HEAD venait de livrer la pièce maîtresse de sa discographie ? Ça en fera certainement hurler plus d’un, mais si on y réfléchit bien… « Øf Kingdøm And Crøwn » recèle d’innombrables trésors répartis sur 15 pistes pour une heure de Thrash/Groove Metal de haute voltige. Les Californiens atteignent enfin le niveau auquel on les a toujours imaginés.

Robb Flynn et ses hommes apposent d’entrée leur ambition et leur assurance avec « Slaughter The Martyr », titanesque morceau de dix minutes où la mélancolie se mêle à une brutalité foudroyante. Dans le même temps, techniquement et au niveau des harmonies, MACHINE HEAD affiche la couleur : elle sera noire. Le quatuor se montre plus affûté que jamais et la fluidité de son Metal est juste phénoménale.

Entre Waclaw Kieltyka et son leader, l’osmose guitaristique est au sommet, tandis que Matt Alston (batterie) et Jared McEachern (basse) apportent à « Øf Kingdøm And Crøwn » un rythme infernal et un groove énorme (« Chøke Øn The Ashes Øf Yøur Hate », « Becøme The Firestørm »). Si la mécanique de MACHINE HEAD est parfaitement huilée, les mélodies et le chant libèrent une diversité presqu’addictive et très audacieuse (« Unhalløwed »). 

La facilité affichée sur l’ensemble de cet album-concept montre aussi à quel point le groupe a atteint sa pleine maturité et sa perpétuelle remise en question porte enfin ses fruits. Les Américains ne sont plus des challengers depuis longtemps et ce nouvel opus vient faire taire ses détracteurs. MACHINE HEAD est affamé, surpuissant et cette démonstration est franchement implacable (« Kill Thy Enemies », « Bløødshøt », « Røtten »).

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Viking Metal

Týr : symphonie viking

Rare représentant du Metal des îles Féroé, TÝR mène une carrière dans un registre où se mêlent une tradition viking ancestrale et une puissance Heavy, progressive et presque Death. Sur « A Night At The Nordic House », le quatuor nordique fait corps avec l’Orchestre Symphonique de son pays pour un enregistrement épique entre modernité et mythologie.

TÝR

« A Night at the Nordic House

(with The Symphony Orchestra of the Faroe Islands) »

(Metal Blade Records)

Réputées pour ses activités ludiques avec les dauphins, ainsi que ses scores à deux chiffres en football, les îles Féroé abritent également l’un des meilleurs groupes de Folk et de Viking Metal en activité depuis 1998. Inspiré par la mythologie nordique, TÝR compte déjà neuf albums à son actif et se présente avec une dizième réalisation « Night At The Nordic House », aussi symphonique que Metal.

Enregistré en live à la Nordic House dans la ville de Tórshavn le 8 février 2020, le quatuor s’est adjoint la collaboration de l’Orchestre Symphonique de son île pour mettre en lumière pas moins de 17 morceaux de son répertoire et une intro. Dans une atmosphère propice aux légendes vikings, TÝR propose un moment fort à ses fans, tant le relief de cette collaboration est assez époustouflant.

L’album brille par sa production exceptionnelle, puissante et parfaitement équilibrée grâce à un mix exemplaire. Epique, sophistiqué et pourtant très fidèle au Metal Viking et son côté Folk, le groupe se détache brillamment du volume apporté par l’orchestre en restant dans la lignée de ses albums (« By The Sword In My Hand », « Ragnars Kvæði », « Blood Of Heroes », « Fire And Flame »). Héroïque et tranchant, TÝR frappe fort.

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France Metal Rock

No One Is Innocent : un combat politiquement Rock [Interview]

C’est avec un dixième album et une sérieuse envie d’en découdre que se présente NO ONE IS INNOCENT avec « Ennemis ». Près de 30 ans après leur formation, les Parisiens n’ont pas levé le pied et continuent leur ‘Combat Rock’, imperturbables aux modes et plus que jamais attentifs à notre société. Kemar, emblématique chanteur du groupe, revient sur l’élaboration de ce nouvel opus et livre aussi sur sa vision d’une époque en perdition. Le frontman a une fois encore trempé une plume acide, afin de livrer des textes engagés et directs. Entretien.

– Commençons par le titre de ce nouvel album, « Ennemis ». D’autres groupes s’y sont déjà essayés, mais il était toujours question de fiction ou d’histoires. Or là, vous les pointez du doigt certaines choses, laissant place à la réalité. Certes, vous êtes un groupe engagé depuis vos débuts, mais on vous sent beaucoup plus virulents. Et « Ennemis » est un titre très violent quand on y pense, non ?

C’est finalement un titre qui est en rapport avec l’évolution de la société médiatique, politique et économique… Il y a dans tous les titres cette notion d’ennemis qui transpire un peu à chaque fois, comme dans « Force du Désordre », « Humiliation », « Bulldozer »… En fait, ça revenait dans les discussions qu’on avait entre nous, et j’ai un peu synthétisé tout ça. Et puis, on a aussi senti qu’en ce moment il y avait des gens qui avaient une espèce de désir d’exister absolue avec cette tentation permanente de désigner un ennemi. Aujourd’hui, on existe constamment en désignant un ennemi ! Je pourrais t’en citer plusieurs qui sont justement dans cette position. On ne désigne plus les amis et c’est hyper-dérangeant.  

– En parlant de cet engagement que vous nourrissez depuis votre premier album, j’ai l’impression que c’est votre disque le plus politique, au sens noble du terme, jusqu’à ce jour. L’état de la société et le comportement de certains sont au cœur d’ « Ennemis ». Et vous dressez un constat, que je partage, très sombre et aussi très colérique pour ne pas dire plus. Il est grand temps de se réveiller ?

Oui, par rapport à des choses qu’on a banalisé. Aujourd’hui, on laisse une Marine Le Pen dire tout et n’importe quoi, on laisse un Zemmour aux télés, aux radios et à la candidature présidentielle, alors qu’il a été condamné pour incitation à la haine raciale et on laisse un Sarkozy faire la promo de son bouquin, alors qu’il a pris un an de prison ferme ! Il y a des choses dans la fonction politique qui déconnent et on banalise tout ça. On aurait pu donner à cet album un titre autour de la banalisation de plein de choses. C’est vrai qu’avec notre musique, on essaie de pointer du doigt tout ça pour alerter un peu.

– Depuis la sortie de « Frankenstein » il y a maintenant trois ans, notre société a subi beaucoup de choses, qui vont de la pandémie bien sûr jusqu’aux actions gouvernementales en France, mais aussi partout dans le monde (George Floyd, Black Live Matters, …). On ne vous a rarement senti si vindicatifs et rageurs. Et pourtant, on a encore le sentiment que vous en avez encore sous le pied. « Ennemis » aurait presque pu être beaucoup plus long, non ?

Oui, mais nous ne sommes pas le supermarché de l’engagement ! Ce qui nous importe avant tout, c’est d’écrire de la bonne musique ! C’est notre métier à la base. Sans bonne musique, a cappella, je ne ressemble à rien, tu vois ? (Rires)

– Sur « Ennemis », on retrouve Charles de Schutter à la production avec Shanka. C’est lui qui avait réalisé « Drugstore » (que je considère d’ailleurs comme votre meilleur album) et on retrouve ce son direct, brut et très massif. Là encore, il n’y a aucune fioriture et des arrangements très efficaces. On sent une certaine urgence dans vos morceaux. C’est ce que vous aviez en tête dès le début de la composition, puis de l’enregistrement ?

C’est très bizarre, car nous avons beaucoup composé pendant la période de confinement. Dans notre rythme, il n’y avait pas de notion d’urgence. Nous nous sommes focalisés sur le son en nous demandant ce que nous pouvions écrire et ce qui pourrait nous surprendre. Shanka est allé chercher un peu du côté des musiques orientales et indiennes notamment. Peut-être que les gens ne vont pas capter toute de suite ces influences-là, mais en tout cas, elles ont été déterminantes sur « Force du Désordre », « Armistice » ou certains mouvements dans « Les Hyènes de L’info », par exemple. On voulait aller chercher un peu ailleurs pour les intégrer aux compos et pas forcément seulement au son.      

– Cela n’empêche nullement le gros travail que vous avez effectué sur la production, qui est très soignée. Et puis, il y a cette irrésistible impression d’énergie live et toujours très fédératrice et communicative. Vous pensez à la scène en composant vos morceaux, car certains refrains vont faire très mal…

On a un mode de fonctionnement bien à nous. Il faut aussi savoir que nous sommes toujours de l’école du riff. On cherche encore le riff ultime, c’est toujours notre démarche. Il faut que la compo, à un moment donné, fasse bouger le chanteur physiquement. C’est un mot d’ordre chez nous. Tout le monde le sait et tout le monde le sent. Quand je commence à ressentir quelque chose, c’est que c’est bon.

– Il y a aussi « Armistice », qui se place au milieu de l’album et qui est une sorte d’interlude. Pourtant, et malgré son titre, on ne sent pas beaucoup de sérénité…  

Il l’est dans le sens où, tout autour, c’est la guerre. Au départ, j’avais proposé à Shanka de chanter un morceau avec moi, car j’aimais bien l’idée. Il n’était pas très chaud, alors je lui ai proposé de regarder parmi tous ses instruments quelque chose qui pourrait sortir de l’ordinaire. On avait comme référence « Planet Caravan » de Black Sabbath. Et comme depuis quelques temps, il s’est mis à la viole de gambe, et qu’il est extrêmement doué, on lui a laissé toute liberté, car ça nous plaisait beaucoup et nous avions aussi besoin d’un morceau comme ça.  

– A propos de scène, vous qui donnez l’impression de ne jamais vous arrêter, le confinement, puis la privation de concerts, ont dû avoir un énorme impact sur le groupe. Comment avez-vous vécu cette (trop) longue période de repos forcé ?

On a eu de la chance, parce que nous avons terminé la tournée fin 2019 et quand le confinement est arrivé, on avait déjà commencé à composer un peu le nouvel album. On n’a pas du tout ressenti de frustration live, parce qu’on était pleinement dans l’élaboration d’ « Ennemis ». Finalement, ça a été un moment de réflexion. Personnellement, ça m’a fait beaucoup de bien, car j’ai besoin que mon corps et mon cerveau soient hyper-posés pour être bien et composer. Paradoxalement, ce confinement nous a fait du bien.

– D’ailleurs, je me posais la question récemment. Je vous suis depuis vos tout débuts et c’est toujours assez difficile de nous définir. Rock, Hard-Core ou Metal, votre leitmotiv reste le combat, la revendication et surtout la prise de conscience, non ? C’est quelque chose qui ne vous quitte pas…

Oui, c’est vrai. Dans une démarche de compo, je dis souvent aux gars qu’il faut que notre musique raconte une histoire. Même si j’ai des thèmes dans mes tiroirs, j’ai besoin que l’instrumental raconte déjà une histoire. C’est ça qui fait qu’on arrive à donner un vrai liant entre ce qui est raconté et ce qui est joué.

– « Ennemis » est aussi votre dixième album studio. C’est toujours un cap particulier dans la carrière d’un groupe, car il marque une étape importante. Vous y avez pensé, ou pas du tout ? Vous aviez la volonté de marquer encore plus les esprits avec « Ennemis » ?

Non, on n’est pas dans le comptage ou la nostalgie. L’album n’est pas plus important qu’un autre. Il marque l’histoire d’un groupe qui est ensemble depuis des années, qui construit ensemble et qui se connait bien. Nous avons une façon de composer apaisante. Il n’y a pas d’histoire égo entre nous, car on cherche le meilleur de nous-mêmes. C’est juste la bonne évolution d’un groupe qui aime faire de la musique ensemble.

– En 2021, la scène musicale française n’est plus aussi contestataire ou engagée comme elle a pu l’être par le passé, alors que nous vivons dans une société de plus en plus inégalitaire. Comment l’expliques-tu, alors que les intérêts ont changé pour devenir essentiellement individuel au détriment du bien-être collectif ?

Il y a une grosse influence des réseaux sociaux. La consommation de la musique n’est plus la même, on est plutôt dans la quantité que dans la qualité. Aujourd’hui, il faut produire, produire, produire… On est peut-être moins dans l’exigence au niveau de la qualité de la musique. Après, l’engagement fait partie de l’ADN d’un groupe, ou pas…

– Oui, mais pourtant dans les années 80 et 90, c’était quand même autre chose…

Oui, c’est vrai. On était aussi poussé par des groupes comme Rage Against The Machine, Nirvana et d’autres qui ont été moteurs à leur façon d’un certain engagement propre à chacun d’eux. Et malheureusement, il y a aussi eu l’avènement d’un Hip-Hop, d’une Trap Music qui ne veut plus rien dire, qui n’explique plus rien, qui se noie dans de la prod’ minimaliste et des textes qui n’ont plus de sens. Alors, tout d’un coup, tu as une nouvelle génération très influencée par tout ça et qui se perd dans une espèce de truc mielleux et mièvre. Finalement, c’est très contradictoire car, aujourd’hui, il devrait y avoir de la colère partout. Cela dit, l’exposition médiatique de musiques comme la nôtre ou d’un Hip-Hop un peu rageur n’existe pas, parce qu’il faut que ce soit lisse, il ne faut pas que ça déborde et il ne faut pas trop d’engagement. En fait, ça ne donne peut-être pas envie à une nouvelle génération d’aller vers cette forme-là de musique, parce qu’ils savent pertinemment qu’ils vont rester dans une niche et dans l’ombre. Nous, ça fait 30 ans qu’on est là. On s’est construit autour de ça et c’est peut-être plus facile d’être écouté par rapport à un groupe qui commence aujourd’hui, ou même il y a cinq ans.

« Ennemis » de NO ONE IS INNOCENT est disponible depuis le 1er octobre chez Verycords.

Retrouvez la chronique de l’album :

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Hard-Core Metal Rock

No One Is Innocent : le poing levé

Une fois de plus, NO ONE IS INNOCENT monte à l’assaut avec une colère à peine contenue, livrée sur un dixième album, « Ennemis », qui sent la poudre. Militant et féroce, le quintet enrobe de riffs appuyés et assassins des textes cinglants et un discours responsable. Très live dans le son et la production, le groupe scande des vérités et rappelle que « Nous sommes des centaines et des milliers ».

NO ONE IS INNOCENT

« Ennemis »

(Verycords)

Dès la première écoute, ça saute aux oreilles : Kemar et sa bande se sont encore surpassés. Même si j’ai tendance à le dire à chaque nouvel album de NO ONE IS INNOCENT, il faut bien avouer qu’ « Ennemis » percute, fédère et donne des envies de grands changements, si ce n’est même un peu plus… Après 30 ans d’existence, ce dixième album confirme la rage intacte du groupe face à une oppression grandissante et un système qui se dérègle totalement (« Force Du Désordre »).

Ce qui tient toujours aux tripes du quintet, c’est ce combat Rock très Metal, incisif et engagé. Co-produit par son guitariste Shanka et Charles de Schutter, qui avait déjà officié sur l’excellent « Drugstore » en 2011, ce nouvel opus désigne sur dix morceaux (et un interlude « Armistice ») les « Ennemis » d’une société, d’une époque aussi, en montrant du doigt des responsables qui ne se cachent pas. Mais pas de leçon de morale ici, NO ONE s’implique juste généreusement (« J’ai fait De Toi Mon Collabo »).

Comme à l’habitude, les Parisiens cognent et giflent sur des textes précis et convaincants, où les phrases fortes sont légions et résonnent comme des slogans (« Dobermann », « Humiliation », « La Caste », « Bulldozer »). Dans une période très incertaine, NO ONE livre son album le plus politique, dénonce et appelle clairement au réveil et au sursaut (« We Are Big Brother », « Polit Blitzkrieg », « Les Hyènes De L’Info »). Puissant et très organique, « Ennemis » est la claque qu’on attendait et les concerts s’annoncent torrides (« Aux Armes, Aux Décibels »).

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Hard Rock Rock

Danko Jones : la preuve par trois

Toujours aussi Rock dans le fond comme dans la forme, le combo canadien reste sans concession et accrocheur sur ce « Power Trio », qui met en exergue la mature-même de sa composition et, au-delà, cette capacité électrique à frapper façon uppercut avec une efficacité redoutable. DANKO JONES monte au front et semble aiguisé comme jamais, l’année de ses 25 ans d’existence.

DANKO JONES

« Power Trio »

(Mate in Germany/Tonpool)

L’explosif groupe de Toronto signe un dixième album en forme d’hommage. Un hommage direct et sans concession aux formations qui ont marqué l’histoire du Rock et du Hard Rock et qui, comme DANKO JONES, évolue sous le mythique line-up de power trio. Une formule brute dont Motörhead, ZZ Top, Venom ou Jon Spencer Blues Explosion sont des références absolues. « Power Trio » sent la poudre et percute à tout-va. 

DANKO JONES (guitare, chant), toujours accompagné de John, ‘JC’ Calabrese (basse) et de Rick Knox (batterie), distillent toujours ce style Hard Rock très frontal à l’énergie Punk. Et c’est indéniable que les trois Canadiens savent y faire. Grosse rythmique et riffs assassins, tous les éléments sont là et très bien mis en valeur par la production d’Eric Ratz, déjà présent sur les albums « Wild Cat » et « Fire Music ».

Groupe de scène s’il en est et adepte des studios d’enregistrement à l’ancienne, DANKO JONES a presque du se faire violence et se plier aux exigences de la pandémie en composant chacun de son côté. Si la spontanéité du jeu en pâtit forcément, les morceaux, quant à eux, sont d’une vitalité et d’une dynamique irréprochables (« I Want Out », « Let’s Rock Together », « Start The Show », « Raise Some Hell »). Une belle claque !

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Extrême Heavy metal Metal

Artillery : à bout portant

Avec « X », les Danois d’ARTILLERY signent probablement l’une de leurs meilleures productions en quatre décennies assez mouvementées. Et le quintet scandinave continue de distiller un Heavy très Speed, tout en continuant à flirter franchement avec le Thrash de ses débuts. Plus mélodique et toujours tranchant, le combo bastonne de plus belle.

ARTILLERY

« X »

(Metal Blade Records)

Après deux splits en 40 ans de carrière et de longues périodes d’inactivité, le parcours d’ARTILLERY est aussi chaotique que sa musique est puissante. Initialement ancré dans un Thrash Metal qu’il a contribué à forger, le groupe a glissé peu à peu dans un Power Metal (le vrai, le noble ! Celui des Raven, Running Wild et consorts) très Heavy faisant la part belle aux mélodies massives et percutantes. Et depuis, le quintet danois n’a pas baissé la garde.

Malgré la perte de son guitariste Morten Stützer il y a deux ans, son frère Michael et le reste du groupe ont décidé de continuer l’aventure avec Kræn Meier pour livrer son dixième album, qui est sans doute l’un des meilleurs des Scandinaves. Sobrement intitulé « X », ce nouvel opus est produit par le très bon Søren Andersen, qui connait parfaitement ARTILLERY et qui a su en tirer le meilleur.

Toujours aussi Speed dans le ton et très fluides dans la forme, les nouveaux titres des Danois sont très Heavy et l’aspect intraitable des riffs reste d’une redoutable efficacité (« I’m Your Mind », « The Ghost Of Me »). Sans renier ce qu’il a toujours fait, le groupe se montre incisif et va à l’essentiel (« In Thrash We Trust », « Turn Up The Rage », « Silver Cross »). ARTILLERY a toujours les crocs et ça fait plaisir.