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Dark Blues Desert Rock

Jaye Jayle : cathartique

Malgré la pénombre dans laquelle nous plonge JAYE JAYLE avec « Don’t Let Your Love Life Get You Down », il en émane cependant une certaine lueur, comme une note d’espoir. Sur des sonorités empruntées au Blues, au Desert Rock et avec une touche Indie, le songwriter Evan Patterson se livre avec émotion dans un opus tourmenté.

JAYE JAYLE

« Don’t Let Your Love Life Get You Down »

(Pelagic Records)

Chaque production de Pelagic Records réserve son lot de surprises et n’étant pas spécialement adepte des différentes formations d’Evan Patterson (Young Widows, Total Concrete), la qualité des sorties du label allemand m’a convaincu de poser les oreilles sur le quatrième album solo de l’artiste sous l’entité JAYE JAYLE. Et ne connaissant pas non plus ses précédentes réalisations, c’est une sorte de saut dans l’inconnu… enfin, pas tout à fait, non plus.

Dès le très Doorsien « Warm Blood And Honey » qui ouvre l’album, j’avoue avoir été séduit par le climat et l’ambiance du morceau. Et la suite est toute aussi intéressante. Si l’on pense tout de suite au regretté Mark Lanegan, JAYE JAYLE ne prend pourtant aucun parti-parti. Au contraire, il pioche autant dans le Desert Rock, le Psych Rock que dans le Dark Blues, mais sans y plonger véritablement. C’est là aussi peut-être toute sa force.

Lancinant et introspectif, « Don’t Let Your Love Life Get You Down » est une partition très personnelle de la part du chanteur et guitariste du Kentucky, qui joue énormément sur les atmosphères tout en livrant des textes bien ciselés. Si l’ambiance est assez feutrée, la noirceur qui l’accompagne ne manque pas de poésie (« The Part Of Redemption », « That Snake Bite », « Tell Me Live », « The Florist »). L’univers de JAYE JAYLE est saisissant et demande aussi plusieurs écoutes.

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Metal

Nita Strauss : guitariste caméléon

Particulièrement bien entourée, NITA STRAUSS signe pourtant son deuxième album en solo. Loin d’être seule donc, on retrouve pas moins de neuf chanteuses, chanteurs et musiciens invités sur les 14 titres de « The Call Of The Void ». La six-cordiste parcourt de nombreux courants du Metal de manière très judicieuse, explosive et avec panache. Très bien produite, cette nouvelle réalisation la fait sortir un peu de sa zone de confort et elle s’en accommode très bien.

NITA STRAUSS

« The Call Of The Void »

(Sumerian Records)

Doll Metal pour certains, virtuose pour d’autres, une chose est sûre : NITA STRAUSS ne laisse ni indifférent, ni insensible. Guitariste du grand Alice Cooper à qui elle doit l’essentiel de sa notoriété, et aussi dorénavant de Demi Lovato (!), l’Américaine est tout de même parvenue à donner une suite à « Controlled Chaos », son premier album sorti en 2018. Pour « The Call Of The Void », elle a misé sur les collaborations et la liste est très attractive et à dominante féminine pour les voix.

Musicalement et grâce aux nombreux invités, NITA STRAUSS propose un très large éventail au point que les styles se bousculent un peu. Hormis les morceaux sans la présence de guests et qui sont instrumentaux, il n’y a donc pas vraiment d’unité artistique sur « The Call Of The Void ». En revanche, sa faculté d’adaptation et la facilité avec laquelle elle se fond dans tous ces registres est plus que bluffante et confirme son grand talent. Elle sait tout faire et la démonstration est saisissante.

Les compositions instrumentales montrent une NITA STRAUSS au jeu très varié, à la fluidité et à la dextérité exemplaire. Sans être trop shred, elle impose son feeling avec classe (« Summer Storm », « Kintsugi »). Outre les très bons titres avec Lisa White-Gluz (« The Wolf You Feed »), Lzzy Hale (« Through The Noise »), on retiendra notamment « Victorious » chanté par Dorothy, « Winner Takes All » par le maître Alice Cooper et le duo avec Marty Friedman. Un bel et éclectique album de Metal.

Photo : Edwin Daboub
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Contemporary Blues

Monster Mike Welch : in full light

Il est l’un des bluesmen les plus brillants de sa génération et malgré tout, il est aussi d’une discrétion presqu’indécente. MONSTER MIKE WELCH impressionne autant qu’il séduit le monde du Blues depuis presque trois décennies. Enregistré en Californie, « Nothing But Tim » est l’un des disques les plus personnels de l’artiste du Massachussetts et il éblouit par la classe qu’il diffuse.

MONSTER MIKE WELCH

« Nothing But Time »

(Gulf Coast Records)

Surnommé ‘Monster Mike’ à l’âge de 13 ans par Mr Dan Aykroyd des légendaires Blues Brothers, MIKE WELCH a depuis fait du chemin et mené une belle et grande carrière. Originaire de Boston, le guitariste, chanteur et songwriter marque de son empreinte le Blues contemporain qu’il parvient à rendre lumineux grâce à son inimitable signature électrique et un toucher unique, qui le rend si identifiable.

« Nothing But Time » est son huitième album sous son nom, mais MONSTER MIKE WELCH est un musicien plus que chevronné de la scène Blues américaine. Multi-nominé et récompensé à plusieurs reprises, il a œuvré entre autres plus de 15 ans au sein de Sugar Ray And The Bluetone et enregistré avec de nombreuses pointures du genre. Ayant combattu un Covid long pendant de très longs mois, il pensait son avenir incertain, et pourtant…

Présentant 14 morceaux, dont deux reprises de Robert Johnson, une de George Harrison et un autre de Buddy Guy, le virtuose brille surtout sur ses propres compositions, où sa dextérité et son feeling célèbrent la beauté du Blues (« Walking To You Baby », « I Ain’t Sayin’ », « Losing Every Battle », « Hard To Get Along With », « Jump For Joy »). MONSTER MIKE WELCH fait un retour rayonnant et son jeu est juste exceptionnel. Une merveille !

Photo : Jo Welch
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Classic Rock Rock Rock Progressif

Songs For An Angel : une émotion intacte

Tous ses amis n’avaient évidemment pas pu figurer sur le premier « Tribute To Eric Bouillette », alors une deuxième réalisation s’imposait, afin que toutes et tous puissent faire un ultime clin d’œil à leur ami et musicien, dont la générosité et l’amitié manquent. SONGS FOR AN ANGEL n’a rien de larmoyant, même s’il est touchant, et il en ressort une douce sensation exacerbée par le talent des artistes présents.

SONGS FOR AN ANGEL

« Tribute to Eric Bouillette Vol. 2 »

(FTF Music)

Quelques mois après la sortie d’un premier volume très réussi, SONGS FOR AN ANGEL complète avec ce second volet le bel hommage rendu à Eric Bouillette après sa disparition. Là encore, on y retrouve ses complices, compagnons de route et membre d’une famille musicale, qui est décidemment très nombreuse. Assez différent de son prédécesseur, celui-ci s’inscrit dans un style qui ressemble beaucoup plus aux dernières inspirations et créations du Niçois.

Cette fois encore, c’est cet élan spontané et très sensible qui donne ce splendide éclat à l’album. SONGS FOR AN ANGEL ne se contente pas de raviver le souvenir du multi-instrumentiste d’exception, il rayonne par l’absence de calcul et l’absolue sincérité des participants. Et si chacun a composé et enregistré son morceau de son côté, il règne une réelle harmonie et une unité artistique surprenante, compte tenu des différents registres.

Comme sur le premier disque, Eric, sa guitare et son violon sont présents sur plusieurs morceaux et le plaisir est intact. Il est bien sûr difficile de mettre en avant certains titres plus que d’autres sur ce SONGS FOR AN ANGEL aux multiples saveurs. Chacun fera ses choix, même si on peut retenir quelques moments forts comme les prestations de Riccardo Romano Land, Hogan’s Hooligans, F.A.C.E., XCIII, AchElas, Colin Timpson et No Limits. Un beau partage.

Pour vous procurer l’album :

https://www.helloasso.com/associations/ftf-music/boutiques/ftf-label

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Blues Blues Rock Contemporary Blues

Joanna Connor : solaire

Généreuse et entière, JOANNA CONNOR ne fait pas que jouer du Blues : elle le vit. Pour preuve, une discographie enflammée et un jeu qui ont fait d’elle une guitariste hors du commun. Sur « Best Of Me », elle a laissé beaucoup de place à des bluesmen qui rendent encore plus magiques des morceaux plein de nuances et d’euphorie et qu’elle guide de sa voix envoûtante et de sa slide débridée.

JOANNA CONNOR

« Best Of Me »

(Gulf Coast Records)

Lorsque j’ai interviewé JOANNA CONNOR il y a deux ans alors qu’elle sortait son 14ème album, « 4801 South Indiana », sur le fraîchement créé label de Joe Bonamassa, KTBA Records, j’avais découvert une chanteuse et une guitariste dotée d’un feeling et d’une énergie phénoménale. La native de New-York, installée à Chicago depuis des décennies, prenait alors un envol mérité en se plaçant au sommet des Charts Blues US pendant un bon moment et en récoltant de multiples récompenses.

Dans la foulée, on l’avait même vu faire une courte, mais explosive, apparition dans le film « Deep Water » (à voir d’ailleurs !) avec Ben Affleck l’an dernier. S’en était suivi une flopée de concerts et on retrouve aujourd’hui JOANNA CONNOR sur le label Gulf Coast Records, ce qui peut sembler étonnant vu l’essor de celui de l’homme au costume. Et sur « Best Of Me », l’Américaine est toujours aussi pétillante avec ce côté sauvage et irrésistible qui a fait sa réputation. 

Et quoi de mieux que d’inviter quelques amis pour montrer le ‘meilleur d’elle’ ? JOANNA CONNOR a donc convié les guitaristes Joe Bonamassa, Josh Smith, Gary Hoey et Mike Zito et le feu d’artifice est majestueux. L’harmonica de Jason Ricci fait aussi des merveilles et l’unité affichée par tout ce beau monde montre une passion commune et surtout une envie de partager cette joie si communicative et authentique. La reine de la slide fait vibrer sa Gibson comme jamais !

Photo : Maryam Wilcher

Retrouvez l’interview de JOANNA CONNOR :

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Hard Blues Hard Rock Heavy metal

Phil Manca : un élan plus Metal

Guitariste complet au toucher inimitable et producteur-arrangeur aguerri, PHIL MANCA a multiplié les expériences dans une vie d’artiste bien remplie. Depuis quelques années, c’est en solo qu’il donne librement court à son inspiration, et il s’échappe ici un temps du Blues Rock pour voguer cette fois sous des cieux Hard et Metal avec ce très bon « Layers Of Pain ».

PHIL MANCA

« Layers of Pain »

(Tremolo Prod/Kuroneko)

Après avoir sévi chez TNT, Sortilège, Era et réalisé plusieurs bandes originales de films, le guitariste rentre du Canada où il était parti enregistrer les neufs morceaux de son nouvel album, « Layers Of Pain ». Après « Signs » (2019) et « Dancing Spirits » (2021) qui étaient plutôt dans une veine Blues Rock musclé, PHIL MANCA durcit encore un peu plus le ton et livre un disque de Hard Rock aux tonalités très Heavy.

Entouré d’Eric Lafont à la batterie, de Chris Danetz à la basse et également à la co-production et de Josselin Jobard qui offre une superbe prestation au chant, le musicien, qui assure aussi les claviers et qui a co-produit et arrangé l’ensemble, montre beaucoup de polyvalence. Que ce soit à travers des titres où il passe de riffs bruts en passages assez shred, PHIL MANCA affiche un panel très large.

Si « Layers Of Pain » est costaud, il reste bien sûr quelques lueurs bluesy, dont on se délecte toujours. Grâce à un frontman qui s’adapte très facilement aux multiples ambiances en offrant une vraie couleur au disque, on passe avec fluidité d’un Hard Rock assez classique à un autre plus mélodique et accessible avant de revenir à des compos nettement plus Heavy (« The Race Is On », « Flat Brains », « Night Stalker », « High And Short »). Efficace.  

Photo : Christophe Crenel
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Classic Rock Hard Rock Rock US

Janet Gardner & Justin James : rockin’ together

Fraîche et entraînante, cette nouvelle galette de JANET GARDNER et JUSTIN JAMES donne enfin tout ce que l’on attend d’eux depuis le début. Autour des deux guitares, de solides compositions font corps sur ce « No Strings » direct, sans fioritures et qui brille aussi par ce son si organique qui manquait jusqu’ici. La frontwoman offre la pleine mesure de ses capacités vocales et son alter-ego des solos spontanés, très relevés et le tout avec un naturel dont ils ont fait leur marque de fabrique.

JANET GARDNER & JUSTIN JAMES

« No Strings »

(Pavement Entertainment/Frontiers Music)

Depuis 2017 maintenant, l’ex-Vixen a entrepris, et de belle manière, une carrière solo en étroite collaboration avec son guitariste et producteur de mari JUSTIN JAMES. Après un premier album éponyme un peu poussif, puis « You Place In The Sun » en 2019, JANET GARDNER a enfin trouvé sa voie depuis le très bon « Synergy » sorti il y a trois ans et depuis lequel le duo affiche ses deux noms sur des réalisations qui s’affirment vraiment.

Pour rappel, JUSTIN JAMES a également travaillé avec Staind, Collective Soul et Tyketto entre autres, avec qui il a pu élaborer son travail d’ingénieur, ce que l’on perçoit sans mal sur la très bonne production de ce quatrième album, qui est véritablement celui de la maturité pour le couple. JANET GARDNER affiche une voix qui se polit avec le temps et qui a considérablement gagné en puissance, mais aussi en variation et en émotion.

Porté par ses racines musicales américaines, le groupe (car il s’agit aujourd’hui d’un quatuor) ne s’interdit rien et campe sur la base d’un Rock US ferme et délicat empruntant aussi au Classic Rock, au Hard Rock et au Blues. Avec « No Strings », GARDNER & JAMES évoluent avec une honnêteté et une authenticité sans faille (« I’m Livin’ Free », « Set Me Free », « Into The Night », « She Floats Away », « Don’t Turn Me Away », « 85 »). Une réussite !

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Blues Contemporary Blues folk

Ashley Sherlock : elementary

Rayonnant et positif, ce premier album de l’Anglais ASHLEY SHERLOCK est une vraie petite merveille. Aussi à son aise en électrique qu’en acoustique, le musicien de Manchester combine avec talent des élans musclés très Rock avec des instants suspendus où le Blues et la Folk se tiennent côte à côte dans une chaleur et une communion qui font de « Just A Name » un magnifique disque.

ASHLEY SHERLOCK

« Just A Name »

(Ruf Records)

Il n’aura fallu que deux EP (l’un éponyme en 2019 et « If You’re Listening » en 2021) à ASHLEY SHERLOCK pour taper dans l’œil de Ruf Records et se joindre à son beau catalogue. Il faut dire que le songwriter a fait les choses dans les règles, à l’ancienne, en écumant les scènes intensément pour aguerrir son jeu et bien mesurer l’impact de ses compositions. Et le résultat est là avec ce resplendissant « Just A Name ».

Accompagné de Charlie Kay (basse) et Danny Rigg (batterie), c’est donc en trio que se présente le chanteur et guitariste avec un Blues Rock accrocheur, qui laisse cependant beaucoup de respiration. Entre riffs appuyés et accords plus délicats, ASHLEY SHERLOCK propose un univers très varié et assez éloigné des standards classiques notamment dans les sonorités, qui balaient un large spectre.

Le registre est résolument britannique dans le style et le Mancunien y a injecté de multiples influences, dont certaines assez étonnantes. « Just A Name » évolue dans un périmètre dans lequel se côtoient le Blues bien sûr, mais aussi le Rock, le Hard version acoustique et une Folk façon Jeff Buckley, jusque dans sa voix tout en nuances. ASHLEY SHERLOCK signe ici et déjà un grand album.

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Cinematic France Rock Progressif

Orpheum Black : une émulsion tribale [Interview]

Toujours autoproduit, ORPHEUM BLACK continue de faire grandir son univers, tant musicalement que visuellement. Après le très bon « Sequel(s) » où l’on a pu découvrir un groupe très créatif et assez singulier, « Outer Space » prend des chemins de traverse sans pour autant renier cet esprit très progressif à l’œuvre depuis le début. Aujourd’hui, le quintet a renouvelé sa rythmique et un souffle nouveau apparaît à travers des morceaux toujours aussi soignés. Entretien avec Romain Clément, guitariste du quintet orléanais.  

Photo : Chloé Dauma

– Lors de notre dernière interview pour la sortie de « Sequel(s) », vous affirmiez vraiment votre style, ainsi que votre démarche, après un premier EP très réussi. On se retrouve donc pour « Outer Space », qui est très différent. S’il en reste quelques bribes, j’ai l’impression qu’il est moins progressif. C’était votre intention de faire encore évoluer la musique d’ORPHEUM BLACK ?

J’ai surtout le sentiment que le terme de musique progressive est un peu à la mode et utilisé un peu rapidement. Justement, je crois que le fait que ce nouveau disque soit différent du précédent rentre bien dans l’idée d’une esthétique ‘progressive’.

Au départ, le groupe s’est forgé sur l’idée de mixer les disciplines artistiques et de proposer à chaque sortie quelque chose de différent, mais de cohérent dans notre univers. A chaque fois, nous cherchons à renouveler la formule afin de proposer une expérience nouvelle. Nous n’avons pas envie de proposer le même disque. C’est quelque chose de très important, car cela permet de garder une vraie émulsion et stimulation lors de la conception d’un album.

Je pense que la différence notable vient vraiment que nous avons axé la composition autour du duo vocal. L’idée était de rapidement capter l’attention de l’auditeur sans pour autant rogner sur la partie instrumentale. Parce que, si on regarde le disque dans son ensemble, il n’y a pas beaucoup de morceaux avec une structure conventionnelle type couplet/refrain.

En résumé, on peut dire qu’on offre une musique qui est accessible, mais qui reste très travaillée sur les arrangements.

– Même s’il y a toujours ce gros travail sur les arrangements et qu’on découvre un peu plus vos morceaux au fil des écoutes, je trouve que les mélodies notamment sont plus efficaces et que votre jeu est aussi plus direct. Il y avait un désir de proposer quelque chose de plus accessible ?

Nous avons cherché à mieux capter l’attention lorsqu’on écoute notre musique. Nous avons davantage travaillé nos top-lines et je pense que c’est ce qui rend nos morceaux plus efficaces. L’arrivée de Nathan à la basse dans le groupe a aussi apporté ce côté plus direct. Il vient d’une musique plus extrême et plus directe. En peu de temps, il a su influer cet esprit plus tribal et c’est une facette vraiment complémentaire de ce que nous proposions jusque-là.

Photo : Chloé Dauma

– L’autre spécificité également sur « Outer Space », c’est ce changement de rythmique avec l’arrivée d’un nouveau bassiste et d’un nouveau batteur. Est-ce que ça a aussi modifié la dynamique du groupe et peut-être l’exploration de nouveaux tempos ?

En fait Alexis, le nouveau batteur, nous a rejoint après l’enregistrement du disque, lorsque nous avons terminé la tournée dédiée à « Sequel(s) ». Sur « Outer Space », c’est la présence de Nathan qui est à remarquer. Je pense sincèrement que l’on a trouvé le line-up qui pourra écrire l’histoire d’ORPHEUM BLACK. On a beaucoup de retours très enthousiastes depuis la reprise des concerts sur ce nouveau duo basse/batterie. Ils ont dépoussiéré les morceaux et y ont apporté beaucoup de dynamisme et de contraste. C’est un vrai plaisir de jouer avec eux et j’ai hâte d’écrire de la nouvelle musique ensemble.

– Sur « Sequel(s) », je trouvais que vos voix jouaient beaucoup sur le contraste, tandis que cette fois, on a le sentiment que vous avez plutôt cherché l’harmonie et la complémentarité. L’idée était qu’elles se fondent et qu’elles prennent le relais entre elles, tout en faisant corps aussi ?

Exactement, sur « Sequel(s) », nous avions cherché à démarquer le plus possible les deux voix. Finalement, on s’est rendu compte que parfois ça perdait un peu les gens en rendant les mélodies moins instinctives. Sur « Outer Space », nous avons totalement revu la façon de les travailler. Nous avons voulu leur donner plus de liant et de cohésion tout en leur donnant plus de place dans l’espace sonore. Un peu comme avec deux guitares qui se complètent, mais qui forment un tout.

– Sur ce nouvel album, et même s’il reste quelque solos très Heavy, il y a nettement moins de sonorités Metal. L’ensemble contient aussi plus de moments presque contemplatifs. Vous avez effectué un travail plus important sur les atmosphères pour « Outer Space » ?

Clairement, on a composé cet album comme la bande originale d’un film. Les auditeurs en sont les protagonistes. On a aussi envie de se démarquer de la proposition musicale Metal que l’on écoute tous au sein du groupe. Les phases très ambiantes de certains morceaux permettent à chacun de se projeter et d’imager sa propre histoire. La production du disque y joue aussi un grand rôle. Par exemple, « Inner World » est joué sur une guitare sept cordes et est construit sur un vrai riff Metal. Pour autant, on lui a donné une esthétique plus Rock et électronique. On a envie de surprendre !

Photo : Chloé Dauma

– Le premier album était basé sur un concept global avec même certaines reprises mélodiques sur certains titres. Qu’en est-il de « Outer Space » ? Vous l’avez composé et conçu sur le même schéma ?

« Outer Space » est la suite et la conclusion du travail entamé sur « Sequel(s) ». Les clips sont d’ailleurs liés et vont nous permettre de clore ce chapitre de l’histoire d’ORPHEUM BLACK avant d’aborder de nouveaux thèmes et histoires. Au contraire du précédent opus, les morceaux sont toujours liés par leur thème, mais ils peuvent être écoutés indépendamment les uns des autres. La tracklist, même si elle est réfléchie d’un point de vue musical, n’a plus de lien chronologique en termes de storytelling.

– J’aimerais que tu me dises un mot au sujet de « My Tribe », un morceau que vous avez dédié à votre public. C’est une démarche assez particulière. C’est une idée qui est venue spontanément ?

L’idée de ce morceau est née durant notre précédente tournée, qui nous a permis de jouer partout en France. Nous en avons profité pour tester nos nouveaux morceaux et nous avions envie de faire participer le public. « My Tribe », par son refrain hyper fédérateur, est vraiment devenu un moment très important et efficace de nos concerts. Lorsque tu pars loin de chez toi toutes les semaines, tu perds certains liens avec tes amis, tes proches, ta famille. Du coup, c’est le public qui remplit ce rôle de lien social et qui devient en quelque sorte une nouvelle famille. Pour la petite histoire, « My Tribe » s’intitulait au départ « Outer Space ». C’est la tournée qui nous a permis de lui trouver son titre définitif.

– Enfin, comme pour « Sequel(s) », les univers du théâtre et du cinéma sont encore étroitement liés sur « Outer Space », d’où est aussi né un court-métrage en deux épisodes. Concevez-vous les deux exercices en même temps et comment cela se passe-t-il au niveau de l’écriture du scénario, du tournage et de la réalisation ?

On ne pense pas directement aux vidéos lorsque l’on compose nos morceaux. Une fois qu’on a tout le contenu sous la main, on prend le temps de la réflexion pour voir lesquels seraient les plus impactants. La mise en production de nos vidéos est un vrai travail en collaboration avec le réalisateur. On choisit avec qui on travaille en fonction de ce que l’on souhaite, mais aussi selon leurs sensibilités. On échange beaucoup sur le scénario et l’ambiance globale, mais on laisse une grande liberté aux équipes. On sort un vrai court-métrage pour accompagner la promotion de l’album. C’est très stimulant et excitant. Pour un projet comme le nôtre, c’est plus de dix jours de tournage dans cinq lieux différents. C’est énormément de boulot, mais nous sommes très fiers du résultat !

Retrouvez la première interview du groupe réalisée à l’occasion de la sortie de « Sequel(s) » :

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Blues Rock Folk/Americana France

Gaëlle Buswel : good vibrations [Interview]

Quelques jours après la sortie de son « Live At Abbey Road Studios », c’est une GAËLLE BUSWEL heureuse à qui j’ai eu le plaisir de poser quelques questions. Sorti uniquement en numérique, l’album a initialement été conçu à l’intention de ses fans, afin de les remercier de leur fidélité. Mais face à l’engouement qu’il rencontre, une réflexion sur une sortie physique serait à l’étude. Car, quelle meilleure preuve de son existence pourrait-on envisager de plus évidente ? Très attachés aussi à l’objet, la chanteuse et ses musiciens y réfléchissent…

Il y a quelques jours, GAËLLE BUSWEL était également l’invitée de la légende Georges Lang pour les 50 ans de ses mythiques « Nocturnes » sur RTL. Elle y a joué en direct et parler aussi de ce live acoustique, bien sûr. Si les bonus tracks de « Your Journey » dévoilaient déjà une partie des enregistrements londoniens du groupe, ils sont ici complétés par quelques morceaux, dont une étonnante reprise. Des instants que l’on pourra d’ailleurs découvrir très bientôt dans un documentaire.

Nouvel entretien avec une artiste spontanée et pétillante, dont la vie prend par ailleurs d’autres beaux tournants…

– On sent beaucoup de décontraction sur ce live et aussi beaucoup d’application dans votre interprétation à tous. On a presque l’impression qu’à Abbey Road, on n’est pas tellement là pour rigoler ! C’est difficile de faire abstraction du poids historique musical de l’endroit ?

Ce studio dégage énormément d’énergie de par son histoire avec toutes les légendes qui sont venues enregistrer là-bas. Quand tu descends les escaliers, quand tu rentres dans une pièce et même à travers les murs, on revit chacun de ces instants. Et au moment où tu fais ta première note, quand tu enregistres ton premier morceau, qui était « Selfish Game » pour nous, on se sent vraiment tout petit. J’avais l’impression que c’était la première fois que j’enregistrais une chanson. C’était assez bizarre. On était tous très concentrés, et en même temps une symbiose s’est créée. On était vraiment tous ensembles, très attentifs les uns aux autres. On s’est dit qu’on avait deux jours ici et qu’il fallait qu’on vive chaque seconde, chaque instant, parce qu’on y reviendrait pas tous les jours !

Jamais, dans une vie d’artiste indépendante, j’aurais pensé venir un jour mettre les pieds dans ce studio et en plus le faire avec une équipe avec laquelle je joue depuis 12 ans maintenant. C’était vraiment magique de pouvoir le faire ensemble. Aujourd’hui encore, j’ai du mal à mesurer la chance qu’on a eu. C’est très, très puissant de jouer dans un tel endroit. Même si en France et en Europe, il y a d’autres ingénieurs du son, d’autres studios tout aussi excellents, Abbey Road représente tout le côté mythique des gens qui y sont passés. Ils y ont tous laissé une partie de leur âme.

– La grande majorité des morceaux sont issus de tes trois derniers albums en plus de « Lovely Lie » que je ne connaissais pas, et on en retrouve une grande majorité aussi en bonus tracks sur « Your Journey ». Comment les avez-vous sélectionnés ? C’était un choix établi dès le départ ?

Au départ, on pensait ne pouvoir enregistrer que trois ou quatre titres. On avait juste deux jours et avec le temps de l’installation, l’inconnu vers lequel on se dirigeait avec d’éventuels problèmes techniques qui peuvent prendre du temps, même si c’est du live, c’était assez court. La plupart des versions que nous avons gardées sont en fait les versions ‘one shot’. Certains morceaux ont été joués deux/trois fois maximum et souvent on a gardé la première version. On voulait vraiment quelque chose d’instantané.

Le choix des morceaux a été assez évident. Je tenais absolument à jouer « Selfish Game », qui est un morceau très fort pour moi, qui a une histoire très importante et je voulais que ce soit la première que l’on joue. Ensuite, tout s’est fait très naturellement. On avait bossé « Help » des Beatles, car c’était une évidence. C’est un titre qui nous a emmenés dans ce studio et que je joue depuis mes débuts.

Et il y avait aussi « Lovely Lie » qu’on n’avait pas mis sur l’album « Your Journey » et que l’on a repris en acoustique cette fois. Tout a été très spontané, y compris la reprise en français. On s’est dit qu’à Abbey Road, ce serait bien de jouer un titre en français et puis les gens n’ont pas l’habitude de m’entendre chanter dans notre langue. Tout a été très évident dans ce qu’on a fait en abordant d’autres versions que sur l’album, de les adapter en acoustique et surtout ce sont les morceaux que je voulais absolument jouer là-bas, vraiment. Il n’y a eu aucun calcul, on s’est vite mis d’accord.  

Au final, il nous restait une demi-journée, ce qui n’était pas prévu ! On s’est dit qu’on allait faire « 25 Hours » et « Black Delta Dirt » qui nous ont accompagnés et réunis. Et c’était super de pouvoir faire tout ça. Je parle beaucoup, hein ?! (Rires)

– Et il y a aussi cette reprise du morceau de Gainsbourg chanté par Vanessa Paradis, « Tandem ». Là, on sent clairement de la décontraction dans l’air. C’est un choix étonnant quand on connait ta discographie, même s’il est très bien réarrangé. D’où est venue l’idée ?

C’est un morceau que je chantais toute jeune, avant même de faire des compos. J’essayais de faire des choses en français. Gainsbourg est quelqu’un que j’aime énormément dans l’écriture et qui était l’un des rares à arriver à faire sonner des mots en français de manière anglophone. Il y a un choix dans les mots et dans les mélodies qui était très fort. Et dans la chanson française, j’adore Francis Cabrel et Vanessa Paradis, car ce ne sont pas des chanteurs à voix, mais ils savent faire sonner leurs mots. Et Vanessa Paradis ne se trompe jamais dans le choix de ses textes et cela ne touche sincèrement.

Ce morceau de Gainsbourg, « Tandem », m’avait fasciné et ça reste l’une des chansons que j’aime le plus en français. Et c’était aussi un clin d’œil de l’enregistrer à Abbey Road, comme pour dire que l’on n’oublie pas d’où l’on vient, car ce sont aussi des choses qui ont forgé l’artiste que je suis aujourd’hui. On a essayé d’en faire une version à notre sauce, très roots, dépouillée et surtout on s’est fait plaisir à le faire ! On l’a d’ailleurs enregistré le dernier après-midi.

– C’est un morceau en français et on te sent très à l’aise, autant qu’en anglais. Reprendre une chanson est une chose et un contexte particulier et peut-être plus facile d’ailleurs, mais aimerais-tu à l’avenir écrire aussi des textes en français ?

Tu sais, je n’ai jamais été fermée à chanter en français. Pour le moment, je n’ai pas encore trouvé la recette magique qui nous ressemble pour faire ce que l’on fait actuellement. On essaie de temps en temps de travailler sur des choses, mais je ne trouve pas que ce soit assez représentatif de ce que l’on fait. Naturellement, comme j’ai grandi avec toute cette musique américaine et anglophone et avec cette langue-là, c’est plus spontané en anglais. C’est vrai que c’est paradoxal de dire ça, car ce n’est pas ma langue maternelle.

C’est plus évident pour moi de faire sonner ce que l’on fait en anglais, ainsi que dans l’écriture à travers mes collaborations avec la parolière Angela Randall et avec Neil Black aussi. C’est plus naturel pour moi dans un premier temps. J’ai écrit énormément de choses en français et je trouve que ça ne me ressemble pas. La langue française est pourtant magique. Peut-être que c’est quelque chose que je n’assume pas encore. Je me laisse le temps pour ça. Il vaut mieux faire les choses que l’on a envie de faire. Il faut que les chansons nous habitent et qu’on ait envie de les transpirer sur scène et de les partager.

Photo : Christie Goodwin

– Après cette belle pause, tu vas reprendre les concerts et les festivals pointent aussi le bout de leur nez. Même si cela a du être un bonheur de rester éloignée de la scène, j’imagine que tu dois être impatiente de reprendre la route et de retrouver ton public ?

C’est vrai que ça nous a fait une petite pause, mais c’était pour la bonne cause ! (Sourires) Et je suis très heureuse d’avoir pris ce temps-là pour mon bébé, car c’est important et je veux la voir grandir. C’est aussi une nouvelle partie de ma vie avec des émotions nouvelles. Mais je suis aussi très heureuse de retrouver le public et de pouvoir mêler ma nouvelle vie de maman et de musicienne. Les tournées vont reprendre et je vais également pouvoir en profiter pour voir mon bébé grandir. Et je suis ravie de pouvoir partager tout ça sur scène avec toute mon équipe. On s’est manqué, mais on s’est beaucoup vu pendant cette période où on ne jouait pas !

– Enfin, c’est sûrement un peu tôt, mais est-ce que tu as déjà ton prochain album dans un coin de la tête, d’autant que l’on sait que certains événements de la vie apportent très souvent un supplément de créativité ?

Et oui, figure-toi ! Quand j’ai appris que j’étais enceinte l’année dernière, je me suis dit que ma vie allait être chamboulée et qu’une nouvelle arrivait aussi. J’ai dit aux garçons qu’il fallait qu’on s’organise et qu’on se projette. J’avais envie qu’on écrive, qu’on compose et j’ai essayé d’anticiper beaucoup de choses. On a beaucoup composé en amont et, en fait, une nouvelle source d’inspiration est arrivée. Alors, entre deux biberons et quand elle s’endort, j’écris énormément et je me remets à composer.

Mais j’ai aussi envie de me laisser le temps pour ça, car je découvre de nouvelles émotions en moi, que j’ai envie de dire et tout se fait naturellement. On a beaucoup de choses dans les tuyaux, mais il n’y a pas de sortie d’album prévue à une date précise. On travaille sur beaucoup de choses avec la maison-de-disques aussi. C’est une grande aventure familiale qui se met en place et c’est vraiment super ! On n’a pas de date encore, mais on est en plein dedans ! (Rires)

Ce très bon « Live At Abbey Road Studios » (Verycords) de GAËLLE BUSWEL est disponible sur toutes les plateformes : https://gaellebuswel.lnk.to/AbbeyRoad

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