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Hard Rock International

D-A-D : institutionalized [Interview]

Ces cinq dernières années sont probablement les plus créatives de D-A-D depuis un bon moment. Même si la formation de Copenhague est restée fidèle à ce Hard Rock si californien, le définissant presque comme le plus américain des groupes scandinaves, elle semble surfer aujourd’hui sur la vague d’une inspiration retrouvée. Dynamique et accrocheur, le quatuor y va même de son premier double-album en 40 ans de carrière et le musée national de la capitale danoise lui a même dédié une exposition relatant sa belle aventure. Autant d’évènements sur lesquels revient Jesper Binzer, heureux frontman d’un groupe qui mesure sereinement le chemin parcouru et le travail accompli…

– Avant de parler de ce nouvel et double album, j’aimerais que tu me dises quels sentiments t’ont traversé lorsque le ‘Danish National Museum’ a décidé de vous consacrer une exposition pour célébrer les 40 ans du groupe en mars dernier ? C’est quelque chose d’assez exceptionnel, j’imagine, que de devenir une institution dans son pays ? 

Lorsque le Musée National du Danemark nous a demandé si nous souhaitions participer à une exposition D-A-D pour célébrer les 40 ans du groupe, nous avons commencé par rire ! Sommes-nous désormais devenus des pièces de musée ? (Rires) Il s’avère que oui et c’était un grand honneur et beaucoup de travail aussi. Ils ont eu leur façon de communiquer dessus et nous avons eu la nôtre. Mais nous avons trouvé un terrain d’entente et cela s’est avéré être un très grand moment de culture contemporaine, avec tout ce que nous avons pu traverser et transmettre à travers notre musique dans le temps.

– Autre moment fort de cette année en plus de cette exposition, c’est ce concert que vous avez donné au ‘Planetarium’ à Copenhague, qui est l’endroit où se trouvait l’emblématique théâtre ‘Saltlageret’ et où D-A-D a donné son tout premier concert. Est-ce que c’est la date la plus excitante, et émotionnellement la plus forte, de cette tournée avec ce que cela représente ?

Remonter dans le temps est bien sûr le mot d’ordre lorsqu’il s’agit d’un 40ème anniversaire. Donc jouer un concert au sommet des ruines du lieu de l’un de nos premiers concerts était une excellente idée. Et comme le nouvel album a une pochette très spatiale et lointaine avec le crâne de vache en guise de météore, c’était parfait pour coller au thème. Doublement parfait, en fait… (Sourires)

– Parlons de « Speed Of Darkness », votre treizième album, qui se trouve aussi être votre premier double-album. Qu’est-ce qui pousse une formation reconnue comme la vôtre à sortir un tel disque dans une époque où le streaming est devenu envahissant ? Peut-être un peu de nostalgie par rapport au vinyle et à vos débuts, où ce genre de production n’était pas rare du tout ?  

En fait, nous avons passé beaucoup de temps à composer et à nous amuser ensemble. A tel point que c’était difficile de choisir les morceaux à la fin… Après, chacun peut écouter tout ce qu’il veut aujourd’hui avec le streaming, c’est vrai. Mais le vinyle est aussi quelque chose de spécial pour beaucoup de nos fans…

– Justement, depuis la sortie du très bon « A Prayer For The Loud » en 2019, où on vous avait retrouvé très inspirés, vous avez composé 40 chansons pour n’en garder que celles qui figurent sur « Speed Of Darkness ». Comment expliques-tu cette grande créativité de ces dernières années ? Y a-t-il eu un déclic entre vous ? Quelque chose de particulier et de déclencheur ?

Pour être honnête, il a fallu très longtemps pour que ce déclic arrive. Nous avions composé au moins une dizaine de chansons, qui étaient fondamentalement nulles. Mais nous avons continué et insisté, même si rien de génial n’est apparu immédiatement. Je pense que le déclic a eu lieu début 2023. À ce moment-là, nous étions en répétition depuis plus d’un an déjà. Au final, ce sont l’astuce, la persévérance et le travail acharné, bien sûr associés à une certaine forme de confiance en nous, qui nous ont aidés à y parvenir.

– 2024 marque donc le quarantième anniversaire de D-A-D et l’on ne peut que saluer une telle longévité, d’autant que votre line-up n’a pas bougé depuis les débuts en dehors de l’arrivée de Peter Lundholm en 1998, il y a 26 ans déjà. C’est aussi ça le secret du groupe ? D’être restés unis et avec une idée commune de la musique que vous avez toujours souhaité faire ?

J’imagine que nous avons la chance d’avoir un objectif commun. Sans doute aussi avons-nous peut-être eu une bonne éducation ? Il faut beaucoup d’introspection pour pouvoir non seulement voir les défauts des autres, mais aussi essayer de  changer soi-même parfois. Mais je pense aussi que c’est principalement parce que nous nous offrons la possibilité de pouvoir toujours façonner le Rock dont nous rêvons. La communion entre nous est parfaite et nous savons tous comment faire un super riff bien Rock… (Sourires)

– Vous avez également fait appel à Nick Foss, qui vous connait très bien, pour produire « Speed Of Darkness ». On y retrouve vraiment ce qui fait l’essence-même de D-A-D, c’est-à-dire un son à la fois puissant et moderne, mais paradoxalement très intemporel. L’objectif était-il de réaliser une sorte de synthèse musicale et sonore de votre carrière à l’occasion cet anniversaire ?

En fait, nous avons simplement composé beaucoup de chansons. Ensuite, plus nous nous sommes impliqués, mieux nous avons su qui nous sommes aujourd’hui. On ne voulait pas non plus être des copies, ou des parodies, de nous-mêmes, mais créer un D-A-D nouveau et amélioré.

– L’album contient des morceaux très directs, parfois assez épurés puisqu’ils ne sont pas surproduits justement. C’est vers cette efficacité que vous tendiez dès le début ? Ecrire et jouer des chansons fraîches, directes et accrocheuses ? Retrouver les fondamentaux du Hard Rock comme on le jouait dans les années 90 et avec l’esprit d’aujourd’hui ?

C’est vrai que nous avons travaillé dur et, au fil du temps, notre confiance en nous a grandi. Cela dit, nous ne pouvons pas nier que nous sommes aussi des témoins de l’évolution du Rock. Nous avons donc essayé de maintenir notre meilleur côté au goût du jour, c’est-à-dire en restant très actuel, tout en conservant l’énergie de nos débuts.

– Justement, où est-ce que vous vous situez aujourd’hui sur la scène Hard Rock en tant que précurseurs du genre ? Quel regard portez-vous sur la nouvelle génération et vous sentez-vous aussi dépositaires d’un certain héritage musical ?

Nous sommes un vieux groupe de ‘Punk Rock’ dans l’âme et cela nous permet de rester authentiques ! (Sourires) Nous savons que la mélodie et l’énergie sont les deux choses les plus importantes dans notre musique et dans cet ordre-là. Et puis, avoir des fans fidèles, notamment dans notre pays, constitue également une grande partie de notre travail au fil des années. Nous sommes constamment en dialogue avec eux et avec ce qui se passe autour de nous. Aujourd’hui, nous restons curieux de voir ce que l’avenir nous réserve… (Sourires)

– La tournée a déjà commencé et elle doit avoir une saveur particulière, d’autant que vous êtes aussi réputés pour être un groupe de scène redoutable. Sortir un double-album et fêter en même temps ses 40 ans d’existence peuvent avoir des avantages et quelques inconvénients… Comment choisir vos meilleures chansons dans un tel répertoire ? Vous allez donner des concerts de quatre heures ?

Je ne pense pas que nous ferons un jour un concert de quatre heures ! (Rires) C’est vrai que nous avons environ 200 chansons que nous pourrions jouer sans même les répéter. En l’occurrence, et comme il s’agit de concerts anniversaires sur la tournée, nous jouerons environ cinq nouvelles chansons au milieu des classiques. Notre objectif est surtout de délivrer beaucoup d’énergie sur scène.

– Enfin, à l’écoute de « Speed The Darkness », D-A-D apparait avec une incroyable fraîcheur et surtout beaucoup d’envie. Et on a le sentiment que vous n’êtes vraiment pas prêts de lever le pied et qu’au contraire, ce nouvel album vous a donné un nouveau souffle et qu’il a presque un effet ‘fontaine de jouvence’ sur vous. C’est le cas ?

L’expérience de l’exposition au Musée National nous a permis d’apprendre à mieux connaître notre passé. Nous avons passé des nuits là-bas à regarder de vieilles photos des premiers albums et des concerts de D-A-D. Nous avons aussi pu observer et écouter beaucoup d’enregistrements et de documentaires. Tout cela nous a apporté un nouveau regard et aussi une certaine douceur de voir ce que nous avons réellement accompli pendant 40 ans. Et puis, c’est vrai que nous sommes dans une bonne phase en ce moment… (Sourires)

Le nouvel et double-album de D-A-D, « Speed The Darkness » est disponible chez AFM Records.

(Photos : Søren Alfred Olsen)

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Glam Rock

Starcrazy : fun injection

Les Australiens ont toujours eu d’excellents représentants dans le vaste monde du Rock brut et instantané avec un petit côté vintage savoureux, une petite madelaine qu’on déguste sans sourciller. Et c’est exactement ce qui se produit avec STARCRAZY qui, malgré sa jeunesse, a opté pour un Glam Rock réoxygéné, mélodique et percutant. Après deux formats courts, c’est avec un dix titres complet qu’il donne sa vision très neuve et clinquante du genre. Et c’est une réussite.

STARCRAZY

« Starcrazy »

(Independant)

Fondé il y a seulement quatre ans à Sydney, STARCRAZY fait déjà beaucoup parler sur son île-continent et les concerts à guichets fermés attestent de l’élan pris par le groupe. Après deux EPs, « Played For Suckers » (2021) et « Another Day, Another Squalor » (2023), place enfin à ce premier album éponyme, véritable concentré d’énergie positive. En s’engouffrant dans un Glam Rock coloré et punchy, le quatuor avance un pied dans les années 70/80 et l’autre solidement ancré dans son époque avec une approche très actuelle.

Si on pense, par réflexe, à T-Rex et Alice Cooper, voire Cream et Poison, il faut bien reconnaître que STARCRAZY s’en démarque aussi habillement grâce à une dynamique et surtout un son très moderne. Irrévérencieux à souhait, il se présente avec une réalisation  très mature, très bien produite et qui libère une fraîcheur pleine de vigueur et d’une douce sauvagerie. Le petit côté rétro planant sur « Starcrazy » va même plus loin qu’un simple effet revival. Le style ici ne manque pas d’originalité et encore moins d’impact.

A la fois glamour et déjà charismatique, STARCRAZY offre une explosion de riffs aiguisés et des refrains entêtants à des morceaux qui accrochent immédiatement. Dès les premières notes de « The Fire », on entre dans le vif du sujet, puis « I Feel Free », « What’s Worth », « Nighttime », « Ain’t That Crazy ? », « Fanzine » » et « Jar Of Dirt » valident l’ensemble. En marge, le combo n’élude pas quelques belles ballades, preuve qu’il maîtrise son propos avec beaucoup de personnalité. Un premier effort très concluant et pour le moins audacieux.

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Modern Metal

Never Obey Again : insoumission assumée

Bien Heavy et pas trop sophistiqué étant donné le registre, NEVER OBEY AGAIN a trouvé le bon équilibre entre des titres où pourraient régner les machines et une dominante Metal bien musclée et massive. Avec « Trust », les Milanais affichent un Modern Metal efficace et racé. Jouant autant sur les émotions que sur le côté rageur de leurs compos, ils occupent le terrain depuis peu de temps et ne semblent pas prêts à lâcher l’affaire de sitôt. Une confirmation à coups de marteau.

NEVER OBEY AGAIN

« Trust »

(Scarlet Records)

Un an presque jour pour jour après la sortie de « The End Of An Era », NEVER OBEY AGAIN revient déjà à la charge et ses intentions sont claires. Encore plus aguerrie, la formation menée par sa charismatique chanteuse Carolina Bestelegni livre un deuxième album explosif, direct et compact. Même si le Modern Metal des Italiens comporte beaucoup d’éléments Electro, ce sont bel et bien les deux guitares et la paire basse/batterie qui occupent l’espace sonore et donne à « Trust » son aspect organique.

NEVER OBEY AGAIN colle à son époque et, malgré les claviers et les boucles synthétiques, on parle encore ici de Metal. Et de ce côté-là, le travail des deux six-cordites offre beaucoup d’intensité et de puissance à ces nouveaux morceaux. Certes, on pense à Halestorm, Evanescence, Spiritbox et In This Moment, mais la frontwoman du quintet apporte justement une touche personnelle, grâce à une palette vocale assez impressionnante. Capable de nous emporter sur de belles harmonies, elle sait aussi montrer les crocs.

Sur une production massive, « Trust » se déroule façon montagnes russes entre riffs acérés et lourds et une rythmique véloce, qui ne manque pas de férocité. Avec beaucoup de profondeur, la chanteuse du groupe fait une belle démonstration de force entre refrains clairs et mélodiques et de sauvages screams aux accents parfois MetalCore (« Never Feel, Never Fear », « I Wish », « Control », « Lost… »). Le spectre est large et Alessandro Tuvo et Alex Pedrotti imposent un mur su son implacable. NEVER OBEY AGAIN grandit vite !

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Chicago Blues Contemporary Blues

Ronnie Baker Brooks : un inestimable héritage

Tout petit déjà, Muddy Waters et Willie Dixon faisaient partie de son entourage, ou plutôt de celui de son père, autre légende disparue en 2017. Alors, bien évidemment, RONNIE BAKER BROOKS a le Blues le sang, il n’en serait être autrement. Guitariste virtuose et très polyvalent, il est également un chanteur hors-pair et nous porte de sa voix chaleureuse et légèrement voilée. Pour son cinquième album, l’Américain mélange émotion et percussion avec ce tranchant propre à Chicago avec un naturel absolu, qui fait perdurer le mythe avec classe. 

RONNIE BAKER BROOKS

« Blues In My DNA »

(Alligator Records)

Affirmer qu’on a le Blues dans son ADN lorsqu’on s’appelle RONNIE BAKER BROOKS est un doux euphémisme. Fils du grand Lonnie Brooks, il a fait ses armes à ses côtés en devenant rapidement son deuxième guitariste après une enfance passée au son des notes bleues. En 1988, il fait même sa première apparition sur l’album « Live From Chicago : Bayou Lightning Strikes » et dix ans plus tard, il fonde son propre label, Watchdog Records, sur lequel il sort trois albums (« Gold Digger », « Take Me Witcha » et « The Torch »).

Après un passage chez Provogue pour « Times Have Changed », il intègre aujourd’hui les légendaires Alligator Records pour un disque qui est finalement un incroyable témoignage de son parcours. Et pour l’accompagner, Will Macfarlane (guitare), Dave Smith (basse), Steve Potts (batterie), Rick Steff (claviers) et Clayton Ivey (orgue Hammond) font rayonner ce superbe « Blues In My DNA », composé entièrement par RONNIE BAKER BROOKS, à l’exception de « All true Man », co-écrit avec ‘Big Head’ Todd Mohr. Du beau monde !

La mise en bouche très funky de « I’m Feeling » annonce une suite très éclectique dans un Contemporary Blues, tout en maîtrise et où chacun y va de son feeling personnel pour donner vie à ce nouvel opus. Sensible sur « My Love Will Make You Do Right » et « Accept My Live », RONNIE BAKER BROOKS fait état de ses nombreuses qualités de guitariste, bien sûr, mais aussi de chanteur. Souvent enrobés de cuivres, certains titres sont d’une profondeur électrisante (« Stuck on Stupid », « My Boo », « Blues In My DNA »). Magnifique !

(Photo : Jim Summaria)

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Metal Progressif

DGM : conceptuel

Les maîtres incontestés du Metal Progressif italien ont décidé d’occuper le terrain et on ne les arrête plus. A raison de deux sorties en quelques mois seulement, on pourrait les croire à court d’imagination, ou plus simplement quelque peu rassasiés, mais il n’en est rien. DGM n’entend pas ralentir la cadence et lorsqu’on écoute ce nouvel effort, on peut se dire qu’ils en ont encore sous le pied… et pour un bon moment ! Captivant du début à la fin, « Endless » est assez inédit pour la formation dans son contenu et c’est ce qui fait tout son attrait.  

DGM

« Endless »

(Frontiers Music)

L’adjectif qui revient sans doute le plus souvent au sujet des Transalpins est ‘impressionnant’. Et sur « Endless », ils le sont encore. Un an à peine après le très bon « Life », ils livrent un album-concept. Etonnamment, c’est même le premier de leur discographie longue de douze opus et il s’agit aussi peut-être d’un des plus variés du quintet. Certes, on y retrouve toujours la patte de DGM, à savoir un style très dynamique aux envolées époustouflantes, mais il se distingue également par un nombre assez conséquent de passages acoustiques et purement Rock Progressif. Et là encore, ils excellent.

Orchestré par le maestro qu’est le guitariste et compositeur Simone Mularoni, « Endless » est bien entendu une réalisation très vive, éclairée par des mélodies et une technique d’une justesse incroyable. Si d’autres, dans le même style, donnent parfois l’impression d’en faire trop, c’est rarement le cas avec DGM, qui a su imposer son style depuis ses débuts. On retrouve donc cette atmosphère propre à ses productions, faite de ponts multiples, de breaks surprenants, de duels entre les claviers et la guitare et les apparitions toujours bien senties de la flûte qui offrent un petit côté intemporel dans cette vélocité très moderne.

Au chant, Marco Basile confirme qu’il est l’un des meilleurs chanteurs de la ‘Botte’. Irrésistible, il alterne les moments calmes et intenses avec une aisance bluffante. S’il aura fallu plus de 30 ans à DGM pour réaliser son premier album-concept, alors que c’est presque la norme en matière de Prog, le groupe se montre à la hauteur de l’exercice avec un déroulé très narratif, qui tient en haleine et se montre limpide dans son interprétation. Sur près d’une heure, on retiendra quelques moments forts comme « The Great Unknow », « Solitude », « From Ashes » et le magistral « … Of Endless Echoes », long de 14 minutes.   

(Photo : Matteo Ermeti)

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Heavy Blues Rock

Red Giant : insaisissable

Entre Rock brut, Heavy Blues et même Pop très British, RED GIANT présente un style, qui peut au départ décontenancer, mais qui devient très vite familier et attachant. Grâce à un frontman au caractère bien trempé et à une paire basse/batterie qui en impose, les Anglais montrent toute leur expérience et surtout un sens du songwriting étonnant et irrésistible. « Red Giant » est une réalisation à la production brute et virevoltante avec une assise solide, qui lui permet bien des écarts, toujours bien négociés.

RED GIANT

« Red Giant »

(Radio Silent Records)

Bâti autour de Dave Simpson, auteur-compositeur, guitariste et chanteur, RED GIANT est le nouveau combo du musicien, qui a déjà fait ses preuves et écumé les scènes du Royaume-Uni avec le Dave Simpson Trio et qui a décidé de prendre une direction artistique nouvelle. Sur ce premier opus éponyme, il a donc fait appel à John Joe Gaskin à la batterie, qui martèle avec un groove pour le moins massif ces nouvelles compositions. Première bonne pioche, puisque la seconde est la jeune bassiste Carina Powell, dont l’impact et la technique éclaboussent littéralement les morceaux. Le duo rythmique fait plus que de tenir la maison.   

Cependant, il y a eu un changement majeur dans le line-up actuel du groupe, car si Carina assure ici la basse et les chœurs, elle a quitté le groupe après l’enregistrement de « Red Giant » et a été remplacée pour le moment pour quelques concerts par Keira Kenworthy, une jeune bassiste de talent également, qui officie chez JoanOvArc. RED GIANT est donc d’humeur assez changeante. Et c’est un peu à l’image de cet opus, où s’entrechoquent des titres très Rock, Heavy Blues ou d’autres carrément dans la droite lignée d’une Pop anglaise convenue, sirupeuse et facile (« Why ? », « What It All My Fault ? »).

Mais au regard de l’album, il s’agit de détails, puisque les trois Britanniques livrent aussi et surtout des chansons très bien écrites, pleines d’émotion et avec un état d’esprit sauvage, tout en étant très sensible (« Tell Me », « Free Me », « The Dark Of Me », « You Say, I Say » et le bluesy « What You Gonna Do ? »). Assez introspectif, RED GIANT joue sur la corde raide avec talent et une efficacité redoutable, qui ne l’empêche pas de se montrer aussi très fin dans une interprétation parfois rugueuse. En jouant la carte de l’authenticité, au niveau des textes comme de la musique, « Red Giant » se montre complet et rafraîchissant.   

Dave Simpson (guitare, chant), John Joe Gaskin (batterie) et Carina Powell (basse, chœurs), qui a malheureusement quitté le trio, mais dont la prestation est exceptionnelle.

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Dark Folk

Thee Old Night : une lueur apaisante

Dans un climat très minimaliste, le trio offre un style très organique, essentiellement acoustique, qui ne met pas très longtemps à captiver. En tout cas, entre la Caroline du Nord, le Michigan et la Virginie, la connexion est établie et ce petit côté ‘au coin du feu’ donne une dimension étonnante à cette première réalisation des Américains. THEE OLD NIGHT a parfaitement su créer un environnement assez éthéré et pourtant d’une grande richesse artistique. Un charme mélodique ensorceleur.   

THEE OLD NIGHT

« Thee Old Night »

(Firelight Records)

C’est une Dark Folk mélancolique et très attachante que présente THEE OLD NIGHT sur son premier effort éponyme. Et l’histoire du trio en elle-même n’a rien d’ordinaire, non plus. Le projet est né de l’imagination et de la créativité d’Erik Sugg, qui fut le temps de trois albums et d’un EP, le leader, chanteur et guitariste de Demon Eye. Aujourd’hui dissous, le combo de Rayleigh, NC, a laissé de très bons souvenirs aux amateurs de Heavy Doom et il est même à ranger aux côtés des légendes du registre.

Mais même s’il persiste toujours quelques touches doomesques chez le songwriter, c’est un tout autre chemin qu’il emprunte ici en plongeant dans ses racines musicales profondes, faites d’éléments psychédéliques, de Folk légèrement bluesy et de Country classique avec une noirceur enveloppante et, finalement, assez réconfortante. Car « Thee Old Night » n’a rien de lugubre et ne baigne pas non plus dans une tristesse absolue. Au contraire, il y a quelque chose de contemplatif et de méditatif chez THEE OLD NIGHT.

Et pour mener à bien cette nouvelle aventure, Erik Sugg a fait appel à la talentueuse violoncelliste Anne Polesnak. Elle apporte beaucoup de relief aux chansons grâce à un jeu de grande classe. Puis, c’est Kevin Wage Inge, rockeur dans l’âme, qui enveloppe de sa steel guitare et de claviers des ambiances assez atmosphériques, qui viennent compléter le spectre musical de THEE OLD NIGHT (« Precious Blood », « The River The Mountain », « Red Light Crimson », « Sibyl » et « Darling » avec l’irrésistible trémolo dans la voix). Envoûtant.

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Psych Sludge Stoner Doom

Oda : mystic vibes

Fait-maison et enregistré live pour l’essentiel, ce premier opus des trois musiciens de la capitale devrait ravir les amateurs de Stoner Doom/Sludge. Les atmosphères vaporeuses un brin incantatoires de « Bloodstained » montrent déjà un groupe déterminé et adepte des morceaux d’une bonne longueur. En abordant des climats très changeants, ODA évite pourtant de se perdre et se montre même vraiment costaud et captivant. Des débuts très encourageants.

ODA

« Bloodstained »

(Independant)

Fondé en 2021 seulement, Cyril Thommered (batterie), Emmanuel Brège (basse) et Thomas Féraud (chant, guitare) n’ont pas tardé à se mettre à l’ouvrage et à construire leur propre univers musical. Le fond est Doom et Occult, tandis que la forme se dessine dans un Stoner Rock rugueux et très Fuzz. L’objectif d’ODA est d’assembler toutes les pièces de cet appétissant puzzle et de donner vie à des morceaux qui sont autant d’invitations à un voyage à la fois sombre, chaotique et envoûtant.

Tout en travaillant d’arrache-pied et en donnant quelques concerts, le trio parisien se forge vite un son et une identité. Avec « Bloodstained », ODA s’affirme déjà comme une formation solide et cette première réalisation autoproduite en dit long sur ses ambitions. Enregistrée au coeur de la forêt de Brocéliande, l’ambiance mystique qui l’entoure semble même avoir offert un supplément d’âme à l’atmosphère profondément mélancolique et terriblement organique, qui règne sur les six titres.

Oscillant entre six et onze minutes, les morceaux de « Bloodstained » réservent quelques surprises. Si la lourdeur et l’épaisseur de sa doublette rythmique donne du corps, le côté massif bascule d’une lenteur ténébreuse dans des fulgurances Sludge au groove gras, d’où émerge au lointain un chant tout à coup presque délicat. Inquiétant et âpre, ODA ne néglige pas pour autant les mélodies… comme pour mieux nous renvoyer dans les cordes (« Children Of The Night », « Rabid Hole », « Mourning Star » et le saisissant « Zombi »). Prometteur !

(Photo : Thomas Féraud)

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Alternative Rock

Smash Atoms : back in town

Dix ans après un split assez surprenant, SMASH ATOMS raccroche les wagons et livre donc, et enfin, sa première réalisation. Sobrement intitulée « Smash Atoms », la formation américano-suédoise ne lésine pas sur les riffs costauds, les solos limpides, des parties vocales impactantes et une rythmique fiévreuse et plus appuyée que véloce. Ça martèle donc, et plutôt bien. Si les clins d’oeil aux années 90 ne manquent pas, on retient plutôt l’aspect moderne des compos, un petit côté underground savoureux aussi, et des morceaux entêtants. Après un faux départ, espérons que celui-ci soit le bon !

SMASH ATOMS

« Smash Atoms »

(M-Theory Audio)

L’histoire de SMASH ATOMS est assez atypique. Créé en 2012 du côté de Göteborg, le groupe commence par sortir une première démo, très bien reçue et qui lui ouvre la voie à plusieurs scènes. Une joie de très courte durée puisque son chanteur, l’Américain Glen Gilbert, quitte le navire, laissant ses trois camarades dans le flou. Qu’à cela ne tienne, ceux-ci fondent The Torch, qui sort deux albums, et leur vocaliste s’active de son côté chez The Story Behind et Hide The Knives. Mais en 2022, coup de théâtre, Martin Söderqvist (guitare), Per Romvall (basse) et Peter Derenius (batterie) retrouvent leur frontman et l’histoire reprend là où elle en était, mais sur de nouvelles bases artistiques.

Revoici SMASH ATOMS sur de bons rails et dans un registre qui a forcément évolué avec le temps pour s’inscrire aujourd’hui dans un Alternative Rock légèrement teinté de Grunge, dans ce qu’il possède de mieux interprété (ça raccourcit la liste !). Le quatuor se présente donc dans un style qui serait une sorte de pont entre Seether et Alter Bridge d’un côté, et Stone Temple Pilots et Soundgarden de l’autre. Cependant les Suédois et l’Américain affichent des morceaux très frais, bien Heavy aussi notamment dans des guitares inspirées du Hard Rock nordique, donc mélodiques, dans les solos surtout. Et toutes ces influences cohabitent très bien et offrent un disque rondement mené.

Parfaitement ancré dans son époque, on doit aussi cette très bonne production aux studios Crehate de leur ville, dont la réputation n’est plus à faire tant les grands noms s’y succèdent. La puissance du son est au rendez-vous et se déverse jusque dans les onze titres de cet effort éponyme. Mais la première chose qui surprend après l’écoute intégrale de « Smash Atoms » est qu’il est presqu’entièrement joué en mid-tempo, alors que la course au Bpm est souvent monnaie courante à l’heure actuelle. Et c’est plutôt bien vu de la part de SMASH ATOMS, qui peut se focaliser sur la force des textes (et de la voix !) et le côté massif des riffs. Un opus très rafraîchissant aux refrains accrocheurs.

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Heavy Stoner Rock Stoner Rock

Planet Of Zeus : force brute

Avec « Afterlife », les Athéniens donnent l’impression de rendre hommage aux années 90, celles qui les ont musicalement nourris et aussi profondément impactés. Et c’est probablement pour ça que cette nouvelle réalisation semble si familière, tant dans les références perceptibles que dans le style très reconnaissable de PLANET OF ZEUS. Cela dit, les gros riffs sont légions, la rythmique lourde et compacte et le frontman toujours aussi percutant.

PLANET OF ZEUS

« Afterlife »

(Ihavedrum Records)

Fer de lance de la scène Stoner grecque aux côtés de 1000Mods, Nightstalker et plus récemment d’Acid Mammoth pour la partie la plus Doom, PLANET OF ZEUS s’est forgé une solide réputation bien au-delà de ses frontières et en tournant avec les plus grands. Explosif en concert, en plus de deux décennies, le quatuor s’est hissé au rang des incontournables du genre, grâce à un style massif et puissant, et surtout très identifiable. Pourtant, avec « Afterlife », il déjoue tous les pronostics avec un album surprenant.

En effet, Babis Papanikolaou (chant, guitare), Stelios Provis (guitare, chant), Giannis Vrazos (basse) et Serafeim Giannakopoulos (batterie) prennent un virage assez différent, marqué par des mélodies entêtantes omniprésentes et surtout une variété musicale étonnante. Preuve d’un éclectisme créatif très maîtrisé. C’est vrai que dans son domaine, PLANET OF ZEUS sait à peu près tout faire… et « Afterlife » confirme ses qualités et nous offre un plongeon dans un Stoner Rock assez 90’s dans son approche, et bien rentre-dedans.

Ce sixième album traverse à peu près tous les courants et parcourt des atmosphères diverses. Classique dans la lignée de QOTSA (« State Of Non-Existence »), Grunge façon Foo Fighters (« The Song You Misunderstand »), plus Heavy aux accents Fu Manchu (« Step On, Skin Off »), PLANET OF ZEUS reste pourtant lui-même et laisse exploser sa force (« No Ordinary Life », « Let’s Call It Even », « Letter To A Newborn »). « Afterlife » n’est peut-être pas le plus passionnant opus du quatuor, mais il réveille les sensibilités.