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Heart Line : conquérant [Interview]

Deux ans après le début de l’aventure, HEART LINE n’a plus rien à prouver comme en témoigne la qualité artistique et technique des albums du quintet. Avec « Back In The Game » et plus récemment « Rock’n’Roll Queen », le groupe apporte beaucoup de fraîcheur et de modernité à un style qui peine pourtant à se faire une place en France. Cependant, les efforts des Bretons portent leurs fruits, puisque l’accueil de leurs deux réalisations est unanime et les projets ne manquent pas. Etat des lieux et plongée dans l’avenir de HEART LINE avec Yvan Guillevic, son guitariste, producteur et compositeur.  

Photo : Cédric Andreolli

– Lors de notre dernière interview à la sortie de « Back In The Game » il y a deux ans maintenant, on avait beaucoup parlé de la création du groupe et de vos objectifs. Quel bilan dresses-tu aujourd’hui de l’aventure HEART LINE ?

Le bilan est super positif, car on a fait deux albums en un an et demi et on a quand même réussi à tourner. D’ailleurs, nous sommes actuellement toujours sur la route. On a fait quelques festivals et d’autres arrivent bientôt. L’objectif premier, qui était de faire un vrai disque avec un vrai groupe et pas quelque chose de collaboratif, est rempli. On fait de la scène et des albums et nous allons également sortir, en accord avec le label (Pride & Joy – NDR), un EP en décembre. Nous sommes très contents, car l’accueil du deuxième album est encore meilleur que pour le premier et tout ça est vraiment très positif !

– Dès le début, vous avez signé chez Pride & Joy, label sur lequel vous êtes toujours bien sûr. Finalement avec le recul et les très bonnes retombées des deux albums, est-ce que tu penses qu’un label français aurait été aussi efficace ?

Non, car il n’y en a pas dans le genre de toute façon. Et puis, je n’avais pas du tout visé la France pour le premier album. On a juste contacté un gros label, et sur recommandation, qui nous a répondu des mois et des mois plus tard. Alors que sur 10/12 envois ciblés, j’ai eu des réponses positives et il n’a fallu que six jours pour signer avec Pride & Joy ! Le constat est là et je crois que la France n’est toujours pas concerné par le Rock/Hard mélodique et c’est toujours aussi compliqué. Donc, je pense que nous avons eu raison de signer là-bas.

Photo : Steph Pictures

– Justement pour rester sur la France, on sait que le style n’a jamais eu de représentants ayant percé ou marqué les esprits, même à la grande époque. Je pense que HEART LINE possède très largement tous les atouts pour tenir cette place. Quelles seraient les choses à améliorer ici, selon toi ?

C’est compliqué, en fait. Par exemple, on a le ‘Hellfest’, qui est un festival énorme et il y a un gros réservoir de personnes qui écoutent du Metal en France. Ce n’est pas comme si on n’en écoutait pas. En gros, ce sont les médias, qui ne s’intéressent absolument pas à ce genre de musique. De temps en temps, pour faire un petit sujet, ils vont te parler de Metallica ou de Gojira, puisque c’est le seul groupe français vraiment costaud dans le monde. On a de très bons groupes, de très bons musiciens, ce n’est pas le souci. Mais pour les gros médias, ça reste quelque chose de bizarre, d’un peu rigolo et il n’y a donc aucun support. La France n’est pas un pilier Rock. Dès qu’on se promène ailleurs, on le voit bien. Quand on entre dans un bar ou un hôtel, on entend du Rock et du Hard Rock, mais pas chez nous. On est vraiment sous-représenté, et notamment en termes de Hard Rock.

– Malgré deux très bons albums, c’est dommage que HEART LINE ne tourne pas plus dans l’hexagone. Ne serait-ce pas le bon moment pour vous d’aller voir à l’étranger, dans des pays plus demandeurs ?

On a eu quelques opportunités qui ne se sont concrétisées, mais qui étaient vraiment réelles. Aujourd’hui, on en a d’autres. Je ne veux pas en parler tant que ce n’était pas fait, mais il ya des choses très intéressantes, qui sont en route en Europe. On travaille actuellement beaucoup là-dessus. Pour ce qui est de la France, le réseau est compliqué. La musique ici a toujours été un peu mise de côté. Pourtant, il y a du public. Il suffit de voir le ‘Hellfest’ une fois encore. Dernièrement, je suis allé voir Ghost à Rennes et c’était rempli ! Il y a des gens pour aller aux concerts, il faut juste les mobiliser.

Et puis, sans tirer dessus puisque j’ai eu un ‘Tribute Band’ pendant un moment, les organisateurs ne prennent plus aucun risque et ils ne programment plus que ça. Donc, pour ceux qui font qui font de la musique composée, ça devient très difficile. C’est une vraie épidémie ! C’est un peu dommage, parce qu’ils feront quoi dans 10/15 ans ? Ils vont reprendre qui ? Il n’y aura plus personne ! (Sourire) C’est un peu ce qu’on vit en France, car les organisateurs vont au plus simple. Il n’y a plus de recherche d’artistes, comme il pouvait y en avoir avant. Il reste bien sûr des festivals et des programmateurs qui jouent le jeu. Mais c’est vrai pour tout le monde, et pas uniquement pour nous, à ce niveau-là.

Photo : Mat Nina Studio

– Revenons à « Rock’n’Roll Queen » qui, musicalement et au niveau de la production aussi, élève encore le niveau d’un cran. Est-ce que sa conception et sa réalisation ont suivi le même processus que pour « Back in The Game » ?

Oui, c’est exactement le même processus et la même façon de réaliser. Cette fois, on a eu plus de temps, on a été plus attentif aussi pour ne pas refaire les mêmes petites erreurs que sur le premier. « Back In The Game » est très frais, rapide, composé en trois semaines et enregistré assez vite. Il y avait un côté très intéressant qu’on ne regrette absolument pas. Pour « Rock’n’Roll Queen », on voulait quelque chose de plus construit, de plus travaillé et surtout prendre notre temps. On a fait des concerts, des résidences et on se connait beaucoup mieux aujourd’hui. Cela nous a permis de nous focaliser aussi sur certains titres et travailler plus en profondeur nos morceaux.

– Et on te découvre aussi comme producteur, dorénavant confirmé. C’est un domaine dans lequel tu t’épanouies également ?

J’ai toujours produit mes disques et ça en fait beaucoup. C’est vrai que personne ne s’en est vraiment aperçu. Et on est aussi dans un métier où il faut commencer à savoir tout faire soi-même, car être dépendant des autres devient très compliqué. Et puis, j’ai toujours fait de la prod’ pour pas mal d’artistes. Cette fois et avec l’aide de Jorris Gilbaud, qui a une oreille en or, cela nous a permis d’affiner tout ça. La production est quelque chose que j’aime énormément et que je tiens à continuer de faire. Parfois, c’est un peu pénible de tenir les deux rôles, à savoir guitariste et producteur, mais au final, cela te permet aussi de contrôler l’ensemble. Car cela peut aussi arriver que, lorsque tu vas en studio et que tu laisses quelqu’un d’autre produire, tu perdes des choses. Mais pour HEART LINE, comme je sais que je veux entendre, je pense que c’est plus sage de rester le producteur du groupe.

Yvan et Patrick Rondat à l’Océanis de Ploemeur le 23 septembre dernier
Photo : YD – Photographies

– Patrick Rondat, grand guitariste et rare ‘guitar-hero’ français fait également une apparition sur l’album. Comment s’est faite votre rencontre ?

On se connait depuis très longtemps sur les réseaux, mais finalement sans bien se connaître. Et puis, je suis fan de sa musique et de son jeu. Je l’avais fait venir il y a plus de 20 ans dans un masterclass ici en Bretagne. D’ailleurs, je ne suis même pas sûr qu’il s’en rappelle ! En fait, c’est lui qui me l’a proposé. Il m’a dit qu’il avait beaucoup aimé le premier album et qu’il adorait ce genre de musique. Il voulait faire quelque chose sur le prochain disque et je n’ai pas été long à lui répondre que j’en serai ravi ! Pour être honnête, je ne suis pas trop fan des guests sur les albums. Quand il y en a trop, tu perds aussi de l’identité du groupe. Mais quand Patrick te propose de jouer sur ton album, tu te débrouilles ! (Sourire) On avait un morceau dans les tiroirs, qui pouvait parfaitement coller avec ce désir de Patrick de faire de l’AOR. Je lui ai envoyé le titre et il m’a très vite rendu sa partie. Tout s’est fait vraiment très simplement.

– Pour conclure, parlons un peu de cet EP prévu pour décembre. Quand penses-tu mettre tout ça en boîte, à moins que ce soit déjà fait, et quel en sera le contenu ?

Je ne peux pas en dire trop pour le moment, si ce n’est que ce sera un cinq-titre et que sa sortie est prévue pour le 8 décembre. Il n’est pas encore enregistré, nous allons le faire courant octobre et toujours chez Pride & Joy. Pour le reste, je tiens à garder un peu de suspense… (Sourire)

L’album « Rock’n’Roll Queen » de HEART LINE est toujours disponible chez Pride & Joy.

Retrouvez la première interview du groupe…

… et la chronique du nouvel album :

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France Metal

Darken : de l’ombre à la lumière [Interview]

Après un break de trois décennies, les Lavallois ont décidé de reprendre du service et l’idée est plutôt judicieuse. Après deux démos le siècle dernier, DARKEN réalise enfin son premier album, « Welcome To The Light », un titre en clin d’œil à une époque révolue. Révolue, car le quintet a fait sa mue pour revenir dans un Metal très moderne, toujours aussi Heavy et aussi mélodique que rentre-dedans. Très bien produite, cette nouvelle réalisation est annonciatrice d’un renouveau musical éclatant, ce que nous explique Lorenzo, guitariste et fondateur du combo mayennais.

– DARKEN a évolué entre 1987 et 1991 sur une scène française, qui a d’ailleurs beaucoup changé depuis. Quels souvenirs gardes-tu de cette époque-là ?

De très bons souvenirs, car c’était mon premier projet musical. Et puis, on a pu faire de bonnes scènes comme deux fois le festival à la Roche-sur-Yon avec Vulcain, Squealer, Loudblast, Massacra, No Return, Jumper Lace et tous les groupes qui tournaient à l’époque. Ce sont vraiment de bons moments. On avait aussi été jouer aux Pays-Bas, en Allemagne et on a fait le Gibus à Paris. Tout ça, quand tu es gamin et que c’est ton premier groupe, te donne l’envie d’aller plus loin.

– D’ailleurs, quelles ont été vos principales motivations pour reformer DARKEN ? Et avez-vous continué à faire de la musique tous les trois, même chacun de votre côté ?

De mon côté, j’ai toujours continué. Après DARKEN, j’ai monté ‘We Don’t Care’ sur Laval et ensuite, je suis allé sur Nantes pendant plusieurs années dans une autre formation, qui a sorti deux albums. Après tout ça, j’ai monté plusieurs groupes de reprises. Et comme j’avais un peu de matériel de côté, l’idée de remonter DARKEN a surgit et j’ai contacté Stéphane (le chanteur – NDR). Au départ, il n’était pas très chaud, car il n’avait pas chanté depuis 25 ans. C’est au moment du Covid, avec l’arrêt des concerts, que ça s’est débloqué. Avec Stéphane et Philos (guitariste – NDR), je me suis dit que ça pouvait repartir. On a fait quelques essais, j’ai embarqué mon fils Liam à la batterie et j’en ai parlé à HP (le bassiste – NDR) que je connais très bien. Et nous en sommes là avec la sortie de l’album !

– Est-ce que le fait que des groupes comme Titan ou ADX, par exemple, aient aussi repris du service a pu peser, même inconsciemment, dans la balance pour ce retour, d’autant qu’on assiste aujourd’hui à un nombre incalculable de sorties, qui nous font même frôler l’overdose ?

Pas du tout ! Je ne devrais peut-être pas dire ça, mais je n’ai jamais été très intéressé par la scène française, en fait. Ce ne sont pas des groupes que je suis et, pour certains, je ne savais même pas qu’ils avaient arrêté ou s’étaient reformés. Non, ça n’a eu aucune influence sur l’idée de reformer DARKEN.

– Après plus de 30 ans de silence, vous revoici avec votre premier album, « Welcome To The Light », où l’on retrouve donc trois membres fondateurs et deux petits nouveaux. Cela n’a pas été possible de reconstituer le line-up originel ? Et comment s’est effectué le recrutement de cette nouvelle rythmique ?

Non, puisque le batteur a arrêté depuis des années, je pense, car on ne se voit plus. Nous avons relancé le bassiste, Michael, mais il est reparti en Bretagne. Il était venu sur Laval, à l’époque, uniquement pour DARKEN. Il vit aujourd’hui entre Brest et Morlaix avec sa petite famille et il a aussi son groupe, plutôt axé Punk Rock. Ce n’était donc pas possible pour lui. Sinon, comme j’ai un batteur à la maison (Liam, batteur de Sujin – NDR), cela aurait été dommage de s’en priver. Et il a tout de suite été conquis à l’idée de jouer avec son père. Quant à HP (bassiste de The Discord – NDR), depuis le temps qu’on se croise, on avait vraiment envie de jouer ensemble.

– Votre dernière démo en 1991 s’intitulait « Welcome To The Dark » et cette fois-ci, vous souhaitez la bienvenue à la lumière. J’imagine que c’est en rapport avec votre retour sous les projecteurs ?

Oui, bien sûr, et « Welcome To The Dark » correspondait surtout à notre état d’esprit d’alors et ça ne l’est plus aujourd’hui. Alors, Stéphane a pensé à ce fil conducteur entre les deux époques, ce qui a donné « Welcome To The Light ».

– DARKEN distille toujours un Heavy Metal solide et, même s’il reste quelques sonorités 90’s, vous l’avez considérablement modernisé. S’il y a eu une évolution technique évidente ces dernières années (instruments, studios, …), est-ce que votre approche dans l’écriture a elle aussi changé ?

Oui, carrément ! A l’époque, on se retrouvait en répétition, on composait tous ensemble et ça allait forcément moins vite. Aujourd’hui, je compose les musiques à la maison, j’envoie tout ça à Stéphane, qui pose des lignes de chant jusqu’à ce que nous soyons satisfaits tous les deux. Ensuite, on envoie ça aux autres qui valident, ou pas, et posent leurs instrus. Je pense qu’on va beaucoup plus vite. Et puis, nous sommes dans un registre complètement différent aujourd’hui, car il était hors de question de refaire du vieux Heavy Metal. On se situe dans un style entre Modern et Alternative Metal…. En tout cas, c’est du Metal !

– Musicalement, il s’est passé beaucoup de choses en 30 ans dans le Metal avec l’émergence de nouveaux courants notamment. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué durant ces trois décennies et qui vous aurait peut-être influencé parmi ces nouveaux groupes et styles ?

Pour ma part, j’aime beaucoup la scène Grunge et notamment Alice In Chains. Korn a également apporté quelque chose de neuf et de différent. Ensuite, cela dépend du moment. Je peux écouter Pearl Jam aujourd’hui, et Rammstein demain. C’est très varié.

– « Welcome To The Light » comporte onze morceaux que vous êtes allés enregistrer dans le très bon studio du Dôme à Angers. Quelles étaient les conditions sine qua none lors de l’enregistrement de l’album ? Et êtes-vous pleinement satisfaits du résultat ?

La première condition était déjà d’être prêt pour entrer en studio. On y était déjà allé avec nos maquettes, qui étaient très abouties et presque trop propres. Et nous sommes hyper-satisfaits ! Cela va même au-delà de nos espérances. Quand j’écoute l’album aujourd’hui, j’étais loin de penser qu’on sortirait un tel produit. David Potvin, ingé-son du Dôme Studio, a fait un travail extraordinaire et on ne le remerciera jamais assez ! Pour relancer une machine comme DARKEN, qui est une petite machine à la base, il est parvenu à ressentir ce qu’on voulait, mettre l’ensemble dans des sonorités très actuelles, ce qu’on désirait absolument. On a vraiment insisté là-dessus, car on voulait éviter le côté Old School et vintage.

– D’ailleurs, vous n’avez pas attendu la sortie de l’album pour remonter sur scène. Pourquoi une telle impatience et avez-vous eu de bons retours ?

Il fallait absolument qu’on fasse cette date pour plusieurs raisons (concert à La Fabrique à Bonchamp-lès-Laval, le 18 mars dernier – NDR). C’est vrai qu’on était très impatient. Il y avait aussi de la demande par chez nous et nous avions besoin d’images pour la promotion du groupe. On n’avait rien en dehors de quelques photos et aujourd’hui, avoir une vidéo est devenu essentiel. Comme l’album n’était pas encore réalisé, nous n’avions pas de son, non plus. On s’est dit qu’il fallait faire un premier concert et le filmer. On a mis les moyens nécessaires et avec des gens qu’on connait. Il y avait plusieurs caméras, un drone et on a sorti quelques images de tout ça pour faire des petites vidéos de promo. Les retours ont été très bons. Les gens ont été surpris et tout s’est très bien passé que ce soit au niveau du son comme des lights. L’identité et la présence du groupe ont très bien fonctionné.

– Pour conclure, vous sortez « Welcome To The Light » en autoproduction. Vous n’avez pas voulu trouver de label, ou est-ce que vous teniez à garder les mains libres pour ce premier album, qui marque aussi et surtout votre retour ?

On y a pensé, bien sûr, et on regardé autour de nous ce qui se passait à ce niveau-là. On ne voulait surtout pas perdre de temps. Et qui aurait signé un groupe qui n’a rien à proposer et pas de dates de concerts ? On a donc décidé de partir en autoproduction pour le premier album et faire nous-mêmes nos vidéos, caler nos concerts et on verra ensuite si l’on peut signer sur un label digne de ce nom.

« Welcome To The Light » sera disponible à partir du 29 septembre sur le Bandcamp du groupe :

https://darken-official.bandcamp.com/

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Desert Rock Psych Rock 70's Stoner Blues

Dead Feathers : un total lâcher-prise

Car c’est suffisamment rare pour y être souligné, ce disque de DEAD FEATHERS est de ceux qui ne s’écoutent pas uniquement, mais qui se vivent, tant on est accroché par l’ampleur sonore que prennent les morceaux et la voix subjuguante de sa frontwoman. Avec « Full Circle », le groupe de l’Illinois s’impose comme un fer de lance du revival psychédélique, façon Rock, Blues et aux fulgurances Stoner et Desert.

DEAD FEATHERS

« Full Circle »

(Ripple Music)

Si pour beaucoup le Psychédélisme a disparu avec les années 70 dans sa forme originelle, qu’ils écoutent vite le nouvel opus des Américains de DEAD FEATHERS, car il incarne à lui seul non pas le renouveau, mais la version moderne du genre. Avec « All Is Lost » (2019), le quintet avait déjà posé les bases d’une musique à la fois captivante et terriblement rassembleuse. Et sur « Full Circles », il monte encore d’un cran grâce à des musiciens inspirés, précis et aux compositions très personnelles.

DEAD FEATHERS possède dans ses rangs un atout de charme et de choc avec sa chanteuse Marissa Welu, dont la voix puissante et sensuelle ouvre sur des territoires véritablement saisissants. L’émotion qu’elle apporte à ce deuxième album sublime des morceaux déjà portés par des atmosphères aériennes qui peuvent aussi se faire très Rock et plus âpres en lorgnant vers des contrées Stoner et Desert Rock. Et sur un groove constant et enthousiaste, « Full Circle » prend son envol dès les premières notes.

L’ouverture avec « Full Circle » nous transporte dans le monde hypnotique de DEAD FEATHERS et les guitares, a priori douces, deviennent vite fuzz en jouant sur les effets propres au Psych Rock. Très organique évidemment, la production ne trahit jamais les titres et au contraire leur donne un son clair et actuel. Tout est donc dans l’intention avec le combo de Chicago et c’est sans surprise que la longueur des certaine plages sont tout sauf formatées (« Daughter », « The Swell », « Robbery », « Galapagos »). Euphorisant !

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Hard FM

Vega : melody makers

Décidemment, le Hard FM (AOR, Melodic Hard Rock, etc…) est en pleine effervescence et surtout se découvre une seconde vie, nettement plus dynamique, audacieuse et technique qu’il a pu l’être durant son âge d’or dans les années 80/90. Et si VEGA profite de cet engouement, il est loin d’être un nouveau venu sur la scène Hard Rock. Créé en Angleterre il y a plus de dix ans, la formation présente un « Battlelines » généreux et solide.

VEGA

« Battlelines »

(Frontiers Music)

Fondé en 2009 par son chanteur Nick Workman, VEGA sort aujourd’hui son huitième album. Si les Britanniques ne bénéficient pas encore d’une grande notoriété dans le reste de l’Europe, ils peuvent compter sur une solde fan-base sur leur île, où ils enchainent les concerts. Et avec « Battlelines », le quintet pourrait se voir ouvrir des portes, d’autant que son Hard Rock mélodique à de quoi séduire de nouveaux adeptes au-delà de ses frontières.

Côté line-up, on note l’arrivée sur ce nouvel opus de Mark Trail à la basse, tandis que le groupe est stabilisé depuis 2020 et « Get Your Teeth » et « Anarchy And Unity ». Cet équilibre se ressent vraiment sur les morceaux de « Battlelines », composé par le leader du combo et Pete Newdeck, le batteur qui est aussi producteur. VEGA semble avoir trouvé un nouveau souffle, grâce à une remise en question étonnante.

Les deux guitaristes, Marcus Thurston et Billy Taylor, s’en donnent à cœur-joie et le travail sur les riffs, les chorus et les solos est remarquable. Entraînant et accrocheur, VEGA se montre costaud et les 12 titres devraient faire un carton sur scène (« Heros And Zeros », « Battlelines », « Don’t Let them See Your Bleed », « Run With Me », « Not Enough »). Très convaincant avec des mélodies aussi fédératrices, les Anglais viennent de frapper un grand coup.

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Hard Rock

H.E.A.T : the power of adrenaline

Présenté comme une compilation par plusieurs medias, « Extra Force » n’en a pourtant pas tous les attributs. Tout d’abord, on découvre deux inédits (« Freedom » et « Will You Be »), deux reprises du groupe chantées par l’actuel frontman et enfin six extraits live. Pas vraiment l’allure d’un Best Of donc, même si l’essentiel du contenu n’est pas une surprise. Cependant, H.E.A.T a bien fait les choses et l’adrénaline est au rendez-vous.

H.E.A.T

« Extra Force »

(earMUSIC)

Surfant sur le succès de « Force Majeure » sorti l’an dernier presque jour pour jour, et surtout sur le retour en grâce de son chanteur originel Kenny Leckremo en lieu et place d’Erik Grönwall parti chez Skid Row, H.E.A.T réapparait avec une nouvelle galette. Légèrement hybride dans la forme, on y retrouve deux titres studio, deux autres réinterprétés par l’actuel frontman et six live très énergiques. Les Suédois font revivre le Hard 80’s avec beaucoup de talent, d’enthousiasme et cela s’entend sur « Extra Force ».

Sans doute désireux de marquer son territoire, Leckremo s’est même fendu du réenregistrement de deux morceaux devenus des classiques sans lui : « Rise » et « One By One ». Cette grosse décennie d’absence, entre 2010 et 2022, a vu H.E.A.T prendre du volume et c’est très probablement ce qui a motivé cette étonnante prise de positon. Cela dit, elles ont fière allure et ces nouvelles versions prennent carrément un bon coup de jeune, tant la production s’inscrit dans celle du précédent disque.

Après cette mise au point, H.E.A.T livre six titres enregistrés en concert l’an dernier, où l’on retrouve d’ailleurs « One By One », ainsi que « Back To The Rythm » et « Nationwide », extraits de « Force Majeure ». Pour le reste, le quintet reprend ses standards, à savoir « Rock Your Body », « Dangerous Ground » et « Living On The Run ». Les Scandinaves confirment qu’ils sont vraiment un groupe de scène et, poussés par leur public, ils dégagent beaucoup de puissance mêlée à un tsunami mélodique. Imparable.

Retrouvez la chronique de « Force Majeure » :

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Ethnic Metal

Shepherds Reign : tribal spirit

Terriblement vivant et farouche, ce deuxième album de SHEPHERDS REIGN rugit de toute part sur des percussions envoûtantes et séculaires posées sur des guitares massives et dans un Metal très moderne. Issue des cultures de l’archipel océanique entourant la Nouvelle Zélande, sa musique explosive est particulièrement physique et d’une richesse incroyable. Loin des coups marketing bâtis sur des cultures lointaines, « Ala Mai » saisit et frappe avec une honnêteté incontestable.

SHEPHERDS REIGN

« Ala Mai »

(Golden Robot Records)

Originaire d’Auckland en Nouvelle Zélande, SHEPHERDS REIGN a à coeur d’intégrer fortement les influences de sa culture polynésienne dans un Metal qui se veut aussi Groove que Heavy. Après un premier album éponyme en 2018, le quintet est de retour avec « Ala Mai », qui combine les rythmes rituels des Tonga, la fierté guerrière de Samoa et son héritage maori avec des riffs puissants et acérés puisés dans un style ravageur, très actuel et même intemporel.

D’une rare authenticité, surtout lorsqu’il s’agit d’Ethnic Metal dont beaucoup se servent pour n’en faire que du folklore, SHEPHERDS REIGN ne donnent pas dans l’appropriation de couleurs exotiques pour rendre son registre crédible et percutant. Les membres du groupe vivent véritablement leur musique à laquelle ils ont très habillement intégré une culture dont ils sont naturellement imprégnés. Le résultat est captivant et unique. « Ala Mai » ne ressemble à aucun autre disque et c’est là toute sa force.

Et toute cette énergie, parfois très brute, est guidée par une envie et un désir de partage de ce patrimoine tribal ancestral. Féroces et aussi émouvants dans leur approche, les Néo-Zélandais montrent une réelle passion à enchaîner des morceaux racés et d’une implacable vigueur (« La Manu », « Aiga », « Nafanna », « Ua Masaa », « The World Bleeds », « Samoa Samoa », « Mo’omo’ogo Sa Molia »). En mélangeant l’anglais, le tongien et le samoan, SHEPHERDS REIGN signe un opus brillant et original.

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Modern Metal

Cyhra : hurricane

En s’éloignant de plus en plus du metal massif de ses débuts, CYHRA est plus que jamais dans l’air du temps avec des combinaisons Electro-Pop, qui ne manqueront pas de séduire le jeune public. Pour autant, « The Vertigo Trigger » n’est pas inintéressant même si les fans des groupes, dont sont issus ses membres, risquent d’être un peu perdus. A écouter sans œillères, donc…

CYHRA

« The Vertigo Trigger »

(Nuclear Blast Records)

Lorsque CYHRA est apparu en 2016 sur la scène Metal européenne, le line-up présenté laissait rêveur et beaucoup l’ont même qualifié de ‘super-groupe’. Avec d’anciens, ou toujours actifs, membres d’Amaranthe, The Halo Effect, Kamelot, In Flame, Mekong Delta, Annihilator et quelques autres, le quintet a d’abord convaincu avec « Letters To Myself » (2017), puis confirmé avec « No Halos In Hell » (2019). Alors, forcément, « The Vertigo Trigger » est très attendu.

Les Suédois concentrent de multiples courants mais, pour faire court, on va dire qu’il s’agit de Modern Metal, compte tenu de l’aspect mélodique qui prédomine sur tout l’album. Malgré tout, les riffs sont acérés et tranchants, la rythmique bastonne comme il faut et Jake E fait toujours des prouesses au chant. Une fois encore, « The Vertigo Trigger » dispose d’un songwriting direct et efficace et, sans prendre de risques, CYHRA se montre décidé et toujours très compact. 

Si le précédent opus proposait déjà quelques sonorités électroniques assez éparses, cette troisième réalisation fait la part belle aux claviers et aux samples. Rien ne gênant en soi, sauf qu’on n’est pas chez Derek Sheridan, mais plutôt au cœur d’une fête foraine qui bat son plein. Cela dit, CYHRA conserve toujours un côté Heavy explosif et évite la caricature de justesse (« Ready To Rumble », « 1.000.000 Fahrenheit », « Too Old For Fairy Takes »). Si « The Vertigo Trigger » est fédérateur, il laisse l’impression d’avoir été un peu bâclé. 

Photo : Linda Florin
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AOR Hard FM Melodic Rock

Heart Line : golden years

D’un statut d’incontournable dans les années 80/90 à celui de paria les deux décennies qui suivirent, le Hard FM, Melodic Rock ou AOR, c’est selon, retrouve des couleurs et redore son blason de belle manière depuis quelques temps. Sans sombrer dans un revival sans saveur, HEART LINE tire au contraire très habillement son épingle du jeu, grâce à des musiciens talentueux et une vision très actuelle, qui font de « Rock’n’Roll Queen » un disque incontournable et un véritable électrochoc.

HEART LINE

« Rock’n’Roll Queen »

(Pride & Joy Music)

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la scène hexagonale en matière de Hard FM, vulgairement appelé AOR de nos jours, est dépeuplée et presqu’orpheline. Pourtant, celles et ceux qui ont connu les grandes heures de MTV en ont été joyeusement abreuvés de longues années durant. Mais au milieu de ce désert musical typiquement français, une oasis a vu le jour il y a deux ans avec l’arrivée en trombe de HEART LINE avec un premier album, « Back In The Game », digne des meilleures productions internationales.

Affichant, c’est vrai, une certaine légèreté en raison de la mise en avant de mélodies bardées de refrains entêtants et d’un côté très accessible qui fait justement sa marque de fabrique, le style est pourtant techniquement très exigeant et même plutôt pointu pour qui vise les sommets. N’en joue donc pas qui veut ! Et c’est avec cette volonté et ce savoir-faire que HEART LINE vient frapper encore plus fort avec « Rock’n’Roll Queen », sa deuxième réalisation, toujours faite-maison, encore plus aboutie, assurée et inspirée.

Fondé par son virtuose de guitariste, Yvan Guillevic, qui produit aussi l’album, le quintet breton peut compter sur son équipe de choc, qu’il convient de citer, composée d’Emmanuel Creis (chant), Jorris Guilbaud (claviers), Dominique Braud (basse) et Walter Français (batterie). Fin et accrocheur, HEART LINE distille des compositions très matures et irrésistibles (« I Am The Night », « Call Of The Wild », « Living My Dreams », « Hard Life », « The Fire Still Burns » et le morceau-titre). Un exercice de haute voltige et de grande classe !

Photo : Cédric Andreolli
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Alternative Metal

Sevendust : l’air du temps

Très attendue, la nouvelle galette de la formation de Georgie laisse un sentiment assez mitigé. D’un côté, les fans ne jurant que par l’aspect Metal et Heavy du combo risquent d’être un peu perdus et de l’autre, les plus jeunes, adeptes de MetalCore et de sonorités sirupeuses, vont se régaler. Alors peut-être en vue d’un éventail rapprochement, SEVENDUST livre avec « Truth Killer » un album complet et sans froisser personne !

SEVENDUST

« Truth Killer »

(Napalm Records)

Alors que leur album « Blood & Stone », considéré à juste titre comme l’un de leurs meilleurs, était sorti en pleine pandémie, les privant ainsi de scène, les Américains font un retour fracassant avec « Truth Killer ». Certes, gavé de sons électroniques et d’une production massive mais un peu lisse, ce quatorzième opus se veut pourtant l’un des plus sombres du groupe au niveau des textes et il propose également des fulgurances rageuses avec des chocs décibéliques proches d’un (bon) MetalCore. Pour autant, SEVENDUST s’inscrit toujours dans un Alternative Metal, dont il est désormais un fer de lance.

Assez éloigné des (très bonnes) productions qu’il a livré en solo ces derniers temps, Clint Lowery retrouve son jeu pointu, précis et incisif. Ses riffs costauds permettent des instants où il envoie ses camarades de jeu dans des sphères plus musclées, nous rappelant aux opus plus bruts et directs des premiers SEVENDUST. Car « Truth Killer » est assez différent de ses prédécesseurs, puisque le combo l’a voulu plus introspectif et cinématique, d’où l’importance donnée aux atmosphères des morceaux et au déroulé de l’album. Sans livrer un album-concept à proprement parler, il nous transporte dans un univers singulier.

Vocalement impressionnant, Lajon Witherspoon passe d’un growl agressif à un chant clair, rappelant même parfois celui de Corey Glover de Living Coloür, avec une facilité déconcertante. Etonnamment, le quintet ouvre avec le morceau le plus calme du disque, « I Might Let The Devil Win », comme pour mieux lâcher les chevaux. Et SEVENDUST ne nous fait pas languir très longtemps (« Truth Killer », « No Revolution », « Leave Hell Behind », « Fence »). Certes, le gang d’Atlanta ne livre pas son meilleur cru, car à trop vouloir coller à l’air du temps, cela lui donne une saveur de déjà-vu, mais son expérience sauve les meubles.

Photo : Chuck Brueckmann
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Blues Rock Southern Blues

Ole Lonesome : Texas rules

Costaud et rugueux, tout en affichant une légère désinvolture lancinante, OLE LONESOME sort son premier opus, « Tejas Motel », qui montre déjà une grande maturité. Loin d’être des novices de la scène texane, le combo joue sur des couleurs à la fois vintage et modernes pour obtenir un Blues Rock touchant et déterminé. Leur cœur est au sud et cela s’entend autant dans leur démarche que dans leur propos. Les Américains offrent une première réalisation généreuse et sensible.

OLE LONESOME

« Tejas Motel »

(Gulf Coast Records)

C’est dans le sud-est du Texas à Beaumont, du côté des marais pétrolifères, qu’ont grandi les membres d’OLE LONESOME. Zachary Feemster (guitare, chant), J. Wesley Hardin (basse), Gregory Mosley (claviers), Jimmy Devers (batterie) et Greg Achord (guitare) ont été nourris au Blues des pionniers, roots et épais, mais c’est pourtant guidés par une énergie et une inspiration très contemporaine qu’ils se présentent avec « Tejas Motel », un opus varié, entraînant, solide et doté d’une production directe et sincère.

Détecté par le guitariste, producteur et patron de Gulf Coast Recors, Mike Zito, dont le chanteur et six-cordiste a tournée au sein du groupe il y a un peu plus de dix ans, OLE LONESOME n’arrive donc pas en terre inconnue pour son premier album, enregistré en Louisiane. Le titre et le thème principal du disque sont nés dans la tête du frontman en passant devant le panneau d’un motel miteux, qui a inspiré « Tejas Motel ». Il s’agit donc d’une succession de petites histoires, qui donnent et redonnent vie à l’endroit.

Bien sûr, il se dégage des sonorités Southern dans le jeu et le son d’OLE LONESOME, mais sans pour autant être prédominantes. Le quintet puise son inspiration dans le Blues Rock américain au sens large du terme et déploie un style original. Les riffs sont gras, le chant déterminé avec une touche Old School et l’ensemble sonne terriblement organique. C’est cette authenticité qui rend les Texans si attachants dans leur approche (« Yvette », « Easy Street », « Ain’t No Good », « Natural Fact »). Ensorcelant !

Photo : Emily Martindale