MR. BIG, c’est un peu la classe incarnée. Des parties de guitares exceptionnelles, une basse chimérique imparable et un chanteur d’une justesse imperturbable. Ajoutez-y un batteur qui respire en rythme et vous obtenez un groupe auquel il est difficile de trouver à redire. Et c’est vrai qu’il est difficile de reprocher quelque chose aux Américains. Cela dit, l’inspiration ne se commande pas, elle est plus ou moins présente selon les productions. Et dans ce cas, « Ten » est sans doute la raison, qui vient mettre fin à une belle histoire du Rock.
MR. BIG
« Ten »
(Frontiers Music)
Clap de fin pour le supergroupe qui livre actuellement sa tournée d’adieu. Avec une carrière faite en partie de grands succès et scindée en deux époques pas franchement égales, MR. BIG tenait à faire un ultime cadeau à ses fans, tout en rendant hommage à son défunt batteur, Pat Topet disparu en 2018, et sans qui le quatuor ne souhaitait pas poursuivre l’aventure au-delà. Même l’excellent et expérimenté Nick D’Virgilio derrière les fûts ne semble avoir pu changer la donne, malgré un jeu comme toujours irréprochable.
Avec un break entre 2002 et 2009, le groupe aura marqué les esprits depuis sa création il y a 36 ans et aura même servi de tremplin à beaucoup d’amoureux de musique, qui ont pu s’initier au Hard Rock en douceur. Et rien que pour ça, MR. BIG restera dans les mémoires. Il faut dire que, techniquement, Billy Sheehan (basse), Paul Gilbert (guitare) et Eric Martin (chant) sont toujours au-dessus du lot. Certes, le frontman de la formation a perdu en percussion, mais sa voix se fait aussi plus Soul et bluesy que jamais : un virage bien négocié.
Alors quelle tonalité a cette dernière réalisation ? Même s’il n’est certainement pas l’album le plus accrocheur du combo, « Ten » laisse l’impression de musiciens qui se font plaisir, qui restent des maîtres du groove et que l’expérience a rendu irrésistibles. Rien de très nouveau donc, mais MR. BIG garde intacte cette facilité tellement évidente à enchaîner les morceaux rythmés avec de ballades, dont il a le secret depuis ses débuts (« Good Luck Trying », « Right Outta Here », « Sunday Morning Kinda Girl », « Courageous »). Merci pour tout.
Parfois les side-projets permettent aux artistes de s’échapper un temps de leur chapelle musicale et même à l’occasion de revenir à leurs premières amours en se faisant tout simplement plaisir. Cela semble être le cas avec ces deux monuments du Hard Rock américain, Tracii Guns et Michael Sweet. Loin des L.A. Guns et de Stryper, c’est sur un Heavy sombre et massif qu’ils ont jeté leur dévolu et il faut bien avouer que ça leur va bien et qu’ils sont plus qu’à la hauteur de cette nouvelle entreprise. « Light Up The Sky » ravive toute une époque.
SUNBOMB
« Light Up The Sky »
(Frontiers Music)
Avec SUNBOMB, la mention ‘toute ressemblance avec des groupes déjà existants ou ayant existés’ n’a rien de fortuite et prend même tout son sens. Sous l’impulsion du patron de Frontiers Music, Tracii Guns et Michael Sweet se sont réunis il y a quelques années autour d’un projet de Heavy Metal traditionnel pour prolonger, à leur manière, l’héritage laissé par Black Sabbath, Dio, Ozzy ou Judas Priest pour ne citer qu’eux. Et après le très bon « Evil And Divine » (2021), le duo récidive avec un « Light Up The Sky », tout aussi convaincant.
C’est vrai qu’avec ce groupe, le leader de L.A. Guns et le frontman de Stryper s’éloignent de leur registre habituel respectif, mais ils démontrent avec beaucoup de vigueur et avec le talent qu’on leur connait qu’ils sont bel et bien des guerriers et, si certains en doutaient encore, « Light Up The Sky » est une réponse franchement éclatante. SUNBOMB propose un répertoire très dark et nous propulse directement dans les années 80/90 sur une production actuelle et puissante. Et le plaisir des deux musiciens est palpable.
Tandis que Tracii signe toutes les guitares et la basse, soutenu à la batterie par l’ex-L.A. Guns Adam Hamilton, Michael Sweet donne de la voix et offre un beau contraste avec son groupe, qui vient d’ailleurs de sortir un nouveau single (« End Of Days »). Il y a même un petit côté fétichiste chez SUNBOMB dans sa recherche de l’aspect intemporel du Heavy Metal des origines. De « Unbreakable » à « In Grace We’ll Find Our Name », « Steel Hearts », « Rewind » ou « Scream Out » et « Setting The Sail », cet opus est marqué au fer rouge.
L’une des premières choses qui surprend chez MOON WOMB, c’est cette production à la fois rugueuse et sauvage, et pourtant très lumineuse, qui se caractérise par une volonté d’authenticité et d’une certaine pureté. La délicatesse presque vulnérable de la voix fait face à des distorsions guitaristiques où l’étrangeté musicale reste étonnamment familière et transcendante. Les Américains donnent le sentiment d’avoir totalement électrifié un registre acoustique pour lui donner du corps et le résultat est plus qu’ingénieux.
MOON WOMB
« Moon Womb »
(Firelight Records)
Rangé derrière une étiquette Heavy Rock un peu étriquée, MOON WOMB fait partie de ses groupes complètement atypiques, qui semblent avoir un don inné pour désarçonner leur auditoire. Car sur ce premier album éponyme, les frontières stylistiques sont abattues pour laisser libre-court à l’inspiration du duo, qui nous embarque dans un périple musical contemplatif, globalement assez sombre, mais toujours pertinent et original. Ici s’entrechoquent Folk et psychédélisme sur fond d’ésotérisme et de magie.
Originaire de Woodland en Caroline Du Nord, Brandy (chant, batterie et cymbales) et Richard Flickinger (guitare et amplification) se sont créé un univers très personnel, composé de paysages sonores aux reliefs saisissants. Très organique dans le son, « Moon Womb » est guidé par la voix de sa chanteuse, qui n’a pas son pareil pour donner aux morceaux des aspects presqu’incantatoires avec une douceur enchanteresse. MOON WOMB se montre très intimiste dans l’approche et même assez minimaliste dans la composition.
Le tandem est en symbiose totale et si la voix semble ouvrir le chemin, la guitare baryton aux sonorités brutes et singulières donne le ton aux ambiances qui s’engouffrent dans des passages très sombres et atmosphériques. On est proches d’une Dark Folk où se mêlent contes de fées et folklore dans une ode à la nature. La lenteur des compositions de MOON WOMB libère d’étonnantes impressions de liberté et d’espace et des éléments empruntés au Drone, voire au Doom, se joignent à ce mélange artistique créatif et inattendu.
13 ans après sa disparition, la musique de Calvin Russell résonne toujours chez les amateurs de Blues aux saveurs Folk, Country et Rock. Ayant trouvé l’Eldorado en France dans les années 90/2000, le Texan n’a bien sûr pas manqué de créer de solides liens d’amitié, parmi lesquels on retrouve MANU LANVIN. Le leader des ‘Devil Blues’ avait d’ailleurs enregistré avec lui « Dawg Eat Dawg » en 2009, un moment fort dans sa carrière. Aujourd’hui, le chanteur et guitariste lui rend un magnifique hommage avec ce « Tribute », qui voit se succéder des artistes au horizon divers pour redonner vie à des chansons pour beaucoup inoubliables et dans tous les cas toujours très touchantes. Entretien avec ce ‘Frenchy’, qui redonne toutes ses lettres de noblesse au musicien d’Austin.
Photo : Tamara Pienko
– On connait la genèse de l’album qui date donc de ce concert donné il y a deux ans à ‘La Traverse’ de Cléon, près de Rouen. De là à vouloir ensuite réaliser un disque, il y a un pas à franchir. Quel a été le déclic ? Y a-t-il eu une demande particulière, ou cela reste personnel ?
Non, il n’y a eu aucune demande. Cela aurait d’ailleurs pu être orchestré par des maisons de disques ou des éditeurs, mais ce n’est pas le cas. Cela fait suite à ce concert, qui m’avait été demandé, à ‘La Traverse’ qui est une salle que j’aime beaucoup. Il y a une programmation très qualitative avec beaucoup d’artistes anglo-saxons de Classic Rock, notamment, et de grands bluesmen. Ils m’ont demandé si je voulais faire revivre, le temps d’une soirée, la musique de Calvin Russell. J’ai accepté en leur disant que je souhaitais le faire avec des invités. On a la chance en France d’avoir des artistes très intéressants et qui sont américains. Ils sont donc plus légitimes pour défendre ce répertoire. Je pense à Neal Black, Beverly Joe Scott, qui est à côté en Belgique, Janet Martin… J’avais envie de personnes qui partagent ce langage-là et je voulais aussi que sa femme et sa belle-famille soit là et se sentent concernées. C’était une soirée très, très émotionnelle, en plus d’afficher complet. Il s’est passé quelque chose de très fort et c’est là que je me suis rendu compte que la musique de Calvin était encore inscrite dans le cœur des gens qui l’avaient connu. D’ailleurs, lors de mes concerts quand je vais au merchandising signé des albums, il n’y a pas une seule fois où on ne me parle pas de sa musique. Elle est toujours là et elle m’accompagne. Je trouvais que c’était un peu frustrant pour les gens qui n’avaient pas pu assister à ce concert-là de ne pas leur proposer une nouvelle lecture de certaines de ses œuvres. C’est donc ce que je me suis mis en tête de faire après ce concert. Je suis entré en studio avec mes musiciens, en reprenant d’ailleurs plus ou moins la même setlist qu’à ‘La Traverse’ et j’ai commencé mon petit casting dans ma tête.
– Tu avais un lien très fort et spécial avec Calvin Russell, qui était aussi un personnage atypique et attachant. Est-ce qu’il t’a fallu prendre un peu de recul lors de l’enregistrement pour mieux contrôler et canaliser ce flux d’émotion, ou au contraire l’immersion a-t-elle été totale ?
Je pense que le temps a joué en notre faveur. Je n’aurais pas pu faire cet album juste après sa disparition. Là, on a pu se détacher d’une forme d’emprise émotionnelle. Cela dit, bizarrement, cela m’est arrivé plusieurs fois pendant l’enregistrement. Juste à côté du studio ‘La Chocolaterie’, j’ai une petite maison de ville mitoyenne, où j’ai accueilli Calvin juste avant et pendant l’enregistrement de « Dawg Eat Dawg ». Ensuite, il y a eu la tournée et il dormait ici. Il y avait malgré tout son fantôme qui était là ! (Sourires) Il m’a d’ailleurs laissé quelques plumes qui sont toujours là, elles aussi. Ensuite, le travail est différent, car je suis le directeur artistique du projet. La question s’est donc posée de faire ou non du plagiat de Calvin Russell, ou est-ce qu’on allait essayer d’aller plus loin ? Ce qui était intéressant, c’était de moderniser certaines versions, de leur offrir une deuxième lecture et aussi de prendre certaines choses à contre-pied. Par exemple, personne ne s’attendait à ce que ce soit une femme (Beverly Joe Scott – NDR) qui chante « Crossroads », qui est le morceau emblématique de Calvin. Il fallait faire une sorte de passage de relais, car il a laissé un super catalogue. Il était très fort au niveau du songwriting et en me replongeant dans tout ça, j’ai retrouvé des trésors que je ne connaissais même pas à l’époque où je le côtoyais. Il y a vraiment des pépites ! Et les faire interpréter par d’autres artistes, c’est vraiment ça qui me plait dans ce genre d’hommage.
Photo : AFP
– La tracklist contient 14 chansons. Certaines s’imposaient comme bien sûr « Crossroads », « Trouble » ou « Soldier ». Pour les autres, comment s’est effectué le choix ? Certains artistes ont-ils proposé des morceaux qui les touchaient plus particulièrement, par exemple ?
En fait, je me suis beaucoup inspiré de la magie qui avait opérée à ‘La Traverse’. La tracklist n’a pas tellement bougé. Parfois, ce sont les circonstances qui décident. Il y a un équilibre avec des passages plus lents, d’autres plus Folk qu’on connait bien chez Calvin. Et puis, c’est aussi très Rock’n’Roll, car il avait vraiment ça en lui. Il aimait les morceaux avec de grosses guitares un peu sales, le Boogie aussi… Et c’est un aspect que je connais bien de lui, car j’ai eu la chance de l’accompagner sur scène. Il vibrait littéralement lorsque tu commençais à envoyer des décibels. J’aime aussi ce côté-là chez lui, ainsi que l’aspect très dépouillé, très acoustique, très intimiste et très introspectif finalement, tout comme des choses beaucoup plus brutes de décoffrage qui font bouger les gens. C’est ce que j’ai essayé de faire pour avoir cet équilibre sur l’album.
– Parlons des interprètes et d’abord des Américains qui, comme Calvin, ont aussi un lien très fort avec la France. C’est apparu comme une évidence dans le choix, car ils le connaissaient tous ?
Beaucoup de choses ont pesé dans la balance, en fait. J’ai d’abord trouvé ça intéressant que ce soient des amis de Calvin qui lui rendent hommage comme Beverly Joe Scott. Nous avions d’ailleurs donné son dernier concert ensemble dans le Sud, près de Manosque, sur les hauteurs. Elle était venue chanter le tout dernier morceau, « Ain’t Leaving Your Love », dont je me rappelle très bien, puisque c’était moi qui l’avait accueilli sur scène. C’était important pour moi qu’elle accepte de venir sur cet hommage. Pareil pour Popa Chubby, qui est un autre ‘exilé’ des Etats-Unis comme il le dit très bien. Ils auraient d’ailleurs tous voulu avoir la même carrière chez eux qu’ils ont eus en Europe, mais les circonstances ont fait que c’est ici que ça leur a souri. C’est ce qui s’est passé pour Calvin, qui a été ‘star’ sur le tard. Et contrairement à chez lui, c’est chez nous que ça a pris, et c’est exactement pareil pour Popa Chubby. C’est vrai aussi qu’on doit beaucoup à Patrick Mathé (fondateur du label New Rose – NDR), qui était un véritable découvreur de talents qui ne prenaient pas aux Etats-Unis et qu’il ramenait en France sur son label. Et ça fonctionnait plutôt pas mal. J’ai donc pris des gens qui le connaissaient et qui font aussi partie de mon réseau. Et puis, ça raconte une histoire. Si j’avais pris des artistes anglo-saxons, qui ne connaissaient pas l’histoire de Calvin, ça ne m’aurait pas paru intéressant pour cet hommage. Mais c’était aussi important d’avoir des gens qui ne connaissent pas forcément très bien son répertoire comme Théo Charaf, Craig Walker, Haylen et même Hugh Coltman. Et comme Calvin était une voix, il me fallait vraiment des chanteurs à voix. Je ne pouvais pas m’amuser avec des guignols ! (Rires) Il fallait que ce soit séduisant et il y ait certaines évidences aussi.
Manu Lanvin & Calvin Russell en 2009 – Photo :Eric Martin
– Pour rester sur la France, il y a aussi des choix chez les interprètes qui peuvent surprendre, car ils ne viennent pas directement de l’univers du Blues. Je pense bien sûr à CharElie Couture, Axel Bauer et à ton père Gérard. C’est une manière de dire que Calvin ne touchait pas seulement les amateurs de Blues ?
Oui, je pense. Ce serait dommage de le classer comme un artiste destiné à quelques ‘happy fews’ et aux ayatollahs du Blues. D’ailleurs, Calvin n’aimait pas le Blues plus que ça. Il avait fait sa propre recette avec ce mélange de Rock, de Folk et de Blues. Le plus important pour moi était d’avoir des personnalités et des grains de voix, et peu importe le style musical d’où ils viennent. Après, il y a quand même beaucoup de similitudes. Quant à mon père, il a écrit « 5m² ». Ils étaient amis et, même s’il vient du cinéma, c’est une chanson qui raconte beaucoup de choses. C’est l’histoire de Charlie Bauer (militant révolutionnaire d’extrême gauche et ancien complice de Jacques Mesrine – NDR) que mon père a rencontré quand il a été consulté pour le film sur Mesrine. On sait très bien les années de prison que Calvin a fait de son côté et il y avait donc une belle histoire qui s’écrivait en enregistrant ce « 5m² » ensemble.
– D’ailleurs, « 5m² » qui est chanté par ton père et toi, et « Soldier » par Axel Bauer, le sont en français. C’est assez inattendu. D’où l’idée est-elle venue de traduire le texte de Calvin ?
C’est vraiment Axel Bauer qui m’a soufflé cette idée. Je ne pensais pas enregistrer « Soldier » en français. Et puis, face à ce qu’il m’a balancé le lendemain, j’ai trouvé ça bien et je me suis dit que cela pouvait ouvrir l’album à d’autres gens sans s’enfermer et qu’il ne soit pas écouté uniquement par celles et ceux qui connaissent déjà Calvin. Cela peut aussi ouvrir la porte au public d’Axel Bauer, par exemple, qui pourrait peut-être s’intéresser à qui est derrière tout ça. Ca remet en lumière l’artiste, mais aussi le songwriter qu’il était.
Photo : Patrick Swirk
– L’album est donc très varié dans les ambiances avec même trois duos, ce qui le rend très collégial d’ailleurs. L’intention était-elle de dévoiler le plus possible l’univers de Calvin, qui était assez vaste, malgré certaines apparences ?
Oui, c’est ce que je pense avoir décodé chez lui. Il y a aussi tous les aspects de sa musique telle qu’elle était présentée. Je voulais être fidèle à ça, à ce côté collégial également qui apporte beaucoup de puissance à cet hommage quand tu as plusieurs interprètes qui échangent sur un titre. Cela dit, les chansons de Calvin ont déjà fait leur travail en termes d’émotion, bien avant cet album. On peut en récréer une autre, intacte, avec une nouvelle histoire, puisqu’elle est interprétée par plusieurs personnes. Je trouve que cela apporte une richesse de plus à l’album.
– Pour rester sur l’héritage laissé par Calvin Russell, ce qui me surprend vraiment, c’est de ne pas entendre souvent son nom revenir dans les influences de certains artistes, surtout américains d’ailleurs. Comment est-ce que tu l’expliques ? Il n’était pourtant pas si ‘confidentiel’ que ça…
Il l’était en tout cas aux Etats-Unis. J’allais souvent le voir là-bas à Austin. Quand je me baladais le soir sur la ‘5th Street’, on me demandait ce que faisait un Français ici. Quand je disais que je produisais et que j’étais le collaborateur artistique de Calvin Russell, on me répondait : ‘Ah oui, c’est le Texan qui fonctionne bien en France et en Europe !’. Ca s’arrêtait à ça. Il faisait quand même partie de cette communauté de musiciens des années 70/80 qui ne tournaient qu’à Austin, mais ça n’allait pas plus loin que les frontières de la ville. C’est vrai que c’est étonnant. Pour tout te dire, il y a une chose que j’ambitionne, ou que j’adorerai, c’est que l’histoire de cet album, qui fait lumière sur Calvin, puisse donner envie à la création d’un film ou d’un documentaire. On peut continuer l’histoire musicale d’un artiste après sa disparition. C’est peut-être jouable. J’ai beaucoup fait écouter l’album à des musiciens américains avec qui je travaille en ce moment. Ils sont sidérés et ils se demandent comment ils ont pu louper ça ! Et ils s’intéressent maintenant à l’original. Je ne suis qu’un relai avec ce disque. D’ailleurs, je pars jouer à New-York fin juillet et j’ai trois titres de Calvin dans ma setlist. Je continue à jouer sa musique dans son pays d’origine, qui ne le connait même pas. C’est insensé !
Nicolas ‘Nikko‘ Bonnière, Calvin Russell et Manu Lanvin en 2009 – Photo : Eric Martin
– Tu chantes également sur trois morceaux (« Wild Wild West », « Ain’t Leaving Your Love » en duo avec la chanteuse Haylen et « 5m² » avec Gérard). C’était important aussi pour toi d’interpréter tous ces titres de ce projet que tu portes depuis le début ?
Au début, mon équipe pensait que j’allais chanter tout l’album ! Comme l’idée était de faire un hommage, tout le monde avait imaginé que ce serait ‘Manu Lanvin chante Calvin Russell’. Pour moi, ça n’avait pas beaucoup de sens. A mon avis, plus il y a de participants, plus l’hommage est beau ! Et c’est ce qui m’a plu dans ce projet, que ce soit quelque chose de collectif. C’est ce qui me semblait intéressant. Pour l’anecdote, j’ai fait toutes les voix témoins des morceaux avant de les envoyer aux artistes. Quand Beverly Joe Scott a écouté « Crossroads », elle m’a dit que je devais le chanter, que c’était à moi de le faire ! Il y a eu une gentille petite bataille ! Il a fallu négocier ! (Rires)
– Un mot enfin au sujet de Popa Chubby qui livre d’ailleurs une version incroyable de ce « All We Got Is Rock And Roll », qui lui va si bien, et avec cette trompette quasi-cosmique et incroyable de Boney Fields. On le sait actuellement malade. Est-ce que tu as des nouvelles rassurantes sur son état de santé ?
On s’est vu récemment lors de son dernier Olympia (le 17 mars – NDR), où il m’a invité à monter sur scène avec lui pour un titre. Il répond moins depuis quelques temps, bien sûr. En tout cas, l’opération s’est bien passée. Maintenant, il faut que les résultats soient bons et que la convalescence aille bien aussi. Cela dit, Ted (son prénom – NDR) est très présent sur les réseaux sociaux et tant que je le vois poster des choses, je suis rassuré. Et puis, c’est un mec balaise. Il n’en donne peut-être pas l’impression avec ce poids imposant et sa béquille, mais c’est quelqu’un de très vif dans le regard. Il a malgré tout une énergie de dingue, il y a le feu chez lui dans les yeux et dans le regard. Il fait partie des guerriers et je pense qu’il va s’en sortir. J’ai toute foi. C’est quelqu’un qui a envie de vivre, il n’a pas envie de se laisser tomber. Ce n’est pas du tout le caractère de ce mec-là ! (Sourire)
« Tribute To Calvin Russell », orchestré par Manu Lanvin est disponible chez Gel Prod/Pias.
Avec « Red Moon Rising », Robert Jon Burrison (chant, guitare), Andrew Espantman (batterie), Henry James Schneekluth (guitare), Warren Murrel (basse) et, depuis peu, Jake Abernathie (claviers) atteignent la plénitude de leur art à travers un Southern Rock frais et ressourcé. Basé autour du mythe de la lune rouge qui apporte son lot d’espoir et de renaissance, ce nouvel opus de ROBERT JON & THE WRECK s’affiche déjà comme un indispensable de sa belle discographie.
ROBERT JON & THE WRECK
« Red Moon Rising »
(Journeyman Records)
Il y a quatre ans déjà, la sortie de « Last Night On The Highway » m’avait parcouru de frissons et, alors que le groupe évoluait encore en indépendant, il paraissait assez évident que le renouveau du Rock Sudiste passerait par lui. Etonnamment, c’est donc de Californie qu’est venu ce souffle chaud et novateur redonnant ses lettres de noblesse à ce style si expressif et rassembleur. Depuis, ROBERT JON & THE WRECK a arpenté sans relâche les scènes des Etats-Unis en long et en large, avant de faire également l’unanimité en Europe, où a même été enregistré le génial « Live At The Ancienne Belgique ». Et après neuf albums studio en moins de 15 ans, il se montre aussi infatigable que prolifique.
Et cette féconde créativité, on la doit aussi et surtout à la volonté des Américains de pouvoir, depuis leur signature sur le label de Joe Bonamassa, sortir à l’envie des singles au gré de leur inspiration. Avant la sortie de cet excellent « Red Moon Rising », on avait ainsi pu découvrir les morceaux « Ballad Of A Broken Hearted Man », « Help Yourself », « Hold On », « Stone Cold Killer » et plus récemment « Trouble ». Certes, ROBERT JON & THE WRECK y dévoile près de la moitié de ce nouvel opus (12 titres avec les bonus), mais cela permet aussi de tenir en haleine son public avant la découverte finale de l’ensemble du disque. Une manière très actuelle, et plus libre selon le combo, de diffuser sa musique entre ses concerts.
« Red Moon Rising » peut facilement être perçu comme l’apogée du style et de la personnalité artistique de la formation de la côté ouest, tant certains titres ont déjà des allures de classiques. La production de Kevin Shirley offre également ce petit plus en termes de lustre, avec beaucoup de clarté et une belle dynamique, ce qui manquait peut-être un peu auparavant. Dorénavant, ROBERT JON & THE WRECK brille comme jamais et la qualité du songwriting est irréprochable, tout comme les harmonies du chant et des guitares (« Dragging Me Down », « Give Love », « Hate To See You Go » et le fabuleux morceau-titre). Le quintet en impose et s’impose de la plus belle des manières.
Photo : Allison Morgan
Suivez le périple de ROBERT JON & THE WRECK à travers les chroniques et les interviews parues sur Rock’n Force (et avant même la création du site) :
Si depuis le début de ce nouveau millénaire, la scène Blues mondiale a vu quelques cartes rebattues avec l’émergence, dans la durée, de grandes blueswomen et bluesmen, il en est un qui surclasse tout le monde et c’est bel et bien JOE BONAMASSA. Sa créativité, en studio comme sur scène, est littéralement le souffle qui manquait à ce style si emblématique. Avec ce « Live At The Hollywood Bowl With Orchestra », il monte encore les curseurs et livre de manière sublime son lot de frissons.
JOE BONAMASSA
« Live At The Hollywood Bowl With Orchestra »
(J&R Adventures)
Alors qu’il vient tout juste de sortir le cinquième album de son supergroupe Black Country Communion, JOE BONAMASSA s’attaque déjà à nos platines et dans son style de prédilection. Et cette fois, c’est dans une configuration époustouflante qu’il interprète une partie de son répertoire. Rarement aussi bon qu’en live, il a investi le magnifique écrin qu’est le Hollywood Bowl de Los Angeles, cultissime amphithéâtre où se produisent depuis 1992 les plus grands noms de l’Histoire de la musique.
Alors que l’homme au costume a sorti presqu’autant de témoignages live que de réalisations studio, c’est de nouveau sur les planches qu’on le retrouve et entouré d’un line-up exceptionnel. Accompagné d’un orchestre de 40 musiciens dirigé par de grands chefs tels que David Campbell et Trevor Rabin, les morceaux de JOE BONAMASSA prennent une ampleur incroyable grâce à des arrangements millimétrés, inédits et audacieux. Et le résultat célèbre littéralement le talent de l’Américain.
Sublimées par l’orchestre symphonique, les compositions du guitariste et chanteur s’élèvent encore un peu plus et la qualité du songwriting original prend une nouvelle dimension. Sur une tracklist parfaitement équilibrée, alternant les titres dynamiques et d’autres purement Blues, JOE BONAMASSA dévoile l’étendu de son répertoire en se faisant virtuose, mais en laissant surtout parler les notes. Enveloppé de cordes, de cuivres, de choristes au diapason, d’une flûte et de son groupe, ce nouveau live est une petite merveille.
Photo : Jenise Jensen
Retrouvez les chroniques de ses précédents albums :
Vétérans fatigués pour certains, dieux vivants pour d’autres, une chose est sûre : les membres de BLACK COUNTRY COMMUNION ne laissent personne indifférent depuis maintenant 2010. Très attendu, cette cinquième réalisation se distingue à nouveau par sa fraîcheur et sa classe, et le combo anglo-américain en a encore sous le pied. Et l’écoute de « V » dévoile un très bon concentré de Hard Rock bluesy intemporel, comme seuls des musiciens de ce calibre savent encore le faire.
BLACK COUNTRY COMMUNION
« V »
(J&R Adventures)
Depuis 15 ans, et même s’il en aura fallu attendre sept entre leurs deux derniers efforts ensemble, Glenn Hughes (basse, chant), Joe Bonamassa (guitare), Derek Sherinian (claviers) et Jason Bonham (batterie) se font plaisir aux commandes de BLACK COUNTRY COMMUNION, supergroupe transatlantique comme on n’en fait plus depuis des lustres. Et si l’attente fut aussi longue, c’est aussi que nos quatre cadors ont un emploi du temps chargé et que, même à ce niveau-là, composer et entrer en studio nécessite déjà de se rencontrer…
Comme depuis les débuts de la formation, on retrouve le compagnon de route de longue date Kevin Shirley aux manettes de la production et, un peu aussi comme d’habitude, personne ne s’est vraiment foulé pour choisir le titre de ce cinquième album. Cependant, ce n’est pas non plus ce que l’on attend en priorité de BLACK COUNTRY COMMUNION, mais plutôt et surtout des morceaux de qualité. Et comme toujours, le quatuor est à la hauteur de son pédigrée avec Classic Hard Rock bluesy et virtuose à souhait.
Les deux premières choses qui frappent à l’écoute de « V » sont d’une part la cohésion qui libère ce groove commun et ensuite la performance vocale de Glenn Hugues qui, du haut de ses 73 printemps, tient la dragée haute à la jeune génération. Sa complicité avec Jason Bonham fait aussi des merveilles. Quant à Joe Bonamassa et Derek Sherinian, on ne leur connait pas de prestations moyennes. Parmi les incontournables du nouveau BLACK COUNTRY COMMUNION, on retiendra « Enligthen », « Stay Free », « Red Sun », « Restless » et « Love And Faith ».
Il faut parfois des épreuves difficiles pour se forger une identité plus forte. Malheureusement, QUINN SULLIVAN vient d’en subir une, ce qui n’a pas manqué de provoquer une sorte de déclic chez lui. Cependant avec cette nouvelle réalisation, il ne donne pas dans le larmoyant et paraît même avoir beaucoup progressé et gagné en efficacité avec ce très bon « Salvation ». Son Blues Rock est aussi fin que très aiguisé, et les notes de Soul offrent une couleur nouvelle chez lui.
QUINN SULLIVAN
« Salvation »
(Provogue/Mascot Label Group)
Considéré comme un enfant prodige du Blues, le guitariste et chanteur compte déjà cinq albums à son actif avec « Salvation », dont la sortie est pour le moins spéciale. Alors qu’il était en pleine écriture et enregistrement de ce nouvel opus, il a appris le décès de sa mère, ce qui a fortement imprégné le contenu, à commencer par son titre. Forcément très personnel et emprunt d’émotion, c’est pourtant un QUINN SULLIVAN paradoxalement inspiré qui livre des morceaux matures et émouvants. Et c’est peut-être aussi ce qui va faire de lui un musicien de premier plan.
Pour autant, « Salvation » est un disque optimiste et tout sauf résigné. Co-écrit avec John Fields et Kevin Bowe (Jonny Lang, Kenny Wayne Shepherd, Etta James), on doit d’ailleurs aussi la production à ce premier et le résultat est lumineux. QUINN SULLIVAN continue d’aller de l’avant, faisant évoluer son Blues vers un Rock classique teinté de Soul. Six-cordiste aussi technique que gorgé de feeling, le natif du Massachussetts semble avoir fait de ce récent traumatisme une force créatrice étonnante.
Avec « Salvation », QUINN SULLIVAN élève un peu plus son niveau de jeu en réalisant son album le plus varié et abouti à ce jour. Vocalement aussi, l’Américain élargit son champ d’action. Parmi les moments forts, on notera « Once Upon A Lie », « Rise Up Children », « Half My Heart », « Dark Love » et le morceau-titre. En multipliant les collaborations aussi diverses que nombreuses, le songwriter se montre aujourd’hui aguerri et également beaucoup plus identifiable. Il donne même l’impression d’un nouveau départ, avec plus de profondeur.
Pilier et pionnier du Stoner Rock aux saveurs largement Desert et Space Jam dans l’esprit, FU MANCHU mène une carrière exemplaire, parvenant sans cesse à rester très prolifique au sein-même du groupe comme en dehors. Avec « The Return Of Tomorow », le quatuor du sud de la Californie est parvenu à une synthèse parfaite de l’évolution musicale qui les caractérise depuis toutes ces années. Lourd, aérien, délicat et accrocheur, ce nouvel opus s’apprête à déferler sur scène et c’est encore son guitariste, Bob Balch, qui en parle mieux.
Photo : Thom Cooper
– L’an prochain, FU MANCHU célèbrera ses 40 ans d’existence et un très beau parcours. Vous avez commencé en jouant un Punk Hard-Core avant de côtoyer ses sonorités plus Hard Rock pour enfin donner naissance au Stoner et au Desert Rock. Que retiens-tu de cette évolution ? Te paraît-elle assez naturelle avec des étapes finalement nécessaires ?
J’ai rejoint FU MANCHU en 1997, donc le son était déjà plutôt bien établi à ce moment-là. Tu sais, je connais des tonnes de musiciens, qui sont passés du Punk Hard-Core au Heavy Rock des années 70. Pour ma part, j’ai commencé avec des groupes de Heavy Metal de la fin des années 70, puis j’ai découvert le Punk Rock, donc c’est un peu l’inverse me concernant, mais mélanger les deux styles fonctionne totalement !
– Ca, c’est pour l’aspect musical de FU MANCHU, mais qu’en est-il des textes et des thématiques que vous abordez ? Est-ce que, de ce côté-là aussi, il y a eu de profonds changements et peut-être des remises en questions à un certain moment ?
En ce qui concerne les textes, ce serait plutôt une question à poser à Scott Hill. D’après ce que j’en comprends, il s’agit principalement d’inspiration de films de série B et de blagues internes, des sortes de ‘private jokes’. Mais je pense que cela va bien plus loin que cela.
Bob Balch – Photo Visions In Pixels
– Est-ce que lorsqu’on fait parti du processus de création du Stoner/Desert Rock, comme c’est le cas pour FU MANCHU et quelques autres, on se sent un peu le gardien du temple ? Ou du moins le garant d’un style qu’il faut peut-être préserver, mais également faire évoluer ?
Pas vraiment, en fait. Au départ, nous n’avions pas vraiment l’intention de créer un son Stoner Rock. Le terme ‘Stoner Rock’ nous est même venu plus tard. Et puis, je pense que chaque style doit également évoluer. Je suis super content quand j’entends un groupe qui pense et qui joue en dehors de son genre d’origine en allant toujours de l’avant.
– Il a fallu attendre six ans pour que vous livriez ce 14ème album, « The Return Of Tomorrow ». Pourtant, FU MANCHU a été très actif avec un album live, des rééditions, trois Eps et même la bande originale d’un documentaire, sans compter vos tournées. Vous êtes vraiment un groupe d’hyperactifs, et on reviendra aussi sur tes projets personnels plus tard. Est-ce qu’avec toutes ces activités, il vous fallu trouver le bon moment pour vous poser et composer ces 13 nouveaux titres ? Attendre l’accalmie en quelque sorte…
Tu sais, nous nous réunissons pendant environ trois heures tous les jeudis. Ce sont trois heures vraiment très productives. Nous repartons généralement avec un morceau complet, ou au moins la moitié d’une chanson. Nous écrivons ensemble depuis si longtemps que c’est devenu une machine bien huilée à ce stade de notre carrière.
Photo : Visions In Pixels
– FU MANCHU est aussi réputé pour être un groupe qui va sans cesse de l’avant. C’est ce que vous avez voulu signifier avec ce titre « The Return Of Tomorrow » ? Que rien n’est figé et vous êtes résolument tournés vers l’avenir ?
Carrément ! Et puis, tu sais, je reste vraiment conscient de notre incroyable longévité et je suis très reconnaissant à tous nos fans.
– Parlons plus précisément de ce nouvel et très bon album. Il est la quintessence parfaite du style FU MANCHU avec encore et toujours des nouveautés dans les compositions et bien sûr dans le son, qui ne cesse d’évoluer lui aussi. Il y a un énorme travail sur le ‘Fuzz’ comme souvent chez vous. Est-ce que, finalement, ce n’est pas la chose qui vous importe le plus ? Le faire grossir et lui faire prendre des directions différentes et nouvelles ?
Nous cherchons toujours à nous améliorer, c’est un fait établi. Ce sont les chansons qui comptent le plus, bien sûr. Mais si nous pouvons obtenir les meilleurs sons possibles, en tout cas pour nous et à nos oreilles, c’est ce qui compte le plus ! Par ailleurs, c’est très important pour nous dans le groupe que notre bassiste, Brad Davis, fabrique et conçoive ses fameuses pédales fuzz ‘Creepy Fingers’.
Scott Hill – Photo Visions In Pixels
– « The Return Of Tomorrow » est aussi très particulier dans sa construction, puisqu’il est scindé en deux parties. La première est très Heavy et Fuzz et la seconde est plus Desert avec aussi un côté Space Jam. C’était l’ambition de départ ? De livrer des atmosphères opposées et aussi de pouvoir vous exprimer le plus largement possible ?
Oui, nous en avons discuté dès le départ. Quand nous avons commencé à écrire, nous avons essayé des chansons très lourdes, puis plus douces pour voir quel style servait le mieux les chansons. C’était d’ailleurs très amusant pour nous d’aborder ce disque avec l’idée que nous allions ensuite le diviser en deux.
– Est-ce que, dans le cas de FU MANCHU, cela demande d’être dans un certain esprit pour aborder au mieux ces ambiances très différentes ?
Pas vraiment, finalement. Personnellement, si je me sens inspiré, je vais en tirer le meilleur parti à ce moment précis et je vais composer autant que possible. Mais chaque semaine quand nous nous réunissons, c’est toujours dans l’idée de nous déchaîner et de nous défouler au maximum !
Photo : D.R.
– D’ailleurs, comment allez-vous composer vos setlists pour les concerts à venir ? Elles seront plutôt axées sur le côté Heavy du groupe, et allez-vous intégrer ces nouveaux morceaux plus ‘légers’ comme des interludes, par exemple ?
Probablement, un peu des deux et le plus possible. C’est vrai que nous pourrions aussi en changer soir après soir. Et puis, cela dépend également s’il s’agit d’un concert spécifique de FU MANCHU ou d’une configuration en festival. Si c’est notre propre show, nous jouerons davantage le nouvel album, c’est certain.
– Justement, parlons des concerts, vous serez en tournée en Europe à l’automne, mais d’abord en juin avec un passage au Hellfest, votre deuxième, je crois. Votre dernière venue date de 2019. C’est un festival que vous appréciez particulièrement ?
Oui, le Hellfest est super fun ! La première fois que nous avons joué là-bas, je n’ai regardé ni la scène, ni le public jusqu’à ce que nous montions sur scène. Je me détendais tranquillement dans les coulisses en regardant l’émission « Showdown ». Et quelques minutes plus tard, nous jouions devant des milliers de personnes. C’est un contraste saisissant et jubilatoire !
Photo : Thom Cooper
– Enfin, Bob, j’aimerais que l’on parle aussi de tes multiples side-projets. Il y a Big Scenic Nowhere dans un registre Desert/post-Rock Progressif, Yawning Balch dans un registre assez proche et plus Psych et enfin Slower, qui est un album de reprises de Slayer dans des versions Doom étonnantes. C’est très varié et assez éloigné de FU MANCHU. Tu as besoin de te lancer ce genre de défi, ou c’est plus simplement un désir d’explorer d’autres styles, dont tu es aussi fan ?
Tu sais, mes influences sont très diverses. De plus, j’ai acheté une ‘Universal Audio OxBox’, qui me permet d’enregistrer très facilement mes guitares avec la qualité d’un album à la maison. Cela m’a aussi aidé à devenir plus prolifique. Big Scenic Nowhere et Yawning Balch sont un peu arrivés par hasard, et je n’ai pas su refuser. Je suis un grand fan du jeu de guitare de Yawning Man et de Gary Arce. J’ai secrètement toujours voulu collaborer avec eux. Je suis ravi que cela se soit produit et que cela continue d’exister. Yawning Balch va d’ailleurs bientôt sortir deux albums. L’idée que je m’en fais est plus posée et je me suis aussi bien amusé à faire le premier disque. Et nous avons presque terminé le deuxième. J’ai des tonnes de morceaux originaux cette fois-ci, et c’est génial.
– Enfin, et puisque l’on parle de tes projets annexes, est-ce que tu te consacres déjà à d’autres choses, ou es-tu essentiellement focalisé sur FU MANCHU et ce nouvel album pour le moment ?
FU MANCHU est mon activité principale. Nous tournons énormément pour soutenir « The Return Of Tomorrow » et j’en suis franchement ravi ! J’ai vraiment hâte que les gens l’entendent. Je pense que nous nous sommes vraiment surpassés sur celui-là !
Le nouvel album de FU MANCHU, « The Return Of Tomorrow », sera disponible le 14 juin sur le propre label du groupe, At The Dojo Records.
Garant d’un Rock US né dans les années 80 et devenu intemporel, BON JOVI est l’un des très rares groupes à avoir traversé presque toutes les époques sans trop d’encombres, jouant des coudes sereinement avec la vague Grunge, puis celle du Rock Alternatif. Et c’est probablement en restant fidèle à ce style inimitable et un songwriting efficace et rassembleur qu’il est devenu cette icone indétrônable. Avec « Forever », ce n’est pas une recette qu’il applique, mais juste un savoir-faire et sa vision du Rock américain qu’il met en œuvre. L’ensemble est plutôt entraînant et joyeux, le reflet d’un artiste accompli et libre.
BON JOVI
« Forever »
(Island Records)
Comme de coutume, les grincheux qui s’ennuient ne manqueront pas de cracher tout ce qu’il leur reste de fiel sur ce nouvel et seizième album de BON JOVI, une institution pourtant outre-Atlantique et où l’on n’oserait même pas imaginer lui manquer de respect. Mais ça, ce n’est pas chez nous, de ce que j’ai déjà pu en lire. Rappelons tout de même qu’en 40 ans de carrière, c’est plus de 130 millions de disques écoulés et tout un pan du Rock US bâti pour durer. Alors, « Forever » est peut-être très ‘mainstream’, certes, mais c’est plutôt une bonne nouvelle, car cela officialiserait le fait que les gens écoutent enfin de la vraie musique !
Bref, trêve de bistrot, on pourra aussi se lamenter sur l’absence de Richie Sambora (depuis plus de 10 ans quand même !) et quand on aura dit ça, on constatera que BON JOVI fait toujours du BON JOVI… Un comble ! Cela fait tout de même quelques décennies que le chanteur du New Jersey n’a plus rien à prouver et, malgré une intense chirurgie reconstructive des cordes vocales en 2022, il donne toujours le change et plutôt bien. On n’attend pas que « Forever » vienne renverser la table pour, tout à coup, présenter autre chose que ce qu’il fait déjà très bien. A 62 ans, le réveil serait un peu tardif.
Le sentiment qui domine ici, c’est que le frontman semble réellement rendre hommage à sa belle et longue carrière, puisque les clins d’œil ne manquent pas. Une façon aussi peut-être de retrouver des sensations passées et qui devraient ravir celles et ceux qui ont grandi avec ses premiers albums (et pas en les découvrant 20 ans après !). Et cette petite nostalgie latente n’est pas désagréable et donne même le sourire (« Legendary », « We made It Look Easy », « Living Proof » et sa talkbox, « The People’s House », « Walls Of Jericho » et le contemplatif « Hollow Man »). Si seulement, il y avait plus de BON JOVI dans ce bas monde…