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Gaëlle Buswel : good vibrations [Interview]

Quelques jours après la sortie de son « Live At Abbey Road Studios », c’est une GAËLLE BUSWEL heureuse à qui j’ai eu le plaisir de poser quelques questions. Sorti uniquement en numérique, l’album a initialement été conçu à l’intention de ses fans, afin de les remercier de leur fidélité. Mais face à l’engouement qu’il rencontre, une réflexion sur une sortie physique serait à l’étude. Car, quelle meilleure preuve de son existence pourrait-on envisager de plus évidente ? Très attachés aussi à l’objet, la chanteuse et ses musiciens y réfléchissent…

Il y a quelques jours, GAËLLE BUSWEL était également l’invitée de la légende Georges Lang pour les 50 ans de ses mythiques « Nocturnes » sur RTL. Elle y a joué en direct et parler aussi de ce live acoustique, bien sûr. Si les bonus tracks de « Your Journey » dévoilaient déjà une partie des enregistrements londoniens du groupe, ils sont ici complétés par quelques morceaux, dont une étonnante reprise. Des instants que l’on pourra d’ailleurs découvrir très bientôt dans un documentaire.

Nouvel entretien avec une artiste spontanée et pétillante, dont la vie prend par ailleurs d’autres beaux tournants…

– On sent beaucoup de décontraction sur ce live et aussi beaucoup d’application dans votre interprétation à tous. On a presque l’impression qu’à Abbey Road, on n’est pas tellement là pour rigoler ! C’est difficile de faire abstraction du poids historique musical de l’endroit ?

Ce studio dégage énormément d’énergie de par son histoire avec toutes les légendes qui sont venues enregistrer là-bas. Quand tu descends les escaliers, quand tu rentres dans une pièce et même à travers les murs, on revit chacun de ces instants. Et au moment où tu fais ta première note, quand tu enregistres ton premier morceau, qui était « Selfish Game » pour nous, on se sent vraiment tout petit. J’avais l’impression que c’était la première fois que j’enregistrais une chanson. C’était assez bizarre. On était tous très concentrés, et en même temps une symbiose s’est créée. On était vraiment tous ensembles, très attentifs les uns aux autres. On s’est dit qu’on avait deux jours ici et qu’il fallait qu’on vive chaque seconde, chaque instant, parce qu’on y reviendrait pas tous les jours !

Jamais, dans une vie d’artiste indépendante, j’aurais pensé venir un jour mettre les pieds dans ce studio et en plus le faire avec une équipe avec laquelle je joue depuis 12 ans maintenant. C’était vraiment magique de pouvoir le faire ensemble. Aujourd’hui encore, j’ai du mal à mesurer la chance qu’on a eu. C’est très, très puissant de jouer dans un tel endroit. Même si en France et en Europe, il y a d’autres ingénieurs du son, d’autres studios tout aussi excellents, Abbey Road représente tout le côté mythique des gens qui y sont passés. Ils y ont tous laissé une partie de leur âme.

– La grande majorité des morceaux sont issus de tes trois derniers albums en plus de « Lovely Lie » que je ne connaissais pas, et on en retrouve une grande majorité aussi en bonus tracks sur « Your Journey ». Comment les avez-vous sélectionnés ? C’était un choix établi dès le départ ?

Au départ, on pensait ne pouvoir enregistrer que trois ou quatre titres. On avait juste deux jours et avec le temps de l’installation, l’inconnu vers lequel on se dirigeait avec d’éventuels problèmes techniques qui peuvent prendre du temps, même si c’est du live, c’était assez court. La plupart des versions que nous avons gardées sont en fait les versions ‘one shot’. Certains morceaux ont été joués deux/trois fois maximum et souvent on a gardé la première version. On voulait vraiment quelque chose d’instantané.

Le choix des morceaux a été assez évident. Je tenais absolument à jouer « Selfish Game », qui est un morceau très fort pour moi, qui a une histoire très importante et je voulais que ce soit la première que l’on joue. Ensuite, tout s’est fait très naturellement. On avait bossé « Help » des Beatles, car c’était une évidence. C’est un titre qui nous a emmenés dans ce studio et que je joue depuis mes débuts.

Et il y avait aussi « Lovely Lie » qu’on n’avait pas mis sur l’album « Your Journey » et que l’on a repris en acoustique cette fois. Tout a été très spontané, y compris la reprise en français. On s’est dit qu’à Abbey Road, ce serait bien de jouer un titre en français et puis les gens n’ont pas l’habitude de m’entendre chanter dans notre langue. Tout a été très évident dans ce qu’on a fait en abordant d’autres versions que sur l’album, de les adapter en acoustique et surtout ce sont les morceaux que je voulais absolument jouer là-bas, vraiment. Il n’y a eu aucun calcul, on s’est vite mis d’accord.  

Au final, il nous restait une demi-journée, ce qui n’était pas prévu ! On s’est dit qu’on allait faire « 25 Hours » et « Black Delta Dirt » qui nous ont accompagnés et réunis. Et c’était super de pouvoir faire tout ça. Je parle beaucoup, hein ?! (Rires)

– Et il y a aussi cette reprise du morceau de Gainsbourg chanté par Vanessa Paradis, « Tandem ». Là, on sent clairement de la décontraction dans l’air. C’est un choix étonnant quand on connait ta discographie, même s’il est très bien réarrangé. D’où est venue l’idée ?

C’est un morceau que je chantais toute jeune, avant même de faire des compos. J’essayais de faire des choses en français. Gainsbourg est quelqu’un que j’aime énormément dans l’écriture et qui était l’un des rares à arriver à faire sonner des mots en français de manière anglophone. Il y a un choix dans les mots et dans les mélodies qui était très fort. Et dans la chanson française, j’adore Francis Cabrel et Vanessa Paradis, car ce ne sont pas des chanteurs à voix, mais ils savent faire sonner leurs mots. Et Vanessa Paradis ne se trompe jamais dans le choix de ses textes et cela ne touche sincèrement.

Ce morceau de Gainsbourg, « Tandem », m’avait fasciné et ça reste l’une des chansons que j’aime le plus en français. Et c’était aussi un clin d’œil de l’enregistrer à Abbey Road, comme pour dire que l’on n’oublie pas d’où l’on vient, car ce sont aussi des choses qui ont forgé l’artiste que je suis aujourd’hui. On a essayé d’en faire une version à notre sauce, très roots, dépouillée et surtout on s’est fait plaisir à le faire ! On l’a d’ailleurs enregistré le dernier après-midi.

– C’est un morceau en français et on te sent très à l’aise, autant qu’en anglais. Reprendre une chanson est une chose et un contexte particulier et peut-être plus facile d’ailleurs, mais aimerais-tu à l’avenir écrire aussi des textes en français ?

Tu sais, je n’ai jamais été fermée à chanter en français. Pour le moment, je n’ai pas encore trouvé la recette magique qui nous ressemble pour faire ce que l’on fait actuellement. On essaie de temps en temps de travailler sur des choses, mais je ne trouve pas que ce soit assez représentatif de ce que l’on fait. Naturellement, comme j’ai grandi avec toute cette musique américaine et anglophone et avec cette langue-là, c’est plus spontané en anglais. C’est vrai que c’est paradoxal de dire ça, car ce n’est pas ma langue maternelle.

C’est plus évident pour moi de faire sonner ce que l’on fait en anglais, ainsi que dans l’écriture à travers mes collaborations avec la parolière Angela Randall et avec Neil Black aussi. C’est plus naturel pour moi dans un premier temps. J’ai écrit énormément de choses en français et je trouve que ça ne me ressemble pas. La langue française est pourtant magique. Peut-être que c’est quelque chose que je n’assume pas encore. Je me laisse le temps pour ça. Il vaut mieux faire les choses que l’on a envie de faire. Il faut que les chansons nous habitent et qu’on ait envie de les transpirer sur scène et de les partager.

Photo : Christie Goodwin

– Après cette belle pause, tu vas reprendre les concerts et les festivals pointent aussi le bout de leur nez. Même si cela a du être un bonheur de rester éloignée de la scène, j’imagine que tu dois être impatiente de reprendre la route et de retrouver ton public ?

C’est vrai que ça nous a fait une petite pause, mais c’était pour la bonne cause ! (Sourires) Et je suis très heureuse d’avoir pris ce temps-là pour mon bébé, car c’est important et je veux la voir grandir. C’est aussi une nouvelle partie de ma vie avec des émotions nouvelles. Mais je suis aussi très heureuse de retrouver le public et de pouvoir mêler ma nouvelle vie de maman et de musicienne. Les tournées vont reprendre et je vais également pouvoir en profiter pour voir mon bébé grandir. Et je suis ravie de pouvoir partager tout ça sur scène avec toute mon équipe. On s’est manqué, mais on s’est beaucoup vu pendant cette période où on ne jouait pas !

– Enfin, c’est sûrement un peu tôt, mais est-ce que tu as déjà ton prochain album dans un coin de la tête, d’autant que l’on sait que certains événements de la vie apportent très souvent un supplément de créativité ?

Et oui, figure-toi ! Quand j’ai appris que j’étais enceinte l’année dernière, je me suis dit que ma vie allait être chamboulée et qu’une nouvelle arrivait aussi. J’ai dit aux garçons qu’il fallait qu’on s’organise et qu’on se projette. J’avais envie qu’on écrive, qu’on compose et j’ai essayé d’anticiper beaucoup de choses. On a beaucoup composé en amont et, en fait, une nouvelle source d’inspiration est arrivée. Alors, entre deux biberons et quand elle s’endort, j’écris énormément et je me remets à composer.

Mais j’ai aussi envie de me laisser le temps pour ça, car je découvre de nouvelles émotions en moi, que j’ai envie de dire et tout se fait naturellement. On a beaucoup de choses dans les tuyaux, mais il n’y a pas de sortie d’album prévue à une date précise. On travaille sur beaucoup de choses avec la maison-de-disques aussi. C’est une grande aventure familiale qui se met en place et c’est vraiment super ! On n’a pas de date encore, mais on est en plein dedans ! (Rires)

Ce très bon « Live At Abbey Road Studios » (Verycords) de GAËLLE BUSWEL est disponible sur toutes les plateformes : https://gaellebuswel.lnk.to/AbbeyRoad

Retrouvez également les interviews accordées à Rock’n Force :

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folk

Innessa : une touchante simplicité

La musique d’INNESSA ne manque pas de charme et l’Alternative Folk proposée par la chanteuse, guitariste et compositrice s’ouvre à bien des horizons. Avec « Golden Wreath », la Russe installée en Australie partage un univers assez singulier à la fois slave et celtique, Pop et acoustique… Un moment suspendu.

INNESSA

« Golden Wreath »

(Independant)

Variée et lumineuse, la Folk d’INNESSA montre autant de finesse et de délicatesse que de caractère. Arrivée en Australie depuis sa Russie Natale il y a quelques années maintenant, la chanteuse a déjà sorti trois albums et s’affirme au fil de ses productions. Avec « Golden Wreath », elle présente de multiples visages grâce à une voix limpide, douce et tout en poésie.

Si l’âme slave de la songwriter plane sur « Golden Wreath », d’autres sonorités plus étonnantes viennent alimenter la belle diversité de ce quatrième opus. Très personnel sur le morceau-titre, le style d’INNESSA sait aussi se faire acoustique (« Hollow »), Pop (« Wild Horses », « We », « Strange World »), cinématographique (« Wings ») et très envoûtant (« Wave »).

Autofinancé et très bien produit, l’artiste a apporté un soin tout particulier aux arrangements qui restent  sobres et épurés, mais non sans beaucoup de richesse, comme les interventions de violon notamment. D’une belle naïveté sur « Beneath The Azure Skies », INNESSA nous entraîne aussi dans des ambiances celtiques (« Shallop »), avec une flûte enchanteresse. Très réussi !

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Blues Contemporary Blues International Soul / Funk

Ana Popovic : une leçon de vie [Interview]

Avec son caractère bien trempé et une virtuosité sur laquelle on ne reviendra pas, ANA POPOVIC est probablement l’une des plus grandes blueswomen de son temps. Grande guitariste et chanteuse hors-pair, la Serbe s’est imposée au fil d’albums de plus en plus affinés à travers lesquels elle affirme également de plus en plus sa forte personnalité. Avec « Power », son treizième album, la musicienne et son incroyable groupe libèrent des ambiances savoureuses, le tout dans une atmosphère de liberté et de bien-être. Entre deux concerts, cette grande Dame du Blues m’a fait le plaisir de répondre à quelques questions avec toute la franchise qu’on lui connait. Entretien.

Photo : Brian Rasic

– Après avoir vaincu la maladie, tu reviens avec un album fantastique et vraiment lumineux. Il faut une volonté incroyable pour obtenir un tel résultat aussi stupéfiant. Est-ce que tu perçois « Power » comme un symbole et un moment unique de ta carrière ?

Absolument. Cela a été un réel ‘entraînement ‘ pour moi et un ‘carburant’ pour mon âme. J’y ai mis tout ce que j’avais ! Le processus a été très enrichissant. Le simple fait de le concevoir m’a donné tellement de joie et cela a aussi guéri ma douleur dans les moments difficiles. Je l’ai abordé très sérieusement. Je ne voulais rien de faible sur le disque. De chaque musicien, de chaque partie, de chaque arrangement et à chacune des performances, je voulais TOUT donner et j’attendais aussi le meilleur des musiciens.

– Justement, le titre de l’album est très évocateur et les morceaux parlent aussi de cette force dans l’unité à travers l’amitié et l’acceptation de l’autre. Est-ce que les épreuves que tu as traversées t’ont donné un regard nouveau sur la société et notre époque ?

Oh non, j’ai toujours eu cette perspective. Buthel (Burns, bassiste – NDR) et moi avons grandi dans des foyers différents. J’ai grandi dans une famille aimant la musique et la fête en Serbie, et lui dans une famille aimant la musique et la fête dans le Michigan. Mais nous avons tous les deux le même goût pour la musique. Par exemple, nous aimons des thèmes de l’unité et de l’acceptation, ce que l’on peut aborder à travers la musique. Nous avons tous les deux adoré le ‘Live Aid’, quand le monde entier se réunissait pour aider l’Afrique. Et aussi, Paul Simon et son groupe africain, les duos d’Aretha Franklin avec différents artistes, ou lorsque Stevie Wonder pose un regard émouvant sur la vie. C’était donc le bon moment pour s’attaquer à tous les maux du monde : l’injustice sociale, le racisme, la lutte des femmes pour l’acceptation et leurs libertés, les droits des LGBT… Vivez et laissez vivre ! Cela a toujours été ma devise.

Photo : Brian Rasic

– Tu as composé l’album avec ton bassiste et directeur musical Buthel et, entre Los Angeles et Amsterdam où tu te soignais, les choses n’ont pas du être simples. Comment as-tu vécu cette expérience inédite et est-ce que tu penses que « Power » aurait eu le même éclat dans une configuration plus ‘normale’ ?

Oui, je pense que cela aurait été le cas. Après tout, nous travaillions déjà sur ces chansons avant que je sois diagnostiquée. Mais cela a sûrement apporté de l’intensité et plus de sensations aux chansons, c’est sûr. On peut dire que « Power » a été habité par les événements de ma vie personnelle, bien sûr. Mais les chansons et leurs messages positifs auraient été là quoiqu’il en soit. Nous avions commencé à écrire ces chansons avant mon traitement et nous avions des bribes de morceaux qui avaient juste besoin d’une touche finale, au contraire d’autres qui ont été composées à partir de zéro. Mais ce que cette période m’a offert, c’est une envie de les terminer et de livrer un bilan positif à travers un excellent disque, déjà pour moi-même en premier lieu. Si cela avait été mon dernier disque, pour une raison quelconque, quel genre de message aurais-je laissé derrière moi ? C’est en tout cas la question que je me suis toujours posée pour chaque album.

– On sent un engagement total sur « Power » et pourtant il s’en dégage beaucoup de sensibilité, de délicatesse et même de douceur. Tu n’as été tentée d’écrire un album plus nerveux et plus musclé compte tenu des circonstances, peut-être en guise de rébellion ?

J’ai fait exactement ce que je voulais ! Le disque a tout pour plaire. « Luv ’n Touch » est aussi sensible, profond et délicat que possible ! « Recipe Is Romance » et « Deep Down » sont doux, pleins de sentiments, de désir et parlent du manque d’une personne… de l’aimer dans les moments difficiles de notre vie. Il y a beaucoup de nuances sur ce disque, de la sensibilité et de la délicatesse, ainsi que de la rébellion et du caractère comme sur « Queen Of The Pack », « Flicker ‘n Flame », « Power Over Me » ou « Turn My Luck ». Et il y a aussi de la pure luxure sur « Strong Taste ». On trouve également beaucoup de choses mystérieuses et de petites surprises dans chaque chanson, que ce soit dans des changements de tempo inattendus, des chants de type gospel et d’autres passages forts qui vous transportent.

Photo : Brian Rasic

– Tu sembles aussi très sereine dans ton jeu et au chant et cela se ressent notamment sur le morceau « Queen Of The Pack ». Là encore, tu dégages beaucoup de force et d’énergie. Quelle était l’intention première de cette chanson ?

C’est exactement ça. C’est déjà assez difficile comme ça d’affronter et de diriger un groupe formidable, même composé de joueurs d’excellence. Je dois donc jouer le rôle de la reine de la meute et leur faire savoir exactement ce que je veux et comment je le veux. Ces dernières années, j’ai une conduite plus fluide en ce qui concerne les membres de mon groupe, mais par le passé, il y a eu des moments où j’ai senti que je devais ‘taper du poing sur la table et leur montrer qui était la Boss Lady !’. C’est mon travail en tant que leader de livrer un excellent spectacle et je tiens absolument à faire ça !

– Un petit mot aussi au sujet de « Rise Up ! » qui ouvre l’album et qui est signé Kenny Wayne Shepherd, qui est un ami de longue date. C’est assez étonnant de commencer un disque avec le morceau d’un autre, surtout quand on a composé tout le reste. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ? 

Les paroles et l’ambiance générale de la chanson, tout d’abord. La façon dont nous l’avons faite est différente de l’originale et elle est très fédératrice. Je voulais ‘sonner le rappel des troupes’ pour changer tout ce qui ne va pas dans le monde aujourd’hui. Et je voulais aussi une chanson assortie à la pochette du disque (deux mains noires et blanches se tenant comme symbole du bien, de l’unité et du pouvoir). Donc, « Rise Up » s’imposait. Et cela avait aussi une signification particulière pour moi quand je l’ai entendu pour la première fois, alors que je traversais ce que je vivais. Cela m’a donné de l’optimisme et l’envie de continuer.

Ana et Buthel Burns – Photo : Brian Rasic

– « Power » est bien plus qu’un simple album de Blues, puisqu’il contient beaucoup de sonorités Rock, Soul, Jazz, Afro-Beat et Funk. On perçoit un énorme élan de liberté. C’est pour cette raison que tu as voulu aborder autant de variétés musicales et de styles différents ?

Putain, ouais ! Je voulais faire exactement ça ! La musique devrait TOUJOURS te faire te sentir libre. Elle doit ressembler à la liberté : celle de s’exprimer et de tout explorer. C’est le plus grand défi et aussi une récompense. Je tenais absolument à mettre quelque chose de nouveau sur la table ! Quelque chose que personne n’avait fait auparavant. On ne peut pas comparer ce disque et son style musical à quoi que ce soit d’autre existant déjà. Nous sommes dans notre propre voie ! Il y a beaucoup d’influences et c’est ça ANA POPOVIC !

– Tu es comme toujours très bien entourée avec une section cuivre conséquente et des choristes incroyables, qui apportent beaucoup de chaleur. Il y a un esprit très ‘Big Band’ sur « Power ». C’est justement pour affirmer cet aspect d’unité et de fraternité qui règne que les chansons que l’ensemble du groupe est autant mis en avant ?

Oh oui ! C’est cette unité qui rend mon groupe si incroyable. J’ai toujours eu le don de faire sonner n’importe quel musicien du groupe, parce que je mettais en évidence ses forces et que je cachais ses faiblesses musicales. Mais à ce stade de ma carrière, j’ai enfin un groupe des deux côtés de l’océan, dans lequel je n’ai pas besoin de cacher quoi que ce soit. Je dois juste mettre en évidence leur incroyable talent et qu’ils continuent de dévoiler de plus en plus leurs qualités. C’est parfois époustouflant de diriger un tel groupe. Et c’est très enrichissant.

Photo : Brian Rasic

– J’aimerais que l’on parle de ton jeu de guitare qui est très aérien, tout en feeling et peut-être moins ‘shred’ que d’habitude. Tu as dit que ta Stratocaster de 1964 t’avait sauvé la vie. Quel un impact cela a-t-il eu sur ton jeu et au moment de composer l’album ?

Sur les albums, j’ai toujours mis la guitare au service de la chanson. Shred, tu dis ? Trop de guitares ? Viens me voir en live ! La musique est mon art, à travers mes chansons et je ne mets jamais en péril la valeur d’un morceau au profit d’aucun instrument, y compris la guitare. C’est la chanson qui tient la première place. Les guitares sont sauvages quand cela est nécessaire, et elles sont plus subtiles quand il le faut. Mais ne vous y trompez pas, il y a plein de guitares sur « Power » !

– Ton album sort sur ton propre label, ArtisteXclusive, Là encore, cela montre à quel point ta liberté artistique est importante. Qu’est-ce que cela t’apporte concrètement et as-tu dans l’idée de signer d’autres artistes ?

Ce serait bien de signer d’autres artistes, si j’avais le temps pour ça ! Il n’y a vraiment plus besoin d’être signé sur un label de nos jours. Vous pouvez faire tellement de choses par vous-même. C’est l’avantage de cette période dans laquelle nous sommes. Sauf si c’est énorme et qu’on ne peut pas le refuser, bien sûr.

– Enfin, tu es venue en Europe et notamment en France pour une série de concerts, alors que « Power » n’était pas encore sorti. Tu avais un besoin irrésistible de retrouver la scène au plus vite ?

Oui, j’avais ce besoin irrésistible de jouer ces chansons et nous avions cette tournée prévue bien avant le jour de la sortie de l’album. Particulièrement en France, car c’était ma façon de tester les chansons et ça n’a jamais été aussi bon ! On a travaillé ces morceaux pour la scène. Tout était prêt et le public s’est régalé. Les gens n’ont pas eu besoin d’un moment d’échauffement et ils n’ont pas eu besoin non plus d’écouter l’album à la maison avant. C’est ça ‘l’amour de la première écoute !’.

Le nouvel album d’ANA POPOVIC, « Power », est disponible partout, via son label ArtisteXclusive.

Retrouvez la chronique : https://rocknforce.com/ana-popovic-une-incroyable-ferveur/

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Blues Country Rock

Samantha Fish & Jesse Dayton : sensuel et sauvage

On aurait pu s’attendre à un simple album de Blues Rock de la part de la blueswoman SAMANTHA FISH et du rockeur JESSE DAYTON, mais c’eût été trop facile et tellement prévisible surtout. Avec des caractères aussi trempés, c’est donc assez logiquement que les deux artistes se livrent à travers des compositions qui leur ressemblent, les différencient aussi et les subliment. Roots et sincère !

SAMANTHA FISH & JESSE DAYTON

« Death Wish Blues »

(Rounder Records)

Il y a un mois, de passage à Paris, SAMANTHA FISH me faisait le plaisir se répondre à quelques questions dans une interview consacrée à « Death Wish Blues », premier album en duo avec le rockeur JESSE DAYTON. Explosif et différent de ce que l’Américaine propose en solo, le disque arrive enfin et, réalisé sous la houlette du grand Jon Spencer, il ne manque pas de piquant et explore bien des horizons.

Sur le papier, la rencontre entre SAMANTHA FISH et JESSE DAYTON promet des étincelles comme on avait déjà pu le constater sur l’EP de reprises « The Stardust Sessions », sorti en décembre dernier. Et les morceaux présentés ici vont même au-delà de toute attente. Enregistré en seulement dix jours dans un studio de Woodstock dans l’Etat de New-York, « Death Wish Blues » est plus que séduisant : il ensorcelle.

Si les deux personnalités sont très fortes, leur complicité est évidente et les nuances artistiques du tumultueux tandem sont même surprenantes. Bien sûr, on parle ici de Blues, d’un Rock’n’Roll brut et authentique, mais aussi de petites escapades dans des contrées Soul et forcément d’une Country très alternative. SAMANTHA FISH & JESSE DAYTON propose un véritable bain de jouvence. Attitude et émotion sont au rendez-vous.

Retrouvez l’interview de SAMANTHA FISH accordée à Rock’n Force :

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Blues Contemporary Blues Soul / Funk

Ana Popovic : une incroyable ferveur

Combative et pleine d’ardeur, c’est une ANA POPOVIC ressourcée et d’un optimisme incroyable qui revient avec « Power » sur le devant d’une scène qu’elle ne quitte plus. L’artiste a écrit et composé cette nouvelle réalisation à un moment compliqué pour elle et son Blues coloré montre une vigueur et une puissance mélodique rare et d’une authenticité qui force le respect.

ANA POPOVIC

« Power »

(ArtisteXexclusive Records/Socadisc)

Mener de main de maître une superbe carrière durant 25 ans n’exclue pas de devoir traverser les difficiles épreuves de la vie. C’est précisément ce que vient de faire ANA POPOVIC qui a trouvé dans la musique, bien aidée par sa Stratocaster de 1964, la force et la détermination pour vaincre la maladie. Et il en résulte ce majestueux « Power », soigneusement élaboré à Detroit, une cité tellement emblématique.

Et ce combat, la virtuose serbe l’a effectué main dans la main avec son bassiste et ami Buthel Burns, comme en témoigne la pochette de ce très bon treizième album. Malgré sa production très feutrée, « Power » sonne comme une libération à l’ambiance festive et enjouée. Groovy et sensuel, le registre d’ANA POPOVIC passe d’un Blues aérien à un Rock nappé de Soul, le tout entrecoupé de quelques éclats de Funk et de Jazz.

Malgré une configuration assez ‘Big Band’, l’ensemble est comme toujours d’une grande sobriété, la guitariste s’évertuant à se mettre au service des morceaux, tout en gardant le panache qu’on lui connait (« Queen Of The Pack », « Power Over Me », « Flicker’n Flame »). ANA POPOVIC se régale, cela s’entend, et nous régale aussi en éclaboussant de son immense talent ce nouvel opus, l’un de ses meilleurs. Immanquable !

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Atmospheric Doom

Messa : une performance inouïe et unique

Doté d’une qualité sonore exemplaire, ce premier témoignage live de MESSA va en scotcher plus d’un ! En l’espace de seulement quatre (longs !) morceaux, tous extraits de sa dernière réalisation « Close », la formation italienne, qui a convié d’éminents invités, présente l’exceptionnelle prestation offerte lors du festival Roadburn aux Pays-Bas l’année dernière. La dimension palpitante du concert est d’une rare beauté et d’une alchimie totale.

MESSA

« Live at Roadburn »

(Svart Records)

Malgré une discographie composée uniquement de trois albums, deux splits et trois singles, MESSA est parvenu à s’imposer sur la scène Doom grâce à un style et une approche originale et pour le moins singulière. Fondé en 2014, le quatuor repousse sans cesse les frontières du genre en jouant sur son côté massif, mais surtout sur les atmosphères en parvenant à véritablement sublimer des compositions étonnantes.

L’an dernier au festival Roadburn en Hollande, MESSA a livré un set de quatre titres éblouissant, qui a hypnotisé les spectateurs tant la prestation a été intense et envoûtante. D’ailleurs, il suffit d’écouter ce live pour saisir la discrétion habitée de respect du public présent. Et pour l’occasion, les Transalpins se sont présentés avec un line-up élargi pour interpréter au plus près quatre extraits du récent opus « Close ».

Et la magie du dernier album de MESSA est parfaitement restituée grâce à l’apport des guests, mais aussi et surtout sous l’impulsion de sa chanteuse Sara. Sa force et son aura portent littéralement les morceaux, qui se fondent dans des ambiances orientales captivantes. « Suspended », « Orphalese », « 0=2 » et « Pilgrim » nous font voyager dans d’incroyables paysages sonores. Incontournable !  

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Americana Blues Rock Classic Rock

Bourbon House : Roots’n’Roll

Le Rock très Blues et Americana de la formation du Wisconsin tire ses influences de la musique roots américaine. BOURBON HOUSE est parvenu à se forger un style et une sonorité très distinctive, grâce notamment à sa chanteuse, mais aussi et surtout à des morceaux d’une grande fraîcheur et d’une spontanéité de chaque instant sur ce très bon « The Fourth Album ».

BOURBON HOUSE

« The Fourth Album »

(Independant)

Comme annoncé il y a moins de deux mois dans l’interview à lire-ci-dessous, BOURBON HOUSE livre « The Fourth Album ». Judicieusement intitulé, il s’agit donc de la quatrième réalisation du groupe, qui avait déjà commencé à diffuser plusieurs singles depuis un bon moment. Très peu adepte des morceaux distillés au compte goutte et briseur, selon moi, de l’unité d’un l’album, c’est donc un plaisir de découvrir les onze morceaux réunis, d’autant qu’ils bénéficient d’une très bonne production.

Faisant suite à « Resonate », « Out For Blood », « High Road Gypsy », « Blue Magic » et « 20 To Life », on découvre les quatre titres inédits et deux versions acoustiques très réussies. Electrique ou unplugged, BOURBON HOUSE fait mouche à chaque fois et il faut reconnaître que son Rock’n’Roll brut et épuré mâtiné de Blues et d’Americana offre de multiples possibilités dans lesquelles les Américains s’engouffrent avec brio. 

Mené par la voix chaude et puissante de Lacey Crowe et les riffs endiablés du songwriter Jason Clark, BOURBON HOUSE franchit véritablement un palier avec « The Fourth Album », tant en ce qui concerne les compostions que l’attention apportée au son (« Love Is A Killer », « Villain », « Hotel Bar Blues », « Wild Days »). En toute logique, la prochaine étape devrait passer par un label, même si pour l’heure, ils ne semblent pas très emballés…

Retrouvez l’interview accordée à Rock’n Force : https://rocknforce.com/bourbon-house-le-rock-a-pleine-gorgee-interview/

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Blues Rock International

Samantha Fish : Jesse Dayton… et la foudre [Interview]

Dans un peu plus d’un mois, la fougueuse blueswoman américaine sortira un album avec son alter-ego Jesse Dayton, « Dead Wish Blues ». Cette réalisation originale a été composée à deux et fait suite à un EP de reprises, « The Stardust Sessions » paru en fin d’année dernière. Explosif, le duo souffle le chaud et le froid sur des morceaux souvent nerveux et parfois plus tendres et posés. SAMANTHA FISH montre ici toute la palette de son jeu, que ce soit à la guitare comme au chant. Récemment de passage à Paris, elle a répondu à quelques questions.

– En décembre dernier, tu avais déjà créé la surprise en sortant avec Jesse un EP de reprises, « The Stardust Sessions ». Même si vous vous connaissez depuis longtemps tous les deux, est-ce que c’est lors de ce premier enregistrement qu’est née l’envie de composer un album entier et original ensemble ?

Je pense que nous avions déjà tous les deux l’idée de faire un album complet avant de commencer la session de l’EP. C’était un peu une surprise, car nous sommes juste allés en studio pendant un après-midi pour voir ce que nous pouvions faire. Le label a pensé que c’était un bon moyen de présenter le projet au public avant la sortie d’un album complet. Puis, nous avons commencé à travailler sur l’écriture des chansons immédiatement après cette session.

– Avec Jesse, vous venez d’horizons musicaux assez différents et pourtant il y a une réelle alchimie entre vous sur l’album. Comment s’est passé le travail de composition ? Vous vous êtes proposé mutuellement vos propres chansons, ou vous avez fait les choses en commun ?

Nous avons fait une grande partie de l’écriture des chansons ensemble. La plupart des titres que nous partageons sont d’ailleurs créditées à nos deux noms. Nous n’en avons écrit que quelques-uns de notre côté et j’ai aussi fait venir mon partenaire de longue date, Jim McCormick, pour quelques morceaux.

– Si on connait déjà ta fougue naturelle, tu parais totalement débridée sur « Death Wish Blues ». Tu as abordé l’album comme une sorte d’exutoire ? Une grande récréation ?

Cet album a sa propre personnalité, je pense. Ma capacité à aller toujours plus loin vers quelque chose de différent est surtout venue de la collaboration de Jesse et Jon (Spencer – NDR). Parfois, cela vous pousse vers de nouveaux lieux en termes de création et cela enlève également une partie de cette pression de toujours rester dans un certain périmètre. Quand il s’agit uniquement de mes albums, je fais constamment des petits contrôles pour m’assurer que je reste fidèle à ma propre vision et à mon style… Mais cette fois, je me suis sentie libre de vraiment tout essayer.

– L’album a été enregistré en 10 jours à Woodstock et avec Jon Spencer aux commandes. C’est un rythme très soutenu pour un album complet et il sonne d’ailleurs très live. Il vous fallait faire vite pour délivrer et conserver cette impression d’urgence qui prédomine ?

La plupart de notre temps a été consacré à la pré et à la post-production. Et à peu près autant que pour l’écriture et la composition, tout comme pour le mixage, le mastering et la création des illustrations autour de l’album. Cela peut parfois prendre des mois. La musique elle-même consiste à capturer un moment spécial et précis. Certains de mes disques, parmi mes préférés, ont été faits en cinq jours. Ce n’est pas par négligence. Là, nous voulions immédiatement capturer et saisir cette foudre, donc cela doit être abordé d’une certaine manière.

Photo : Daniel Sanda

– D’ailleurs, comment s’est passé ce travail avec Jon Spencer, dont on connait les habitudes assez peu académiques ? Vous vous connaissiez déjà tous les trois ? Et a-t-il un peu bousculé ta façon de travailler en studio ?

Jesse et moi travaillions ensemble depuis un moment déjà et nous avions aussi commencé à co-écrire tous les deux et puis, il y a eu l’enregistrement de l’EP. Nous avons tous les deux rencontré Jon en studio. Je le considérerais un peu comme un prof, peut-être non-conventionnel dans son approche, c’est vrai. Il a passé beaucoup de temps derrière les consoles et il est également très intuitif sur la structure des chansons. Il a su comment tirer le meilleur son de chaque instrument. Je vais d’ailleurs certainement travailler dans ce sens avec ce que j’ai appris avec lui à l’avenir. J’ai aussi beaucoup appris sur le matériel, les magnétophones, etc… ainsi que sur la façon d’aborder les chansons pour en tirer le meilleur à chaque performance.

– Sur l’album, vous explorez avec Jesse des styles qui vont du Blues à la Country en passant par du Rock Garage et avec une énergie presque Punk parfois. Tu commençais à te sentir à l’étroit dans un registre que tu maîtrises parfaitement,  ou ce sont des musiques que tu as toujours écoutées et peut-être même déjà jouées ?

Je pense que mon style a toujours été très varié, mais définitivement ancré dans le Blues, c’est vrai. Cependant, il a pris des caractéristiques différentes d’un album à l’autre. J’ai une gamme assez large à travers la musique que j’écoute et c’était l’occasion de creuser un peu plus du côté agressif et Rock’n’Roll de ma personnalité.

Photo : Daniel Sanda

– A l’écoute de ce très bon et enflammé « Death Wish Blues », il y a une question qui vient tout de suite à l’esprit : y aura-t-il une suite à cette belle aventure ou s’agit-il juste d’un one-shot ?

Pour l’instant, nous avons fait ce disque et nous prévoyons de le jouer en concert, comme nous le faisons actuellement. Et puis, nous avons aussi nos propres projets en ligne de mire. Mais on ne sait jamais, nous pouvons très bien continuer et faire quelque chose de nouveau en chemin. Mais il faut d’abord sortir ce disque.

– On sait que tu tournes toujours beaucoup, mais est-ce que tu as déjà une petite idée du successeur de « Faster », sorti il y a deux ans ? Te sachant très active, est-ce que tu as déjà commencé à composer ?

J’ai quelques idées. J’ai recommencé à écrire. Parfois, il faut aussi se permettre de vivre sa vie. Bien qu’il s’agisse d’un disque de collaboration pour « Death Wish Blues », il m’a fallu la même quantité d’énergie pour l’écrire, autant que pour un album solo. Je m’investis totalement dans ma musique. Pour l’instant, je retourne un peu dans ma bulle pour commencer à écrire et composer, mais je n’en suis qu’au stade le plus précoce.

– Pour conclure, j’aimerais que tu me donnes ton regard sur la scène Blues féminine qui connait une incroyable effervescence depuis quelques années maintenant. Y a-t-il parmi toutes ces musiciennes certaines avec qui tu aimerais collaborer ? Des françaises aussi peut-être ? Je pense à Laura Cox, Gaëlle Buswel, Nina Attal, Jessie Lee, …

Je ne connais pas aussi bien que je le devrais tous les artistes de la scène contemporaine, hommes ou femmes. Je suis vraiment concentré sur mon travail et j’ai aussi écouté des artistes d’autres styles. Mais je sais qu’il y a plus de jeunes talents sur la scène Blues aujourd’hui qu’il n’y en a eu depuis longtemps. Je suis ouverte à toutes sortes de collaborations, tant qu’elles servent les chansons.

L’album de SAMANTHA FISH et de JESSE DAYTON, « Death Wish Blues », sortira le 19 mai chez Rounder Records et le duo fera une halte le 31 mai au Bataclan à Paris pour une soirée qui s’annonce déjà mémorable et brûlante !

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International Pop Rock Rock

Amy Montgomery : l’âme d’une guerrière [Interview]

Originaire de Belfast en Irlande du Nord, AMY MONTGOMERY a une personnalité très forte qui ne peut laisser indifférent. Musicalement, son registre est vaste et même s’il tourne autour d’un Rock efficace et direct, les émotions qu’il véhicule sont tout aussi saisissantes. Indépendante, la chanteuse et multi-instrumentiste vient de livrer un nouveau single, « Change Change », accrocheur et doté d’une énergie incroyable. Nul doute qu’AMY MONTGOMERY ne tardera pas à fouler les scènes françaises. Alors, avant de la découvrir en concert, entretien avec une artiste hors-norme et très attachante.  

– Ce qui m’a le plus surpris lorsque je t’ai écouté pour la première fois, c’est cette force qui émane de toi et bien sûr de ta voix. Est-ce que c’est quelque chose que tu as toujours eu en toi ?

J’avais huit ans quand j’ai commencé à jouer sur scène et à l’époque, ma voix était vraiment chétive ! Ma force vocale est venue après des années de pratique, de concerts et d’apprentissage. Après quelques expériences de vie difficiles aussi, je peux vraiment dire qu’elles m’ont aidée à devenir une femme très résiliente. La performance me donne de la force dans la vie et la vie me donne de la force dans la performance.

– Sans revenir sur les drames que tu as traversés adolescente, j’ai aussi l’impression que tu te nourris de cette douleur pour en faire quelque chose de très positif. C’est cette démarche que tu suis à travers ta musique aujourd’hui ?

Oui, absolument. Parfois, je l’exprime dans une chanson très directe, parfois dans une ballade au piano déchirante, parfois dans une chanson Rock aux riffs lourds comme « Change Change ». C’est toujours différent. Mais oui, beaucoup de mes intentions dans l’écriture viennent de mes expériences de vie d’enfant et d’adolescente, ainsi que de choses qui se passent dans le monde et aussi dans ma vie à un moment donné.

– Avant de parler de ton nouveau single « Change Change », j’aimerais que tu me dises un mot au sujet de tes prestations scéniques. Tu te présentes avec un maquillage très guerrier et des tenues assez provocantes. C’est un personnage que tu endosses pour te préserver, ou c’est la véritable AMY MONTGOMERY ?

Ah !!! Eh bien, nous devons d’abord nous demander ce qu’est le ‘vrai’ dans chaque chose, non ? Le personnage que j’incarne sur scène est bien sûr la vraie AMY MONTGOMERY, mais peut-être juste en version un peu exagérée. Je pense que la plupart des gens sont toujours agréablement surpris lorsqu’ils discutent avec moi après un concert. Je ne suis pas aussi effrayante ou féroce que ce que j’ai l’air sur scène. Pour moi, la scène est un lieu où je peux m’exprimer librement, à travers le mouvement, la musique, le chant et bien sûr visuellement à travers les vêtements. Enfiler mes tenues un peu dingues et ma peinture de guerre est un rituel. Cela me rappelle ma force et, à son tour, rappelle au public sa propre force aussi.

– Ce qui est étonnant, c’est que tu es très jeune et pourtant tu as déjà sorti plusieurs singles, EP et un mini-album « Alterations ». Et tu as également tourné dans le Royaume-Uni, bien sûr, mais aussi en Allemagne, en Suisse et même en Australie. Tout semble s’enchainer très rapidement… 

Oui, j’ai été très chanceuse avec les opportunités qui se sont présentées à moi très jeune. A 18 ans, j’avais signé un contrat de management et à 20 ans, j’avais signé avec une agence de booking. J’ai toujours su que la musique était ma passion la plus profonde et je pense que si vous aimez suffisamment quelque chose, vous ne laissez rien vous empêcher de la réaliser. J’ai travaillé, et je travaille toujours extrêmement dur, sur ma carrière musicale. J’ai fabriqué moi-même tout le merchandising et les bénéfices ont financé des tournées complètes, et en groupe, au Royaume-Uni, en Irlande et en Allemagne. J’avais même tout booké moi-même avant même d’avoir un tourneur ! Il a fallu six ans pour arriver au niveau où je suis maintenant et il y a encore un sacré chemin à parcourir ! C’est un voyage d’apprentissage constant et je l’aime !

– Parlons de « Change Change », ton nouveau single qui vient de sortir. Il propose une production très ample et puissante et tu sembles musicalement franchir un cap avec une énergie incroyable. Au regard de tes précédents morceaux, on dirait qu’il annonce et amorce un nouveau départ. C’est le cas ?

« Change Change » est définitivement plus lourd avec un ton légèrement différent de mes morceaux précédents, mais je pense qu’il y a toujours un même sentiment qui s’en dégage. J’ai toujours été influencé par la musique Rock en grandissant avec des groupes comme Black Sabbath, AC/DC et Eagles, donc c’est vraiment génial de sortir une chanson qui se penche davantage sur mes influences classiques et solides. Il s’agit d’un processus constant plutôt que d’un nouveau départ.

– J’imagine qu’un album va suivre. Est-ce que peux nous en dire un peu plus ? Est-il déjà entièrement composé et as-tu commencé à enregistrer quelques morceaux ?

En octobre, je vais sortir un EP qui inclura « Change Change ». 2024 sera l’année de la sortie de mon premier album. Je coproduis mes chansons avec mon partenaire Michael Mormecha et nous avons notre propre studio, donc il y a toujours des chansons en cours d’enregistrement. Et nous aurons beaucoup de chansons et d’idées dans lesquelles piocher pour l’album !

– En écoutant tes morceaux depuis tes débuts jusqu’à aujourd’hui, il y a une grande évolution et une belle maturité, tant dans l’écriture que dans l’interprétation. Quelles sont les étapes franchies et est-ce que tu as le sentiment qu’avec « Change Change », tu livres enfin la musique que tu as toujours voulu écrire et chanter ?

Quand j’ai sorti mon premier single « Dangerous », c’était la musique que j’avais toujours voulu écrire. Quand « Intangible » est sorti, c’était encore la musique que j’avais toujours voulu écrire. Aujourd’hui, je joue rarement « Dangerous » en live, parce que je ne le ressens plus comme avant. C’est peut-être parce que je l’ai tellement joué, et aussi parce que le temps passe et mes goûts et mes envies changent. Je pense que beaucoup d’artistes diraient la même chose… C’est un peu comme aimer porter un t-shirt pendant un moment, puis vouloir porter autre chose après. Parfois, vous retournez dans votre garde-robe et vous sortez un vêtement que vous avez oublié. En ce moment, j’aime vraiment mélanger des guitares massives avec des synthés. J’adore « Change Change », mais je suis sûr que dans un an ou deux, j’aurai envie de faire à nouveau un style de musique différent. C’est la nature et la beauté de la créativité. Et comme je le dis souvent : « On ne peut pas aller contre le changement ! » (Sourires)

– Tu es d’ailleurs une songwriter accomplie et ton écriture est de plus en plus efficace. De quelle manière travailles-tu tes chansons ? On a l’impression que c’est le texte qui sert de guide…

Mon processus d’écriture est toujours différent, mais la plupart du temps, la musique est écrite en premier, puis c’est presque comme si les paroles et la mélodie vocale en découlaient toutes seules. J’ai écrit « Change Change » au piano et les paroles et la mélodie des couplets et du refrain sont venues très rapidement et naturellement. Pourtant, je n’ai écrit le pont que deux ans plus tard. Musicalement, la chanson sonne complètement différemment de la première mouture. Je l’ai remanié en studio avec les talents magiques de multi-instrumentiste de Michael Mormecha. Nous l’avons reconstruite autour du riff de guitare que vous entendez maintenant. J’adore discuter de l’évolution d’une chanson. Certaines s’étalent dans le temps plus que d’autres. J’ai d’ailleurs une nouvelle page Patreon, où je partage tous ces ‘coulisses’ de ma vie et de l’écriture des chansons pour tous ceux qui souhaitent s’abonner !

– Si on écoute attentivement « Change Change » d’un côté et des chansons comme « Old Photographs » ou « Dangerous » de l’autre, on peut y entendre nettement les influences d’Alanis Morissette et de Beth Hart notamment. Ce sont deux artistes qui semblent t’avoir beaucoup marqué, non ?

Alanis Morissette a définitivement eu un énorme impact sur moi. Non seulement elle est une compositrice et une interprète fantastique, mais c’est aussi une femme très intelligente émotionnellement, ce qui est super inspirant. Ma sœur a 14 ans de plus que moi et c’est elle qui m’a vraiment fait découvrir Alanis Morissette, alors que je n’avais que neuf ans. J’admire aussi profondément Beth Hart, mais je n’ai découvert sa musique qu’il y a quelques années. Je l’ai vue en concert pour la première fois il y a quelques semaines à peine. J’ai vraiment frissonné très profondément grâce sa performance très expressive, sa voix et son écriture incroyables !

– J’aimerais aussi que tu me dises un mot de ta reprise de Sharon Van Etten, « Jupiter 4 », qui est vraiment magnifique. Pourquoi ce choix et est-elle aussi une chanteuse qui t’inspire ?

En 2019, j’ai découvert Sharon Van Etten au ‘Festival de Glastonbury’, la veille de mon passage. C’était une artiste dont je n’avais jamais entendu parler et la découvrir à ce spectacle a été vraiment époustouflant. Je ne pouvais pas croire que je n’avais jamais entendu parler de sa musique auparavant ! « Jupiter 4 » a explosé en moi en live à travers le son et aussi avec la présence venue d’ailleurs de Sharon Van Etten. Ca m’a rendu accro. Le désir dans sa voix sur cette chanson m’a amené à vouloir la reprendre. Sur ma reprise, je joue d’ailleurs de tous les instruments : batterie, basse, piano et chant !

– Un mot aussi sur tes prestations scéniques qui sont explosives et pleines d’énergie. A te voir, on a vraiment l’impression que c’est là que tu peux t’exprimer le mieux et te libérer à travers des morceaux parfois écorchés mais surtout, une fois encore, d’une grande force. Tu vois et abordes tes concerts comme le but et l’objectif ultime de ton travail d’artiste ?

En ce moment, oui ! Le live est ce qui compte le plus pour moi. Je pense que les gens ont besoin de voir me voir en live pour bien comprendre ce que je fais artistiquement. J’ai cependant beaucoup d’idées créatives et à l’avenir, je pense d’ailleurs que je sortirai de la musique sous un nom d’artiste différent, uniquement pour l’écouter et sans intention de la jouer sur scène.

– Chose étonnante encore, tu produis ta musique en indépendante. Est-ce que des labels se sont déjà manifestés, ou préfères-tu conserver une totale liberté sur la musique, du moins pour le moment ?

J’aime produire ma musique de manière indépendante, mais je pense également qu’il est vraiment avantageux d’être sur un label pour obtenir la promotion nécessaire. J’ai des labels en tête avec lesquels j’aimerais travailler, mais aucun ne m’a encore approché. C’est un long chemin. Mais pour l’instant, je suis contente de continuer à me produire de manière indépendante, car cela a aussi de nombreux avantages !

– Belfast est une ville de contrastes, où beaucoup de combats très variés sont menés. Est-ce qu’à travers ta musique, il y a certains messages que tu souhaites faire passer et certains combats que tu peux peut-être aussi mener parallèlement, car on te sent très engagée ?

Oui, définitivement ! Dans ma musique, il y a à la fois une bataille constante et un message d’acceptation. Je pense que c’est le reflet de la vie en elle-même… ou de la vie telle que je la vois en tout cas. Nous rencontrons des difficultés comme la perte et le chagrin, mais nous éprouvons aussi de la joie et nous surmontons des obstacles. J’aime présenter ces dualités dans ma musique, sachant que nous avons tous besoin de lutter pour savoir ce qu’est la liberté. Enveloppez tout ça de riffs rock, de tenues folles et de peintures de guerre et l’écriture et la performance deviennent un rituel en soi !

Retrouvez le nouveau single d’AMY MONTGOREMY, « Change Change », et toute son actualité sur son site :

https://www.amymontgomery.me/

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Hard 70's Proto-Metal

Red Cloud : rockin’ cumulus

Fortement ancré dans les seventies, RED CLOUD semble procéder, dès son premier effort, à un retour aux sources du Rock et même du Hard à travers leur registre originel, qu’il a pourtant réussi à renouveler. Car il règne un souffle vivifiant et très actuel sur ce « Red Cloud », qui se fond parfois même dans des sonorités Psych vraiment bienvenues. Le combo a de la suite dans les idées et cet opus ne manque pas d’originalité.    

RED CLOUD

« Red Cloud »

(Independant)

Tout semble être allé très vite pour le quintet parisien, même si Roxane Sigre (chant) et Rémi Bottriaux (guitare) sont déjà à l’œuvre en duo depuis 2018. Avec les arrivées de Maxime Mestres (basse), Laura Luiz (orgue) et Mano Cornet Maltet (batterie), RED CLOUD prend forme trois ans plus tard et le groupe entame les concerts pour y roder son répertoire. Les choses dans l’ordre en somme…

Enregistré, mixé et masterisé par son guitariste, ce premier album éponyme tient toutes ses promesses. Sur des ambiances vintage revendiquées, RED CLOUD livre un Rock Hard 70’s aux contours proto-Metal frais et dynamique. Mais si les influences se nichent quelques décennies en arrière, il n’en est rien des morceaux et surtout de la production qui les habille et qui affiche une belle modernité.

Sur une énergie très live et un son organique, RED CLOUD enchaine les morceaux en multipliant les atmosphères. La chanteuse apporte beaucoup de variations, tout comme les parties d’orgue qui rivalisent de créativité avec la guiatre. Mené par une rythmique hors-pair, « Red Cloud » se révèle très accrocheur (« The Battlefield », « Bad Reputation », « The Night », « Hey Sugar »). Un baptême du feu réussi haut la main !