Guidé par un violon qui offre à sa musique une sensibilité originale, SPIRIT MOTHER continue sa chevauchée artistique avec beaucoup de délicatesse et un sens de la composition qui se projette au-delà d’un Stoner Psych Progressif parfois lancinant. Dynamique et organique, ce nouvel opus confirme les très belles choses entrevues sur « Cadets », ainsi que sur le live désertique hallucinant livré il y a trois ans déjà. Les Américains se font une place de choix dans un registre très maîtrisé.
SPIRIT MOTHER
« Trails »
(Heavy Psych Sounds)
Depuis ses débuts en 2020 avec le bien-nommé « Cadets », SPIRIT MOTHER ne cesse de convaincre un auditoire toujours plus grand, grâce à un Heavy Stoner Psych aux multiples variations et dont les atmosphères sont si changeantes qu’elles captivent instantanément. Aussitôt détecté par le label italien Heavy Psych Sounds, le groupe s’était vu inviter à se joindre à l’aventure « Live In The Mojave Desert », dont il a signé le volume 3. Une performance si intense qu’elle lui a valu, à juste titre, bien des éloges
Dans la continuité de cette remarquable entrée en matière, le quatuor a quitté la Californie pour le Haut désert de l’Oregon, un lieu qui visiblement ne manque pas de l’inspirer. Une chose est sûre, les grands espaces réussissent plutôt bien à SPIRIT MOTHER qui parvient sans mal à franchir le cap du redouté deuxième album studio avec une créativité incandescente. Son Heavy Rock a pris du volume, se veut aussi plus aérien en empiétant sur des sonorités Desert et post-Rock parfaitement mises en valeur par une production irréprochable.
Avec un line-up inchangé et soudé autour des fondateurs Armand Lance (chant, basse) et SJ (violon, chant), avec Landon Cisneros (batterie) et Sean McCormick (guiatre), SPIRIT MOTHER déploie une énergie constante alimentée de fuzz, de rythmiques hypnotiques et d’un incroyable sentiment de liberté. Et si l’ensemble peut paraître sombre et un rien mélancolique, « Trails » livre des titres très bien arrangés et d’une grande fluidité (« Veins », « Below », « Tonic », « Vessel », « Wolves » et le morceau-titre). Un lyrisme prégnant.
(Photo : Spirit Eye Photography)
Retrouvez la chronique du « Live At The Mojave Desert » :
Il y a trois ans sur « Push », les Anglo-américains de Sons Of Alpha Centauri avaient fait le pari d’intégrer l’excellent chanteur Jonah Matranga à son post-Metal instrumental, devenu de fait plus alternatif avec des sonorités 90’s. Pari remporté haut la main et « Pull » vient s’inscrire dans une belle continuité sur des morceaux techniquement redoutables et des mélodies accrocheuses. SOAC avance tout en émotion sur des fulgurances très maîtrisées et originales. L’occasion était trop belle pour en parler avec son bassiste et fondateur Nick Hannon.
– Trois ans après « Push », vous êtes de retour avec « Pull » et il semblerait que le pli soit désormais pris. Vous n’êtes plus un groupe instrumental, puisque Jonah Matranga est toujours au rendez-vous et le line-up semble aussi stabilisé. Est-ce que cette configuration de SONS OF ALPHA CENTAURI est enfin la bonne ?
Nous apprécions vraiment que Jonah et Mitch (Wheeler, batterie – NDR) fassent partie du groupe et que cette phase, c’est-à-dire l’époque où cela n’était qu’une simple idée, soit consolidée. Mais quel que soit notre niveau d’engagement, et même auparavant, je pense que le groupe est toujours axé en interne autour du noyau dur que nous formons avec Marlon (King, guitariste – NDR). Nous sommes les ‘fils’ d’ALPHA CENTAURI. A l’heure actuelle, il s’agit plus d’un ‘engagement’ que d’un statut permanent, c’est sûr !
– Cependant, cela ne veut pas dire que vous ne réserviez pas de surprises. Au contraire même, car votre démarche musicale paraît plus précise et déterminée. L’album est plus direct et joue sur l’efficacité des morceaux. Est-ce à dire que vous délaissez pour un temps l’aspect expérimental de votre post-Metal des premières réalisations ?
J’aime les choses que nous avons faites autour des ambiances précédemment, car à notre meilleur dans l’écriture, on avait l’impression qu’elles capturaient les côtés progressifs comme ceux plus expérimentaux. Mais non, je ne pense pas que nous ayons abandonné cet aspect du groupe. En ce moment, ce n’est pas trop notre truc, mais il y a toujours beaucoup de choses qui tournent en arrière-plan ! C’est similaire à nos côtés Desert Rock et instrumentaux aussi, je pense. Notre défi est de continuer à les diluer dans les albums, sans les rendre trop accessibles dans le concept et l’interprétation.
– Ce qui attire immédiatement l’attention, c’est la faculté de Jonah Matranga à captiver l’attention, grâce à un chant tout en émotion et des refrains entêtants comme sur « Ephemeral », par exemple, qui ouvre l’album. On pense d’ailleurs à Ed Kowalczyk du groupe Live, qui possède cette même faculté a envoûté l’auditeur. L’ensemble sonne même plus Rock dans son approche, c’était l’objectif ?
Oui et cette fois-ci, il s’agissait aussi de capturer l’ambiance post-HardCore de la fin des années 90. De toute évidence, Jonah est très influencé par Far, bien sûr, mais aussi Will Haven, Helmet, Quicksand ou Deftones, pour ne citer qu’eux. Cela se retrouve notamment dans l’approche, le ton et la composition. C’est un mélange de post-HardCore, de Metal et de Rock Alternatif. Je pense qu’atteindre cette cible n’était pas forcément notre objectif, mais nous avons évolué pour le rendre plus pertinent dans les années 2020, soit plus d’une génération plus tard.
– « Pull » présente aussi un aspect plus compact et direct. Les morceaux aussi ont un côté plus ‘chanson’ qu’auparavant, où les parties instrumentales semblaient plus libres et aériennes. Tout le monde s’est mis au service du collectif et de l’impact des morceaux, cette fois ?
Absolument. L’écriture des riffs, des breaks et même des mélodies est quelque chose que nous avons commencé à affiner sur « Continuum », et surtout sur « Push ». Mais avec « Pull », nous savions que la force ne résiderait pas tant dans la charge utile de ces éléments que dans le mécanisme de diffusion des chansons elles-mêmes. Donc, les structures sont devenues vraiment importantes et même une priorité pour nous. Nous avons aussi beaucoup réécrit, changé les compositions, puis élargit et redessiné certains aspects pour faire de la place au chant et à la batterie, plutôt que d’être trop plat et de simplement charger d’éléments certains morceaux.
– Vous évoluez toujours en quatuor, lequel est toujours anglo-américain. Sans parler de l’osmose qui règne chez SOAC, est-ce que ce n’est pas trop compliqué au niveau de la logistique notamment pour travailler sereinement ?
C’est un peu plus complexe que d’avoir quatre personnes dans la même pièce, c’est sûr. Mais nous faisons cela depuis de nombreuses années maintenant. Je pense que nous avons affiné notre processus de collaboration. La clef est de prendre notre temps pour bien faire les choses. Personne n’aime précipiter les choses et ce n’est vraiment pas nécessaire. Alors, s’assurer que nous allons tous dans le bon sens, et dans le bon ordre, compense ce qui peut souvent paraître comme une logistique assez complexe !
– Avec « Pull », vous livrez un style que l’on pourrait qualifier d’‘Alternative post-Metal’ avec toujours des touches progressives et surtout une intensité dans l’émotion qui est assez phénoménale. On sent beaucoup de passion et de sincérité dans les textes de Jonah. Est-ce que c’est vous musiciens qui vous adaptez à ces paroles pour y apporter une force supplémentaire, ou c’est lui qui écrit suivant vos compositions ?
Un peu des deux. La capacité de Jonah à créer des harmonies et à transmettre des émotions dans la musique est indéniable. Ainsi, lorsqu’il découvre quelque chose qui change la dynamique de la chanson, nous prenons du recul et nous réfléchissons à la manière dont nous allons modifier, ou altérer, le morceau pour saisir et élever ses mélodies à travers des breaks, par exemple. Nous apprenons tellement de choses sur l’intégration des voix dans les morceaux. Ce n’est pas une superposition d’éléments et cela a vraiment changé ma façon d’aborder l’écriture avec Marlon. Maintenant, nous pensons plutôt à comment cela pourrait fonctionner avec des voix. C’est une chose que nous ne faisions pas auparavant.
– J’aimerais qu’on dise un mot que cette rythmique que tu formes avec Mitch Wheeler à la batterie. Ce qui surprend au fil des écoutes, c’est votre complicité, car sur des morceaux en apparence assez accessibles, vous vous faites carrément plaisir ! Il s’avère que dans le détail, les structures sont plutôt complexes et très techniques. C’est une sorte d’héritage de votre post-Metal instrumental d’antan, qui était peut-être axé sur la performance ? Un truc de musicien, en somme…
Jouer avec de grands musiciens est toujours un plaisir et je suis très fier de n’avoir travaillé qu’avec de grands batteurs. Steve, le batteur original de SOAC était fantastique et Mitch est tout simplement hors-norme avec sa précision et ses capacités à diriger les morceaux. Tandis que la basse et les guitares donnent de la profondeur aux morceaux, Mitch a leur donné de l’énergie, du dynamisme et cette touche post-HardCore sans être trop Rock, ni trop Metal. C’est une ligne fine, précise et il l’a parfaitement réussi. Former la section rythmique avec lui est un honneur absolu !
– Qu’en est-il de vos autres collaborations et projets ? Je pense notamment à Yawning Sons et à une éventuelle suite à « Sky Island », qui était fascinant…
Gary (Arce de Yawning Man – NRD) est particulièrement occupé en ce moment avec Big Scenic Nowhere et bien sûr Yawning Man, mais nous sommes toujours en contact. Encore une fois, Gary est une autre personne avec laquelle il existe un véritable lien, il y aura donc toujours une envie de travailler ensemble à un moment donné.
– Enfin, lors de notre dernière interview, nous avions parlé un peu de concert. Est-ce que cela se concrétise aussi de ce côté-là, car on imagine sans mal la dimension que prendrait « Pull » sur scène…
La logistique est beaucoup plus compliquée à gérer pour le live que pour l’écriture et l’enregistrement. Mais si, par exemple, Mitch et Jonah se retrouvent en tournée ici, alors cela deviendrait une réelle possibilité. Nous aimerions faire avancer cet aspect-là du groupe pour faire plus de choses à travers quelques performances live. Et puis, en étant si proches et mêmes voisins, nous adorerions vraiment venir jouer en France !
L’album de SONS OF ALPHA CENTAURI, « Pull », est disponible chez Exile On Mainstream Records.
Retrouvez aussi la première interview du groupe…
… ainsi que celle de Nick à la sortie de l’album de YAWNING SONS :
Ils ont beau être très occupés tous les quatre avec leur groupe respectif et différents projets annexes, les membres de BIG SCENIC NOWHERE continuent l’aventure en se livrant cette fois dans un répertoire Classic Rock, toujours emprunt de Stoner et de Desert Rock, guidé par un groove tantôt progressif, tantôt plus costaud. « The Waydown », troisième album auxquels viennent s’ajouter deux EP, plonge dans des espaces plus identifiables, certes, mais tout en mélangeant toujours des tempos et des ambiances variés.
BIG SCENIC NOWHERE
« The Waydown »
(Heavy Psych Sounds)
Fondé il y a quatre ans sous l’impulsion d’un quatuor constitué de cadors de la scène Stoner/Desert Rock, BIG SCENIC NOWHERE continue de livrer des albums toujours plus aboutis et surprenants. L’une des particularités des Américains est aussi d’évoluer au fil des réalisations devenant un collectif dans lequel viennent se greffer et se fondre des invités prestigieux qui se prêtent à l’exercice avec talent et virtuosité. « The Waydown » révèle cette fois un visage nouveau, sans pour autant renier les fondements qui ont forgé son identité sonore et musicale.
Sur des bases aussi diverses qu’inamovibles, BIG SCENIC NOWHERE explore de nombreux horizons et va encore étonner tant le champ d’investigation est spectaculaire depuis sa première production, « Vision Beyond Horizon » en 2020. Bob Balch (Fu Manchu, Slower) à la guitare et sur tous les fronts actuellement, Tony Reed (Mos Generator) à la basse, aux synthés et surtout au chant, Gary Arce (Yawning Man) à la guitare et Bill Stinson (Yawning Man) à la batterie forment une entité très soudée et capable d’atteindre des sommets de créativité.
Avec « The Waydown », c’est dans une lignée Classic Rock, toujours très infuzzée, que BIG SCENIC NOWHERE s’engouffre en proposant des morceaux lumineux et hors du temps. Loin des jams qui l’ont toujours caractérisé, le songwriting est plus traditionnel, faisant la part belle au Rock Progressif, à la Funk Psyché, à quelques passages Surf Rock et même Soul Blues. L’interprétation est magistrale et Reeves Gabrels (The Cure, Bowie), Per Wiberg (ex-Opeth) et Eliot Lewis (Hall And Oates) viennent aussi prêter main forte sur cet opus aussi accrocheur qu’envoûtant. Monumental !
Le changement de label et une orientation musicale nettement plus féroce semblent avoir donné à NO TERROR IN THE BANG une vision plus nette et sans limite de son Cinematic Metal. Toujours aussi progressif, des sonorités plus extrêmes sont cette fois à l’œuvre sur « Heal », notamment dans le chant. Les Normands paraissent avoir pris leur allure de croisière et s’impose vraiment sur la scène Metal hexagonale grâce à un registre original, créatif et totalement maîtrisé. Alexis Damien (batterie, arrangements), Romain Greffe (claviers, arrangements, piano) et Sofia Bortoluzzi, frontwoman du sextet, reviennent sur ce fougueux élan à l’œuvre sur ce nouvel album.
– Un peu moins de trois ans après « Eclosion », vous faites un retour fracassant avec « Heal ». Entre-temps, vous avez changé de label pour intégrer la belle maison Klonosphere. J’imagine que c’est une source de motivation supplémentaire ? Est-ce que cela a pesé d’une quelconque manière dans la réalisation de l’album ?
Alexis : Klonosphere est un label fondé par Guillaume Bernard de Klone, que je suis depuis longtemps. Son avis et ses encouragements étaient donc une très bonne surprise et un encouragement. Il a reçu l’album et nous a appelé assez rapidement. Le côté éclectique et progressif de notre musique collait à l’esthétique globale des groupes Klonosphere. On est donc ravis et cela nous donne un second souffle.
– Le cap du deuxième album est toujours important pour un groupe et dans votre cas, cela semble vous avoir donné des ailes et une détermination incroyable. C’est pour cette raison que « Heal » est nettement plus agressif que son prédécesseur ?
Romain : On avait à cœur de confirmer ce que nous avions entrepris dans le premier album, et nous étions portés par les retours positifs, autant dans la presse que dans les diverses rencontres au fil des scènes. On s’est dit qu’on voulait aller plus loin, qu’on voulait plus explorer, se lâcher et se faire plaisir aussi.
Alexis : Sofia a voulu aller plus loin dans le chant saturé, cela donne forcément une brutalité supplémentaire, et emmène la musique sur des territoires plus hostiles… Je pense qu’on a forcé le trait, on est effectivement allé plus loin dans le spectre sonore.
– Votre Metal Progressif a lui aussi beaucoup évolué et, s’il se veut toujours aussi cinématique, il est très ancré dans son époque avec notamment des sonorités MetalCore et Electro. C’était un changement nécessaire ou, plus simplement, c’est dû au fait que NO TERROR IN THE BANG n’avait pas encore exploré toute sa palette artistique ?
Romain : Cette fois-ci, tous les membres du groupe ont écrit des morceaux, et les idées ont fusé. Les expérimentations aussi. Donc, ces sonorités Electro sont un prolongement de ce que nous avions expérimenté sur « Eclosion », et font suite à cette volonté d’aller plus loin. C’est l’envie, toujours et plus, de faire cohabiter les styles. Inclure des parties Electro, ou aussi des vraies parties de piano proches d’une musique cinématographique et parfois même contemporaine, était à la fois amusant et évident !
Alexis : Je suis heureux si le disque t’a semblé actuel. C’est une priorité pour moi de se poser la question de la modernité, de mettre en perspective le passé – l’héritage – le présent et le futur. Je ne me verrais pas créer un groupe de Thrash, par exemple…Les références sont trop dures à surpasser. En revanche, défricher de nouveaux terrains, tenter des métissages, cela est excitant. Les musiques actuelles, c’est comme un arbre qui se développe à l’infini, et si nous pouvions incarner ne serait-ce qu’un petit bourgeon dans la grande maison ‘Metal’, cela nous irait parfaitement.
– L’autre fait marquant de « Heal » est la dimension prise par Sofia au chant. La puissance affichée est assez phénoménale avec, notamment, une facilité étonnante à passer du registre clair au growl. Se rapprocher ainsi du Metal extrême est même assez inattendu. Cela tient-il aussi de la thématique du combat développé sur l’album ?
Sofia : Oui tout à fait, rien dans l’interprétation n’a été composé au hasard. Le côté growl plus extrême se justifie par une volonté de démontrer cette maturité acquise au fil des années, mais c’est également dû à l’envie d’illustrer la thématique du combat de manière plus poignante, plus cathartique. Allié au chant clair, il devient d’autant plus saisissant.
– Malgré beaucoup de vélocité, « Heal » contient toujours autant de passages très cinématiques et immersifs, mais peut-être plus sombres que sur « Eclosion ». Cependant, on a le sentiment que vous avez cherché l’efficacité tout au long de l’album…
Alexis : Effectivement, si on fait du live, il est important de le penser et de l’anticiper. Certains morceaux marchent mieux que d’autres, chaque groupe connait ça. Désormais, nous avons plus de répertoire, et donc nous jouons les plus efficaces. Par conséquent, c’est un exercice d’équilibriste et d’autocritique permanent. Il faut savoir expérimenter en gardant raison gardée – une sorte de lucidité, pour se dire ‘oui’ ça marche ou ‘non’, ça ne marche pas, ce sera un morceau sur album, mais pas en concert…Cela dépend aussi de quels types de concert : jouer en première partie est très différent que de jouer un set de 1h15 en tête d’affiche.
Romain : C’est aussi dû à notre propre retour du premier album. On s’est rendu compte qu’il y avait des parties vraiment ardues à reproduire en live, et on voulait également que notre musique soit encore plus éclectique. C’est pour cela qu’on a souhaité introduire quelques parties plus efficaces, plus directes, mais sans pour autant renier ce qui fait notre sel. A chaque partie plus ‘in your face’ s’adjoint une autre plus subtile, avec des arrangements les plus travaillés possibles, pour que toutes les sensibilités de notre public s’y retrouvent.
– Même si l’une des particularités de NO TERROR IN THE BANG est de présenter une musique très fouillée et technique, « Heal » est encore plus sophistiqué dans le son, ainsi que dans la structure des morceaux, les détails de l’orchestration et le soin porté aux arrangements. Comment vous êtes-vous répartis le travail d’écriture et de production surtout ?
Romain : Tout le monde a contribué à l’écriture et l’arrangement de cet album, alors que sur « Eclosion », tous les morceaux partaient d’idées d’Alexis (et nous les avions arrangés à six). Chacun est venu avec deux ou trois morceaux, avec des sensibilités différentes, des discours et des ambiances variées. Parfois, avec des morceaux quasiment aboutis, parfois avec quelques idées à assembler. Nous avons ensuite repassé le tout à la moulinette ‘NO TERROR’, et chacun a pu apporter sa patte. Et le travail de Sebastien Langle a sublimé nos créations.
Alexis : Nous réalisons des pré-prod en home-studio, très avancées, et nous enregistrons ensuite au studio de Sebastien Langle, puis au mastering avec Pierrick Noel. Sebastien est un peu notre Rick Rubin, il nous pousse dans nos retranchements.
– A l’écoute de l’album, les images se bousculent et l’on pense évidemment au rendu scénique. Avez-vous imaginé une nouvelle scénographie ? Et puis, est-ce que le répertoire de deux albums-concepts peut se fondre facilement dans un même set ?
Romain : Evidemment ! Nous sommes en train de travailler sur une nouvelle scénographie, mais ça prend du temps. Ça n’est pas toujours simple de correspondre visuellement à notre ambition musicale, surtout que c’est un métier à part entière. Les morceaux peuvent cohabiter sans aucun souci, même si dans un premier temps, nous aurons à cœur de défendre « Heal » sur scène.
Alexis : Un objectif serait de pouvoir un jour proposer des projections à la façon d’un ciné-concert. Nous avons commencé à faire des tests, mais évidemment, tous les endroits ne sont pas adéquats pour cela. Certaines SMAC sont bien équipées, mais en festival, c’est déjà plus compliqué, et ne vous y trompez pas, cela est souvent réservé aux très grosses productions. Mais rien n’est impossible, il faut aussi être malins, nous y réfléchissons.
– Enfin et toujours à propos de la scène, comment allez-vous restituer la complexité de certains titres ? Vous comptez utiliser plus de machines, ou peut-être épurer certains passages ?
Romain : Pour le premier album, on jouait tout 100% live. Là, au vue de la production des morceaux, on va s’aider de séquences. Ça nous permettra de restituer au mieux nos arrangements, sans concession, peu importe la situation de concert, qu’on soit en première partie ou en tête d’affiche.
Alexis : Epuré, ça peut se faire sur certains tout petits bouts, comme le pré-refrain de « Warrior », qui contient 75 couches ! (Rires) Mais les titres ne sont pas aussi complexes que cela, on s’y fait très vite !
« Heal », le nouvel album de NO TERROR IN THE BANG est disponible chez Klonosphere
Retrouvez l’interview du groupe à l’occasion du premier album :
Enregistré à Stockhölm avec Mike Wead (King Diamond) notamment, ce quatrième opus vient confirmer l’élan de ces dernières années. « Reign Of The Reaper » montre enfin le véritable visage que l’on pouvait attendre de SORCERER, à savoir un style plus personnel, entre un Heavy Metal classique et des touches Doom savamment dosées. A noter à l’arrivée de Stefan Norgren derrière les fûts, il y a quelques semaines, et qui vient participer à cette résurrection entamée en 2010.
SORCERER
« Reign of the Reaper »
(Metal Blade Records)
Dans sa première et courte vie, celle qui s’étend de 1988 à 1995, le Metal de SORCERER penchait bien plus qu’aujourd’hui vers le Doom. Après des débuts prometteurs, les musiciens sont allés grossir les rangs de Therion, Tiamat, Sundown et Lion’s Share avant de démarrer une seconde phase plus féconde. Très aguerris donc, ils ont fait la bascule vers un Heavy Metal plus généreux et surtout très épique. Et 35 ans après leur création, les Suédois affichent un total de quatre albums, « Reign Of The Reaper » compris.
Cela dit, même si le groupe de par son histoire avance à un rythme de sénateur, il faut lui reconnaître de la qualité dans ses derniers albums, notamment sur « Lamenting of the Innocent », sorti il y a trois ans et qui l’avait relancé. C’est précisément dans cette même dynamique que le frontman Anders Engberg et ses compagnons s’inscrivent avec « Reign Of The Reaper ». SORCERER n’a pas renié ses influences Doom, qui se font toujours sentir dans les moments les plus dark et progressifs, mais la vélocité actuelle est terriblement Heavy.
Avec sa galopante rythmique et la puissance vocale de son chanteur, le quintet possède de solides arguments que les deux guitaristes renforcent brillamment. Les riffs sont racés et appuyés, les chorus abondants et les solos très shred. Et SORCERER montre toute sa maîtrise sur des refrains mémorables, des structures de morceaux massives et un mélange savoureux d’ambiances teintées d’une noirceur un brin Old School (« Mourning Star », « Unveiling Blasphemy », « Thy Kingdom Will Come » et le morceau-titre). Convaincant.
Derrière ce titre énigmatique, cette nouvelle réalisation reprend les choses, musicalement, là où le très créatif duo nous avait laissé avec « Pull ! ». Même si le ‘propos’ est différent dans l’intention, il est le même dans la forme. Dynamique, parfois épique et cinématique, le post-Rock Progressif de GLEN joue sur des concepts très modernes et assez visionnaires avec une technique et une élégance toujours aussi délicates. « I Can See No Evil » est envoûtant à plus d’un titre.
GLEN
« I Can See No Evil »
(Sound Effect Records)
Avec « Pull ! », son précédent album sorti il y a deux ans, la formation basée entre Berlin et Athènes, nous propulsait dans un post-Rock Progressif étonnant. Toujours emmené par le multi-instrumentiste allemand Wilhelm Stegmeier et la guitariste et pianiste Eleni Ampelakioutou, GLEN réédite l’exploit de faire aussi bien en plus de se renouveler. D’ailleurs, sur « I Can See No Evil », il accueille les batteurs Lucia Martinez et Achim Faeber, ainsi que Roland Feinaeugle à la basse. Et l’unité demeure.
Ce qui rend si spéciale la musique du groupe, c’est alors qu’elle est entièrement instrumentale, elle nous raconte plein de choses. Chaque album donne lieu à des morceaux directement liés aux réflexions du binôme et notamment de son compositeur. GLEN possède un sens de l’expressivité musicale, qui se dilue dans un groove obsédant, lui-même guidé par un style narratif qui se passe facilement de mots. Et ce troisième opus est toujours aussi polymorphe, inspiré et véloce.
Comme sur « Pull ! », on retrouve le légendaire producteur allemand Reinhold Mack au mix, qui offre cette fois encore un relief saisissant à des morceaux d’une grande finesse, mis en lumière par des arrangements très soignés (« Paradigma », « Neos Kosmos » et sa trompette aérienne, « In The Midday Sun » et le nerveux « Strike »). GLEN n’a pas son pareil pour nous inviter au voyage, grâce à des envolées lumineuses, des instants suspendus et un art du crescendo inouï. « I Can See No Evil » est exaltant, séduisant et explosif. Un grand moment.
Retrouvez l’interview du groupe parue à la sortie de « Pull ! »…
Sur une production terriblement organique et entièrement dirigée par le combo, OHMWORK propose avec « In Hindsight », l’un des albums les plus novateurs et intéressants en termes de Heavy Stoner Rock de cette année. La fusion à l’œuvre chez les trois musiciens est plus que palpable et donne lieu à un déferlement de puissance, de riffs épais et massifs soutenus par une paire basse/batterie renversante. Ajoutez à cela un frontman véritablement habité et l’ensemble se fait ensorceleur et ravageur.
OHMWORK
« In Hindsight »
(Rob Mules Records)
C’est toujours assez difficile de définir le style du power trio norvégien et ça fait plus de dix ans que ça dure, depuis son premier album « Storm Season ». Non pas qu’il faille à tout prix mettre une étiquette sur OHMWORK, mais préciser de quoi on parle n’est pas dépourvu d’intérêt, non plus. Alors pour faire simple, il s’agit de Stoner Rock avec une grosse dose d’un Metal lourd, efficace et mélodique et parfois même aux frontières du Doom. Autant dire que le groupe possède solides arguments.
Faisant suite à « Pareidolia » (2021), « In Hindsight » va plus loin dans l’expérimentation et notamment sur la texture des guitares, parfois même acoustiques. Très Heavy dans l’approche, OHMWORK repousse les limites de son Stoner en faisant cohabiter le Rock et le Metal avec beaucoup d’habileté. Accrocheurs, les morceaux sont rapidement immersifs et dégagent une incroyable énergie portée par la voix de son chanteur. Les Scandinaves vivent réellement leur musique, ce qui explique la grande proximité sonore.
Tout en progression, ce sixième opus montre une évolution constante au fil des titres, gravés dans une modernité musicale très audacieuse. Anders L. Rasmussen (guitare, chant, orgue), Heige Nyrud (basse) et Espen A. Solli (batterie) en appelle pourtant à des influences un brin Old School comme socle à des accélérations et des montées en puissance musclées (« 17 Years », « Turmoil », « Relentlessly Closer », « The Web », « Adrift » et ses sept minutes et le fracassant morceau-titre). OHMWORK sait où il va et ne prend aucun détour.
Pour peu d’avoir l’esprit ouvert, cette nouvelle réalisation de BAD AS va ravir les amateurs de Hard Rock, de Heavy Metal et de Prog. Car les Transalpins, à travers « Fight The Demons », ne se mettent aucune limite et laissent libre-court à une inspiration qui va puiser dans une culture musicale aussi vaste que pointue. Techniquement imparable, le groupe joue sur les mélodies en y insufflant des accélérations ravageuses et un chant d’une superbe polyvalence.
BAD AS
« Fight The Demons »
(Wormholedeath Records)
Un peu moins de huit ans après sa formation et la sortie de quatre albums avec ce nouveau « Fight the Demons », BAD AS est parvenu à se faire un nom et développer un style, grâce à un registre assez peu conventionnel mêlant Hard Rock, Heavy Metal et Prog. Autant dire que les amateurs d’étiquettes en tout genre vont avoir du fil à retordre afin de ranger les Italiens dans une même case… et c’est justement ce qui fait leur force.
Et non content d’avancer à contre-courant de la scène actuelle, le combo a aussi effectué des changements de line-up assez conséquents. En novembre dernier, le Grec John Jeff Touch a pris le poste de frontman, suite au départ de Mattia Martin. Et dans la foulée, le batteur Marco Andreeto s’est posé derrière les fûts. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que BAD AS dégage une énergie et une puissance phénoménales.
De cet étonnant crossover naît une musique pleine de rage enrichie d’instants plus aériens et donc progressifs, qui viennent offrir cette particularité au quatuor. Sur les riffs très créatifs de son guitariste, Alessio ‘Lex’ Tricarico, qui ne se refuse absolument rien, BAD AS jouit d’une incroyable liberté de composition (« You Better Run », « Fight The Demons », « Where Did The Love Go », « Inside A Dream », « Awake »). D’une grande fraîcheur !
Il faut dorénavant de plus en plus compter sur la scène française, car que ce soit en termes de Metal ou de Rock, l’hexagone tient la draguée haute au reste de l’Europe et même beaucoup plus loin. Avec sa troisième réalisation, « Something Ominous », MOLYBARON se fait une place de choix dans un registre Alternative Metal/Rock aux contours très progressifs.
MOLYBARON
« Something Ominous »
(InsideOut Music)
Après des débuts assez discrets en 2017 avec un premier album éponyme, puis une belle montrée en puissance quatre ans plus tard avec « The Mutiny », c’est à peine si l’on reconnait MOLYBARON. Le combo franco-irlandais a gagné en volume, en maturité aussi et surtout son frontman, Gary Kelly, prend enfin ses responsabilités et l’Irlandais semble avoir définitivement perdu toute timidité pour s’affirmer avec force. Un réel plaisir !
Et il n’est le seul à avoir vécu une petite métamorphose. Si l’arrivée de Florian Soum à la guitare a un impact certain sur le jeu du quatuor, la prise de confiance à l’œuvre chez MOLYBARON parait plutôt collective. La rythmique transpire le groove et les attaques sont incessantes, malgré des mélodies omniprésentes entre Metal et Rock, et d’où émane une atmosphère progressive qui plane sur l’ensemble de « Something Ominous ».
Percutant et fédérateur, le groupe rappelle les Américains de Live, mais la patte est plus musclée et bien plus féroce (« Billion Dollar Shakedown », « Breakdown », « Anyway », « Daylight Dies In Darkness », « Pendulum » et le massif morceau-titre). MOLYBARON vit littéralement ses compositions et l’énergie déployée ici est électrisante et captivante. Bien au-delà d’avoir gagné ses galons, il s’impose avec brio et avec la fougue qu’on attendait.
Mené de main de maître depuis quatre ans et autant d’albums, le vaisseau UNITED GUITARS vogue toujours au rythme des riffs, des solos et des chorus envoûtants de celles et ceux qui viennent se greffer à ce projet au départ un peu fou. Parfaitement produit, comme toujours, « #4 » nous fait parcourir l’univers de cette trentaine de guitaristes et le voyage est encore une fois enchanteur.
UNITED GUITARS
« #4 »
(Mistiroux Productions)
Chez UNITED GUITARS, on ne fait jamais les choses à moitié. Depuis le début de l’aventure en 2019, Ludovic Egraz et sa compagne et productrice Olivia Rivasseau ont livré quatre doubles-albums, dont voici le petit dernier. Et comme on ne change pas les bonnes habitudes, pas moins de 33 guitaristes se relaient sur deux bonnes heures de musique, où un grand nombre de styles sont abordés avec classe et une dextérité de chaque instant.
Chaque volume réservant son lot de surprises, « #4 » ne déroge pas à la règle. Et lorsque l’on connait le principe de base d’UNITED GUITARS, celle-ci est de taille. En effet, presqu’érigé en règle immuable, les précédentes réalisations étaient entièrement instrumentales, l’objectif étant de se mettre au service de la six-codes avant tout. Avec « Stay Real », Jessie Lee Houllier s’invite au chant pour un Blues Rock au groove imparable… et à trois guitares !
Tout en finesse et virtuosité, « #4 » nous invite notamment à faire connaissance avec le bluesman Robben Ford, le jeune prodige russe Max Ostro ou encore le Canadien Nick Johnston. Et UNITED GUITARS garde toujours une petite place pour ses habitués dont Yvan Guillevic (Heart Line), Saturax, NeoGeoFanatic ou Youri de Groote, toujours aussi créatifs. Soutenu par une rythmique royale, ces musiciens-là ne manquent vraiment pas de maestria.