Certes, on ne présente plus BUDDY GUY. Pourtant les décennies défilent et le guitariste et chanteur continue de surprendre et d’émerveiller son auditoire à chaque album. Sur « The Blues Don’t Lie », l’Américain rassemble pas moins de 16 nouveaux morceaux, dont l’authenticité, la sincérité et le groove restent la marque de fabrique de ce géant du Blues.
BUDDY GUY
« The Blues Don’t Lie »
(Silvertone/RCA/Sony Music)
En arrivant à Chicago en train en provenance de Baton Rouge, Louisiane, il y a précisément 65 ans, BUDDY GUY avait la ferme intention de se faire un nom dans le monde du Blues. Et c’est un doux euphémisme de dire qu’il y soit parvenu mais qu’en plus, il demeure l’une des dernières légendes encore en vie. Mieux encore, l’énergie et la créativité qui le guident sont un modèle du genre et toujours une inspiration pour de très nombreux bluesmen.
Du haut de ses 86 printemps, BUDDY GUY conserve un jeu et un enthousiasme de jeune homme. L’artiste aux huit Grammy Awards livre son 34ème album, quatre ans après « The Blues Is Alive And Well », lui aussi récompensé. Composé de 16 morceaux pour une belle heure de musique, « The Blues Don’t Lie » célèbre sa passion pour ce style unique auquel il a tant apporté. Et loin de se reposer sur de légitimes lauriers, son feeling reste incroyable.
Si le guitariste y clame son indéfectible amour pour le Blues, c’est aussi l’occasion de mettre en lumière de longues amitiés, qui viennent irradier « The Blues Don’t Lie ». Excellemment produit pat le batteur et compositeur Tom Hambridge, l’album accueille Mavis Staples, James Taylor, Elvis Costello, Jason Isbell, Bobby Rush et les claviers de Reese Wynans sur l’ensemble des 16 titres. BUDDY GUY est rayonnant et offre une véritable masterclass.
Rock, Blues, robuste, généreux et guidé par une émotion très palpable, cet album hommage à son frère Johnny par EDGAR WINTER reflète avec un grand respect et une volonté de très bien faire l’immense parcours d’un guitariste hors-norme qui aura marqué tant de musiciens de Blues et conquis tant de fans à travers le monde. « Brother Johnny » ne verse pas dans la nostalgie, mais plutôt dans la fierté d’un beau travail accompli.
EDGAR WINTER
« Brother Johnny »
(Quarto Valley records)
Rendre un hommage appuyé à son frère aîné était apparu comme une évidence à EDGAR WINTER, cadet de feu-Johnny. Bien entendu axé sur les guitares, avec des six-cordistes prestigieux à l’œuvre sur « Brother Johnny », l’album se veut et se présente comme un grand voyage musical, qui traverse la vie et l’œuvre du Texan en passant par toutes les émotions et avec une classe ultime dans laquelle le guitariste se serait sûrement reconnu. Et forcément, de grands noms du Blues qu’il a directement influencé sont présents sur l’album.
Sur 17 titres et une heure et quart de Blues Rock, de Rock et de morceaux intemporels, « Brother Johnny » d’EDGAR WINTER nous transporte à travers la très prolifique discographie de l’Américain. Et sa Gibson Firebird résonne toujours avec l’éclat qu’on lui connait entre les mains d’un tel prodige. Pour la petite (et triste) histoire, Johnny Winter nous avait quitté le 16 juillet 2014, dans un hôtel du District de Bülach en Suisse, deux jours après sa toute dernière prestation mondiale, au ‘Cahors Blues Festival’ en France.
Sur une production brillante signée Ross Hogarth, on mesure l’immense héritage laissé par Johnny, et qui mieux que son frère EDGAR WINTER pouvait constituer un tel casting ? Ainsi, on retrouve Joe Bonamassa, Doyle Bramhall II, John McFee, Robben Ford, Billy Gibbons, David Grissom, Taylor Hawkins, Warren Haynes, Steve Lukather, Michael McDonald, Keb Mo, Doug Rappoport, Bobby Rush, Kenny Wayne Shepherd, Ringo Starr, Derek Trucks, Waddy Wachtel, Joe Walsh, Phil X et Gregg Bissonnette. Que la fête est belle !
Fer de lance de la scène Heavy Metal espagnole depuis une dizaine d’années, GUADAÑA nous revient avec un quatrième album (le groupe compte aussi deux EP) bien rentre-dedans et épicé à souhait. Chanté dans sa langue maternelle, le registre du quintet prend de l’ampleur et de l’énergie sans négliger des mélodies toujours plus accrocheuses. Avec « Erytheia », les Hispaniques s’affirment de belle manière.
GUADAÑA
« Erytheia »
(Maldito Records)
Quatrième opus pour le quintet espagnol GUADAÑA et on peut aisément considérer « Erytheia » comme l’album de la maturité, tant le groupe semble exprimer vraiment son jeu avec des compos très abouties, une production conséquente et un parti-pris qu’il faut aussi saluer. En effet, le combo de Cadix a la particularité de présenter un Heavy Metal entièrement interprété dans la langue de Cervantès, ce qui est toujours une force… lorsque c’est bien fait, ce qui est le cas.
Certes assez classique, le registre de GUADAÑA comporte aussi quelques touches symphoniques, qui n’assouplissent pas ce très bon « Erytheia », mais a contrario lui donne beaucoup de volume. Puissant et très bien arrangé, ce nouvel album présente un bel équilibre entre des riffs percutants et racés façon NWOBHM et des solos pleins de fougue signés du guitariste Juanna Patrón, très son aise et affichant une liberté de jeu efficace et solide.
L’autre particularité, et aussi tout le charme de GUADAÑA, est d’évoluer avec un duo vocal constitué de Gloria Romero et de Salvador Sanchez. Si la touche féminine apporte beaucoup au niveau des mélodies, le chant rugueux de son acolyte n’est pas en reste et vient très habillement compléter l’impact des morceaux. A noter que les Hispaniques ont fait appel à quelques compatriotes, qui viennent offrir une belle diversité à ce « Erytheia » qui ne manque pas de saveurs.
YAWNING SONS est une entité transatlantique née de la rencontre entre les Anglais de Sons Of Alpha Centauri (SOAC) et les Américains de Yawning Man. Dans un Desert Rock progressif devenu mythique, le groupe est une évasion musicale sans pareil entre longs jams et fulgurances Rock très instrumentales. Pour la sortie du très attendu deuxième album (après 12 ans !), c’est le britannique Nick Hannon, bassiste de SOAC et pilier du groupe, qui nous en dit un peu plus sur le génial « Sky Island ». Rencontre…
– J’aimerais tout d’abord que tu reviennes sur la création de YAWNING SONS. Comment vous êtes-vous rencontrés et qu’est-ce qui vous avait poussé à enregistrer « Ceremony To The Sunset » à l’époque ?
Avec SOAC, nous travaillions sur notre deuxième album et Gary (Arce de Yawning Man) venait de sortir l’album « Dark Tooth Encounter », ou du moins les démos, et j’ai été complètement époustouflé. Nous l’avons contacté pour lui demander s’il serait intéressé pour s’impliquer sur le deuxième album de SOAC à l’époque. Il est venu en Angleterre et tout est devenu évident à son arrivée, tant l’alchimie musicale était phénoménale et complètement organique. YAWNING SONS était né.
– 12 ans séparent les deux albums. Pourquoi avez-vous attendu si longtemps avant d’enregistrer « Sky Island » ? Ce sont vos emplois du temps respectifs qui ont compliqué les choses ?
Oui, Gary a été très occupé avec Yawning Man. Ils tournent autant qu’ils le peuvent et lorsque nous avons travaillé ensemble pour la première fois, seuls « Rock Formations » et le EP « Pot Head » étaient sortis. Depuis, ils ont sorti quatre albums, plusieurs live et entrepris de nombreuses tournées. De notre côté, nous avons travaillé sur de nombreuses versions en collaboration avec Karma to Burn, et ensuite un deuxième album, puis un album-concept avec Justin Broadrick. Alors oui, nous étions très occupés chacun de notre côté.
– Maintenant qu’on a un point de comparaison entre les deux albums, je trouve que « Sky Island » sonne très américain, alors que « Ceremony To The Sunset » avait une sonorité très anglaise…
Je suis heureux qu’il y ait cette perception de contraste. Après ce grand laps de temps, il n’aurait pas été judicieux, ni utile de livrer un second « Ceremony To The Sunset ». Chaque album doit avoir sa propre identité et le groupe ne pourrait pas survivre s’il était purement enraciné sur un seul album après tant d’années. C’est bien qu’il y ait ce contraste pour créer un certain équilibre.
– « Sky Island » est aussi moins instrumental que le précédent. C’était une envie commune d’avoir plus de chant et donc aussi du texte ? D’ailleurs, par qui sont-ils écrits ?
Avec deux groupes entièrement instrumentaux, pouvoir travailler avec des chanteurs est passionnant ! Les paroles sont écrites par eux-mêmes, et elles captent toujours des vibrations vraiment cool dans les morceaux, ce qui les rend tout à fait uniques.
– Est-ce qu’avec YAWNING SONS, tu t’autorises des choses que tu ne fais pas avec SOAC ?
Absolument. Nous avons tendance à explorer davantage de thèmes précis dans YAWNING SONS et à les poursuivre jusqu’à ce qu’ils soient suffisamment organiques pour serpenter doucement d’une ambiance à une autre. C’est un processus progressif très naturel. La façon dont les deux guitares et la basse se lient est tout à fait unique et nous pousse à des performances différentes que nous ne ferions pas autrement dans nos groupes respectifs, je pense.
– Vous avez enregistré « Sky Island » à Joshua Tree et il en ressort d’ailleurs une atmosphère très particulière. Dans quelles conditions cela s’est-il passé et quels souvenirs gardez-vous de la conception de ce nouvel album ?
Ce fût un moment très agréable. Nous avions prévu que Bill Stinson soit à la batterie pour l’album, mais nous étions si loin dans le désert qu’il s’est perdu ! Du coup, nous avons demandé à Clive (notre producteur) s’il connaissait quelqu’un de la région qui savait exactement où nous étions et qui pouvait aussi jouer de la batterie. Et c’est Kyle (Hanson) qui s’y est collé et qui a rendu vraiment rendu l’album spécial. Gary (Arce) venait de rentrer de tournée et avait de très bonnes idées. Sur laligne de basse de ce qui est devenu « Shadows and Echoes », tout s’est parfaitement imbriqué. C’est ça aussi YAWNING SONS.
– Sur ce nouvel album, il ressort une couleur sonore étonnante, une ambiance musicale profonde et pleine de relief. C’est le son que vous souhaitiez donner à YAWNING SONS dès le début ?
La profondeur du son et l’ambiance sont plus définies sur ce deuxième album. Tant que cela reste organique et planant, alors c’est cool. Les retours et les critiques ont été incroyables, et nous avons travaillé dur pour capturer cette atmosphère rare, mais constante, en sachant que l’ambiance est la chose la plus importante.
– Est-ce que vous suivez vos carrières respectives, et quel regard portez-vous sur vos derniers albums à savoir « Continuum » pour SOAC et « Macedonian Lines » pour Yawning Man ?
Eh bien, je ne peux parler que pour SOAC, même si bien sûr je suis un grand fan de mes frères de Yawning Man. Pour moi, « Continuum » a été un grand pas en avant pour SOAC. Nous avons réuni un Rock Ambiant et Progressif dans un voyage instrumental. Nous avons vraiment apprécié de pouvoir faire les choses vraiment librement et sans contrainte. Il est imprévisible, enfin j’espère ! Je ne pense vraiment pas que nous ayons un style immédiatement identifiable.
– Pour conclure, une question s’impose : considérez-vous toujours, et tous, YAWNING SONS comme un side-project ou un groupe à part entière ?
Ce deuxième album contribue certainement à élargir l’horizon de ce qu’est YAWNING SONS. Ce n’est plus seulement une simple idée ou un projet : c’est un groupe. Cependant, c’est un concept rare et précieux et j’espère que les astres s’aligneront à nouveau un jour …
L’excellent « Sky Island » est disponible depuis le 26 mars chez Ripple Music.