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Emerald Moon : céleste [Interview]

Arrivé il y a quelques jours dans les bacs, le premier album d’EMERALD MOON est LA sensation Classic Rock française de l’année. Il faut aussi avouer que le quintet compte dans ses rangs des musiciens chevronnés et bouillonnant d’idées. Guidés par leur chanteuse, les deux guitaristes multiplient les combinaisons sur une rythmique groovy à souhait et ce très bon « The Sky’s The Limit » vous renvoie avec bonheur dans les 70’s sur une production très actuelle et organique. Le fondateur et guitariste, Fabrice Dutour, revient sur la création du groupe, sa façon de travailler et surtout sur cette musique qui lui tient tellement à cœur.

– Au regard de vos parcours respectifs, j’imagine que vos chemins ont dû se croiser assez souvent au gré de vos projets. Quel a été le déclic pour monter EMERALD MOON et surtout pour en définir le style ?

Pour ma part, je joue déjà avec Laurent (Falso, batterie – NDR) et Vanessa (Di Mauro, chant – NDR) dans deux projets différents. J’ai eu le bonheur de partager l’aventure ‘United Guitars’ avec François (C. Delacoudre, basse – NDR), dans laquelle figurait également Michaal (Benjelloun, guitare – NDR). Tous les deux ont d’ailleurs eu plusieurs fois l’occasion de partager la scène, lorsque les chemins de Gaëlle Buswel, avec qui joue Michaal et de Laura Cox, avec qui jouait François, étaient amenés à se croiser. Vanessa et Laurent ne connaissaient donc pas Michaal et François. J’ai été l’entremetteur… Pour revenir à la genèse du projet EMERALD MOON, cela s’est passé en 2021, après l’enregistrement du « Volume 2 » d’’United Guitars’. Nous venions d’enregistrer un titre avec Fred Chapellier, le courant est vite passé et l’envie était commune. C’était aussi une évidence pour nous que François était le bassiste idéal. Yann Coste serait donc le batteur. Chacun de notre côté, Fred et moi avons composé plusieurs titres pour ce nouveau groupe, qui s’appellait alors Silverheads et que nous envisagions, logiquement au vu de nos influences, de faire sonner dans un style Classic Rock. Après plusieurs mois à la recherche d’un chanteur, j’ai proposé Vanessa, qui a fait l’unanimité. Nous devions enregistrer en mai 2022. Mais à quelques semaines du début des sessions, l’emploi du temps de Fred est bousculé en raison de sa collaboration à la tournée des Dutronc. L’album ne se s’est donc jamais ensemble. Mais début 2024, Vanessa, François et moi avons eu envie de faire aboutir ces titres que j’avais composés et sur lesquels Vanessa avait écrit des textes. J’avais quelques idées en tête pour cette place de guitariste et Michaal était mon choix numéro un, il a tout de suite accepté de rejoindre l’aventure. Et Laurent s’est imposé à moi comme une évidence également et il s’est joint à nous.

– Vous avez tous un CV conséquent et une connaissance affûtée du métier. Comment est-ce que cela s’organise pour la composition des morceaux et l’écriture des textes ? Chacun apporte-t-il ses propres idées, ou faites-vous confiance à certains d’entre-vous en particulier ? Je pense au noyau dur ayant évolué ensemble sur ‘United Guitars’ notamment…  

L’organisation, pour cet album, a été en partie dictée par nos emplois du temps respectifs et la distance qui nous sépare. Je dis en partie, car j’ai depuis longtemps l’habitude de composer ainsi, c’est-à-dire que je maquette l’ensemble du titre avec la batterie, la basse et les deux guitares. Les structures sont figées, les parties de  guitares harmonisées également mais, évidemment, la réinterprétation des lignes de chaque instrument est libre pour chacun. J’avais déjà six titres pour le projet initial, j’en ai composé cinq autres avant l’enregistrement de l’album et Michaal a également amené une composition. Après, toutes les idées et les contributions ont été les bienvenues.

– On vous avait découvert en octobre dernier avec « Phase One », un premier EP, presque de présentation finalement. Pourquoi le choix du format court ? C’était faute de temps en raison d’emplois du temps chargés, ou plutôt une manière de prendre la température et de voir quel en serait l’accueil, d’autant que l’on retrouve les quatre morceaux sur l’album ? 

Question très intéressante. Pour tout te dire, cet EP est la restitution de notre première session de répétition. Il n’y avait pas, initialement, l’idée de sortir quelque chose, nous enregistrions juste pour pouvoir prendre du recul. Il faut dire aussi que nous répétions chez Laurent qui, en plus d’être batteur, est plutôt très bon dans le domaine du son. Son local est équipé et il a coutume d’enregistrer toutes les répétions qui se font chez lui. Nous nous étions donc fixés quatre titres, trois compos et une reprise, « Ramble On » de Led Zeppelin, et nous nous sommes retrouvés pendant deux jours. L’objectif était juste d’aboutir un titre, « What You’re Told » et de le clipper, histoire d’avoir la possibilité de démarrer l’aventure. A ce moment-là, le groupe n’avait même pas de nom. Et puis, à la réécoute de cette session, on se dit que ça sonnait plutôt bien et cela confirmait la sensation de cohésion que nous avons tous ressentie dès les premières notes. Et de là a germé l’idée de sortir ces quatre titres. Vu l’esthétique, le format vinyle s’imposait aussi. Et tout cela a permis, effectivement, d’accélérer la naissance d’EMERALD MOON. 

– D’ailleurs, avez-vous apporté des modifications sur ces morceaux entre l’EP et l’album ?

Déjà, il était évident pour moi que ces trois titres faisaient partie d’un tout. Ils devaient figurer sur l’album. Sur la version EP, ils sont joués live, les amplis sont dans la même pièce que la batterie, il n’y a pas d’overdub ou de guitares additionnelles. Pour l’album, ils ont été totalement réenregistrés, au propre, avec plus d’arrangements, notamment sur les parties de guitares. Le fait de garder ces trois titres a également eu une incidence sur l’écriture. Il fallait que les personnes qui avaient déjà découvert ces trois premières compositions aient de la matière avec la sortie de l’album. Avant l’EP, l’idée était plutôt un album de neuf ou dix morceaux, « Phase One » a changé la donne et nous voilà avec 12 titres.

– Lorsque l’on voit par où vous êtes tous passés, le côté Rock et bluesy semble une évidence. EMERALD MOON présente donc un Classic Rock très 70’s dans l’esprit, mais pas forcément dans le son. On sent aussi beaucoup de plaisir entre vous en vous écoutant. C’est ce qui vous guide depuis le départ ?

Le plaisir est ce qui nous guide dans notre métier de musicien. C’est une chance infinie de vivre de notre passion. C’est déjà vrai lorsque l’on joue la musique des autres, c’est encore plus intense lorsque l’on défend ses propres chansons. Pour ce qui est de nos influences et nos parcours, nous avons beaucoup de choses en commun comme des racines Blues et le Rock/Hard Rock Seventies. On a voulu restituer ça avec un son plus contemporain, sans aller trop loin, de sorte à garder la dynamique, le grain et les nuances propres à ce style. 

– D’ailleurs, même si votre registre retrouve des couleurs depuis quelques temps maintenant, est-ce qu’EMERALD MOON est là aussi pour palier un certain manque, car il y a vraiment un public en demande concernant le Classic Rock notamment ?

Il n’y a pas de calcul sur le bon endroit ou le bon moment. Il y a juste l’envie de faire ce que l’on aime faire et que l’on fait chacun depuis longtemps : Michaal avec Gaëlle Buswel, François avec Laura Cox, Laurent avec Jack Bon et moi avec Back Roads. Et surtout, de le faire ensemble. C’est une magnifique équipe et il nous tarde d’être sur scène tous les cinq.

– Vous êtes en autoproduction, ce qui n’est pas franchement une surprise étant donné que vous êtes tous rompus à l’exercice du studio et que trouver votre son n’a dû pas être très compliqué. Est-ce un avantage aussi de pouvoir mener votre projet vous-mêmes, et avez-vous tout de même fait appel à des personnes extérieures pour l’enregistrement, le mix ou le mastering ?

Il est certain, comme je te le disais tout à l’heure, que le fait que Laurent ait les compétences et le matériel pour enregistrer et mixer un album est un atout essentiel. On a pu avancer à notre rythme. De la même manière, Michaal et François peuvent gérer leurs prises chez eux. On peut travailler ensemble ou à distance, c’est très confortable. Et pour ce qui est de la production et des choix artistiques, on avait déjà des idées, puis le temps et les propositions ont affiné tout cela. On a passé, Laurent et moi, le temps nécessaire pour aboutir les titres comme nous le souhaitions. 

– Avec Michaal Benjelloun, vous formez un beau duo de guitaristes. L’esprit est très zeppelinien avec des teintes Blues et Southern. Comment est-ce que deux musiciens aussi aguerris se partagent-ils les rôles, même s’il y a aussi de beaux passages de twin-guitares ?

De manière très naturelle. Déjà, dans l’écriture, il y avait beaucoup de place laissée aux guitares. Et c’est logique, puisqu’initialement, c’est un projet de guitaristes… On aborde un titre avec comme question : ‘tu préfères faire le premier ou le deuxième solo ?’. Après, tout est libre, les idées d’arrangements sur les parties rythmiques, le choix des guitares et des sons. On s’écoute, l’idée de l’un fait rebondir l’autre, on cherche toujours à se compléter et à mettre en valeur nos qualités respectives.

– Est-ce que, lorsque l’on joue et compose du Classic Rock comme EMERALD MOON, l’idée est de toujours faire évoluer le style en y apportant quelques touches modernes, ou plus simplement juste de se faire plaisir ? Car cela impliquerait de fait une certaine finitude du registre… 

Je me souviens d’une chronique d’album qui se concluait par cette phrase : « Ils n’ont pas inventé la poudre, mais ils savent la faire parler ». C’est une très belle formule. Quand je compose, il m’arrive de faire des citations volontairement appuyées comme pour « What You’re Told », qui sonne très Thin Lizzy. Il arrive également que l’on me dise que telle composition est inspirée de tel titre, alors que ce n’était pas une piste de départ consciente… Il est évident que nous sommes imbibés de toutes nos écoutes et que ces influences transpirent fatalement dans notre écriture. Je n’ai absolument pas l’idée de révolutionner le style, mais j’essaie de m’appliquer, lorsque je compose un titre à lui donner une première lecture fluide. J’essaie également de le remplir de petites surprises à travers les arrangements, la réexposition des thèmes, la structure et un ensemble de choses qui fait que la première impression d’évidence évolue au fur à mesure des écoutes. Parce que l’idée est là : façonner et penser notre musique dans l’esprit de celle que nous écoutions il y a trente ans, lorsque les moyens technologiques ne nous permettaient pas d’accéder à tous les albums de tous les groupes en un clic. On avait, en gros, un album par mois, on prenait le temps de l’écouter et d’en extraire la totalité des subtilités. Si les gens qui s’intéressent à notre album nous font l’honneur de prendre le temps de se l’approprier, je veux qu’ils puissent découvrir des choses au fil des écoutes. 

– Enfin, avec un tel premier album, on attend forcément une suite à cette belle aventure. Est-ce que vous vous projetez déjà dans l’avenir avec des concerts à venir, par exemple, et/ou déjà le projet d’un deuxième album en tête ? Comme vous êtes tous les cinq engagés avec dans d’autres formations, j’espère qu’EMERALD MOON n’est pas un one-shot…  

L’album est sorti le 13 juin, via Inouïe Distribution, et nous étions sur scène ce jour-là, ainsi que les trois jours qui ont suivi. Mais nos emplois du temps respectifs ont effectivement limité les possibilités de concerts pour 2025. On travaille sur 2026 pour pouvoir mieux s’organiser et avoir plus de visibilité. Et effectivement, l’idée du deuxième album est déjà là.

Le premier album d’EMERALD MOON, « The Sky’s The Limit », est disponible chez Inouïe Distribution.

Photos : Christian Viala (3) et Richard Guilhermet (4).

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Rock 70's

Jade Elephant : Rock spirit

C’est avec beaucoup de feeling et de précision dans le jeu que JADE ELEPHANT surgit avec un premier opus abouti et séduisant. Inspiré par le grand dirigeable tout comme Creedence Clearwater Revival notamment, les Canadiens, qui n’ont pourtant pas connu cette période bénie, sont totalement imprégnés de cette culture vintage pleine de vibrations fortes qu’il remettent au goût du jour avec talent et dans la formule la plus épurée et sincère qui soit : le trio. Une énergie débordante sur dynamique authentique.

JADE ELEPHANT

« Jade Elephant »

(Independant)

Même s’ils sont encore tous les trois dans la vingtaine, ils nous rappellent au bon souvenir d’un Rock 70’s débridé et sauvage. Et si le nom de Led Zeppelin revient sans cesse en tête, JADE ELEPHANT réussit à trouver sa voie et affirmer sa touche sur ce premier album éponyme, qui en dit déjà long sur ses ambitions. Brut et organique, « Jade Elephant » est un recueil de dix morceaux bien structurés, efficaces et mélodiques qui, malgré leurs références évidentes, n’ont absolument rien de poussiéreux. 

Après avoir sorti « So Far » en novembre dernier, sur lequel figuraient déjà trois morceaux de ce long format, JADE ELEPHANT se lance donc dans le grand bain et le résultat est très convaincant. Produit et mixé par Russell Broom entre Langdon et Calgary en Alberta, « Jade Elephant » affiche exactement le son que l’on attend d’un tel disque. Farouche et massif, il reflète l’état d’esprit d’une certaine époque conjugué à la fougue de jeunes musiciens qui se surprennent à en prolonger le plaisir avec vigueur.

Le power trio se montre plein d’audace en ouvrant avec « That Much Is Clear », un titre qui commence de manière acoustique pour se conclure par un solo électrisant. Ensuite, JADE ELEPHANT poursuit sur sa lancée et s’enflamme sur « Bad Thing », « I Got Time », « Zombie », « Pay The Piper » et « Hallway Dark ». Sans révolutionner le genre, le groupe l’oxygène à sa façon et avec la manière. Voir la nouvelle génération reprendre le flambeau avec autant de classe et d’enthousiasme est un ravissement.

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Fuzz Rock Psychedelic Rock

Paddang : un fuzz reptilien

Si ce deuxième album a quelque chose de solaire dans le son, il l’est nettement moins dans son propos. Cela dit, « Lost In Lizardland » est lumineux et dynamique et surtout, il vient confirmer que la formation toulousaine n’a pas son pareil pour mettre en musique des visions souvent hostiles et obsédantes. PADDANG hypnotise et s’engouffre dans une épopée cosmique pleine de rebondissements. Revigorant !

PADDANG

« Lost In Lizardland »

(Le Cèpe Records/Stolen Body Records/98 Décibels/Noise Circle)

Lorsque pas moins de quatre labels se penchent sur un même groupe, c’est qu’il doit y avoir une bonne raison. Deux ans après « Chasing Ghosts », PADDANG remet le couvert et nous invite à une sorte de road-trip Sci-Fi, où les gros lézards ne sont jamais loin et la bonne humeur omniprésente. Sur « Lost In Lizardland », le fil conducteur tourne autour des enjeux mondiaux actuels et le trio nous met en garde à travers l’histoire de Moros, une jeune femme désenchantée en mode survie. Tout un programme !

Composé de Thomas Boquel (guitare), Guirec Petton (basse, synthés) et Rémi Fournier (batterie), PADDANG a la particularité de compter trois chanteurs dans ses rangs et le travail sur les harmonies vocales a même quelque chose des Beach Boys (si, si !) dans un ensemble qui résonne de manière androgyne, planante et insaisissable. Avec le soutien du claviériste Cédric Forestier, le trio développe un univers musicalement très riche et on le doit à des arrangements soignés et très créatifs, qui rendent cet album si singulier.

Si l’exigence est au cœur de « Lost In Lizardland », on perçoit aussi beaucoup de plaisir dans l’interprétation de ces huit nouveaux morceaux. Passé l’intro, on entre dans le vif du sujet avec « Pressure », qui dévoile d’ailleurs un passage en français, et PADDANG pare également  son Psych Rock d’aspects plus Heavy et massif. Parfois assez Pop (« Lizardland »), atmosphérique (« Moros Journey ») ou cinématique (« The Astral Flood »), l’aventure sonore est captivante et bien fuzz. Enfin, laissez « Agartha » défiler et patientez jusqu’à l’assaut final.

Photo : Prescilia Vieira

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Classic Hard Rock Rock Hard

Star Circus : intrépide

Avec « From The Wreckage », STAR CIRCUS vient assoir une position déjà séduisante entrevue sur « Separate Sides ». Avec un titre qui vient habillement faire mentir son contenu, le duo, qui a doublé de volume entretemps, se montre à la hauteur d’un héritage musical qu’il ne cherche même pas à cacher. Classique sans être poussiéreux, les Britanniques s’inscrivent dans une lignée déjà bien tracée et s’y engouffrent avec plaisir en apportant une touche de fraîcheur à un Rock rassembleur et percutant, sans être nostalgique. Deuxième essai transformé !

STAR CIRCUS

« From The Wreckage »

(Renaissance Records)

Trois ans après un premier effort, « Separate Sides », qui avait valu aux Londoniens une belle reconnaissance nationale, STAR CIRCUS fait un retour en force avec « From The Wreckage ». Et le duo initialement composé de Tony Winkler (chant, guitare) qui avait d’ailleurs produit le premier opus et Sophie Aurelia Young (basse, chant) accueille Reuben O’Donoghue (batterie/chœurs) et les guitaristes Tom Draper (ex-Carcass, Spirit Adrift) et Ritchie Mohicano (Dobermann), venus renforcer les rangs. La nouvelle configuration a fière allure et l’entente est claire. Autour d’un Hard Rock qui évolue entre Classic Rock et un Glam Metal estampillé 80’s, l’ensemble est enthousiasmant.

Signé sur le label Renaissance Records basé en Arizona, les Anglais sous-entendent que leur projet vise l’international et « From The Wreckage » devrait leur permettre, en effet, de quitter leur île sans trop de mal. L’album est plus que cohérent, malgré quelques grands écarts stylistiques bien maîtrisés et franchement bien sentis. STAR CIRCUS est absolument ancré dans son temps et la variété des compositions vient confirmer le savoir-faire du quatuor, qui est assez bluffant en termes de mélodies avec des refrains qui restent en tête. La machine est parfaitement huilée et les membres plus qu’aguerris.

Et ce qui frappe aussitôt également sur « From The Wreckage », c’est la combinaison des deux six-cordistes, qui jouent à armes égales et se partagent très bien les riffs et les solos, se relayant avec beaucoup de finesse et sans se marcher dessus. STAR CIRCUS se montre volontiers ambitieux, alternant des élans musclés et des passages plus sombres avec une efficacité redoutable. Le frontman tient la baraque, mais quand la bassiste prend le chant sur « Masquerade », on regrette qu’elle ne le fasse pas un peu plus. Le combo se montre donc très convaincant et assène un Rock solide, enthousiasmant et personnel.

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Hard Rock Rock US

Buckcherry : l’effet tornade

Revigoré depuis le très bon « Vol. 10 » sorti il y a deux ans, le gang de Los Angeles continue sur sa lancée et les cinq rockeurs semblent même au sommet de leur art. Bâti sur un Rock US ravageur et débridé, le Hard Rock de BUCKCHERRY est d’une totale sincérité et d’un impact sans limite. Avec beaucoup de caractère, il fait le lien entre des mélodies accrocheuses et une puissance de feu rugissante. « Roar Like Thunder » est aussi redoutable qu’addictif. Une bonne beigne !

BUCKCHERRY

« Roar Like Thunder »

(Earache Records)

Onzième album en l’espace de 30 ans pour les Américains, qui confirment avec « Roar Like Thunder » que le virage vers un Hard Rock plus direct et est devenu leur véritable cheval de bataille. BUCKCHERRY est revenu aux fondamentaux, délaissant un Alternative Rock assez convenu et surtout ultra-formaté pour les radios US, afin de laisser place à une explosivité déjà sous-jacente depuis longtemps pour offrir enfin tout son potentiel. Et, rangé derrière le phénoménal Josh Todd, certains aspects plus costauds refont surface avec éclat.

Frais et spontané, BUCKCHERRY renoue donc avec une attitude plus Sleaze, presque Punk, sur des morceaux taillés pour la scène et nerveux à souhait (« Crazy Bitch »). Côté guitares, Stevie Dacanay et Billy Rowe s’en donnent à cœur-joie et affichent une belle complicité. Les titres composés par leur fondateur et frontman avec le producteur Marti Frederiksen sont probablement les meilleurs depuis un moment, et l’air de Nashville, où a eu lieu  l’enregistrement, semble avoir fait du bien au groupe, tant il bouillonne de plaisir.

Dès le morceau-titre qui ouvre les festivités, on sent la ferveur et l’enthousiasme qui envahissent ce « Roar Like Thunder » d’un claquement de doigt. Inspiré et déterminé, BUCKCHERRY livre un opus estampillé 100% californien, dont on avait presque oublié l’authenticité de la saveur (« Come On », « Talkin’ Bout Sex », « Blackout », « Machine Gun », « Let It Burn »). Vivant et dynamique, le quintet n’a rien perdu de son jeu et, au contraire, paraît plus tranchant et malicieux que jamais. Une tornade !

Photo : Tommy Sommers

Retrouvez les chroniques des albums précédents :

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Americana Country-Rock Roots Rock Southern Rock

American Mile :  from roads to paths

Situé entre The Black Crowes et Chris Stapleton, AMERICAN MILE a rapidement défini son propre style, autour d’une Country-Rock très Southern et plutôt musclée. Efficace et entraînante, cette deuxième réalisation est le reflet d’un registre en pleine évolution et qui s’oxygène à travers les vibrations d’un Rock américain traditionnel. Rompu à l’exercice scénique, les quatre musiciens se montrent également impressionnants et vifs sur disque. A suivre de très près.

AMERICAN MILE

« American Dream »

(Independant)

Alors que le rêve américain a sérieusement du plomb dans l’aile depuis quelques mois maintenant, AMERICAN MILE parvient avec facilité et beaucoup de fraîcheur à nous y faire croire encore un peu, le temps du moins de ce très bon « American Dream ». Cinq ans après « The Longest Road », le groupe vient confirmer les belles choses entendues sur son premier album, en franchissant avec panache le cap du deuxième effort brillamment. Grâce à un Southern Rock qui fait l’équilibre entre Americana et Country, le quatuor a trouvé sa voie.

Bien qu’originaire de la région de Los Angeles, AMERICAN MILE laisse aussi traîner ses oreilles du côté de Nashville et a aussi parfaitement digéré les classiques du Allman Brothers Band et du Marshall Tucker Band notamment. Servies sur un plateau par la production de Bruce Witkin et Keith Nelson, les neuf nouvelles compos laissent éclater une audace et une énergie débordantes. Guidé par leur chanteur et guitariste, les autres membres donnent aussi de la voix dans une belle harmonie, et c’est un vrai plus mélodique.

Entre slide, pedal steel et orgue, l’éventail est large et complet, et AMERICAN MILE fait preuve de beaucoup de maturité dans l’écriture. Tournant de manière intense ces dernières années, le combo se montre très affûté et multiplie les ambiances à l’envie, tout en restant accrocheur et puissant dans le jeu (« Get Up & Fly », « Photograph Of You », « Waiting On A Sunday », « American Dream », « Wiggle For Me », « Straight From The Hearland »). Toujours sans label, le Roots Rock très sudiste des Californiens devrait vite se répandre.

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Alternative Metal Alternative Rock

Volbeat : le coup de la panne

Grosse flemme ou signe des temps ? Ou les deux, tant ils sont inhérents ? Une chose est sûre, certaines formations s’usent plus vite que d’autres et atteignent leur plafond de verre une fois la reconnaissance et le succès obtenus. Cela semble être le cas de VOLBEAT qui, faute de se renouveler, régresse au fil des disques. Les Scandinaves ont perdu leur guitariste solo Rob Caggiano et, comme on s’y attendait, le coup est rude. A l’écoute de « God Of Angels Trust », on cherche vainement un peu d’imagination… avant de se rendre à l’évidence.

VOLBEAT

« God Of Angels Trust »

(Universal)

Alors qu’il n’avait fallu que trois mois aux Danois pour mettre en boîte « Servant Of The Mind » il y a quatre ans, six petites semaines, dont treize jours de studio, ont suffi à l’élaboration de « God Of Angels Trust ». Et cela s’entend ! Depuis deux albums maintenant, VOLBEAT se montre expéditif et ça ne joue pas forcément en sa faveur. La routine s’installe et avec elle une créativité qui s’étiole. Michael Poulsen peine très franchement à retrouver l’explosivité d’un « Rewind, Replay, Rebound », par exemple. Les idées manquent et l’ennui pointe très rapidement le bout de son nez.

Certes, le groupe livre toujours de bonnes mélodies et le fantomatique (car il n’est toujours pas un membre officiel) Flemming C. Lund d’Asinhell fait même de petites merveilles sur les solos, tandis que la rythmique fait le taff, tout comme Jacob Hansen à la production, mais VOLBEAT semble avoir perdu la flamme. Capable de belles étincelles ponctuellement, il ne va plus au fond des choses en présentant des morceaux qui tiennent en haleine jusqu’au bout. Sans surprise donc, le combo ne met plus le feu… ou alors, très brièvement. On a le sentiment qu’il expédie le truc sans conviction.

Se reposer ainsi sur ses lauriers n’est pas donné à tout le monde. L’ombre de Metallica pèse lourdement sur « God Of Angels Trust », tant au niveau des riffs que des nombreux gimmicks vocaux. Cependant, la bonne nouvelle vient du single au titre interminable « In The Barn Of The Goat Giving Birth To Satan’s Spawn In A Dying World Of Doom » (on ne rit pas !), où plane cette fois l’esprit de Johnny Cash. Ensuite, VOLBEAT sombre totalement sur « Time Will Heal » et « Lonely Fields », entre autres. Le désormais power trio n’a plus de power que son appellation. Circulez !

Photo : Brittany Bowman

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Blues Rock France Rock 70's

Pacôme Rotondo : les songes bleus [Interview]

Il y a deux ans, le jeune guitariste-chanteur faisait une entrée fracassante avec un premier effort, « World Of Confusion », d’une maturité déjà bluffante. Le voici déjà de retour avec la même fougue, les mêmes convictions et un son qui s’est franchement étoffé. Plus percutant encore, mais également de plus en plus à l’aise dans des sphères aériennes, PACÔME ROTONDO passe haut la main le difficile exercice du deuxième album. Le Lyonnais fait preuve d’une liberté totale et enrobe son Blues Rock de teintes progressives et psychédélique avec une audace rafraîchissante sur ce « Crimson Rêverie » aux saveurs multiples. Entretien avec un musicien, qui montre déjà un savoir-faire et une maîtrise de son jeu et du songwriting rares.  

– La première question que je me pose est de comprendre comment lorsqu’on grandit dans les années 2000, on acquiert une culture et un goût aussi prononcés pour la musique Blues et Rock des 70’s. Est-ce que c’est le fruit d’un apprentissage fait en famille, ou au contraire une grande curiosité de ta part ?

Je pense que c’est un tout. Effectivement, l’environnement familial joue un rôle, mais la curiosité y est aussi pour beaucoup. Avant d’être musicien, je suis d’abord un mélomane. Ecouter de la musique m’a donné envie d’en faire. A la maison, j’ai toujours baigné dans un environnement musical Blues et Rock avec les goûts de mon père, tel que Calvin Russel, Gary Moore, Bonamassa, ou du côté de ma mère avec des choses plus actuelles comme Depeche Mode, Seal, Robbie Williams… Dans tous les cas, ça a toujours été de la musique joué par des instrumentistes.

Et de mon côté, j’ai écouté beaucoup de Hard Rock et de Metal et je me suis forgé ma propre expérience. C’est vraiment un style que j’affectionne et qui m’a donné envie de travailler mon instrument pour jouer à la manière des guitaristes que j’apprécie dans le style comme Zakk Wylde, Kiko Loureiro, Paul Quinn de Saxon, etc…

Les rencontres aussi sont importantes, il y a toujours un tel ou un tel qui te dit : tiens, écoute cet album, ça devrait te plaire. Que ce soit des professeurs que j’ai eu, de simples discussions entre mélomanes souvent plus âgés que moi ! (Rires) ou avec des camarades musiciens, tous ont eu un impact dans ma culture musicale. C’est d’ailleurs grâce à ce genre d’échanges que j’ai découvert, avec joie, Albert et Freddie King.

Et puis comme tu l’as très bien dit, j’ai grandi dans les années 2000 (je suis né en 2001….), avec Internet et YouTube, où il est quand même facile d’écouter de la musique et de découvrir plein de choses. Je continue d’affirmer que le streaming est, quand il s’agit de découvertes, un outil absolument formidable et fantastique. Si on est un boulimique de musique, c’est une confiserie à ciel ouvert !

– On t’avait découvert il y a deux ans avec un premier album, « World Of Confusion », dans un Blues Rock aussi explosif que sensible et déjà avec une vraie touche. Même si tes références sont assez évidentes, comment justement as-tu œuvré pour t’en détacher le plus possible ?

Je n’ai pas réellement cherché à me détacher de mes influences. Cependant, j’ai essayé d’en mettre d’autres en valeur ! Le laps de temps a été assez court entre les deux albums, il est compliqué de se ‘réinventer’ totalement dans un intervalle aussi limité (enregistrement en mars 2023 pour le premier album et novembre 2024 pour le deuxième). Mais j’ai voulu proposer une expérience nouvelle et éviter la redite de « World Of Confusion ». Et je pense que cela passe aussi par le fait de ne rien s’interdire. Avec l’ajout du clavier, le travail de composition a lui aussi été différent.

– Tu es guitariste et aussi chanteur, ce qui ne va pas forcément de soi, puisque beaucoup préfèrent se concentrer sur leur instrument ou leur voix. Est-ce que pour toi, cela a été une évidence de mener de front les deux exercices ? Et quant est-il du contenu des textes ?

Alors, peut-être que cela ne semble pas aller de soi au premier abord, mais nombreuses sont mes références de guitariste-chanteur et qui excellent dans les deux registres. Je pense évidemment à Hendrix, Gallagher ou encore les trois King dans un contexte Blues Rock, et Dave Mustaine ou James Hetfield dans un registre plus Metal. Je pourrais d’ailleurs citer aussi George Benson. Cela est donc plutôt apparu comme une évidence pour moi plutôt qu’une contrainte, même si je me sens tout de même plus guitariste que chanteur !

Evidemment, je donne beaucoup d’importance aux textes. La musique est un joli vecteur pour faire passer des messages, ou simplement raconter une histoire. Dans mes morceaux, je raconte mon rapport à l’autre, à l’amour, la mort, la déception, l’alcool, …Je décris aussi ce qu’il se passe dans le monde. J’aime bien cet exercice d’écriture, c’est une belle introspection.

– Sans parler de fossé, la différence entre « World Of Confusion » et « Crimson Rêverie » est assez flagrante. La première se situe au niveau du son, tandis qu’on te sent également beaucoup plus assuré dans ton jeu comme vocalement. Tu le dois à un travail acharné, à l’enchaînement des concerts, ou l’expérience vient forcément de ces deux aspects de la musique ?

C’est évidemment un tout. Je dirais que le retour d’expérience de « World Of Confusion » est primordial et il participe à cette différence. Le clavier apporte aussi beaucoup au son du groupe, il permet d’avoir un son de guitare tout à fait différent, de créer des ambiances et il participe fortement au climat du disque. J’ai été assez exigeant envers moi-même sur mes parties de guitares et de voix sur ce deuxième album, tout comme les comparses qui m’accompagnent. On a beaucoup travaillé de notre côté, et en groupe, pour tirer le meilleur de nous-mêmes ! Je suis content qu’on ressente cette différence.

– Sur ton premier album, l’atmosphère globale était nettement marquée par le Blues Rock avec des sonorités très British et irlandaises aussi. Est-ce qu’avant de te projeter sur la suite, tu avais besoin de faire une espèce de bilan personnel sur ton lien avec ses racines profondes ?

Avec un laps de temps aussi court, il n’y a quasi pas eu de pause d’écriture entre les deux albums. Dès la fin de l’enregistrement de « World of Confusion », le travail de composition a repris. Non, il n’y a pas de bilan personnel sur mon lien avec mes influences Blues Rock. En fait, j’ai plein d’autres influences et c’est peut-être ces dernières qui se dévoilent un peu plus sur cet opus. J’ai un gros passif de hard rockeur/metalleux, cela se ressent sur certains titres et dans ma manière d’aborder certains solos ! Mes influences Folk et Blues sont aussi à l’honneur avec un titre comme « Is The World », et même Pop sur « A Man Needs ». Sans parler du coté Prog avec le titre éponyme. Puisque je suis un boulimique de musique et que j’aime énormément de styles, il m’est difficile de trancher dans une direction précise. Finalement, toutes ces racines et influences forment la musique de PACÔME ROTONDO !

– Avec « Crimson Rêverie », on te retrouve dans un registre très 70’s et surtout avec une approche plus Classic Rock voire Hard Rock, c’est selon, avec des inspirations clairement ancrées dans les pas de Led Zeppelin, des Doors et de Deep Purple, notamment dans les parties d’orgue et les aspects plus aériens. Avant d’entrer dans les détails, est-ce que l’apport de claviers, et donc d’un nouveau membre, t’a paru indispensable pour te mouvoir plus facilement dans ce registre ?

Oui, l’apport du clavier m’a paru nécessaire. Cela me semblait essentiel, afin de proposer un discours nouveau et d’étoffer ma musique. C’est un exercice différent du power trio, deux approches singulières. Le clavier offre plus de liberté à la guitare et un certain confort. Je peux aussi me détacher de certaines parties et aborder l’aspect chant plus sereinement.

Led Zeppelin, Deep Purple et les Doors sont des groupes que j’ai beaucoup écouté et dont je maîtrise assez bien la discographie, je suis donc heureux qu’on retrouve un peu de tout ça dans ma musique ! Cet album est un peu comme le premier, une combinaison de tout ce que j’aime. Hard Rock, Hard Blues, Rock Psyché, Rock Progressif, Folk….

– Est-ce que, finalement, la formation avec laquelle tu te présentes sur « Crimson Rêverie » est celle dans laquelle tu t’épanouies le plus et qui convient le mieux pour la musique que tu as en tête ? Le groupe de PACÔME ROTONDO est-il au complet dans cette formule ?

A l’heure actuelle, oui, c’est celle avec laquelle je m’épanouis le plus et qui retranscrit au mieux mes idées. Après, rien n’est figé ! Un retour au power trio n’est pas prévu, bien que j’aime ce côté brut et l’aspect ‘sans parachute’. Je pense en avoir fait le tour, du moins pour l’instant. La formation ne pourra que s’étoffer à l’avenir !

– On l’a rapidement évoqué, mais il y a une progression assez évidente aussi dans la production de ce nouvel album. Qu’est-ce qui a changé cette fois-ci ? Ton entourage en studio a-t-il changé et surtout, qu’as-tu appris de ton premier enregistrement ?

L’entourage n’a pas changé ! Même studio, même ingénieur du son pour les prises et le mix (Pascal Coquard du Studio ‘Les Tontons Flingueurs’ – NDR) et même ingénieur du son pour le mastering (Alan Ward d’Electric City Studio – NDR). La production a été différente, on a pris le temps de travailler les sons et de tester plein de choses ! J’avais envie de faire sonner le disque différemment du premier, qui a été formateur. Il m’a permis d’aborder le deuxième de manière beaucoup plus sereine. Il y avait moins d’appréhension et un stress positif, proche de l’excitation. On savait comment donner le meilleur de nous-mêmes, sans se contraindre d’une pression négative. Et puis, je savais peut-être un peu plus où je voulais emmener ce deuxième album dans la production.

– Le morceau-titre est aussi assez angulaire sur l’album avec ses sept minutes. Là encore, c’est quelque chose que l’on n’entend plus beaucoup dans les répertoires contemporains. Est-ce une chanson sur laquelle tu t’es penché plus longuement que les autres avec l’idée, peut-être, d’en faire une sorte de ‘morceau signature’ dans ton parcours ?

Effectivement, ces sept minutes peuvent paraître comme un OVNI, à l’instar du dernier titre qui dure 7min40 ! Pourtant, ce sont ces deux-là qui sont venus le plus naturellement. Les idées se sont mises en place de manière assez fluides et cohérentes. La longueur permet de prendre le temps, de proposer un discours et de faire évoluer le morceau. C’est peut-être dans ce genre de registre que la suite se fera. Dans un monde où tout va plus vite, où les musiques sont de plus en plus courtes et où les gens perdent l’attention au bout des 15 premières secondes, c’était un pari risqué. Mais ces morceaux très longs sont aussi des références pour moi comme chez Pink Floyd, Supertramp, The Doors, etc… Dans tous les cas, je serais vraiment réjoui et flatté qu’on assimile ça à un ‘morceau signature’.

– Un mot aussi du titre « Interlude II » et son côté très Gary Moore et qui est par ailleurs instrumental. De quelle manière le perçois-tu  sur « Crimson Rêverie » ? Comme une sorte de respiration ou franchement un hommage au guitar-heros irlandais ?

« Interlude II » est le petit frère du titre « Interlude », qui était présent sur « World Of Confusion ». J’aime bien ce côté 100% instrumental. Une capsule dans un album. Faire passer un discours avec seulement son instrument n’est pas chose aisée. C’est toujours délicat et compliqué à réaliser. Je vois ça comme un challenge personnel. D’ailleurs, je ne voulais pas qu’on l’enregistre, je n’étais vraiment pas satisfait de mes parties. Et puis, mes comparses m’ont poussé et j’ai essayé d’oublier celles que j’avais composées pour la guitare, de me détacher de tout ça pour jouer dans l’instant présent et improviser pleinement le jour de l’enregistrement. Je suis très heureux du résultat, je trouve que la guitare chante et ça me fait plaisir ! C’est marrant que tu y trouves des inspirations de Gary Moore, car cela n’a pas du tout été une référence pour ce morceau de mon côte. « Interlude II » est né, au départ, d’une écoute de l’album « Genesis » de Genesis. Le climat de « Mama » a été une belle source d’inspiration. Je voulais aussi avoir un côté Pink Floyd, très Prog, avec une guitare très arienne au début du titre et ce piano très présent, qui participe au climat du morceau. Je perçois ce titre comme un hommage à mes influences Prog et comme un lien avec le premier album. Gary Moore n’est donc pas dans l’équation. Mais si jamais tu peux me trouver un morceau de lui dans cet esprit, ça m’intéresse ! (On s’en reparle sans faute ! – NDR)

– Enfin, peu avant la fin de l’album, on te retrouve aux côtés de Raoul Chichin pour une version beaucoup plus Folk et dans un Blues très aéré et puissant du standard de Buffalo Springfield, « For What It’s Worth ». C’est un choix un peu surprenant de jouer cette chanson qui date de 1966. Comment vous êtes-vous retrouvés tous les deux autour de ce morceau ? Et qui en est à l’initiative ?

Au départ, je souhaitais faire une reprise sur l’album. « For What It’s Worth » est une chanson qui m’accompagne depuis longtemps et que j’apprécie tout particulièrement. Je voulais un arrangement assez personnel du titre, éloigné de l’original, sans trop transformer l’œuvre de base ! Raoul est un bon copain. S’il devait y avoir un invité sur le disque, ça ne pouvait être que lui. Ça m’a paru tout naturel de l’inviter ! On a enregistré ses parties chez lui à Paris, mi-décembre, alors qu’il rentrait tout juste de tournée. Et c’est un chouette souvenir, on aura bien rigolé à faire ça !

Le nouvel album de PACÔME ROTONDO, « Crimson Rêverie », est autoproduit et disponible chez Inouie Distribution.

Photos : Olivier Frety (1, 3, 5) et Virgil Dupin (2, 4, 6)

Retrouvez la chronique de son premier album :

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Classic Rock Southern Rock

The Speaker Wars : rockin’ peace

Faire dans la nouveauté à Nashville n’est pas l’exercice le plus facile, c’est vrai. Cependant, élever le niveau et produire un album de qualité en jouant sur une monumentale expérience et un talent qui n’est plus à prouver depuis longtemps est largement dans les cordes de THE SPEAKER WARS. Son Classic Rock teinté de Southern ne souffre d’aucune faille et le plaisir des protagonistes s’entend même sur chaque chanson. « The Speaker Wars » est de ces disques à mettre entre toutes les mains.

THE SPEAKER WARS

« The Speaker Wars »

(Frontiers Music)

Il y a des rencontres qui font des étincelles et qui semblent même être le fruit du destin. Celle entre le songwriter texan Jon Christopher Davis et l’emblématique Stan Lynch en fait clairement partie. Pour rappel, ce dernier est membre du Rock And Roll Of Fame, a fondé les célèbres Heartbreakers de Tom Petty avec qui il a œuvré durant deux décennies avant d’écrire, avec succès, pour des artistes comme les Eagles, Don Henley, The Byrds, Toto ou The Fabulous Thunderbirds. Les bases sont donc solides chez THE SPEAKER WARS.

Les deux compositeurs se sont rapidement attelés à l’écriture, à Nashville, puis se sont mis en quête de musiciens. Aux côtés de Jan Michael Smith (guitare), Brian Patterson (basse), Steve Ritter (percussions) et Jay Brown (claviers), Jon Christopher Davis a pris le micro et Stan Lynch retrouve enfin sa batterie avec un sens du groove imparable. Autant dire que ça ronronne et nos deux têtes pensantes ont fait de THE SPEAKER WARS un groupe vraiment efficace et dont ce premier album éponyme ne devrait être qu’un début.

C’est à Denton, Texas, que le sextet a enregistré ce très organique « The Speaker Wars » d’où émane une douce nostalgie, celle d’un Classic Rock entre tradition et saveurs sudistes. Et si l’on retrouve quelques références notables, THE SPEAKER WARS tire magnifiquement son épingle du jeu. Après une entame très Rock et relevée, les Américains présentent une seconde partie plus Southern avec émotion et sur des mélodies entêtantes (« It Ain’t Easy », « Never Ready To Go », « When The Moon Cries Wolf », « Sit With My Soul »). Savoureux !

Photo : Michelle Ganeles

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Alternative Rock

Skunk Anansie : sans faille

Sa voix, sa silhouette et son engagement auront marqué d’une empreinte indélébile le Rock exalté des 90’s. La frontwoman Skin et ses trois compagnons d’armes sont enfin de retour avec « The Painful Truth ». Cumulant plus de cinq millions d’albums vendus, SKUNK ANANSIE a pourtant connu des passages à vide, malgré une notoriété conséquente. Peut-être parce qu’il ne triche pas, le combo a pris son temps pour élaborer ce nouvel opus et on y retrouve la même pertinence dans le propos, des mélodies entêtantes et une électricité palpable. L’ambition est intacte et le verbe haut.

SKUNK ANANSIE

« The Painful Truth »

(FLG Records)

On aurait pu croire SKUNK ANANSIE mort et enterré, mais c’était sans compter sur l’énergie qui guide le groupe anglais depuis sa création en 1994. Après des débuts fracassants avec les monumentaux « Paranoid & Sunburnt » (1995), « Stoosh » (1996) voire « Post Organic Chill » (1999), on ne voyait pas bien qui, ou quoi, pouvait les arrêter. Pourtant, une longue pause de 2001 à 2008 l’a fait un peu passer au second plan, et malgré trois albums, le quatuor n’a jamais véritablement retrouvé son aura originelle. La faute probablement à une époque en pleine mutation à laquelle l’adaptation a mis du temps à se faire.

Neuf ans après « Anarchytecture », SKUNK ANANSIE livre son septième opus et celui-ci pourrait bien être celui de la renaissance et d’une impulsion créatrice retrouvée. Toujours menée par sa charismatique (le mot est faible pour qui l’a vu sur scène) chanteuse Skin, la formation londonienne se met à refaire ce qu’elle fait de mieux : un Alternative Rock mélodique, accrocheur, engagé, car il ne saurait en être autrement, et surtout percutant et provocateur à souhait. Sur « The Painful Truth » au titre si évocateur, le groupe paraît même ouvrir un nouveau cycle avec l’assurance des grands.

Après une sérieuse remise en question, les Britanniques ont retrouvé cette fraîcheur et ce dynamisme qui les a toujours caractérisés. Riche en textures et très bien produit, SKUNK ANANSIE se montre ambitieux, tenace et livre autant de paroles et de refrains qui restent ancrés instantanément. Sans remettre en question son style et son jeu, l’évolution est pourtant manifeste. Et cette hargne militante avec ses positions politiques et sociales affirmées resplendit (« An Artist Is An Artist », « Shame », « Cheers », le dubesque « Shoulda Been You » à la Nina Hagen, « Animal » et le tendre « Meltdown »). Quel retour !

Photo : Rob O’Connor