Mené de main de maître depuis quatre ans et autant d’albums, le vaisseau UNITED GUITARS vogue toujours au rythme des riffs, des solos et des chorus envoûtants de celles et ceux qui viennent se greffer à ce projet au départ un peu fou. Parfaitement produit, comme toujours, « #4 » nous fait parcourir l’univers de cette trentaine de guitaristes et le voyage est encore une fois enchanteur.
UNITED GUITARS
« #4 »
(Mistiroux Productions)
Chez UNITED GUITARS, on ne fait jamais les choses à moitié. Depuis le début de l’aventure en 2019, Ludovic Egraz et sa compagne et productrice Olivia Rivasseau ont livré quatre doubles-albums, dont voici le petit dernier. Et comme on ne change pas les bonnes habitudes, pas moins de 33 guitaristes se relaient sur deux bonnes heures de musique, où un grand nombre de styles sont abordés avec classe et une dextérité de chaque instant.
Chaque volume réservant son lot de surprises, « #4 » ne déroge pas à la règle. Et lorsque l’on connait le principe de base d’UNITED GUITARS, celle-ci est de taille. En effet, presqu’érigé en règle immuable, les précédentes réalisations étaient entièrement instrumentales, l’objectif étant de se mettre au service de la six-codes avant tout. Avec « Stay Real », Jessie Lee Houllier s’invite au chant pour un Blues Rock au groove imparable… et à trois guitares !
Tout en finesse et virtuosité, « #4 » nous invite notamment à faire connaissance avec le bluesman Robben Ford, le jeune prodige russe Max Ostro ou encore le Canadien Nick Johnston. Et UNITED GUITARS garde toujours une petite place pour ses habitués dont Yvan Guillevic (Heart Line), Saturax, NeoGeoFanatic ou Youri de Groote, toujours aussi créatifs. Soutenu par une rythmique royale, ces musiciens-là ne manquent vraiment pas de maestria.
Jessie Lee Houllier, LA chanteuse de l’album – Photo : La Chaîne Guitare
Précurseur et même pionnier du Thrash Metal, RAVEN est toujours resté fidèle à ce style Heavy et Speed, et en mode power trio, qui fait sa force et a forgé sa légende depuis maintenant un demi-siècle. Fondé par les frères Gallagher, ossature indestructible du combo, les Britanniques sont de retour avec leur 15ème album, « All Hell’s Breaking Loose », toujours aussi rageurs et athlétiques. Entretien calme et tout sourire avec John (basse, chant).
Photo : Jay Shredder
– Votre dernier véritable album studio date de trois ans, « Metal City ». Mais l’année dernière, vous avez sorti « Leave’Em Bleeding », qui était aussi le dernier chez Steamhammer. C’était la manière la plus simple de quitter votre label avant de venir chez Silver Lining Music ?
Oui, « Leave’Em Bleeding » était une sorte de compilation, qui faisait le bilan de nos dernières années chez Steamhammer et sur laquelle on a pu ajouter des morceaux en version inédites et notamment live. Et cela tombait bien aussi, puisque le nouvel album n’était pas encore terminé. Ensuite, nous avons reçu une très belle proposition de Silver Lining Music. Steamhammer a fait du bon boulot avec nous, c’est vrai, mais ce nouveau deal nous permettait d’avoir une exposition différente et également de toucher un public plus large et un peu différent.
– « All Hell’s Breaking Loose » est aussi le second album complet avec votre batteur Mike Heller et on a franchement l’impression qu’il a toujours été là. Je trouve même que c’est peut-être le meilleur line-up affiché par RAVEN depuis longtemps. C’est aussi ton sentiment ?
Oui et j’espère que c’est vrai ! (Rires) Il suffit de le voir sur scène ! Et puis, il gère très bien les interviews, la presse, les vidéos : il s’occupe vraiment de beaucoup de choses au sein de RAVEN. Il est très impliqué et il a fait du super boulot sur l’album.
John Gallagher – Photo Jay Shredder
– D’ailleurs, c’est votre 15ème album et l’an prochain, vous fêterez vos 50 ans de carrière. C’est une incroyable longévité et vous faites partie d’un cercle très fermé. Qu’est-ce que tout ça t’inspire et est-ce que tu aurais pu l’imaginer en 1974 à Newcastle ?
Bien sûr que non ! On a commencé à faire de la musique pour s’amuser et on n’aurait jamais imaginé que cela dure aussi longtemps. C’est incroyable pour nous de nous voir dans le Top 10 des groupes les plus anciens encore en activité. C’est même fou ! Aerosmith s’est formé juste deux ans avant nous, tu imagines ? (Rires) L’an prochain, nous allons essayer de préparer quelque chose de spécial pour célébrer cet anniversaire. Nous avons toujours eu cette motivation pour continuer le groupe et surtout pour faire ce que nous faisons. On a toujours voulu être meilleur à chaque album. Nous avons toujours en nous cette étincelle qui nous pousse plus loin et qui continue à nous inspirer. Et nous n’avons pas l’intention de nous arrêter en si bon chemin ! (Sourire) D’ailleurs, je pense que ce nouvel album en est un parfait exemple. Nous ferons des choses très spéciales en tournée l’an prochain, c’est une certitude.
– Vous avez enregistré ce nouvel album à Los Angeles dans vos propres studios. Vous êtes désormais installés là-bas, ou est-ce que c’est juste parce que le soleil de Californie qui vous donne toute cette énergie ?
En fait, Mike (Heller, le batteur – NDR) vit là-bas et possède son propre studio. Nous sommes en Floride avec Mark, mais cela ne change rien au processus d’écriture. Mike a apporté beaucoup d’idées et fait de nombreuses propositions pour obtenir ce son sur ce nouvel album. Pour ce qui est des arrangements, nous nous en occupons toujours tous les trois, ensemble. Nous lui avons tout envoyé : les guitares, la basse, les solos et il a fait un travail de fou avec tout ça, ainsi que sur les voix ! Il a réussi à faire un mix génial, tout en conservant ce côté très organique, qui caractérise RAVEN. Il nous a suffit de livrer la meilleure performance possible finalement.
– Cette fois encore, l’album est bâti autour des riffs et vos morceaux sont toujours très compacts. Il y a un côté intemporel dans votre écriture, ce qui fait que RAVEN sonne très actuel et moderne. Comme l’expliques-tu, car la plupart des groupes sont marqués par une époque et cela ne concerne pas seulement le son ?
En fait, on essaie de garder à l’esprit ce qui fait RAVEN : les riffs, bien sûr, un rythme soutenu, etc… mais sans jamais regarder vers le passé. On ne perd pas de vue nos racines, elles sont définitivement ancrées en nous. Et il y a aussi ce côté un peu extravagant et exagéré dans les textes, une certaine attitude de mauvais garçons peut-être aussi. Parfois, la basse et la guitare prennent des directions différentes et lorsqu’on se rend compte que ça devient un peu trop commercial : on se dit ‘Oups ! Il faut changer ça !’. Mais on garde un œil sur l’aspect mélodique, c’est un truc de fou en fait ! Il y a de l’intensité, on frôle souvent le chaos, mais il faut que ce soit accrocheur. Notre truc, c’est notre relation de musicien et la destruction ! (Rires)
– Il y a aussi une chose que je trouve incroyable chez RAVEN, c’est que votre Heavy Thrash ou Speed Metal ne baisse pas en rapidité et en percussion. Beaucoup de groupes de votre génération ont tendance à lever le pied et diminue en intensité, mais pas vous. Quel est le secret de toute cette nervosité si généreuse ?
C’est juste qu’on adore ce que l’on fait et nous sommes très ouverts ! Je me souviens que gamin à Newcastle, ce qui me fascinait dans certains concerts, c’était justement cette intensité et cette puissance, qui étaient saisissantes. Ca me transportait littéralement. Mon héritage musical vient de là, de tout ça. Depuis, j’essaie de délivrer la même chose, les mêmes sensations que j’avais adolescent. Et il y a aussi bien sûr cette connexion avec le public, qui est incroyable. C’est aussi pour ça qu’on ne prend pas de drogue, par exemple. Si tu fais ça, tu ne peux pas capter l’attention, tu restes dans ton coin à faire ton truc. Tu comprends ça en vieillissant et tu te rends vite compte que tu n’as pas d’excuse si tu n’as pas la passion. Balancer toute cette énergie est ce que tu dois faire ! C’est ça la liberté ! Regarde les Rolling Stones, ils sont probablement meilleurs aujourd’hui qu’ils ne l’ont jamais été ! Mick Jagger n’a jamais arrêté, il n’a jamais perdu l’inspiration. Si on peut le faire, alors faisons-le ! (Rires)
John & Mark Gallagher – Photo Jay Shredder
– Tout en restant très puissant et massif, RAVEN n’a jamais négligé les mélodies. Vous les travaillez plutôt en fonction des lignes vocales ou de la guitare ?
La plupart du temps, cela vient de la guitare. Souvent, Mark (Gallagher, son frère – NDR) m’envoie des trucs par téléphone qui ne veulent pas dire grand-chose et il me dit : ‘Tu vois, c’est ça qu’il faut faire !’ (Rires) Plus sérieusement, cela vient de la musique, pas du chant. Elle dicte la structure de la chanson, mais pas seulement, elle guide aussi la mélodie qui installe le titre. Ensuite, c’est une question de feeling. Il pose des voix avec des mots qui ne veulent rien dire au début pour installer la charpente en quelque sorte. Les paroles viennent après, suivant l’ambiance, et la ligne directrice apparaît d’elle-même. La fin de la pandémie a aussi réveillé beaucoup de choses en nous et nous a ouvert tellement de voies. Il a fallu canaliser tout ça et se demander de quelle manière devaient sonner nos nouveaux morceaux et je pense que cela nous a rendu encore meilleurs. On trouvait les choses plus rapidement, les breaks venaient d’eux-mêmes… Cela a provoqué ce genre de choses chez nous. Pas mal de trucs sont devenus assez évidents et nous avons expérimentés tellement de choses également ! (Rires) Lorsque nous enregistrons un album, il y a toujours environ 20% d’improvisation en studio. C’est quelque chose que nous adorons et qui ne nous fait pas peur du tout. Il y a un peu de magie là-dedans… (Sourire)
– Enfin, beaucoup de groupes dénoncent les difficultés économiques engendrées par les tournées. Comment cela se passe-t-il pour RAVEN ? Vous n’avez pas trop de problèmes au niveau de l’organisation financièrement ?
On en a eu, oui, mais ce n’était pas de notre fait. Nous devions participer à des festivals qui ont été annulés. Mais nos fans n’ont pas demandé à être remboursé. Ils ont en grande partie gardé leur billet. Après, c’est vrai que beaucoup de choses s’annulent, car les organisateurs n’ont aucune idée du nombre de gens qui viendront et combien d’argent ils pourront faire. Ils ne prennent donc aucun risque et annulent. Ils veulent l’argent avant de faire le concert. La pandémie a bousculé beaucoup de choses également jusqu’en 2021. Depuis deux ans, les concerts ont repris et certains endroits où nous étions programmés ont reportés en gardant la même affiche. Et pour nous, c’est très bien, car nous avons un nouvel album et nous ferons tous les festivals l’an prochain, même s’il y en aura aussi cet été. Et nous allons tourner avec Saxon également en Italie, puis nous jouerons aussi quelques concerts en Belgique. Et nous serons en France le 9 septembre dans les Pyrénées pour le ‘Pyrenean Warriors Open Air’, et ensuite en Allemagne. En octobre, nous serons ici en Angleterre pour une série de concerts, puis l’an prochain en Australie et au Japon. Donc, tout va très bien !!! (Sourire)
Le nouvel album de RAVEN, « All Hell’s Breaking Loose », est disponible chez Silver Lining Music.
RAY ALDER n’est pas du genre à rester les deux pieds dans le même sabot. Pour preuve, le leader de Fates Warning multiplie les projets artistiques, tout en restant dans un Metal Progressif qu’il maîtrise parfaitement. Avec cette deuxième réalisation sous son nom, « II », il fait encore la démonstration de sa polyvalence et de sa faculté à s’approprier les mélodies avec talent.
RAY ALDER
« II »
(InsideOut Music)
Figure emblématique du monde du Metal Progressif depuis 1988 avec Fates Warning avec qui il a sorti une dizaine d’albums, ainsi qu’avec Engine, With Redemption et A-Z depuis l’an dernier, RAY ALDER se balade en solo. Son nouvel opus, « II », fait suite à « What The Water Wants » (2019) et offre également d’autres perspectives au chanteur américain, qui est une fois encore très bien accompagné.
Ainsi, Mike Abdow qui tourne aussi avec Fates Warning et Tony Hernando (Lords Of Black) qui jouent tous les deux les basses et le batteur Craig Anderson (Ignite, Crescend Shield) font partie de l’aventure. Et tout ce petit monde s’entend à merveille et libère une grande vélocité sur « II ». RAY ALDER livre comme toujours une très belle prestation et s’affirme comme la pièce centrale du groupe.
Très bien produit et avec un mix particulièrement bien équilibré, ce nouvel opus va encore plus loin dans l’exploration musicale proposée habituellement par le frontman. Sur des refrains accrocheurs et des riffs intenses, RAY ALDER se montre audacieux, percutant et tout en puissance (« The Hollow Shell », « My Oblivion », « Waiting For Some Sun », « Changes »). Et grâce à des solos tout en finesse, « II » s’impose brillamment.
On connait assez mal les talents de songwriter de JOEL HOEKSTRA, même s’il marque de son empreinte le monde du Hard Rock et du Heavy Metal depuis plusieurs décennies au sein de plusieurs institutions du genre. Soliste hors-pair et incomparable faiseur de riffs racés, il présente aujourd’hui le nouvel opus de son projet solo, « Crash Of Life ».
JOEL HOEKSTRA’S 13
« Crash Of Life »
(Frontiers Music)
Guitariste de Whitesnake, Trans-Siberian Orchestra et Revolution Saints, le virtuose américain trouve tout de même le temps de se consacrer à son projet solo. Et « Crash Of Life » est déjà le troisième album du JOEL HOEKSTRA’S 13, composé d’une petite troupe d’élite. Les riffs tombent en cascade, les mélodies sont plus accrocheuses les unes que les autres et lorsqu’on peut s’offrir Jeff Scott Soto pour les chœurs, c’est que tout va bien.
Toujours entouré du bassiste Tony Franklin (ex-The Firm, Blue Murder), du batteur Vinny Appice (Ex-Black Sabbath, Dio), du claviériste Derek Sherinian (Sons Of Apollo, Dream Theater) et pour la première fois de Girish Pradhan (Girish And The Chronicles) au chant, la formation de JOEL HOEKSTRA a fière allure et la machine est bien huilée. Et entre Melodic Metal ou Heavy AOR, le groupe rayonne et s’impose avec clarté.
Musicalement, JOEL HOEKSTRA’S 13 évolue en terrain connu et pourtant le quintet ne manque pas de fraîcheur et d’envie et il ne se contentant pas de s’assoir sur une technicité et une expérience de longue date. Tout en puissance sur « Everybody Knows Everything », le groupe se met en ordre de marche et bouscule tout (« Damaged Goods », « Far Too Deep », « You’re Right For Me », « No Tonight »). Très bluesy dans la voix, le nouveau frontman fait des étincelles et l’on sort de « Crash Of Life » le sourire aux lèvres.
Si la pochette, tout en sobriété, de ce quatrième opus de DEAD QUIET peut laisser penser à une musique sombre et violente, c’est presque le contraire que proposent les Canadiens avec « IV ». Les belles harmonies et les envolées métalliques nous replongent dans l’univers si créatif des années 70 et 80 et son esprit Rock indélébile et savoureusement rétro.
DEAD QUIET
« IV »
(Artoffact Records)
Faisant partie de la grande famille Stoner en raison de l’épaisseur des riffs essentiellement, c’est plutôt du côté des pionniers du Heavy Metal et du Hard Rock, à savoir Black Sabbath et Deep Purple pour faire court, qu’il faut regarder pour bien saisir l’essence-même et le feu qui animent DEAD QUIET. Depuis ses débuts en 2014, le groupe s’est forgé une solide réputation dans son Canada natal et tend à rugir partout ailleurs.
Dès son premier album éponyme l’année qui suivit sa formation, puis avec « Grand Rites » (2017) et surtout « Truth And Ruin » (2020), DEAD QUIET n’a laissé personne indifférent à Vancouver. La musique du quintet n’a pas tardé à se propager au-delà, fort d’un registre efficace, très travaillé et où les mélodies et la puissance jouent les équilibristes. Et malgré cet esprit très vintage, un vent de modernité souffle bel et bien ici.
Armé de deux très bons guitaristes, d’une rythmique massive, d’un claviériste parfois touché par la grâce et d’un frontman au charisme évident, DEAD QUIET possède de sérieux atouts. Les refrains sont implacables et l’énergie déployée rend ce quatrième album rapidement addictif (« The Hanging Man », « Dying To Live Again », « Existential Dread », « High Roads », « Murder City »). La marque des grands.
Pour son premier opus, le combo finlandais frappe fort et affiche même une belle audace. Loin des clichés habituels, ENDLESS EXAM fait preuve de beaucoup d’aplomb, d’une grande liberté et la pertinence des arrangements de « Voice Of Passion And Agony » conjuguée à une envie plus que palpable, des riffs racés, des solos bien sentis et surtout une chanteuse dont le charisme éclabousse l’album, font de lui une réalisation très réussie.
ENDLESS EXAM
« Voice Of Passion And Agony »
(Inverse Records)
« Voice Of Passion And Agony » est le genre de disque qui fait du bien par les temps qui courent. ENDLESS EXAM, pour son premier album, bouscule les codes du Metal actuel grâce à une modernité et une fougue exacerbée, ainsi qu’un côté théâtral qui ne manque ni d’originalité, ni de fraîcheur. Formé en 2020, le groupe a déjà sorti quatre singles, tous très bien accueillis tant par la presse que par le public et le quatuor ne manque franchement pas d’ambition.
En s’appuyant sur des claviers pour développer les atmosphères et donner du relief à ses morceaux, ENDLESS EXAM s’est créé un univers à la fois décadent et très bien structuré. En frontwoman de choc, Nina Kuronen libère une incroyable énergie et se montre capable de se fondre dans n’importe quel registre, du Heavy à l’Indus. Hyper polyvalente, elle capte l’attention en maniant la douceur et la férocité avec une grande habileté.
Bâtis comme des tableaux, les dix titres de « Voice Of Passion And Agony » sont dotés d’une dynamique qui donne une belle unité à l’ensemble. Sans forcément jouer sur la vélocité, ENDLESS EXAM navigue entre les émotions avec un aspect très fédérateur, notamment dans les refrains qui restent rapidement gravés (« The Voice », « I Ain’t Your Toy », le génial « Wilride », « Consealed Truth », « Mother of Mercy », « Solaced Mind »). Envoûtant !
Chaque album de THE OCEAN est un nouveau voyage musical dans lequel on prend le large sans savoir vraiment comment se passera la traversée. Et la donne est la même avec « Holocene », qui nous plonge dans des temps immémoriaux, tout en portant cependant la marque d’une modernité très cyclonique. Inévitable… encore ! Entre Post et Progressive Metal, les Allemands se distinguent à nouveau.
THE OCEAN
« Holocene »
(Pelagic Records)
Toujours aussi imprévisible et insaisissable, THE OCEAN poursuit sa quête et son périple dans le Quaternaire avec un focus cette fois sur sa dernière période, « Holocene ». Et la suite du très bon diptyque, « Phanerozoic I & II » (2018 – 2020) s’avère toute aussi surprenante et envoûtante. Elaborés autour des claviers de Peter Voigtman, ces nouveaux morceaux ne manquent ni d’audace, ni de créativité. Et malgré les changements de line-up, les Berlinois fascinent toujours autant.
Cependant, le collectif est stable depuis 2018 maintenant et il faut avouer que cela s’en ressent dans l’écriture, mais aussi dans l’interprétation de « Holocene ». D’ailleurs, à y regarder de plus près, comment pourrait-il en être autrement tant la discographie de THE OCEAN est d’une qualité si régulière ? Ce dixième album s’inscrit ainssi dans son solide ADN et ce Metal progressif teinté de post-Metal est transcendé par des passages Sludge renversants et d’une fureur très sauvage.
Assez froid de prime abord, « Holocene » ne met pas longtemps à vous embarquer à travers des sonorités jouant sur la texture et les variations instrumentales (« Boreal », « Seed Of Reeds »). Massif (« Subboreal ») et véritablement frénétique avec le soutien de la chanteuse d’Årabrot (« Unconformities »), THE OCEAN déroute encore et ce malgré une unité artistique permanente. Quant à son chanteur, Loic Rossetti, il se montre aussi flottant qu’imperturbable quand il monte au front. D’un esthétisme raffiné et puissant.
Avec un tel premier album, ORYAD a placé la barre très haut. Bien qu’autoproduit, « Sacred & Profane » conjugue à la fois le côté symphonique versant dans le lyrique et également l’explosivité du Metal. Mélodique et inspiré, le groupe parvient à marier un grand nombre d’univers avec une facilité déconcertante. Grâce une telle entrée en matière, sa chanteuse vient déjà s’installer aux côtés des plus grandes voix du genre.
ORYAD
« Sacred & Profane »
(Independant)
Depuis son EP, « Hymns Of Exile And Decay » sorti il y a deux ans, ORYAD a pris du coffre et du volume pour lâcher un temps le Folk Metal à l’œuvre sur sa première production. Le duo de Denver dans le Colorado surgit avec « Sacred & Profane », où l’on peut prendre toute la dimension de sa frontwoman Moira Murphy, également aux arrangements et à l’orchestration. Soutenue par Matt Gottin-Sheehan derrière les fûts, et une multitude d’autres musiciens, le tandem se montre très créatif.
Cette fois, le ton est résolument symphonique et la soprano s’en donne à cœur-joie en offrant une prestation hors-norme, où mélodie et puissance se fondent dans des compositions aux paysages saisissants. ORYAD possède une maîtrise totale de son jeu basé sur une grande technicité et des harmonies progressives, sans pour autant sombrer dans le pompeux. Les Américains sont d’une fraîcheur incroyable et nous propulsent d’une ambiance à l’autre comme par magie.
Exigeant et ambitieux, « Sacred & Profane » traverse les styles avec élégance, cheminant de passages très Heavy au Doom, et à des atmosphères cinématiques et des éléments d’opéra. ORYAD raconte des histoires souvent épiques, bien aidé par une richesse orchestrale brillante élaborée avec une grande minutie (« Scorched Earth », « Blood », « Alchemy », « Wayfaring Stranger », « Slice Of Time », « The Path part I & II »). Etonnant et rigoureux, ce premier album est fait de poésie et de rêves.
Ayant émergé au début des années 2000 dans une espèce de no man’s land artistique qui a contribué à inonder la planète d’une multitude de trucs Nu Metal et MetalCore, AVENGED SEVENFOLD fait partie de ceux qui ont survécu et qui sont, par conséquent, l’un des plus surcotés de sa génération. Sans saveur, ni folie ou imagination, les Américains sortent un huitième opus non-essentiel et insipide.
AVENGED SEVENFOLD
« Life Is but A Dream… »
(Warner Records)
Et dire que cela faisait sept ans qu’on était peinard. Après « The Stage » et avec ce vaste temps de réflexion, on aurait pu imaginer qu’AVENGED SEVENFOLD fasse enfin sa mue, d’autant qu’après plus de 20 ans d’existence, il n’y a aucun mal à devenir mature et surtout à trouver son style, sa patte et un élan créatif digne de ce nom. Car le quintet possède bien des atouts malgré tout… sauf qu’on les cherche encore !
C’est vrai que le combo a toujours tourné autour du pot sans véritablement trouver sa voie. Empêtré dans un MetalCore confus et fadasse avec cependant quelques éclairs occasionnels, AVENGED SEVENFOLD s’est pourtant forgé un solide background et a vendu quelques millions de disques. De là à dire que les Américains jouent encore ici la déstabilisation, il ne faut pas exagérer non plus, la stabilité n’étant déjà pas acquise.
Alors que renferme cette huitième réalisation de la formation californienne ? En dehors de quelques trop rares passages dans de trop rares morceaux corrects (« Mattel », « We Love You »), l’ensemble passe pour une sorte de fourre-tout de choses qui n’ont rien à faire ensemble. Le peu de riffs intéressants peinent très sincèrement à se faire une place dans ce déluge brouillon, où chacun semble faire son petit truc dans son coin.
Ce que l’on retient surtout de « Life Is But A Dream… », et c’est sûrement ce qui met le plus mal à l’aise, c’est la posture de M. Shadows, le frontman, qui essaie tant bien que mal (et carrément mal) d’endosser le costume d’un Mike Patton. C’en est même gênant (« Easier »). Pour le reste, AVENGED SEVENFOLD donne dans le dissonant à grand renfort de R’n B à la con, d’auto-tune et de sons de batterie en plastique. Navrant et finalement pénible.
Techniquement imparable, l’effort de DISILLUSIVE PLAY se porte pourtant sur les mélodies et le côté très fédérateur d’un style qui navigue entre Rock et Metal, Heavy et Hard Rock avec des touches progressives aériennes. Beaucoup de registres et de couleurs musicales se croisent donc et se fondent sur « Songs Of The Non-Existent », un opus très bien réalisé et doté d’un équilibre et d’une structure très travaillée. Les grecs n’ont rien laissé au hasard.
DISILLUSIVE PLAY
« Songs For The Non-Existent »
(Wormholedeath Records)
Fondé en 2014 à Athènes, DISILLUSIVE PLAY possède toutes les marques d’un groupe moderne et particulièrement bien ancré dans son temps, pour peu d’avoir l’esprit ouvert et d’apprécier différents courants du Metal et du Rock. Cinq ans après « Open Arms », son premier album, le quintet livre « Songs For The Non-Existent », un disque à dominante mélodique et progressive guidé par une chanteuse au timbre puissant.
Si sa frontwoman, Antigoni Kalamara, imprime un ton résolument Rock, DISILLUSIVE PLAY évolue dans des sphères Melodic Metal qui viennent justement apporter ce contraste original et dynamique. Grâce à des claviers bien distillés et des riffs acérés et accrocheurs, les Grecs dégagent une belle énergie et les nuances progressives de « Songs For The Non-Existent » donnent du relief et une profondeur musicale efficiente.
Très variée, cette deuxième réalisation offre une production soignée, qui met en valeur les solos rapides et virtuoses de Jim Kuikos (« Sisyphus », « Make Them All Feel Good ») et les refrains entêtants à l’œuvre ici (« Queen Of The Night », « Demons Glove »). DISILLUSIVE PLAY a également convié quelques guests et on retrouve donc Bob Katsionis (ex-Firewind) aux claviers, Iliana (Enemy Of Reality) aux chœurs et le bassiste Panagiotis Bourazanis. Un bel album.